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Particulièrement connue pour la richesse de sa biodiversité, ses problèmes de déforestation, la diversité de sa population et les conditions de vie difficiles de la majorité de ses habitants, Madagascar est loin d’être une terre inconnue des géographes. Cependant, la géographie malgache, c’est-à-dire celle pratiquée à Madagascar, demeure quant à elle bien méconnue. On ne peut donc que se réjouir de la parution de cet ouvrage qui donne la chance à huit géographes de faire connaître leurs travaux et, à travers eux, certains aspects de la géographie de la Grande Île. Fruit de la collaboration entre les géographes de l’Université de la Réunion et de l’Université d’Antananarivo, cette réalisation mérite certainement d’être soulignée.
Prenant en considération qu’il s’agit d’un très vaste territoire aux composantes physiques et humaines fort variées, on comprendra que ce recueil de travaux ne cherche pas à dresser un portrait exhaustif de l’île, de son environnement, de sa population ou encore de son économie. Il s’agit plutôt de faire partager des analyses portant sur des thèmes et des espaces variés. Sur le plan géographique, quatre textes s’intéressent aux Hautes Terres Centrales alors que les quatre autres portent sur le Nord, le Nord-Ouest et le Centre-Est. Reste donc le Sud à couvrir, ce qui pourrait éventuellement se faire dans un second numéro spécial des Travaux et Documents sur Madagascar. Concernant les thèmes abordés, ceux-ci couvrent des questions fondamentales quant aux enjeux et défis du développement sur la Grande Île.
En ce qui concerne les textes portant sur les Hautes Terres Centrales, chacun des quatre auteurs témoigne de l’évolution récente des conditions de vie dans des campagnes qui, trop souvent, sont marquées par un certain appauvrissement d’une large part des paysans. Cela touche notamment les communautés peu ou pas intégrées aux circuits commerciaux et dans lesquelles le système de culture traditionnel est encore largement prédominant (voir les textes de J. Ravalison et de M. Rabemanambola). Ces conditions difficiles ne sont pas sans effet négatif sur l’environnement alors que l’érosion, sous forme de lavaka (texte de S. Randriamanga), et la déforestation (texte de R. Vololonirainy) sont dynamisées par l’action anthropique.
Dans l’optique de favoriser le développement régional, la pertinence du découpage territorial est ensuite remise en question à propos de la région de Majunga (texte de G. Rabearimanana). Puis il est question de l’armature urbaine et des paysages urbains de la province d’Antsiranana (texte de T. Caligaris). Suit une analyse de l’activité touristique et des potentialités de la destination côtière du Centre-Est, une région bien dotée pour l’activité balnéaire et la découverte, mais où l’offre touristique doit être augmentée et professionnalisée (texte de C. Ratovoson). Enfin, est posée la question de la pérennité de la crevetticulture dans la mangrove malgache, activité introduite avec succès dans les années 1990 bien qu’elle ne soit pas sans danger pour l’écosystème où elle s’installe (texte de H. Dabe Rakotonavalona).
Ensemble, ces textes constituent une très bonne initiation à la réalité malgache telle qu’elle est perçue par les géographes. Avec une trentaine de cartes et une vingtaine de photos, l’ouvrage est abondamment illustré. On regrettera cependant que certaines cartes soient très peu lisibles (tons trop difficiles à différencier) et que les photographies soient si sombres et petites. Ces détails de forme n’enlèvent cependant rien à la qualité générale du contenu. En bref, cet ouvrage est un beau témoignage de la géographie malgache qui, de surcroît, est une géographie francophone.