Éditorial

Libre accès : vers une science plus ouverte[Notice]

  • Vanessa Allnutt et
  • Marc-André Goulet

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  • Vanessa Allnutt
    Bibliothécaire, Université du Québec à Rimouski
    vanessa_allnutt@uqar.ca

  • Marc-André Goulet
    Chef de service, Musique et films, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
    ma.goulet@banq.qc.a

En 2013, le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG) ainsi que les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont annoncé leur volonté d’adopter une politique harmonisée sur le libre accès s’appliquant aux articles scientifiques issus de la recherche financée par les fonds publics fédéraux. Les trois organismes subventionnaires souhaitent ainsi s’inscrire dans cette tendance lourde que l’on peut observer à l’échelle mondiale depuis une dizaine d’années et qui vise à faire du libre accès une condition sine qua non de l’obtention de subventions de recherche auprès des organismes de financement public. Les IRSC (2013) disposent d’une telle politique depuis 2008; elle est obligatoire depuis décembre 2012. De son côté, le CRSH dispose d’un énoncé de mission sur le libre accès, sans toutefois être obligatoire, l’organisme ayant choisi de miser sur « la sensibilisation, l’éducation et la promotion […] plutôt que d’imposer des impératifs » (2014). Quant au CRSNG, il ne dispose pas de politique à proprement parler, mais a approuvé en mai 2013 le plan d’action pour le libre accès du Global Research Council. La politique harmonisée vise ainsi deux objectifs : uniformiser l’approche des trois organismes subventionnaires fédéraux, tout en se mettant au diapason des tendances mondiales. La Politique de libre accès des trois organismes, dont la version préliminaire a fait l’objet entre octobre et décembre 2013 d’une consultation en ligne auprès de la communauté scientifique, exigerait notamment des titulaires de subvention qu’ils rendent gratuitement accessibles les articles découlant de la recherche financée par l’un des trois organismes au plus tard 12 mois après leur publication. D’abord annoncée pour septembre 2014, la version définitive de la politique n’avait pas encore été rendue publique au moment d’écrire ces lignes. Les résultats de la consultation ont permis de mettre en lumière plusieurs éléments intéressants, notamment en ce qui concerne les perceptions des chercheurs à l’égard du libre accès (CRSNG & CRSH 2014). C’est sans grande surprise qu’ils se sont, pour la plupart, prononcés en faveur du libre accès, alors que la nécessité de se diriger vers un modèle ouvert de partage des connaissances semble s’imposer de plus en plus dans les milieux de la recherche, du moins en théorie. On peut en effet difficilement être contre la vertu. Cependant, dans la pratique, les résultats révèlent encore plusieurs réticences de la part des chercheurs à l’égard du libre accès. Certains y voient une atteinte à la liberté académique, d’autres craignent que le fait de publier dans des revues en libre accès ait un impact dommageable sur leur carrière, estimant ces revues de moindre portée et de moindre qualité. Publier dans des revues moins bien cotées porterait ainsi atteinte à leur réputation ainsi qu’à la crédibilité de leurs travaux, l’évaluation de la recherche et des chercheurs étant encore largement tributaire de la visibilité et de la notoriété – entendre du facteur d’impact – des revues dans lesquelles ils publient. Ces préoccupations trouvent de forts échos dans l’enquête menée auprès des chercheurs de l’Université Laval par Piron et Lasou (2014). À l’instar de nombreuses autres études, cette enquête a démontré que si les chercheurs tendent majoritairement à être en faveur du libre accès, leurs pratiques de publication tardent à s’adapter, le libre accès ne constituant pas un facteur déterminant au moment de choisir les revues dans lesquelles publier leurs articles. La notoriété de celles-ci, directement reliée au facteur d’impact, serait un motif beaucoup plus décisif. L’étude de Piron et Lasou révèle en outre de nombreux mythes ou fausses croyances à l’égard du libre accès, ce qui pourrait expliquer l’hésitation de …

Parties annexes