Comptes rendus bibliographiques

BAILLY, Antoine et SCARIATI, Renato (2018) Voyage en nouvelle géographie. Paris, Economica, 127 p. (ISBN 978-2-71787-013-8)[Notice]

  • Sylvie Lardon

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  • Sylvie Lardon
    INRA et AgroParisTech, UMR Territoires, Clermont-Ferrand

Le rôle de l’espace, en géographie, renvoie aux quatre domaines que sont les effets de distance, de milieux, de proximité et de représentation spatiale. La nouvelle géographie explique le pourquoi des implantations humaines et le sentiment d’appartenance à un fragment de terre. Elle explique les milieux de vie, l’environnement local, mais aussi les emboîtements d’échelles et les logiques de découpage de l’espace. Elle traite des hiérarchies liées à la proximité et explique les implantations humaines agglomérées ou dispersées. Elle donne du sens aux lieux, aux espaces vécus et renforce l’identité et la patrimonialisation des territoires. Elle reprend ainsi les principes organisateurs de l’espace (maillage, quadrillage, hiérarchie et contact, ainsi que leur mise en dynamique territoriale) formalisés par Roger Brunet (1986) et instrumentés par Lardon et Piveteau (2005) pour l’aménagement des territoires. La nouvelle géographie met l’accent sur différentes thématiques. Elle traite des risques : inondations, famines, conflits armés, fuite nucléaire, etc. Au-delà de la prévention des risques naturels, elle vise à réduire les inégalités et ruptures liées aux phénomènes de société. Elle s’intéresse aux flux, aux cycles de vie, mais aussi aux déplacements et mobilités dans les aires dorénavant métropolitaines. Les conséquences de la mondialisation se marquent par des ségrégations territoriales. La nouvelle géographie s’attaque aux inégalités sociales et prône la justice sociale pour la valorisation et l’exploitation des ressources. En cela, elle critique la croissance inégale. Elle a repéré la théorie des milieux, présentée par Camagni et Maillat (2006), qui veut donner leurs chances aux régions et territoires locaux par une meilleure liaison des acteurs privés et publics, une amélioration de la formation, un développement des savoir-faire spécifiques maintenus grâce aux relations de confiance entre partenaires. La nouvelle géographie reconnaît le pouvoir des cartes, révélatrices des symboles et des pouvoirs, et invite à apprendre à lire les cartes avec un sens critique, à les déconstruire, pour traquer la propagande ou le marketing géographique qui vise à asseoir le pouvoir de quelques-uns. Elle va jusqu’à faire un clin d’oeil à Lewis Carrol (1929) qui proposait… une carte vide La nouvelle géographie se veut au service du développement durable et du développement urbain durable. Car il s’agit d’habiter la terre, de transmettre son patrimoine et donc d’apprendre à vivre ensemble. Les finistères et les îles font figure de lieux métaphoriques. C’est une géographie existentielle et humaniste, qui est en quête d’un monde nouveau, combinant voyage et sédentarité, hauts-lieux et paysages ordinaires, comme nous y invite également Martin de la Soudière (2019). Elle n’hésite pas à élargir son champ de vision aux espaces virtuels et au cyberespace, pour promouvoir une existence harmonieuse et durable sur terre. Elle recherche les liens qui unissent l’homme à l’espace et aux lieux, liens concrets ou abstraits, par une approche transversale. Pour finir, la nouvelle géographie invite le chercheur à prendre part à son objet d’étude, dans une géographie active et appliquée, selon une approche ascendante (bottom-up), pour une exploration permanente de nos actions, implicites et explicites dans nos territoires de vie. Ira-t-elle jusqu’à s’ancrer dans le terrestre, comme le propose Bruno Latour (2017) et inventer une nouvelle manière de faire de la politique et de dessiner la carte de nos terrains de vie partagés ?

Parties annexes