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Stéphane-Albert Boulais (dir.), Le cinéma au Québec. Tradition et modernité, Montréal, Fides, 2006, 349 p.[Notice]

  • Karine Bertrand

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  • Karine Bertrand
    Université d’Ottawa

Le cinéma québécois connaît présentement une vague de sympathie peu commune. Les films attirent le public dans les salles et les artisans se font de plus en plus nombreux. De nouveaux auteurs émergent qui répondent aux sensibilités actuelles pour nommer et représenter les problématiques de la société. On a même parlé de « nouvelle vague » pour caractériser le travail d’un groupe de jeunes de la relève qui, de leur aveu même, tirent leur inspiration de l’héritage de l’éthique et de l’esthétique du cinéma direct pour créer des oeuvres à la fois personnelles et susceptibles d’attirer un public fidèle. Cette ascendance d’une époque fondatrice dans laquelle baigne le cinéma au Québec et pour laquelle les pionniers (Proulx, Jutra, Perrault, etc.) semblent occuper une place centrale est parfaitement ressentie dans l’ouvrage dirigé par le professeur de cinéma et écrivain Stéphane-Albert Boulais, Le cinéma au Québec. Tradition et modernité. Le collectif réunit plusieurs spécialistes du cinéma, dont la plupart ont à leur actif plus d’une trentaine d’années d’expérience dans le domaine. Les thèmes qui en émanent sont d’abord ceux de la mémoire et du pays, parfums de terre et de lumière qui renvoient à l’époque du bonimenteur et de la magie première qui accompagne la naissance du 7e art, et qui se transforme avec l’arrivée de nouvelles techniques en une effervescence qui atteint son apogée avec l’émergence du direct dans les années soixante. C’est d’ailleurs cette période comprise entre 1960 et 1980 qui sera re-visitée par la majorité des auteurs, lesquels s’appliquent à rendre justice (pour ne pas dire rendre hommage) aux oeuvres issues de cette époque et qui continuent d’influencer les jeunes générations de cinéastes comme Francis Leclerc, Denis Villeneuve, Denis Chouinard ou Philippe Falardeau. Viendront se greffer à ces derniers thèmes quelques textes qui nous font pénétrer dans une ère plus contemporaine, en traitant par exemple de l’oralité au cinéma, de l’ère du numérique, de la rencontre des cultures et en esquissant finalement quelques portraits de cinéastes comme Denys Arcand et Pierre Perrault, dont les oeuvres ont profondément marqué la cinématographie québécoise. D’entrée de jeu, le texte de Pierre Véronneau « Écrire en dépit des trous de mémoire », nous invite à prendre connaissance des premiers balbutiements de l’industrie du cinéma au Québec. Citant comme source principale le groupe de recherche GRAFICS, sur le cinéma des premiers temps, l’auteur nous informe de cette époque charnière (et méconnue) située entre le muet et le parlant, où le cinéma québécois a peu à peu forgé son identité, à travers l’expression d’une oralité aux couleurs locales qui a favorisé l’appropriation culturelle et le développement d’un nouveau langage. Ce faisant, nous apprenons cette volonté inébranlable des cinéastes québécois qui, cent ans plus tôt, manifestaient ce même désir de pouvoir créer et diffuser un produit intègre, éloigné des représentations étrangères et de leur contenu uniforme. Dans la même veine, Esther Pelletier et Steven Morin (avec la collaboration de Karine Latulippe) retracent l’histoire du scénario au Québec de 1913 à 2003, en soulignant les principales transformations de l’écriture scénaristique en fonction des exigences de l’époque et bien entendu, de l’industrie. Le film documentaire occupant presque entièrement le paysage cinématographique québécois de 1920 à 1970, on nous apprend que le scénario ne connaîtra son heure de gloire qu’avec le déclin (relatif) du cinéma documentaire et le développement d’une industrie qui encouragera désormais le cinéma de fiction. S’ensuit une description fort détaillée de l’émergence du scénario à partir de la moitié de la décennie 70 et des principaux scénaristes qui ont marqué cette période. Or, si l’ensemble du texte s’avère généreux en matière d’informations historiques, on …

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