TY - JOUR ID - 022998ar T1 - Mythe et connaissance scientifique dans l’histoire de la pensée géographique A1 - Claval, Paul JO - Cahiers de géographie du Québec VL - 45 IS - 126 SP - 349 EP - 368 SN - 0007-9766 Y1 - 2001 Y2 - 19 mars 2024 02:14 PB - Département de géographie de l'Université Laval LA - FR AB - La géographie humaine est née, à la fin du XIXe siècle, comme science naturelle des paysages et des lieux. Elle cherche aujourd'hui à comprendre l'expérience que les hommes font de la Terre, s'intéresse aux représentations et doit prendre compte les valeurs. Ces dernières résultent d'un processus mental de décentrement qui ouvre des perspectives sur ce qui pourrait ou devrait exister. Dans les sociétés purement orales, la vision de l'au-delà par rapport auquel il est possible de juger le monde résultait de l'accès que certains avaient au temps immémorial des origines et s'exprimait dans des mythes. Toutes les sociétés produisent des récits fonctionnellement similaires aux mythes afin de bâtir des interprétations de leurs structures sociales, de leur dynamique et de leurs destinées individuelles ou collectives. Les géographes sont les seuls chercheurs à pouvoir expliquer la genèse des valeurs sur lesquelles se fondent les sociétés, puisque cette genèse fait appel à un processus spatial de communication. Néanmoins, il peut être dangereux pour eux de les analyser comme s'il s'agissait de paysages ou de forces économiques : on le voit bien aux erreurs d'interprétation qui ont marqué les premiers développements de la géopolitique et de la géographie urbaine. Les perspectives que les techniques de déconstruction à la mode offrent sur les sociétés d'aujourd'hui sont exclusivement morales. Avec elles, les sciences sociales tendent à devenir purement idéologiques. Afin d'éviter ce risque, les géographes doivent développer une vue critique des épistémologies modernes et de l'idée qu'il existe des « explications alternatives » : celles-ci sont produites par le web et par l'illusion voulant qu'il donne accès à des chercheurs réellement « libres », de la même manière que les vieillards des sociétés d'oralité paraissaient avoir accès au temps de l'immémorial et à l'histoire des origines. AB - Human geography was born, at the end of 19th century, as a natural science of landscapes and places. Today, it aims at an understanding of the human experience on Earth, deals with representations and has to take values into consideration. Values are produced through a mental process of decentring which opens perspectives on what could or should exist and allows for its comparison with what exists. In the societies with purely oral traditions, the vision of the great beyond from which one can judge the world came from an access by some members to time immemorial of the origins and which were expressed through myths. All societies produce narratives functionally similar to myths in order to build interpretations of their social structures and dynamics and collective or individual destinies. Geographers are only social scientists who are in a position to explain the genesis of values, since it relies on a spatial process of communication. The geographical exploration of values shows that geographers more often base the history of geographic thought they use on oral memory rather than documentary evidence, which means that it is akin to mythical tradition. Societies are based on values. As a consequence, it may be dangerous for geographers to analyse them in the way they deal with landscapes or physical or economic forces, as is shown by the incorrect interpretations they often developed in the early exploration of geopolitics or urbanism. The use of the fashionable techniques of deconstruction opens purely moral perspectives on today's societies: social sciences tend to become exclusively ideological. In order to avoid such a risk, geographers have to develop critical views of modem epistemologies and the idea of 'alternative explanations': the latter are produced by the network structure of modem communication which gives the illusion of enjoying a privileged access to the time immemorial of origins. DO - https://doi.org/10.7202/022998ar UR - https://id.erudit.org/iderudit/022998ar L1 - https://www.erudit.org/fr/revues/cgq/2001-v45-n126-cgq2698/022998ar.pdf DP - Érudit: www.erudit.org DB - Érudit ER -