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Publié conjointement en 2012 par l’Institut de recherche pour le développement et le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, cet atlas propose une excellente synthèse des connaissances portant sur un territoire insulaire océanien marqué profondément par la colonisation française, l’exploitation du nickel [1] et la domination de Nouméa (agglomération du Grand Nouméa). Il s’agit de présenter le « pays » tel qu’il est aujourd’hui, avec ses atouts et ses contraintes, en documentant les évolutions et les processus en cours ainsi qu’en abordant les grands enjeux contemporains que représentent notamment l’évolution statutaire, la cohésion sociale, le déséquilibre territorial, les questions environnementales et les perspectives de développement. Considérant les profondes mutations politiques et socioéconomiques survenues depuis les 30 dernières années, il s’agit d’un ouvrage bienvenu, car la Nouvelle-Calédonie a beaucoup changé depuis la parution, en 1981, de l’Atlas de la Nouvelle-Calédonie et dépendances (publié par l’ORSTOM).

Tirant profit d’une masse de données considérables et à jour, des connaissances et compétences d’une équipe multidisciplinaire formée de 75 auteurs (universitaires, chercheurs, spécialistes, etc.) et d’une excellente réalisation cartographique, l’atlas est conçu comme un recueil scientifique et un ouvrage de référence, mais il a également une vocation de vulgarisation. Il pourra donc être utile à un large public s’intéressant à la Nouvelle-Calédonie (élèves et enseignants, étudiants et professeurs, chercheurs, personnel des services techniques, élus et décideurs, curieux, etc.). La dimension de l’Atlas, soit 43 x 30,4 x 3,2 cm, rend la consultation relativement aisée tout en permettant d’inclure un grand nombre de documents dans des formats tout à fait adéquats pour la lecture. À cet égard, la grande qualité des cartes et de la mise en page mérite d’être soulignée.

L’Atlas comprend 60 planches regroupées en 5 chapitres portant sur le contexte régional (2 planches), les milieux (18 planches), les populations et leur histoire (12 planches), l’économie (11 planches) et la vie en Nouvelle-Calédonie (17 planches). Chacune de ces planches comprend un minimum de quatre pages et se compose d’un résumé introductif, d’un texte explicatif, d’un certain nombre de vignettes documentaires (cartes, tableaux, graphiques, photographies, schémas, affiches, etc.), de quelques orientations bibliographiques (dans la plupart des cas) et d’un résumé en anglais (qui, toutefois, aurait souvent pu être plus élaboré). Les planches sont toutes d’une excellente qualité, bien structurées, claires, précises et bien documentées. De plus, on saluera la présence d’un excellent glossaire qui comprend 410 entrées (p. 263-266) et d’un index des sigles qui compte 265 entrées (p. 268-269), deux éléments qui aident à rendre l’ouvrage plus accessible pour un large public.

Globalement, le contenu de l’Atlas, riche et précis, est tout aussi excellent que la forme, impeccable et attrayante. Toutefois, on aurait pu développer davantage sur le contexte régional, qui fait l’objet du premier chapitre, et notamment présenter en pleine page une carte générale de l’Océanie (avec les zones économiques exclusives) en plus des anamorphoses trouvées à la planche 1 (p. 17). Dans le deuxième chapitre sont présentés les différents éléments de l’environnement physique, dont le relief des terres émergées et la bathymétrie du domaine océanique, les conditions climatiques, la géologie et la géomorphologie, les sols et la végétation ainsi que la biodiversité animale terrestre et la biodiversité des poissons côtiers. On y souligne, d’une part, le fait que la Nouvelle-Calédonie possède « le deuxième plus vaste ensemble récifal au monde après la Grande Barrière de corail avec 24 000 km2 de surface » (p. 25), dont 60 % est inscrite sur la liste du patrimoine mondial depuis 2008, et, d’autre part, le contexte dans lequel se sont formées et se retrouvent aujourd’hui les remarquables ressources de nickel, dont le « pays » détiendrait environ 20 à 25 % des réserves mondiales connues (p. 169).

Les populations et leur histoire font l’objet du troisième chapitre. L’approche est d’abord historique, abordant le premier peuplement de l’archipel calédonien, qui se serait produit dans le cadre de l’expansion austronésienne (vraisemblablement entre 1100 et 1050 av. J.-C.), puis l’ensemble culturel traditionnel kanak [2], l’exploration européenne et la colonisation (1774-1946) et, enfin, la Nouvelle-Calédonie de 1946 à 1998. On aborde ensuite la situation actuelle en faisant une large place aux enjeux liés à la population kanak, tout comme on présente l’actuelle organisation administrative et politique du « pays » et traite de l’occupation de l’espace et des questions foncières. Le quatrième chapitre porte sur l’économie, notamment sur l’ensemble des activités liées au nickel. Si les services constituent la principale source de richesse du pays, le nickel (environ 10 % de la création de richesse) n’en demeure pas moins le secteur déterminant en raison de son rôle majeur en termes d’emploi, de fiscalité et d’aménagement du territoire (p. 149). Les planches 36 à 40 nous donnent la pleine mesure de ce secteur d’activité, avec une présentation fort réussie de la métallurgie du nickel et des opérations de la Société Le Nickel (SLN) ainsi que des deux grands complexes métallurgiques qui viennent tout juste de démarrer dans le Sud (Vale Nouvelle-Calédonie) et le Nord (Koniambo Nickel SAS) de la Grande Terre. Les autres secteurs économiques sont également abordés, notamment l’agriculture, l’aquaculture et la pêche, l’énergie, le commerce et le tourisme.

Le cinquième et dernier chapitre s’intitule « Vivre en Nouvelle-Calédonie ». Il débute par une planche qui porte sur les communications et les transports, puis traite de la santé, de l’enseignement et de la formation, de la vie culturelle et artistique et de la vie sportive. Suivent quatre planches consacrées à Nouméa, « la » ville de Nouvelle-Calédonie qui, en s’étendant sur les communes périphériques, forme une agglomération pluricommunale de 163 000 habitants en 2009 (agglomération du Grand Nouméa), soit les deux tiers de la population néo-calédonienne. Sont enfin successivement abordés les espaces de la Brousse [3] et des îles avec la zone Voh-Koné-Pouembout (VKP) qui est actuellement dynamisée par les activités de Vale Nouvelle-Calédonie, les centres de Brousse (La Foa, Bourail, Koumac et Poindimié), les îles (îles Loyauté, île des Pins, îles Belep, etc.), le Grand Nord (Poum, Ouégoa, Pouébo et Kaala-Gomen), la côte océanienne (Hienghène, Touho, Ponérihouen et Houaïlou), l’Est minier (Kouaoua, Canala, Thio et Yaté) et, enfin, le Sud-Ouest rural (Poya, Moindou, Farino, Sarraméa et Boulouparis).

En conclusion, l’Atlas de la Nouvelle-Calédonie est un ouvrage de référence d’une très grande valeur pour qui s’intéresse à ce territoire insulaire et « pays » de l’Océanie. C’est aussi une très belle leçon de géographie qui plaira à ceux qui s’intéressent aux petits États et territoires insulaires ou encore à l’outre-mer français. La Nouvelle-Calédonie fait aujourd’hui face à de nombreux défis, dont ceux du vivre ensemble en harmonie, d’un développement économique respectueux de l’environnement, d’un développement territorial plus équilibré et d’un projet de société qui fédère l’ensemble des néo-calédoniens. L’Atlas de la Nouvelle-Calédonie constitue un outil de base pour mieux comprendre l’ensemble des enjeux soulevés par ces questions fondamentales.