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L’action collective, internationale et pluridisciplinaire déployée pour la production de cet ouvrage met à la disposition du lecteur un outil pour concevoir des évolutions dans la gestion en devenir de l’épiderme aérien. Les 21 auteurs ont oeuvré au sein du collectif international L’épiderme aérien des villes au regard de la question de l’énergie et des modes de vie : prospectives des formes et des stratégies architecturales et urbaines, et de l’IMR-Roofscape.

Tous les toits des territoires urbains sont regroupés sous la conceptualisation d’un objet : le toit urbain. Cette prise de position est en corrélation avec les préoccupations grandissantes au sujet des surfaces imperméabilisées, de l’énergie perdue, des îlots de chaleur, de l’écoulement des précipitations, du facteur éolien et des potentialités de valorisation de ces surfaces, sans omettre ni la pollution ni l’aspect global du réchauffement climatique.

Fondés et construits sur des exemples étudiés essentiellement à Montréal, Paris et Chicago, les développements proposés tendent à démontrer qu’il est possible de répondre aux inquiétudes contemporaines en prenant en considération les énergies disponibles, les écosystèmes, les orientations architecturales et les aménagements des toits. Densément illustré et renforcé par une bibliographie conséquente alimentée par les auteurs, l’ouvrage offre une diversité d’axes d’approche, de compréhension et d’analyse du nouveau territoire : le toit urbain. Les trois parties mettent en exergue les phénomènes écologiques propres à l’urbain, les prises en compte des toits dans l’expansion urbaine et l’émergence de toits multifonctionnels.

L’interface dynamique, l’interface active, l’épiderme aérien ou la cinquième façade, selon la perspective de lecture et de mise en oeuvre d’un projet d’aménagement des toits, offrent une diversité étendue d’options. Afin de répondre aux aléas, des pistes sont proposées afin de contribuer à la réalisation d’une aire environnementale globale pour mieux vivre l’urbain. La durabilité des aires métropolitaines est recherchée en prenant appui sur la limitation des émissions de carbone, la recherche de matériaux innovants pour les toitures, l’imperméabilisation et l’hybridation des projets. Le toit est conçu, en tant qu’objet universel, comme un territoire en devenir d’expansion des activités anthropiques.

Les toits, dans leur pluralité de forme, de nature et de potentialité, sont des éléments d’architecture et de gestion spatiale des espaces habités. Les transpositions d’activités ludiques, économiques ou de loisir pour prendre un bain de soleil, participer à une réunion ou faire du sport démontrent les qualités des surfaces aménageables. Toutefois, l’entretien, l’isolation, les capacités mécaniques du bâti, les transformations, les valorisations doivent pouvoir répondre aux spécificités climatiques locales. En outre, les investisseurs, les aménageurs, les décideurs et les habitants doivent pouvoir agir collectivement pour mener à bien des projets d’utilisation des toits.

Le toit urbain est un élément de l’écosystème. Il participe à la biodiversité en fonction des aménagements et des projets de végétalisation. Il contribue à la dépollution de l’urbain, à la gestion énergétique, à l’écoulement des eaux et aux rivières urbaines, ainsi qu’aux évolutions paysagères. L’amélioration des matériaux de construction des toits influe largement sur l’isolation thermique, la diminution des îlots de chaleur et la réduction des ruissellements. Les capacités multifonctionnelles de ces territoires urbains soutiennent l’intégration économique des acteurs proximaux, l’intensification de l’économie locale, les développements des circuits courts, ainsi que la diversification des supports d’exploitation et la valorisation des surfaces libres.

La richesse des supports et des pistes proposées pour que le territoire de l’épiderme aérien soit intégré dans les dynamiques d’aménagement des territoires laisse cette production dans un entre-deux consensuel. Des notions telles que la géographicité, la convivance, l’interface humanité / espaces terrestres, la durabilité ainsi que la transdisciplinarité trouveraient largement une place dans ces orientations. Elles sont susurrées par l’intermédiaire des notions d’homme / nature, d’interface ou d’interdisciplinarité. En effet, ce sont des réalisations pragmatiques qui sont prises pour support et simultanément pour levier. Il manque, à notre sens, la dimension de projection et d’implication de toutes les populations, accompagnée d’une facette de théorisation.

Cet aspect n’enlève rien aux différents axes d’intérêt de cet ouvrage. Nous le relevons pour inciter à aller plus loin dans la conscientisation des potentialités de l’utilisation des toits. Le premier intérêt est d’ouvrir des pistes d’étude pour les étudiants et les chercheurs en agronomie, en géographie, en histoire, en architecture, en aménagement, en économie et en sciences sociales. Le second intérêt est la mise en relief des actions contemporaines, pour valoriser les toits, soutenues par la volonté de quelques acteurs et leur soif d’innovation en faisant des toits des surfaces actives. Le troisième intérêt offert par cet ouvrage est d’ouvrir le monde des possibles au sujet des aménagements, des potentialités des écosystèmes aériens, de la gestion de l’énergie thermique ou éolienne, de la qualité de l’habitat et des paysages urbains, tout en responsabilisant les acteurs sociétaux. Enfin, le toit urbain est intégré dans la problématique de la gestion globale du devenir de la planète en agissant au plus près des plus grandes concentrations humaines que sont les territoires urbains. Finalement, le lecteur a à sa disposition un outil pertinent, évolutif et toujours en construction, pour participer à la gestion active de la cinquième façade que constitue le toit urbain.