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Huitième de la collection Tendances et débats en développement régional, cet ouvrage est publié par le Centre de recherche sur le développement territorial (CRDT) en collaboration avec le Groupe de recherche sur le développement régional de l’Est du Québec (GRIDEQ). Ces deux organismes se rattachent à l’Université du Québec à Rimouski. Danielle Lafontaine et Bruno Jean, conjointement signataires des présentations de chaque volume, en résument et commentent les contributions.

Fruit d’un congrès et d’un colloque tenus en 2003, ce vaste ouvrage rassemble en plus de 700 pages les textes d’une quarantaine de spécialistes, sociologues et géographes pour la plupart, quelques autres se rattachant aux disciplines couramment utilisées en urbanisme et en aménagement du territoire.

« Cerner les éléments de bilan des efforts accomplis au nom du développement régional et de l’aménagement du territoire depuis la Seconde Guerre mondiale » est l’un des objectifs poursuivis. S’y ajoute une dimension prospective visant « une meilleure compréhension, modélisation et prise en charge des conditions futures possibles d’intégration des territoires et des régions ». Ambitieux programme à la vérité, honorablement réalisé.

Le premier tome, sous-titré Des pratiques aux théories, se concentre sur les modèles de développement régional et de gouvernance. Quant au second, sous-titré Des pratiques aux paradigmes, il porte sur les systèmes régionaux et les dynamiques d’innovation.

Dans un texte rédigé après la colloque (pp. 347-406) et qui sert de postface au premier tome, Danielle Lafontaine, après avoir exposé les modèles théoriques de développement, s’interroge sur la nouveauté du paradigme émergent de développement territorial, dont elle dégage les courants, concepts, objectifs, indicateurs et indices de mesure et de résultats. Fort utile sur le plan épistémologique, cette analyse pose les « jalons pour un projet de recherche internationale comparative ».

De son côté, Bruno Jean expose dans la postface du second tome (pp. 281-295) le projet du CRDT dont il est le directeur scientifique. L’objectif, ambitieux mais légitime, consiste à « repousser les frontières de la connaissance sur le développement territorial ».

L’espace manque ici pour souligner l’originalité et l’intérêt de plusieurs chapitres de l’ouvrage. On y trouve tout le vocabulaire nouveau : développement local, autodéveloppement, développement territorial solidaire, développement durable, etc. Dans le contexte actuel de la mondialisation et de la communication instantanée, la théorie universelle du développement est toujours à la recherche d’un paradigme consensuel. Quant à la région, notion fourre-tout et depuis longtemps galvaudée, elle se prête à tous les artifices du découpage et, lorsqu’il s’agit de développement, plusieurs préfèrent le qualifier de local ou territorial plutôt que régional.

Territoires et fonctions, grâce à l’initiative d’un groupe d’universitaires, surtout rimouskois, sera pendant plusieurs années un ouvrage de base pour la réflexion sur le développement et la gouvernance, tant par l’arrière-plan historique et méthodologique sur lequel il s’appuie que par les perspectives sur lesquelles il débouche. Dommage qu’il soit assez pauvrement édité et qu’il renferme de trop nombreuses coquilles. Dommage aussi qu’on n’ait pas révisé et corrigé la prose de quelques auteurs. Dommage, enfin, que Fernand Dumont et Yves Martin, fondateurs de ce qu’on appelle l’École de Laval et à qui d’ailleurs l’ouvrage est dédicacé, soient plusieurs fois mal cités à travers les deux tomes. Leur important ouvrage sur Saint-Jérôme, publié en 1963, comporte en effet dans son titre « structures sociales régionales » (nous soulignons sociales). Quant au sous-titre, il faut lire : Étude sociologique de la région de Saint-Jérôme et non pas Le Cas de Saint-Jérôme (p. 391). À l’époque, faut-il le rappeler, les études de sociologie religieuse étaient aussi populaires que les études régionales.