Comptes rendus bibliographiques

DIONET-GRIVET, Suzanne (2011) Géopolitique de l’eau. Paris, Éditions Ellipses, 253 p. (ISBN 978-2-7298-6404-0)[Notice]

  • Frédéric Lasserre

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  • Frédéric Lasserre
    Département de géographie, Université Laval

Ce livre se propose d’aborder de façon synthétique (en 253 pages et avec une police assez grosse, il le faudra bien) les différentes facettes de la géopolitique de la gestion de l’eau, un enjeu majeur au XXIe siècle avec l’augmentation rapide d’une demande pour une ressource stratégique. Le thème n’est certes pas novateur, mais le sujet est loin d’être épuisé, d’une part ; d’autre part, la complexité même du sujet rend la diversité des points de vue a priori intéressante pour souligner les interactions entre les acteurs et les dimensions politiques de la gestion de l’eau. Ambitieux, bien illustré et accompagné de nombreux documents en encadré, cet ouvrage se divise en quatre parties, elles-mêmes articulées en quatre sous-parties. La première, La pression sur les ressources en eau : la raréfaction de l’eau et la croissance des inégalités, se propose de jeter les bases de l’hydrologie, avec l’étude du cycle de l’eau, des usages anthropiques et de l’accès à l’eau puis une étude de cas avec une présentation rapide de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient (curieusement sous son nom anglais de Middle East and Northern Africa). Une seconde partie revient sur les usages de l’eau, en agriculture et dans les villes, en développant également les thèmes de la gestion institutionnelle de l’eau, de l’ingénierie et des grands travaux, puis du prix de l’eau. La troisième partie aborde directement les questions de géopolitique de l’eau, avec des études de cas déjà très connues, le Moyen-Orient, la Chine, l’Asie centrale, le Sénégal, et des exemples de coopération. Enfin, une quatrième partie évoque les enjeux environnementaux de la gestion de l’eau : impacts du changement climatique ; méthodes d’augmentation de l’offre et de gestion de la demande et, enfin, approches organisationnelles de la gouvernance de l’eau. Le souci de brosser un tableau le plus complet possible en si peu de pages conduit l’auteur à user de raccourcis alors que, parfois, de longs développements ne semblent pas fondamentaux. Ainsi, dans la première partie, on aurait sans doute pu faire l’économie du développement sur le cycle naturel de l’eau, puisque ces informations ne sont pas mobilisées plus tard et que ces connaissances sont déjà largement diffusées. L’auteure s’efforce aussi de distinguer prélèvement et consommation en une seule page (p. 20), mais ses explications répètent le terme de consommation sans le définir et sans que, par la suite, ces concepts majeurs ne soient remobilisés pour venir éclairer des dimensions de la géopolitique de l’eau. La sous-partie suivante, traitant de l’accès à l’eau, évoque de façon parfois lapidaire des concepts fondamentaux, comme la responsabilité des divers gouvernements dans la gouvernance de l’eau ou encore les fortes inégalités dans l’accès à une ressource de bonne qualité. La question du droit à l’eau, qui est l’objet d’un vif débat politique sur la scène internationale, n’est abordée qu’en une demi-page. De fait, l’étude de cas sur l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient semble un peu incongrue dans ce contexte de passage en revue de nombreux concepts qui, pour être louable, n’est pas moins inefficace pour le lecteur non averti. La carte 5, qui cherche à présenter plusieurs aspects de la gestion de l’eau dans la région, fait un peu assemblage de données diverses et semble émaillée d’erreurs : on y apprend que la faim est un grave problème en Égypte (pas à ma connaissance) et que le barrage Atatürk se trouve sur le Tigre (sur l’Euphrate en réalité). La deuxième partie sur les usages de l’eau, entre la révolution hydraulique, l’eau des champs, l’eau des villes et la gestion de l’eau, ignore la question des usages industriels …