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Les discontinuités sont ici définies comme des lignes ou des zones (gradients) séparant des espaces aux caractéristiques différentes. Elles sont des lieux de convergence de différentiels, de propriétés dissemblables, séparant un dedans et un dehors. Elles exercent des effets tangibles dans l’organisation des territoires concernés. L’objectif principal de l’ouvrage est de mieux comprendre leur rôle structurant dans la mise en place, le fonctionnement et la pratique des espaces commerciaux.

La première partie s’intéresse aux effets des discontinuités géopolitiques sur les activités commerciales. Sept études de cas sont livrées à la réflexion, tant dans les pays du Nord (frontières Allemagne-Belgique-Luxembourg-France, frontières Russie-Pays baltes, Andorre, Pologne) que dans les pays du Sud (frontière Argentine-Bolivie, frontière Ghana-Togo). Elles aident à comprendre en quoi des différences, le plus souvent législatives, entraînent des différentiels de prix et pourquoi ces différentiels sont entretenus par les politiques publiques, quitte à contredire les principes d’un développement durable. Elles examinent également ce que deviennent les pratiques des commerçants et des clients lorsque les différentiels se réduisent.

En deuxième partie, l’étude des formes commerciales et celle des pratiques de consommation à Montréal, Barcelone, Paris, Stockolm et Marseille montrent en quoi les segmentations sociales et culturelles interagissent avec les morphologies urbaines. La répartition des commerces et les paysages commerciaux traduisent de manière particulièrement riche la complexité des dynamiques de segmentation et d’uniformisation qui sont perpétuellement remises en jeu entre les personnes, les âges, les origines, les revenus et les professions.

La troisième partie traite des discontinuités institutionnelles et administratives, à partir de données à l’échelle de la France ou d’études de cas concernant Rouen, Le Havre, Arras ou différentes petites villes autour de Lyon et Clermont-Ferrand. En ressort la place faite au commerce dans les politiques des collectivités territoriales, tantôt comme levier d’une vive compétition interterritoriale, tantôt comme outil de rénovation urbaine ou de revitalisation des centres urbains et ruraux. En ressortent également les résultats mitigés de ces politiques, tant leur articulation avec les stratégies économiques privées est difficile à inscrire dans la durée.

Cet ouvrage collectif a été rédigé à la suite du colloque Commerce et discontinuités qui s’est tenu à Arras en 2011. Il s’inscrit ainsi dans le prolongement des rencontres régulières organisées pour la Commission de géographie du commerce, au sein du Comité national français de géographie. La grande diversité des contributions qu’il comporte démontre une nouvelle fois la vitalité scientifique de la géographie francophone sur le commerce. La multiplicité des approches et des terrains mobilisés répond à la multiplicité des enjeux, des situations, des jeux d’échelles spatiales et temporelles mis en lumière, confirmant la richesse du commerce comme objet de recherche pour faire progresser tant les débats de géographie économique que ceux de géographie sociale, culturelle ou politique.