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Introduction

En 1989, la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) reconnait une diversité de droits aux enfants. Les droits qui y sont consacrés ont été résumés en trois types principaux : la participation (p. ex. l’article 9 et 12), la « provision[1] » (p. ex. l’article 24) et la protection (p. ex. l’article 3) (Lansdown, 2001 ; 2010). Cette répartition continue d’alimenter les discussions scientifiques au regard des tensions entre les droits des enfants à la protection, droits à la participation et respect de l’autorité parentale (Capelier, 2015). Malgré l’effort de traduction de ces principes dans les législations nationales et un consensus scientifique évolutif reconnaissant les enfants comme des acteurs sociaux, cette rhétorique peine à se concrétiser dans les pratiques, en particulier au cours des processus décisionnels qui composent les systèmes de protection de l’enfance (Balsells et al., 2017 ; Bessell, 2011 ; Holt, 2018). Selon les professionnels interrogés par les chercheurs ces tensions représentent des obstacles importants (Van Bijleveld et al., 2019 ; Lacharité et al., 2015 ; Lacroix, 2016 ; Thomas, 2007 ; Thomas & O’Kane, 1999 ; Vis et al., 2012). De récents travaux font état de l’intérêt de considérer cet ensemble comme intrinsèquement lié et non d’envisager ces droits distinctement (Heimer et al., 2018). En d’autres termes, si le déficit de participation des acteurs familiaux est souvent justifié par l’impératif de protection de l’enfant, les auteurs précisent à l’inverse que le déficit de protection peut également être la conséquence d’un déficit de participation des acteurs.

Adaptés à ce contexte spécifique dans lequel elles se déploient, ces principes et logiques se diffusent à l’intérieur des dispositifs et interventions. Dans une recommandation[2] formulée par le conseil de l’Europe, la participation des enfants est définie de la manière suivante : « toutes les personnes de moins de 18 ans, individuellement ou en groupe, ont le droit, les moyens, la place et la possibilité d’exprimer librement leurs opinions, d’être entendues et de contribuer à la prise de décisions sur les affaires les concernant, qu’elles bénéficient si nécessaire d’un soutien à cette fin et que leurs opinions soient dûment prises en considération eu égard à leur âge et à leur degré de maturité ». Si cette première définition, dans une approche centrée sur les droits, constitue un point de départ à notre réflexion, elle peut apparaitre réductrice et conduire à minorer les contraintes, paradoxes et enjeux auxquels sont confrontées les parties prenantes de ces interventions. Dans plusieurs des travaux ici analysés, la participation est conçue comme un processus dynamique, multidimensionnel, situationnel et interactionnel dans lequel tous les acteurs impliqués entrent en dialogue. De même, afin de ne pas rester à un niveau symbolique, voire stratégique, la participation doit comporter une finalité pratique telle qu’une action ou un changement. Dans ce processus, les perceptions, les connaissances et l’expérience de chaque acteur doivent être prises en compte. Dans la pratique quotidienne des services de protection de l’enfance, une participation significative implique donc une interaction entre un professionnel et l’enfant. Dans ces échanges, l’enfant doit se sentir capable et libre d’exprimer ses besoins et ses souhaits et est pris au sérieux dans cette démarche. Lorsque ses souhaits et ses idées ne sont pas réalisables, l’enfant espère recevoir une explication appropriée (Van Bijleveld et al., 2015).

Le droit de pouvoir participer aux décisions qui affectent la vie des enfants, lorsqu’il s’exerce dans le contexte spécifique de protection de l’enfance, s’applique à différents niveaux institutionnels et concerne autant les activités éducatives ordinaires que les processus décisionnels à l’œuvre (Rurka et al., 2020). La participation des enfants peut alors être appréhendée à partir de trois niveaux : les questions relatives à leur vie quotidienne, les questions relatives à la planification, le déroulement et l’évaluation de l’intervention et enfin les questions relatives à des dimensions plus institutionnelles et politiques (ten Brummelaar et al., 2018). La participation des enfants aux activités éducatives ordinaires et aux activités quotidiennes, notamment dans le cadre d’un accueil au sein d’un établissement collectif, a fait l’objet de plusieurs travaux internationaux (Join-Lambert Milova, 2004 ; McCarthy, 2016 ; ten Brummelaar et al., 2018). Le niveau plus institutionnel prend plus souvent des formes de participations collectives. Une revue de littérature internationale (Lacroix, 2016) et d’autres travaux scientifiques publiés récemment (Cahill et Dadvand, 2018 ; Greissler et al., 2020) proposent des analyses approfondies des expériences de participation collectives, de ses effets, ses enjeux et conditions. Le troisième niveau repéré par Theo ten Brummelaar semble, quant à lui, moins exploré par la littérature francophone. Pourtant, Anna Rurka et al. (2020) considèrent que le contexte décisionnel se compose de microdécisions prises tout au long de l’intervention. Dans les recherches francophones s’intéressant aux parcours des enfants en protection de l’enfance (Euillet, 2019 ; Jamet, 2021 ; Potin, 2012 ; Robin et Séverac, 2013) ou à leur devenir (Robin et al., 2014 ; Frechon et Marquet, 2018), le constat du faible niveau de participation aux décisions qui les concernent semble faire consensus chez les chercheurs. Les écrits francophones restent finalement assez fragmentaires concernant la mise en œuvre de cette participation au cours des interventions et c’est d’ailleurs cette lacune que le présent article espère combler.

Nous avons souhaité proposer cet état des lieux autour des conditions et obstacles de la participation dans le but de repérer les questions intéressantes à explorer dans de futurs travaux. Les résultats provenant des travaux internationaux nous permettent de comprendre les écarts existants entre les exigences du cadre légal, les discours des institutions, de leurs acteurs et les pratiques des professionnels. La production d’une telle revue peut fournir des pistes de réflexion nouvelles sur les conditions de participation des enfants.

Parmi elles, nous choisissons de nous centrer en premier lieu sur la difficile traduction et l’interprétation complexe des principes énoncés dans les conventions internationales et dans le cadre légal. Nous verrons dans un second temps que les niveaux d’information et de compréhension des enfants constituent des conditions essentielles à l’activation de leur participation. Ces conditions peuvent être favorisées ou affaiblies dans et par des dimensions relationnelles et organisationnelles. Pour finir, nous explorons l’impact des expériences vécues par des enfants et des professionnels. Cette partie éclaire selon nous l’aspect diachronique et dynamique de la participation qui pour se déployer doit être éprouvée dans l’intervention et les interactions.

Méthode

La recherche bibliographique a été effectuée au moyen de recherches électroniques issues de l’ensemble des bases de données accessibles en ligne (Cairn, EBSCO, Elsevier, Science Direct, Érudit, Wiley Online Library). À partir de mots clés en français et en anglais, nous avons cherché à recenser les travaux francophones ou anglophones portant sur la participation des enfants ou des jeunes (child, children, young people, youth) en protection de l’enfance (child protection, child care, protection services, child welfare, home-based services). Afin d’accéder à la pluralité des acteurs, nous avons également associé des mots en lien avec les fonctions des professionnels qui pouvaient être engagés tels que les travailleurs sociaux (social worker), les référents (independent reviewing officer, case manager). Près de 200 références ont été repérées. La moitié d’entre elles a été exclue de l’examen en raison de l’approche majoritairement centrée sur les parents et moins sur l’enfant. Parmi la centaine de références, nous avons écarté celles ne portant pas spécifiquement sur la protection de l’enfance et avons fait le choix de mobiliser essentiellement les travaux publiés entre 2010 et 2020. Quelques travaux antérieurs sont toutefois mobilisés lorsqu’ils constituaient des sources largement mobilisées dans les travaux recensés. Parmi ces références, trois revues de littérature ont été recensées (ten Brummelaar et al., 2018 ; Van Bijleveld et al., 2015 ; Vis et Fossum, 2015). Notre inscription théorique se situant dans la discipline des sciences de l’éducation et dans le champ de l’éducation familiale (Durning, 1995), les articles analysés s’inscrivent dans plusieurs champs disciplinaires (sociologie, psychologie, droit…). Le choix d’analyser des travaux internationaux pourrait générer quelques critiques au regard de l’impact éventuel du contexte législatif ou social des pays dans lesquels les études scientifiques mobilisées ici ont été produites. En effet, Healy et al. (2011) précisent qu’une distinction peut être faite entre les pays qui ont une approche de protection de l’enfance, comme l’Australie et le Royaume-Uni, et les pays ayant une approche du système de services à la famille, tel que la Suède, la Norvège et les Pays-Bas. Une étude comparant quatre pays montre pourtant qu’il n’a pas été observé d’indicateurs plus élevés de la participation des enfants en Angleterre ou dans les pays scandinaves, bien que ceux-ci disposent d’orientations politiques plus précises en termes de prise de décisions des enfants (Berrick et al., 2015). Le choix de mobiliser des travaux internationaux nous a permis d’accéder à des données peu disponibles en France autour de la place, du rôle et des fonctions du référent de l’enfant nommé par l’Aide sociale à l’enfance (Euillet et Faisca, 2019) et qui peut être comparable aux « gestionnaires de cas » (case manager) ou aux « référents indépendant de suivi » (Independent Reviewing Officer). Enfin, cette ouverture sur les travaux internationaux apporte quelques éléments concernant un champ très peu étudié en France. Nous n’avons pas repéré de production scientifique portant sur la participation des enfants bénéficiant d’une intervention à domicile.

La difficile interprétation des règles et principes dans les pratiques : un obstacle majeur à la participation des enfants aux processus de décisions en protection de l’enfance

Aujourd’hui, la question n’est plus tant de savoir si les enfants devraient participer aux décisions qui affectent leur vie, mais davantage la manière d’y parvenir et de rendre effectifs les droits qui leur sont octroyés par les conventions internationales ou les dispositions légales nationales. Alors que l’intention de favoriser la participation des enfants apparait dans les législations nationales et peut se formaliser à travers des documents qui balisent les interventions, la transformation des pratiques semblait plus difficile. Comme le montrent plusieurs rapports, les enfants continuent d’éprouver de faibles niveaux de participation (Arbeiter et Toros, 2017 ; Munro, 2011 ; Pert et al., 2017 ; van Bijleveld et al., 2015).

L’une des raisons pour lesquelles la mise en œuvre de la participation reste complexe en protection de l’enfance est l’absence d’accord, entre les différents acteurs, sur ce que la participation en protection de l’enfance implique (Van Bijleveld et al., 2015). Jaffé (2001, cité par Ackermann et Robin, 2016) a montré que la qualité de la participation des enfants dans le processus d’évaluation dépend des représentations des adultes du monde de l’enfant, et inversement. En effet, si le législateur peut fournir des instructions générales concernant la participation des enfants, les professionnels déterminent en fin de compte le sens et la forme que ces consignes prendront dans la pratique.

Les écarts entre les obligations légales, les discours et la pratique peuvent alors être analysés en tenant compte de l’interprétation que les différents acteurs se font de la participation (Berrick et al., 2015), la manière dont ils parviennent à se situer face aux tensions inhérentes à leurs missions (protéger et faire participer) ou la conception qu’ils ont de l’enfance. Pourtant, les recherches ont démontré que la participation des enfants s’est avérée essentielle pour proposer des modalités d’interventions réactives et adaptées (Bessell, 2011 ; Healy et Darlington, 2009 ; Heimer et al., 2018 ; van Bijleveld et al., 2015 ; Vis et al., 2011). Les enfants veulent avoir leur mot à dire sur les décisions qui les concernent (Charron, 2010 ; Thomas, 2007 ; van Bijleveld et al., 2020). L’une des principales constatations de l’étude de Heimer et al. (2018) est que lorsque les enfants n’ont pas la parole ou la possibilité d’agir sur la définition du « problème », la conception des interventions tend à être mal ajustée aux difficultés telles qu’elles ont été évaluées au début de l’intervention. Au contraire, lorsque les enfants peuvent influencer le « cadrage du problème », cela est associé à une protection plus appropriée.

Une participation symbolique visant à protéger les enfants

Comme évoqué en introduction, la participation est ici envisagée sous l’angle d’un processus plutôt que d’un événement ponctuel (van Bijleveld et al., 2020). Ceci est d’autant plus important dans le contexte de protection de l’enfance, cela ne concerne pas seulement une décision, mais se rapporte à une longue période au cours de laquelle de multiples décisions sont prises, et ce, en présence d’une pluralité d’acteurs. Pour Achard et Skivenes (2009), il ne s’agit pas de mobiliser le point de vue de l’enfant dans une volonté de démontrer ses compétences à décider, à choisir ou encore pour aider les adultes décideurs. L’expression doit avoir une valeur indépendante et constituer un élément à part entière du processus décisionnel. Pourtant plusieurs travaux révèlent que les professionnels considèrent la participation comme importante tout en la pensent essentiellement comme un moyen visant à assurer la coopération de l’enfant (Bessell, 2011 ; Charles et Haines, 2014 ; van Bijleveld et al., 2014). Dans ces conditions, la participation des jeunes peut être considérée de manière symbolique puisque celle-ci n’aura aucune influence ou qu’aucune prise de décision réelle n’en résultera (Sinclair et al., 2019). En l’absence de changements possibles, il s’agit davantage d’une consultation dont l’objectif se limite au recueil d’informations ou d’un assentiment de l’enfant au discours des adultes. Dans la pratique quotidienne des services de protection de l’enfance, une participation significative implique donc, à minima, une interaction entre au moins un professionnel et l’enfant, interaction dans laquelle l’enfant se sent capable et libre d’exprimer ses besoins et ses souhaits. Cela suppose également que l’enfant soit pris au sérieux, et lorsque ses souhaits et ses idées ne sont pas réalisables, qu’il obtienne une explication appropriée des raisons (Cashmore, 2002).

Dans la revue de littérature proposée par van Bijleveld et al. (2014), les auteurs ont relevé les principes sur lesquels les professionnels et les jeunes s’appuient lorsqu’ils font référence à la participation des enfants. Pour les professionnels, les références aux droits, à la responsabilisation, à la préparation à l’âge adulte, à la coopération des enfants et l’acceptation des décisions constituent les arguments principaux. Pour les professionnels interrogés dans l’étude française de Euillet et Faisca (2019), trois conceptions de la participation sont repérées : le fait d’outiller les enfants pour l’avenir, de les rendre acteurs et de limiter la stigmatisation éventuelle liée à leur statut particulier. Cela confirme l’idée selon laquelle la vision qu’ont les praticiens des objectifs ou finalités de la participation, de ses dimensions et de l’équilibre entre les logiques de protection et de participation influence largement les processus décisionnels. Les prescriptions politiques peuvent alors donner lieu à des pratiques très divergentes avec les enfants (Berrick et al., 2015).

Dans le champ de la protection de l’enfance, les professionnels qui cherchent à soutenir la participation des enfants sont confrontés à plusieurs dilemmes (Archard et Skivenes, 2009). Comment équilibrer le droit d’être entendu et celui d’être protégé ? Comment garantir les droits des parents et ceux des enfants ? Comment évaluer la maturité de l’enfant et selon quels critères ? Les professionnels doivent également maintenir un équilibre entre la nécessité de recueillir des éléments permettant d’évaluer une situation de danger et le droit de l’enfant de donner des renseignements sur ses propres conditions de vie (Ferguson, 2017). En outre, la double responsabilité des travailleurs de la protection de l’enfance en tant qu’enquêteurs et pourvoyeurs de soutien rend difficile l’effectivité de la participation (Darlington et al., 2010).

Des enfants trop vulnérables pour participer ?

Au-delà des tensions existantes entre le droit d’être protégé, et celui de participer, il apparait dans la littérature que la conception de l’enfance impacte tout autant que les conceptions de la participation.

En effet, les professionnels de la protection de l’enfance considèrent la participation des enfants comme un élément important, mais ils le feraient différemment selon leur âge (Berrick et al., 2015). Si l’article 12 de la CIDE stipule que les points de vue des enfants doivent être pris en compte en fonction de l’âge et de la maturité, la convention ne donne aucune indication dans la façon d’évaluer cette condition (Archard et Skivenes 2009). Dès lors, si la prise en compte de l’expression de l’enfant doit tenir compte de son niveau de maturité, la possibilité d’exprimer son avis ne doit pas être conditionnée par l’âge. Lansdown (2001, 2010) rappelle que les enfants dès le plus jeune âge sont capables de se forger des opinions et avis, même lorsqu’ils ne sont pas en mesure de les communiquer verbalement. Dans ce sens, il ne devrait pas y avoir de limite d’âge au droit de participer, et cette participation ne devrait pas se réduire à la seule expression verbale dans un langage conforme à celui des « adultes ».

Dans une étude menée en Finlande concernant la participation de l’enfant à la réunification familiale après un placement en famille d’accueil, les enfants interviewés de moins de 12 ans considéraient ne pas être souvent impliqués. Les chercheurs ont indiqué que le niveau de participation augmentait au fur et à mesure qu’ils grandissaient (Pölkki et al., 2012). Pour d’autres chercheurs, le niveau de participation des enfants de moins de 12 ans dépasserait rarement celui de l’information et resterait à un niveau de consultation pour les jeunes de plus de 12 ans (van Bijleveld et al., 2014). Dans cette étude néerlandaise, les professionnels interrogés ont estimé que les jeunes enfants (moins de 6 ans) sont incapables d’évaluer la situation, d’apprécier son niveau de gravité ou de décider de ce qui est nécessaire. L’étude réalisée par Berrick et al. (2015) compare, quant à elle, les pratiques de quatre pays à partir d’un questionnaire s’appuyant sur deux vignettes cliniques. La recherche montre que les travailleurs sociaux étaient plus susceptibles de parler à un enfant âgé et de l’inclure dans la prise de décision lorsqu’il avait plus de 11 ans. Pour Woodman (2018), dont l’étude repose sur un questionnaire adressé à 467 professionnels australiens, le critère d’âge est également pris en compte. Les répondants font état de l’existence d’obstacles émotionnels et physiques à la participation des enfants de moins de 5 ans. S’agissant des visites à domicile menées en Angleterre, Ferguson (2016, 2018) précise que dans 29 des 47 visites à domicile observées, les enfants âgés de moins de 5 ans n’ont pas été vus seuls par le professionnel. Ces enfants étaient alors considérés comme étant trop jeunes pour être capables de communiquer.

Ces références à l’âge de l’enfant et à son degré de maturité peuvent être éclairées à partir des dimensions culturelles associées à l’enfance. Comme le montre l’étude par questionnaire de Vis et al. (2012), ces dimensions imprègnent les croyances des professionnels quant à la capacité des enfants de communiquer et participer, à la nécessité ou aux risques de le faire. Cela conduit à renforcer leur vulnérabilité et la croyance qu’ils ne sont pas en mesure d’exprimer une opinion, un souhait, un avis. Finalement, ces perspectives nous conduisent à considérer que la protection de l’enfance s’inscrit toujours dans une logique déficitaire (Boulanger et al., 2010) et ces travaux nous montrent que cette logique n’est pas uniquement attribuée aux compétences parentales (Lacharité, 2015).

Selon les croyances mobilisées par les professionnels, l’enfant peut être perçu en tant qu’être vulnérable nécessitant la protection des adultes. Les enfants sont socialement construits comme ayant besoin d’aide. Atwool (2006), à partir des travaux de James et Prout (1990), considère que dans les systèmes de protection de l’enfance : « les enfants sont considérés comme immatures, irrationnels, incompétents, et asociaux ». Dans cette perspective, l’enfant est majoritairement perçu comme un être passif, influencé uniquement par les réponses provenant des adultes. Cela renforcerait l’asymétrie des positions et l’utilisation du pouvoir par les professionnels, qui estiment être plus à même d’évaluer « l’intérêt » de l’enfant, « ses besoins » et les réponses adaptées. Dans une étude néerlandaise, certaines des objections des professionnels à la participation découleraient principalement des représentations socioculturelles envisageant principalement la vulnérabilité de l’enfant et son besoin de protection (van Bijleveld et al., 2015). L’interprétation subjective de ses compétences et de son degré de maturité diminue les possibilités d’inclure l’enfant dans la définition du problème ou des solutions (Woodman et al., 2018). À ce propos, la réflexion avancée par des chercheuses canadiennes nous semble particulièrement intéressante. À partir des deux notions de vulnérabilité et de participation, les autrices montrent que « certaines vulnérabilités rattachées à l’enfant et d’autres qui lui sont extérieures influaient négativement sur le processus de sa participation aux procédures de protection et constituaient souvent des motifs pour justifier son exclusion » (Paré et Bé, 2020 : 271). Ce qui est alors énoncé par les professionnels concerne plus une forme de « vulnérabilité problématique » (Boutanquoi et Lacharité, 2020) considérée comme celle relative à certains individus, adultes ou enfants, dont la voix ne porte pas ou n’est pas entendue. Cette conception est alors particulièrement intéressante lorsqu’elle est mise en perspective avec la définition de la participation proposée en introduction. En effet, elle invite les praticiens et les chercheurs à explorer les modalités concrètes de l’expression des enfants et de la prise en compte de leurs opinions et non les seules intentions.

Aussi, la conclusion d’une recherche allemande menée par Ackermann et Robin (2016) apparait intéressante pour conclure cette partie. À partir de l’analyse approfondie de l’ensemble des documents composant une dizaine de dossiers de services allemands, les chercheurs estiment que les enfants sont souvent invisibilisés ou regardés comme objets de soins. Pour eux, « au lieu d’imposer simplement une vision extérieure de leur situation aux enfants, il est temps que les évaluations reconnaissent la compréhension qu’ont les enfants de leur situation et prennent en considération leur point de vue ».

Les conditions nécessaires pour rendre effectifs les droits et les principes 

Lorsqu’il analyse les conditions nécessaires visant à rendre les principes et les droits relatifs à la participation effectifs, Lansdown (2001) repère cinq dimensions essentielles. Les adultes doivent veiller à ce que les enfants disposent d’informations adéquates appropriées à leur âge pour former des opinions ; leur donner de réelles occasions d’exprimer leurs points de vue et d’explorer les options possibles pour eux ; écouter ces points de vue et les considérer avec respect et sérieux, mais aussi expliciter la manière dont leurs avis peuvent être pris en compte ; leur faire savoir l’issue de toute décision et, si cette décision est contraire aux souhaits de l’enfant, s’assurer que les raisons sont pleinement expliquées ; fournir aux enfants qui utilisent les services publics des services efficaces, accessibles et authentiques les voies de plainte, appuyées par l’accès à un défenseur indépendant pour les situations où les enfants se sentent maltraités ou ignorés de quelque façon que ce soit (Lansdown, 2001 : 38-39). La majorité de ces dimensions ont été repérées dans les travaux récents et permettent de saisir les conditions et les obstacles de la participation que nous présenterons ici.

Des conditions préalables à la participation : l’information et la compréhension

La participation n’est pas un acte isolé. Elle doit être considérée comme un processus nécessitant d’être activé et l’information constitue l’un des facteurs largement énoncés dans la littérature existante. Il s’agit pour Berick et al. (2015) à la fois de l’information donnée tout autant que celle recueillie auprès de l’enfant (2015). Ces informations doivent exister à chaque étape du processus décisionnel et de l’intervention. Dans l’étude portant plus spécifiquement sur le placement familial, les auteurs répertorient six dimensions relatives aux besoins d’informations des enfants : Information sur leur propre histoire de vie, sur les raisons de leur placement, à propos du moment où ils pourront retourner chez eux, à propos des raisons pour lesquelles les travailleurs sociaux sont intervenus dans leur vie, des informations sur eux-mêmes et enfin des informations sur les processus d’intervention et les différentes phases qui les composent (Pölkki et al., 2012).

L’information inexacte et incomplète est une constante dans les récits des participants de l’étude portant sur la décision de réunification (Balsells et al., 2017). Dans cette recherche réalisée en Espagne, 135 entretiens ont été menés auprès de 30 enfants, 42 parents et 63 professionnels. Les résultats montrent que ce déficit d’information est présent à toutes les étapes du processus décisionnel. Le degré de compréhension des raisons qui sous-tendent cette prise de décision est quant à lui minime. Ce déficit d’information est d’ailleurs énoncé par les enfants eux-mêmes (van Bijleveld et al., 2015). Dans cette étude néerlandaise (ibid), les enfants considèrent qu’ils n’étaient pas bien informés de ce qui allait leur arriver, de ce à quoi ils devraient s’attendre dans un avenir proche et des changements éventuels qui se produiraient dans leur vie.

Les informations nécessaires doivent porter sur le processus (acteurs, contenus, moments), les enjeux et les options qui entourent la prise de décision, ainsi que la manière dont les enfants peuvent exprimer leurs désaccords à l’égard des décisions prises (Cashmore, 2002). Pour cela, il est important que le professionnel explique clairement ce qu’il se passe et pourquoi, même lorsque les décisions ne peuvent pas être partagées à l’avance (van Bijleveld et al., 2014). L’un des travaux rappelle que l’information doit également permettre d’éclairer les procédures de plaintes possibles pour les enfants. Dans l’étude de Muench et al. (2017), seulement 3 des 22 enfants interrogés avaient connaissance de ces procédures et deux d’entre eux l’ont utilisé au cours de l’intervention.

Toutefois, le simple fait de rendre l’information disponible ne signifie pas qu’elle soit pour autant accessible. Au-delà de l’information, il s’agit de s’assurer du niveau de compréhension de cette dernière par chaque enfant, ce qui impose d’adapter les modalités de communication et le vocabulaire à l’âge et à la maturité de chaque enfant. À partir de 26 entretiens menés en Angleterre auprès d’enfants âgés de 6 à 17 ans, Cossar et ses collaborateurs (2016) explorent le lien entre le niveau de compréhension du processus en protection de l’enfance, le niveau de participation des enfants et ses effets. Le niveau de compréhension minimale et partielle est généralement associé à des enfants de moins de 10 ans et à un faible niveau de participation tandis que les jeunes plus âgés ont une compréhension plus claire du processus et sont ainsi davantage impliqués. Pour les chercheurs, l’attention accordée à la compréhension de l’enfant doit porter sur le processus, les décisions et les enjeux de la participation et trois niveaux de compréhension ont été repérés à partir de leurs travaux. La compréhension minimale concerne des enfants qui expriment ne pas comprendre le rôle d’un professionnel au-delà du fait qu’il effectue des visites au domicile. La compréhension partielle se réfère à des enfants qui ont une connaissance plus précise d’au moins un aspect du processus sans en mesurer les enjeux ou les motifs (ex. : une audience, une réunion). La compréhension claire est attribuée aux enfants pouvant rendre compte de manière relativement complète des processus d’intervention. Les enfants ayant une compréhension claire du système et des processus sont plus nombreux à mentionner des occasions dans lesquelles ils ont pu prendre part aux décisions qui les concernent.

Une étude anglaise s’est intéressée au point de vue de 25 enfants âgés de 8 à 17 ans ayant été invités à participer à une réunion organisée pour aborder leur situation. Pert, Diaz et Thomas (2017) ont repéré que 19 d’entre eux avaient une « compréhension de base » et 4 une compréhension « inexacte ». La non-compréhension du processus a été soulevée par les enfants et les jeunes comme un obstacle majeur à leur participation. Les auteurs concluent que la participation de l’enfant comprend non seulement ce qu’un enfant dit et ce qui est pris en compte, mais aussi la façon dont l’enfant peut être en mesure de saisir les questions, les options disponibles et les raisons des décisions ou encore le choix quant au lieu de la réunion et s’il a le choix d’y assister ou non.

Les dimensions relationnelles : une condition essentielle à la participation des enfants

Dans l’étude de Muench et al. (2017) la faible participation des enfants au cours du processus décisionnel et des étapes qui le composent est de nouveau soulevée. Les 23 jeunes âgés de 8 à 18 ans participant à l’étude ont associé leur niveau de compréhension et donc de participation plus élevée, à la relation positive qu’ils entretenaient avec un travailleur social. Dans la majorité des cas, le travailleur social a été perçu comme étant parvenu à provoquer un changement dans leur situation. Il s’agit là d’une des conditions favorisant ou limitant la participation des enfants et celle-ci est révélée dans la majorité des travaux étudiés.

Notons ici que des différences importantes peuvent exister au regard des rôles et des fonctions attribués aux professionnels. Dans la littérature étudiée, il apparait parfois une distinction entre les « travailleurs sociaux » et les « gestionnaires de cas ». Cette distinction peut être expliquer par la fonction et la place occupée par le professionnel dans le système de protection de l’enfance. Les travailleurs sociaux semblent majoritairement être ceux qui occupent une place dans le quotidien de l’enfant (professionnels en établissement, familles d’accueil) ou ceux qui interviennent au domicile des parents. Les « gestionnaires de cas » (case manager, case worker) sont les professionnels qui occupent un rôle plus spécifique dans l’articulation, la coordination des différentes interventions et qui peuvent être l’interlocuteur faisant le lien entre l’enfant, ses parents et les institutions judiciaires ou administratives. Cette distinction est plus rare dans les travaux francophones repérés. Elle apparait toutefois dans la recherche menée par Euillet et Faisca (2019). « Le rôle du référent semble attendu et souhaité tant auprès de l’enfant directement, qu’auprès de l’assistant familial et des parents autour de cette participation » (p. 59) et serait l’acteur principal de la transmission et de la pondération de la participation, de sa circularité, de son arbitrage, des décisions, mais aussi de responsabilités dans les modalités de participation de l’enfant.

Quelles que soient les places ou fonctions occupées, les professionnels peuvent être considérés comme des facilitateurs de la participation (Sinclair, 2019) et la qualité de la relation entre l’enfant et ces derniers est essentielle. Des chercheurs et chercheurs pairs (Robin et al., 2017) parlent « d’écoute institutionnelle personnalisée » pour décrire les rencontres et relations individuelles positives vécues par les enfants, lesquelles constitueraient des supports facilitant leur expression. Les qualités attendues par les enfants sont de deux ordres : professionnelles et personnelles. Les enfants attendent des professionnels qu’ils fassent preuve d’écoute, d’empathie, de chaleur et d’honnêteté (Cossar et al., 2016 ; Horsfall, 2013 ; Muench et al., 2017 ; Munro, 2011 ; Pölkki et al., 2012). Ils souhaitent que ces derniers aient une « approche informelle, mais professionnelle », faisant référence aux entretiens formels souvent inadaptés. En dehors de ces qualités, la stabilité des relations (Diaz et al., 2018) et leur continuité (Pölkki et al., 2012) constituent des dimensions importantes. Cette continuité permet d’éviter la répétition des récits des enfants et de prendre le temps nécessaire à la construction d’une relation significative et de confiance avec un professionnel (Diaz et al. 2018). Ces éléments ne sont pas sans rappeler les constats de Potin (2012 : 79), précisant que « l’accompagnement a du sens à partir du moment où il s’inscrit dans un parrainage, dans un lien privilégié avec un tuteur ». Par ailleurs, les enfants interrogés par les chercheurs pairs dans l’étude de Robin et al. (2015 : 139) considèrent à de nombreuses reprises l’écoute comme une qualité essentielle.

D’autres chercheurs observent que les enfants et les jeunes s’attendent à ce que cette relation n’existe pas seulement dans les situations de crises (Pölkki et al., 2012), lorsqu’il y a un problème à résoudre (van Bijleveld et al., 2014), ou dans les instances formelles qui composent le processus tel que les réunions (Diaz et al., 2018). Cette relation doit comprendre un contact minimal (Cossar et al., 2014) et être proximale (Euillet et Faisca, 2019). Des espaces informels doivent être envisagés pour permettre à la relation, dans des instances plus formelles et institutionnelles, d’être positive et de soutenir l’enfant dans l’expression de son point de vue. Pour que cette relation se construise, il doit y avoir suffisamment de temps et d’espace afin de soutenir les enfants dans l’expression de leurs propres sentiments, pensées et opinions. Enfin, les jeunes et les enfants attendent que les référents les voient seuls, en l’absence de leurs parents ou d’autres professionnels (Cossar et al., 2014).

Cette dimension relationnelle est pourtant mise à mal au regard des spécificités de l’organisation de la protection de l’enfance. Pour les enfants en population générale, un ou deux principaux aidants naturels, généralement représentés par les parents ou membres de l’entourage familial, prennent des décisions en leur nom. Pour ceux qui sont concernés par une mesure de protection de l’enfance, ce pouvoir est divisé entre de nombreux professionnels (Sinclair, 2019), dont les enfants mesurent difficilement les rôles et fonctions (Diaz et al., 2018). Cette dimension exige que « les conceptualisations déterministes qui positionnent les enfants comme les “objets” de la prestation des soins, et les relations entre les travailleurs et les enfants comme les “outils” par lesquels la recherche de conformité est assurée cèdent la place à des conceptualisations dialectiques, où les enfants sont considérés comme des agents actifs, où l’agency est considérée comme relationnelle » (Bolin, 2018 : 9).

Si la dimension relationnelle constitue l’une des conditions indispensables aux approches participatives avec les enfants, peu de travaux éclairent ce qu’il se passe au moment où se produisent les interactions entre un enfant et un ou plusieurs professionnels. Seulement deux études recensées explorent ces dimensions. À partir d’approches ethnographiques (Ferguson, 2016 ; 2017 ; Winter, 2006 ; Winter et al., 2017), des chercheurs et chercheuses montrent que les professionnels s’adaptent aux enfants en changeant de position pour passer du confident, au messager en passant par le conseiller (Winter et al., 2017). Les travailleurs sociaux s’ajustent aux différentes situations dans lesquelles ils se trouvent et l’étude révèle la nature très personnelle, physique et intime des rencontres à domicile. Cette relation implique ce que Winter considère comme le « déplacement » vers l’enfant. Ce déplacement n’est pas seulement physique, mais suppose également des dimensions verbales, non verbales et relationnelles. Celles-ci se traduisent par des changements de position (confident, conseiller, messager) et des changements de pratiques communicatives (dessin, jeux) pour trouver la meilleure façon de communiquer avec les enfants, les écouter et leur expliquer ce qu’il se passe. Si ces dimensions relationnelles conditionnent la participation des enfants, il apparait au préalable nécessaire que des rencontres avec l’enfant s’organisent, et ce, afin que la relation puisse exister. L’étude de Ferguson (2016) a permis d’établir que sur 63 des 87 rencontres observées, les enfants étaient présents et seulement un tiers ont été rencontrés seuls lors de l’évaluation initiale de la situation. La rencontre se fait souvent dans la chambre de l’enfant et dure en moyenne entre 5 et 16 min, ce qui pour l’auteur représentait environ 23 % du temps passé avec l’ensemble des membres de la famille. L’auteur considère que ce laps de temps est relativement court et ne favorise pas la construction d’une relation significative avec l’enfant.

Des dynamiques relationnelles affaiblies par des logiques organisationnelles

Les éléments de la précédente partie démontrent l’intérêt d’envisager la participation comme un processus dynamique et interactionnel. Ce processus ne peut être disjoint des dimensions organisationnelles au risque de faire porter aux professionnels toute la responsabilité de la non-effectivité des droits de l’enfant d’exprimer une opinion et d’être entendu. Si la qualité, la fréquence et la continuité de la relation constituent des conditions essentielles, celles-ci sont largement impactées par les dimensions organisationnelles. Dans les récents travaux menés par Robin et al. (2017) les adolescents mettent également en relation le contexte organisationnel et notamment les changements fréquents avec l’indisponibilité des éducateurs.

À partir du récit de certains jeunes, Potin (2012 : 76) constate que « la question du nombre d’interlocuteurs devient prégnante dans les récits » et l’autrice poursuit plus loin « il est rare que ce soit le même référent qui intervienne tout au long du parcours… la discontinuité les oblige à se (re) raconter ». Nombreuses études font état du nombre de professionnels différents rencontrés par les jeunes et les enfants (van Bijleveld et al., 2015). En effet, tous les jeunes interrogés dans l’étude de Diaz, Pert et Thomas (2018) ont évoqué les changements fréquents de travailleur social.

En France, ces éléments ont largement été mis à jour dans la recherche de Join-Lambert (2004) qui faisait état du lien entre le contexte organisationnel qui entoure les pratiques des éducateurs au sein d’établissement résidentiel (Maison d’enfants à caractère social) et l’implication des jeunes accueillis. Les résultats de l’étude de Vis et Fossum (2015) indiquent que les contextes décisionnels et la culture organisationnelle sont plus importants que les facteurs liés aux croyances et aux priorités des travailleurs sociaux telles que nous les avons abordés en première partie. Les enfants sont susceptibles de ne pas s’impliquer si le processus est trop bureaucratique en raison des règlements procéduraux formels. L’étendue des tâches administratives a notamment été signalée comme un facteur limitant les contacts entre les travailleurs sociaux et les enfants. Ces éléments sont repris dans l’étude de Pert, Diaz et Thomas (2018) pour qui l’attention accordée à la réduction de la charge de travail peut diminuer les roulements trop importants de personnels et augmenter la disponibilité des référents. Ferguson (2017) établit que le manque de temps disponible des travailleurs sociaux impacte la fréquence et la durée des rencontres individuelles avec les enfants. Cette question du temps disponible conduit alors les professionnels à aller « à l’essentiel » et « à l’urgence » usant de questions directes et réduisant ainsi la participation de l’enfant à un niveau stratégique ou symbolique énoncé plus haut.

Cette partie rend compte de la nécessaire réflexion à accorder au caractère multidimensionnel et interactionnel des processus à l’œuvre. Dans cette revue de littérature, il ne s’agit pas d’un, mais de plusieurs processus qui se conjuguent, s’alimentent voire s’entrechoquent : celui de l’intervention, celui des décisions et celui de la participation. Dans les travaux, les enfants expriment largement le besoin d’informations et d’explications sur les procédures et les processus au cours desquels ils sont invités et parfois sommés de donner leur avis. C’est alors dans et par les relations qui s’établissent avec certains acteurs qu’ils parviennent à exister plus significativement dans les processus, passant d’une participation symbolique à une participation effective. Pourtant, ces relations, amplement impactées par le contexte organisationnel qui les entoure, apparaissent souvent trop instables, voire déséquilibrées, et les expériences de ruptures vécues par ces jeunes ébranlent les processus et provoque un affaiblissement de leur participation.

« Éprouver » la participation et ses effets : une condition relevée dans les pratiques et les expériences

Les expériences des enfants et des professionnels : vers la constitution d’expériences habilitantes

Le terme d’expériences habilitantes, emprunté à Girard (2016), est défini à partir des événements, des occasions et circonstances permettant aux personnes d’accroitre leur pouvoir d’agir. Si son propos se centre sur le développement du pouvoir d’agir des parents, considérons ici que les travaux scientifiques s’appuyant majoritairement sur les propos des enfants font également état d’expériences ayant pour effet de renforcer le niveau, les formes et la qualité de leur participation.

La participation des enfants à la vie quotidienne semble être, pour les assistants familiaux un préalable à d’autres formes et niveaux de participation (Euillet et Faisca, 2019) et ces éléments rappellent les connaissances issues des travaux de Join-Lambert (2004) sur la participation des jeunes accueillis en foyer. Pour cette dernière, il existe un certain paradoxe lorsqu’il s’agit de demander aux jeunes d’exprimer leurs avis, opinions ou souhaits à propos des modalités d’intervention alors même que leur niveau de participation aux niveaux inférieurs (la vie quotidienne) est souvent moindre. Ici, il apparaît que le type d’accueil offre des opportunités différentes. Si en famille d’accueil le choix des vacances, de la décoration, du repas peut être parfois négocié entre quelques personnes, au sein d’un plus grand collectif soumis à d’importantes règlementations, les occasions sont plus rares. Pourtant, l’espace du quotidien peut permettre aux enfants de vivre de multiples expériences dans lesquels leur avis est sollicité, écouté et pris en compte, et ce, dans des décisions plus ou moins sensibles. Pour les assistants familiaux et les jeunes interrogés par Euillet et Faisca (2019), ces expériences représentent les premières circonstances et occasions au cours desquelles ils et elles se confrontent aux tensions, conditions et effets de la participation.

Plusieurs auteurs considèrent que des niveaux plus élevés de participation peuvent être atteints à mesure que les enfants et les jeunes expérimentent l’influence que peuvent avoir leurs avis au cours du processus décisionnel. Dans l’étude de Sinclair (2019), il est noté qu’une participation significative des jeunes s’est produite lorsqu’un processus de changement a été amorcé à la suite d’un engagement des jeunes avec les adultes. Les changements opérés et repérés par les jeunes se reflètent également dans l’étude portant sur l’intervention d’un « défenseur indépendant » (Thomas et al., 2017). Dans leur étude, les auteurs précisent que les jeunes remarquent les bénéfices de cette participation au moment où des changements pratiques se produisent dans leur vie quotidienne ou dans leurs rapports aux institutions. Pour favoriser ces changements et tendre vers le développement d’expériences habilitantes, la participation ne peut être ponctuelle et partielle. Les jeunes ont déclaré se sentir habilités quand ils peuvent être prendre part à toutes les étapes du processus allant de la création, de la mise en œuvre et de l’évaluation du programme (Sinclair, 2019).

A contrario, lorsque les opportunités données aux enfants de s’exprimer ne provoquent aucun changement ou ont des effets qu’ils considèrent comme délétères pour et sur eux, ces expériences négatives risquent d’impacter les occasions futures. Certains jeunes, sur la base de leurs expériences passées, ont mentionné qu’ils ne donneraient pas leur avis parce que personne ne l’écouterait (van Bijleveld et al., 2014). Leur déception suggère que la participation est importante dès le début et à chaque étape dans la mesure où ils abandonnent une fois qu’ils ont vécu des expériences négatives. Les enfants et les jeunes interrogés dans l’étude de Pert, Diaz et Thomas (2017) ont indiqué que si le référent les a écoutés pendant les réunions, ils n’ont pas toujours été informés des actions ou des résultats des décisions, engendrant chez eux un sentiment de découragement et d’insatisfaction. Ces constats apparaissent largement dans les travaux de Robin et des chercheurs-pairs qui soulignent à la fois les effets de l’absence d’opportunités d’être écouté et entendu, mais également ceux d’une utilisation de leur parole qui souvent les dépasse (2015 : 146).

Pour comprendre ces éléments, ces expériences seraient fortement impactées par le risque de captation institutionnelle de la parole des enfants en protection de l’enfance (Lacharité et al., 2015). Lacharité et ses collaborateurs considèrent que le vécu des parents et des enfants est fréquemment réduit aux catégories qu’impose l’institution « protection de l’enfance ». Dès lors, il s’opère selon eux une transformation de leur(s) parole(s) provoquée par une normalisation et une normation de leur vie, une décontextualisation de leur vie ordinaire, une difficulté à envisager l’expérience vécue au sens large. Dans ce processus de captation, la parole des professionnels est largement privilégiée au regard d’une hiérarchisation des pouvoirs inhérente à l’institution concernée. Finalement, il semble important de tenir compte de ce qui est fait de la parole des enfants et, comme l’indique Euillet et Faisca (2019) la participation implique de donner suite à cette parole, d’informer l’enfant sur la transmission d’une partie ou de la totalité de cette parole de sa prise en compte ou des effets qu’elle génère.

Les expériences et les compétences professionnelles

Nous avons vu plus haut que les dimensions organisationnelles pouvaient constituer un obstacle important. À l’intérieur de ces dimensions, il apparait que ce ne sont pas seulement les expériences vécues par les enfants qui peuvent avoir une incidence sur les processus. Pour Woodman (2018), l’expérience professionnelle en matière de protection de l’enfance a été citée comme la raison la plus fréquemment invoquée lorsqu’il s’agissait d’aborder la capacité et la possibilité que des professionnels s’adressent à l’enfant. Dans cette étude, il y avait une plus grande proportion de travailleurs ayant au moins cinq ans d’expérience qui étaient très à l’aise dans la consultation de l’enfant, comparativement à ceux qui avaient moins d’expérience. Des auteurs précisent que des compétences particulières sont nécessaires pour consulter les enfants, compétences que les praticiens estiment manquer (Vis et al., 2012 ; Winter et al., 2017). Selon Woodman et ses collègues (2018), il n’est pas toujours question d’un manque de compétences, mais d’un manque de confiance dans ces compétences. Cet élément peut être éclairé par les travaux de Winter (2017) qui, s’appuyant sur des observations des échanges, montre que les professionnels parviennent à se déplacer dans l’univers de l’enfant et à adapter leurs pratiques. À ce propos, Ferguson (2017) a repéré la présence de professionnels qui ont utilisé des compétences particulières pour favoriser une communication sous une forme créative et ludique (jouets, stylos et papier). Dans un article approfondissant certaines dimensions de son étude, Ferguson fait valoir que la façon dont les enfants deviennent invisibles n’est pas simplement une conséquence de la présence de « mauvais » praticiens, mais doit être comprise en termes d’» interaction des processus organisationnels, des qualités du praticien, de leur expérience et de leur état émotionnel lors de rencontres en face à face, et des atmosphères dans lesquelles la pratique se produit » (Ferguson, 2017).

La participation des enfants aux instances formelles : des expériences concrètes à promouvoir

Dans l’analyse de la littérature, les enfants interrogés par les chercheurs expriment souvent leur déception quant à l’impossibilité de participer à certaines instances, qui pourtant jalonnent leur parcours, tel que les réunions ou synthèses organisées et qui peuvent être appelées « conférence de cas » dans certains travaux. Si en France, quelques chercheurs se sont intéressés à ce qui se passe lors d’instances collectives (Boutanquoi et al., 2010), force est de constater que les enfants sont majoritairement absents de ces dernières. À l’étranger, certaines études ont cherché à savoir si les enfants participaient aux processus décisionnels (Charron, 2010 ; Cossar et al., 2011 ; Pert et al., 2017 ; Thomas et O’Kane, 1999), s’ils influençaient les résultats (Bell, 2002) et quels étaient les obstacles et leviers de la participation des enfants dans ces instances. L’un des principaux résultats suggère que la participation des enfants aux réunions constitue une condition importante de l’effectivité de sa participation à l’intervention (Cossar et al., 2011 ; Vis et al., 2012).

La participation des enfants à ces instances formelles est conditionnée par le niveau de compréhension qu’ils ont du système de protection de l’enfance (Cossar et al., 2017). L’une des exigences de base est que si un enfant est présent aux réunions, il doit être aidé à comprendre ce qu’il se passe (Pölkki et al., 2012). Si la présence des enfants et des jeunes est un préalable à l’activation de la participation et à son évolution, les chercheurs attirent l’attention sur les objectifs visés par cette participation. Pour Sinclair (2019), la participation des jeunes peut être considérée comme symbolique lorsqu’on demande seulement aux jeunes de partager leurs pensées et leurs opinions sans qu’aucune influence ou prise de décision réelle n’en résulte. Dans une revue de littérature étudiée, les études mobilisées révèlent que les enfants peuvent se sentir intimidés par le grand nombre de personnes présentes, par le fait qu’ils n’aient pas accès aux mêmes renseignements que ces adultes et se sentent mal préparés et mal soutenus (van Bijleveld et al., 2015).

De récents travaux s’appuient sur le point de vue des enfants et des jeunes pour nourrir la réflexion sur leur vécu dans ces instances et les changements que les jeunes souhaiteraient voir opérer afin de faciliter leur présence et leur implication dans ces instances (van Bijleveld et al., 2019). Les 25 enfants interrogés dans l’étude de Diaz, Pert et Thomas (2018) et les 26 enfants rencontrés par Cossar (2011) expriment avoir vécu difficilement ces moments notamment lorsqu’ils sont exposés à des échanges hostiles. Bien que les enfants apprécient la possibilité d’assister à des réunions, leur présence ne garantit pas toujours une participation (Cossar et al., 2016). Dans l’étude, les jeunes trouvaient ces moments stressants et ne se sentaient pas écoutés. Parmi les obstacles repérés, les chercheurs soulignent le nombre d’adultes présents, dont certains sont inconnus (Diaz et al., 2018) ou avec lequel la relation est qualifiée de « minimal » par Cossar et al. (2016). Là encore, les changements de professionnels constituent des obstacles largement énoncés par les enfants eux-mêmes (van Bijleveld et al., 2015). Enfin, les lieux et les moments dans lesquels se déroulent ces réunions représentent des freins supplémentaires. L’endroit où ces réunions sont organisées, souvent dans un espace auquel seul le professionnel est habitué et familier n’apparait pas propice à la construction d’un sentiment de sécurité pour l’enfant (Diaz et al., 2018; Pert et al., 2017; Thomas, 2000 2007; Thomas et O’Kane, 1999; van Bijleveld et al., 2015). Pourtant, Archard et Skivenes considèrent que l’un des quatre principes directeurs qui sous-tendent tout processus de délibération[3] est de disposer d’un lieu adapté. La question du moment, quant à elle, se réfère aux horaires puisque ces réunions ont généralement lieu au moment où les enfants sont à l’école (Pölkki et al., 2012).

Les méthodes de communication sont également importantes lorsqu’il s’agit de la participation des jeunes. Par exemple, certaines décisions peuvent avoir lieu au cours desquelles les adultes et les jeunes parlent des langues différentes (van Bijleveld et al., 2015 ; 2019). Cette dimension est largement mise en avant dans l’étude récente de l’équipe néerlandaise (van Bijleveld et al. 2019) qui, dans le cadre de leur recherche-action, a développé des outils avec des enfants et des jeunes afin d’améliorer leur niveau de participation dans les espaces formels. Les auteurs notent que ce qui importait pour les enfants n’était pas de travailler sur le contenu de leur expression, mais sur la forme de celle-ci. À partir des expériences des enfants qui composent le groupe, ils ont construit des outils portant moins sur le contenu de leur expression que sur les moyens de communiquer (journal intime, boites aux lettres, notes, hochet, carte d’arrêt, etc.). La recherche montre que les enfants peuvent participer lorsque les conditions leur permettent de le faire de manière adaptée. Ils souhaitent une communication non verbale dans certain cas, pouvoir participer aux choix des sujets et avoir un contrôle sur le choix et l’utilisation des informations.

Afin de faciliter leur participation dans ces instances, plusieurs propositions sont formulées par les chercheurs, et ce, à partir du point de vue des jeunes qui participent à la recherche. La possibilité d’amener un ami (Diaz et al., 2018) pourrait réduire les effets intimidants que peut produire la présence de nombreux adultes. Par ailleurs, le fait de proposer à l’enfant d’être accompagné et soutenu par un aidant qu’il a lui-même choisi, permettrait aux enfants de se sentir à l’aise pour exprimer leurs points de vue et leurs souhaits, et donc servir de facilitateur pour la participation (van Bijleveld et al., 2019). Toutefois, les aidants « professionnels » peuvent représenter un obstacle lorsque, selon les enfants, ils tentent de répondre à leur place ou « ne disent pas la vérité ». Cet élément conduit à favoriser le choix de l’aidant par l’enfant lui-même et de rendre possible la présence d’aidant non professionnel. Il n’en demeure pas moins que la préparation à ces rencontres a été jugée importante et les enfants expriment le besoin de soutien de la part des professionnels (Cossar et al., 2011, 2016; Diaz et al., 2017 ; 2018; van Bijleveld et al., 2014 ;2019). Cette préparation peut passer par la construction avec l’enfant de l’ordre du jour (Sinclair, 2019), afin de trouver l’équilibre entre les sujets choisis par le jeune et ceux qui doivent obligatoirement être abordés.

La conclusion finale de l’étude de Diaz, Pert et Thomas (2018) montre que les jeunes qui animaient leurs propres réunions ont eu un engagement plus significatif dans le processus décisionnel et ont eu l’occasion de faire entendre leur voix à l’égard des aspects essentiels de la réunion, comme le moment et l’endroit où elle a eu lieu, qui a été invitée et quel était l’ordre du jour. Leur étude précédente (2017) rappelle la nécessité de faire de ces instances de prises de décisions un processus et non un seul événement.

Considérée comme un processus, la participation se construit plus qu’elle ne se décrète. Cette participation s’édifie pas à pas par et dans les relations que les enfants entretiennent avec les adultes qui les entourent. Ces axes révèlent que les effets ou changements concrets provoqués au cours des interventions par la participation des enfants résultent d’opportunités multiples et sont susceptibles de produire de nouvelles opportunités, constituant un cercle vertueux de participation.

En guise de conclusion

Cet article apporte un éclairage sur les questionnements qui animent actuellement les chercheurs s’intéressant à la participation de l’enfant en protection de l’enfance. Les résultats des travaux analysés montrent que la traduction des principes énoncés dans la Convention internationale des droits de l’enfant reste difficile. Les institutions et les professionnels qui y exercent leurs métiers appréhendent la participation de diverses manières et ces considérations hétéroclites et protéiformes expliquent en partie les décalages entre les discours et les pratiques effectives.

En cause selon les chercheurs, la multiplicité des définitions de la participation et de ces objectifs. Par ailleurs, c’est la conception même de l’enfance et de l’enfant qui entre ici en jeu lorsque nous tentons de comprendre les écarts. Winter (2006), s’appuyant sur les travaux de James et Prout (1997), rappelle que l’enfance est une construction sociale. Les enfants sont des sujets actifs dans la construction et la détermination de leur propre vie et de celle de ceux qui les entourent . Par ailleurs, les tensions ou l’opposition entre les logiques de participation et les logiques de protection, entre la participation des parents et celles des enfants semblent demeurer dans le discours des professionnels interrogés. Face à ces tensions et ces discours stériles visant à opposer l’une ou l’autre de ces logiques, de récentes recherches soulignent que ces logiques sont intrinsèquement liées entre elles et même interdépendantes (Heimer et al., 2018). Il convient de considérer la participation, non plus seulement comme un objectif, une contrainte, une norme, mais bien en tant que droit et elle constitue aussi une pratique habilitante qui conditionne un autre droit de l’enfant, celui de la protection.

La majorité des méthodes utilisées dans les travaux recensés se répartissent autour d’entretiens ou de questionnaires. Les travaux permettant d’accéder à ce qu’il se passe au moment où le processus d’intervention et la participation se déploient apparaissent plus rares alors même qu’ils favoriseraient une meilleure compréhension des processus participatifs. Le travail social ne se produit pas dans le vide et la nécessité d’accéder au réel et à l’action en cours répond à l’importance de saisir de quelle manière les contextes organisationnels, relationnels, environnementaux et culturels agissent sur les processus à l’œuvre. Si les modèles de participation proposés par les chercheurs (Arnstein, 1969 ; Cahill et Dadvand, 2018 ; Hart, 2002 ; Shier, 2001) éclairent les composantes de ces processus, ou les niveaux de participation, les mêmes causes ne génèrera pas les mêmes effets. Aussi, l’analyse des pratiques et des processus doit tenir compte de l’interdépendance des dimensions et de ces contextes sur le déploiement de la participation des enfants.

De plus, les articles étudiés concernent majoritairement des mesures de placement faisant des interventions à domicile, au moment de la primoévaluation ou concernant l’aide à domicile, un champ d’intervention et de pratiques encore peu étudié par la recherche. Il conviendrait de développer des travaux sur ces pratiques. Si l’accueil des enfants en institution ou en famille d’accueil constitue une forme d’intervention, elle n’est pas la seule option disponible et possible.

Enfin, l’un des constats issus de notre analyse porte sur le rôle et le statut des différents acteurs qui interviennent dans le quotidien de l’enfant. Durning (Boutin et Durning, 1999 ; Durning, 1995) établit que dans le cadre des interventions socio-éducatives une pluralité d’acteurs auprès de l’enfant et de sa famille. Dès lors, les décisions qui ponctuent les interventions se construisent autour de discussions, de négociations, de compromis entre plusieurs acteurs, lesquels sont institutionnels, professionnels ou familiaux. Cette revue de littérature insiste sur le caractère dynamique de la participation. La participation est un processus actif où une ou plusieurs personnes sont informées, expriment un point de vue, influencent les décideurs ou prennent la décision finale. Le nombre de personnes impliquées, la stabilité d’au moins un professionnel et la régularité des relations sont largement évoqués par les enfants comme impactant leur niveau de participation.