Chronique bibliographique

Amissi Melchiade Manirabona, Entreprises multinationales et criminalité environnementale transfrontalière : applicabilité du droit pénal canadien, coll. Minerve, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2011, 420 p., ISBN 978-2-89635-640-9.[Notice]

  • Karel Osiris Coffi Dogué

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  • Karel Osiris Coffi Dogué
    Université de Montréal

Cette recension porte sur un ouvrage qui traite spécifiquement d’un sujet actuel et d’une importance indéniable : la responsabilité des multinationales canadiennes pour des crimes contre l’environnement commis hors du Canada. L’ouvrage de M. Manirabona va non seulement à l’encontre de nombreuses idées préconçues, mais pousse la question dans ses derniers retranchements tout en éclairant le lecteur avec pertinence sur des questions connexes et parallèles en rapport avec des aspects théoriques et pratiques de la responsabilité sociale des entreprises au Canada et à l’international. Au fil de plus de 300 pages qui se lisent aisément, le lecteur bénéficiera d’une analyse rigoureuse basée sur des arguments inédits et très bien structurés. Rien de moins pour que la thèse à l’origine de l’ouvrage ait mérité plusieurs prix et distinctions, dont le prix Minerve 2010 de la meilleure thèse de doctorat au Québec. L’auteur démontre que, en l’état actuel du droit pénal canadien et sans qu’une réforme législative soit nécessaire, il est possible de poursuivre les entreprises canadiennes qui se rendent coupables de crimes environnementaux en dehors des frontières nationales. Pour y arriver, M. Manirabona développe sa thèse en deux grandes parties que nous analyserons l’une à la suite de l’autre. La nature transversale des questions abordées, la richesse et la portée à la fois théorique et pratique des développements de cet ouvrage nous ont plongé inconsciemment dans l’analyse succincte d’une question parallèle. N’assiste-t-on pas avec cette thèse à une élaboration de pistes pour l’adoption d’un principe de compétence universelle lorsque certaines conditions seraient remplies pour des crimes environnementaux ? Il ne s’agirait plus seulement de compétence universelle pour violations massives de droits humains en général mais bien pour des questions de responsabilité sociale des entreprises (RSE) au Canada. Ce questionnement sera adressé dans la seconde partie de cette recension. Il pourra nous être reproché, à raison, de nous éloigner des objectifs traditionnels d’une recension, mais ceci se justifie par la qualité de l’ouvrage qui ne saurait se suffire d’un exposé classique : il faut, comme l’ouvrage que nous recensons, sortir des sentiers battus. Les deux parties de la thèse de M. Manirabona sont précédées d’un chapitre préliminaire. En effet, quoi de mieux qu’un rappel pour planter le décor et bien situer le cadre de son analyse ? Ce rappel, à la fois historique et actuel, traite de l’utilisation du droit pénal aux fins de protection de l’environnement. L’auteur part historiquement de l’exposé des obstacles à l’application du droit pénal aux infractions contre l’environnement pour en venir à la prise de conscience en faveur d’une nécessité de répression des graves atteintes à l’environnement. S’ensuit une explication du régime actuel de responsabilité pénale en matière d’environnement étayée à l’aide d’exemples forts édifiants. La Loi canadienne sur la protection de l’environnement sert de cadre principal à cet exposé. La philosophie de cette loi est décryptée. L’auteur dénote notamment à travers l’insertion de nouvelles dispositions incriminant les violations environnementales une prise en compte de cette nouvelle réalité au niveau national principalement par le législateur canadien. Ce constat sert de tremplin pour des propositions concrètes au regard du fait que ces entreprises canadiennes n’interviennent pas seulement au Canada mais aussi ailleurs à l’étranger. À ce titre, il n’y a aucune raison en principe que les normes qui leur sont appliquées lorsqu’elles polluent l’environnement au Canada soient différentes pour ces mêmes entreprises, simplement parce qu’elles agissent à l’étranger dans des pays où la réglementation appropriée est quasi inexistante, d’autant plus que c’est le même écosystème environnemental qui est finalement pollué. Le décor ainsi magistralement planté, la première partie de l’étude permet à l’auteur de partir de « ce …

Parties annexes