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L’objet de ce livre est de saisir les représentations territoriales nouvelles qui émergent, sous l’effet de multiples phénomènes sociétaux et politiques, et qui ne correspondent plus aux territoires traditionnellement cartographiés. Deux particularités font de cet ouvrage un document pertinent et original. Premièrement, les représentations territoriales sont abordées selon une approche temporelle. Cette perspective permet la saisie des différences contemporaines qui existent entre les représentations mentales et les représentations matérielles et pose la question des contours des territoires du futur. Deuxièmement, l’analyse des représentations territoriales, qu’elles soient mentales ou matérielles, vise l’appréhension et la compréhension du territoire politique et de son avenir.

Ouvrage collectif et européen, deux parties organisent les propos des auteurs. La première aborde les représentations mentales tandis que la seconde traite des représentations matérielles, et plus précisément des représentations cartographiques. Le livre se termine sur deux synthèses dont l’objectif délibéré est d’ouvrir le débat, non de tirer des conclusions des argumentations précédentes.

L’objectif de la première partie est de mettre au jour les nouvelles représentations qui émergent et qui induisent de nouvelles territorialités. L’hypothèse sous-tendue est que les territoires contemporains se complexifient, sans toutefois se compliquer. Les territorialités persistent, mais elles se modifient. Ces changements sont divers et s’expliquent tant par la mobilité accrue des individus que par l’émergence de nouveaux acteurs territoriaux, si bien que l’État ne détient plus le monopole du pouvoir. Plus précisément, l’État partage aujourd’hui son pouvoir, remettant ainsi en question l’acception de sa souveraineté, les limites et la symbolique de son territoire. Dans ce sens, le territoire est à considérer sous l’angle du mouvement et de l’incertitude, tout en gardant en mémoire sa dimension historique, essentielle à sa définition actuelle. Repenser la dimension politique du territoire devient nécessaire, notamment sous l’angle de la prospective.

La seconde partie de l’ouvrage apporte des éléments de réflexion sur la cartographie et son avenir. La carte, médiation symbolique entre l’homme et son environnement, se modifie, remettant en cause ses critères traditionnels. Vecteur de l’aménagement du territoire, la carte est un moyen de lier les territoires de la prospective à la citoyenneté. Pour être efficaces, les cartes de la prospective ne peuvent pas négliger les différents temps et espaces sociaux de la société actuelle. Plus encore, la nécessité aujourd’hui de faire de la cartographie participative, c’est-à-dire incluant l’ensemble des acteurs concernés, est démontrée. Sans omettre les cartes traditionnelles établies, il s’agit de repenser ces dernières en fonction des mutations politiques contemporaines, dont celle de la souveraineté de l’État, afin d’aborder le territoire comme un ensemble de représentations.

En conclusion, les auteurs révèlent l’influence des représentations territoriales dans la création et recomposition du territoire, que ces représentations soient mentales ou matérielles. Ils soutiennent également que la prise en compte de ces deux types de représentations sous un angle complémentaire s’impose pour comprendre les multiples dimensions – notamment politiques – que le territoire recouvre.

Destiné à un public essentiellement français, cet ouvrage ne pose pas moins des jalons et questionnements théoriques essentiels à l’évolution de la géographie et de ses méthodes, d’une part, et à la compréhension des phénomènes politiques et sociaux contemporains, d’autre part.