Présentation du numéro thématique

Histoire de la population de la ville de Québec[Notice]

  • Valérie Laflamme et
  • Charles Fleury

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  • Valérie Laflamme
    Université des sciences et technologies de Lille et Institut national d’études démographiques (France)

  • Charles Fleury
    Centre d’études de populations, de pauvreté et de politiques socioéconomiques (Luxembourg)

Le 3 juillet 2008, la ville de Québec a fêté son quatrième centenaire. Cette célébration rappelle que Québec est la plus ancienne ville d’Amérique du Nord. Son patrimoine bâti, reconnu et classé au patrimoine mondial de l’Unesco, atteste de la richesse de l’histoire de la ville. Faite de « couches temporelles superposées » qui racontent différents moments de son passé, Québec est une « fresque » (Courville, 2001 : 1) qui s’offre à celui qui veut étudier l’histoire de sa population. Sur quatre siècles, les fonctions de Québec ont varié. D’habitation, puis de forteresse, elle est devenue ville. Elle a été pendant un certain temps capitale du pays et garnison militaire. Elle est désormais capitale de la province. Les régimes français et britanniques s’y sont succédé. La ville a connu des périodes de reconversion économique parfois difficiles. Et comme nous allons le voir, d’autres sont à prévoir. Non sans heurts, la population participe à ces transformations politiques, économiques et sociales. Les dynamiques de la population de la ville de Québec au cours de ces quatre derniers siècles sont encore mal connues. En cela, l’histoire de la ville de Québec se compare à celle d’un « vieux bouquin auquel il manque de nombreuses pages et dont les autres sont annotées et rapiécées » (Lebel, 1999 : 20). Certaines périodes de l’histoire de Québec, comme celle de la Nouvelle-France, ont été à maintes reprises revisitées. Citons le très important chantier du Programme de recherche en démographie historique de l’Université de Montréal qui a permis de connaître les comportements des populations sous le Régime français. Mais d’autres périodes ont été pendant longtemps délaissées. Ce fut le cas notamment, et jusqu’à très récemment, de la période allant de la Confédération à la Première Guerre mondiale. Lorsqu’elle pose son regard sur les villes de la province, l’histoire sociale prend souvent pour objet Montréal. Il faut dire qu’au moment même où la province s’industrialise, s’urbanise et se modernise, la ville de Québec est en perte de vitesse par rapport à Montréal, et éclipsée par celle-ci. Pourtant, la population de la ville de Québec représente un certain intérêt démographique, et non seulement en raison de l’ancienneté du territoire. D’abord, Québec est la seule grande ville du pays très majoritairement francophone depuis le dernier quart du xixe siècle. La population anglophone, pourtant bien implantée depuis la Conquête, est nombreuse à avoir quitté la ville après la Confédération. Sa plus proche consoeur, Montréal, est beaucoup plus mixte. Dans la région de Québec, encore au recensement de 2006, la proportion de la population dont la langue maternelle est l’anglais n’est que de 1,46 %. À titre indicatif, cette proportion s’élève à 16,81 % dans la région de Montréal. Ensuite, la croissance démographique de la ville est irrégulière. Même si la croissance est peu dynamique, la ville de Québec connaît des périodes de régression, de stagnation, et de pleine croissance. Il faut à la ville 30 ans pour récupérer la population perdue au moment de la Conquête. Mais un peu plus tard, de 1818 à 1851, la population de la ville va tripler, passant de 15 839 habitants à 45 940 (Hare et al., 1987 : 192). Sur le long terme, en raison de la diminution des activités portuaires et de la construction navale, en raison aussi de la perte de son rôle de capitale canadienne et de son exclusion des réseaux ferroviaires, la ville de Québec connaît entre 1831 et 1921 « le plus mauvais bilan démographique du pays » (Lebel, 1983 : 34). Alors même que les villes nord-américaines connaissent une croissance sans précédent, Québec stagne. …

Parties annexes