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Ce livre aborde un thème important en sciences sociales, soit le rôle que peut jouer le tourisme comme moteur de développement dans les pays du Sud. De nombreuses études se sont penchées sur cette question, mais peu d’entre elles se sont attardées au cas de la Guinée, pays parmi les plus pauvres de la planète et largement méconnu en Occident. Le titre de l’ouvrage laissait donc présager une contribution opportune. Malheureusement, le livre nous laisse sur notre faim. Il est difficile de suivre les auteurs dans leurs nombreuses propositions, compte tenu du manque de rigueur dans l’écriture et de l’absence de sources crédibles pour appuyer leurs affirmations.

Le livre s’amorce sur un long résumé dont certains paragraphes sont repris textuellement dans l’introduction qui suit. On peut donc se questionner sur sa pertinence. Bien que les objectifs de l’ouvrage ne soient pas clairement énoncés, on comprend que les auteurs veulent proposer une « nouvelle approche pour [la Guinée], en vue de créer un environnement plus favorable au développement durable du tourisme » (p. 13). Dans le chapitre préliminaire (c’est ainsi qu’on le nomme), les auteurs présentent un historique assez pauvre du développement du tourisme dans le monde et tentent une définition de cette activité. On aurait pu ici renvoyer le lecteur à quelques auteurs-clés qui ont fait ce travail de façon admirable et plutôt concentrer ses énergies à nous présenter le contexte guinéen dans lequel s’insère le tourisme, un aspect abordé dans la seconde partie du chapitre. Bien que cet exposé soit peu documenté et par moments difficile à suivre en raison du manque de repères, c’est sans doute la partie la plus stimulante du livre.

Le chapitre I est consacré aux grands constats sur l’environnement touristique de la Guinée. Les auteurs y dévoilent quelques indicateurs socioéconomiques clés, dont certains sont basés sur des projections à partir du recensement officiel de 1996, il y a donc 20 ans. Comme le livre a été publié en 2016, il aurait été pertinent d’intégrer les nouvelles données du recensement de 2014. Les auteurs font usage de nombreuses statistiques, mais celles-ci ne sont jamais appuyées par des sources. Par ailleurs, pour faire bien comprendre la situation actuelle, il aurait été préférable de mettre ces chiffres davantage en contexte, par exemple en comparant certains indicateurs avec ceux des pays limitrophes ou de la région. Dans l’ensemble, le chapitre est plutôt décousu et les choix d’indicateurs sont discutables.

Le tourisme comme facteur de développement durable est abordé au chapitre II. Les auteurs commencent par évoquer « l’approche systémique » pour décrire leur démarche, sans toutefois expliquer ce qu’ils entendent par cela. On y va ensuite de généralités sur le développement durable et sur certaines formes de tourisme qui s’en accommodent. On évoque une « nouvelle approche pour la Guinée » en matière de développement touristique où le but ultime est « d’inscrire le tourisme parmi les premiers secteurs porteurs de croissance en Guinée » (p. 83), ambitieux projet considérant la situation actuelle du pays. Un peu plus loin, les auteurs déterminent six pôles touristiques qui méritent, selon eux, une attention particulière. Cela nous permet d’apprécier le potentiel que recèle la Guinée en termes de développement touristique. Cependant, cette section aurait mérité des images et quelques cartes de qualité.

Le dernier chapitre ambitionne d’élaborer un nouveau plan stratégique pour le développement du tourisme en Guinée en tenant compte des éléments présentés en amont. À l’image des chapitres précédents, les auteurs nous promènent entre des généralités (par exemple sur le rôle des parties prenantes) et des listes spécifiques interminables et décontextualisées. Il est ainsi difficile d’adhérer à leur proposition.

Il ne fait aucun doute que Diallo et Barry, tous deux ayant travaillé pour le ministère du Tourisme, ont à coeur le développement du pays par le tourisme. Cependant, l’utilisation fréquente de phrases ou d’expressions emphatiques traduit un manque de regard critique sur cette industrie. À aucun moment n’est-il fait mention de doutes quant à la pertinence de cette industrie pour la Guinée ou encore des risques associés. De plus, l’ouvrage ne prend pas en compte des événements importants comme la crise de l’Ebola, née en Guinée à la fin de 2013, et ses impacts dévastateurs sur le développement du tourisme au pays (Loungou, 2015).

Sur le plan de la forme, le livre présente de nombreuses faiblesses qui agacent et en freinent la lecture : erreurs orthographiques, typographie inégale, erreurs de syntaxe, mise en page peu soignée, etc. Les figures et les tableaux sont souvent sans titre, sans source et ne sont pas expliqués, nous laissant trop souvent dans le flou. Par ailleurs, le livre ne contient qu’une seule carte (p. 9) et celle-ci est illisible.

« La République de Guinée n’est pas un pays touristique » (Raout, 2009 : 175). Les auteurs ont voulu nous montrer tout le contraire en insistant sur l’immense potentiel du pays en matière de tourisme national et international. Cependant, ils ne réussissent pas à nous convaincre, nous laissant plutôt l’impression d’une occasion manquée d’apprendre des erreurs passées afin de développer graduellement un tourisme respectueux du contexte guinéen. En somme, c’est un livre brouillon, tant dans sa forme que dans son contenu. Malgré tout, il sera peut-être d’un certain intérêt pour les chercheurs et les praticiens qui s’intéressent de près au développement du tourisme en Guinée. Sans plus.