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À voir les livres qui se multiplient à propos du Mexique, on pourrait croire que ce pays est en transition depuis bientôt 20 ans. Son adhésion à l’aléna en 1994, l’élection de Fox en 2000 et bientôt l’arrivée de la zléa font en sorte que cette impression de transition continue encore de nos jours. C’est dans cet esprit que le livre de Tulchin et Selee, Mexico’s Politics and Society in Transition, aborde la transition du Mexique sous trois angles principaux : politique, économique et international. Les auteurs attestent des nombreux changements structurels qu’a vécu le Mexique depuis les dix dernières années. Ces changements vont de l’ouverture et de la démocratisation du système électoral jusqu’aux nouvelles conceptions que se font les Mexicains par rapport au gouvernement, à l’État et à la place du Mexique dans le monde. Le but de l’ouvrage est d’explorer ces diverses tendances et changements qui traversent la société mexicaine contemporaine. Le mandat des différents auteurs est clair : décrire les changements qui ont touché le Mexique et expliquer comment ces changements ont influencé la relation de ce pays avec les États-Unis.

Plus précisément, ce livre de 13 chapitres, se divise en quatre parties. La première et sans doute la plus importante du livre en termes de travail et d’analyse, se consacre aux derniers changements politiques du Mexique. Par exemple, cette partie traite des prochains défis de l’administration Fox, de la sécurité, des réformes de l’État, du monde du travail, du problème Zapatiste, du rôle des femmes au Mexique et de la société mexicaine en général. La seconde partie se concentre sur l’aspect économique des changements. Entre autres choses, cette partie discute de la transformation macroéconomique de l’économie mexicaine, du rôle de l’aléna et de l’omc dans cette transformation, des défis du secteur rural dans une économie ouverte et d’une évaluation des réformes et des politiques de développement. La troisième partie aborde la question du Mexique dans l’espace régional. Les deux chapitres qui composent cette partie traitent de la relation Mexique/États-Unis et de la communauté mexicaine vivant aux États-Unis. La dernière partie constitue la conclusion du livre. Dans ce chapitre, les directeurs de l’ouvrage expriment leurs évaluations sur les trois tendances mentionnées ci-dessus. Ils affirment que l’influence grandissante des Mexicains vivant aux États-Unis ainsi que l’interdépendance croissante entre les deux pays ont contribué à approfondir et à stabiliser comme jamais auparavant la relation Mexique/États-Unis. De façon tout autant importante, le processus de démocratisation du système électoral a donné au leadership mexicain actuel de la crédibilité dans les affaires internationales et lui a permis de développer une politique étrangère plus active qu’auparavant. À cet égard, l’administration Fox a engagé avec assurance le Mexique dans des relations multilatérales (onu, oéa...) et bilatérales (surtout avec les États-Unis) fructueuses dès le début de son mandat. En fait, les auteurs attestent que le Mexique est sorti de sa traditionnelle réserve à l’étranger pour devenir un acteur majeur (an agenda-setter actor) dans les relations bilatérales entre l’Amérique du Nord et le reste de l’Amérique latine.

L’aspect intéressant de l’ouvrage est la diversité des points de vue et des sujets qu’il contient ainsi que la diversité de provenance des auteurs. Ceux-ci sont d’origine étatsunienne et mexicaine ce qui augmente la qualité analytique du livre. De plus, ces auteurs travaillent dans des disciplines professionnelles comme journalistes, professeurs ou analystes et proviennent de différents champs disciplinaires tels que la science économique, l’histoire ou encore les relations internationales. Le public cible est sans aucun doute académique, visant autant les spécialistes du Mexique qui retrouveront une foule de données et d’informations dans le livre, que les étudiants qui désirent s’initier à la politique et à la société mexicaine. De plus, l’aspect « transitionnel » du Mexique est bien présent dans le livre ce qui en augmente la qualité, car cet aspect est développé selon une perspective comparative. En effet, chacun des auteurs apporte une image distincte du Mexique, selon le thème de leur chapitre ou de la partie, et ils comparent souvent l’état du Mexique en 1980 à celui de 2002 afin de bien marquer le contraste entre les deux dates. Mais le livre ne répond pas, malheureusement, à la question de savoir pourquoi le Mexique est encore en transition, vers où il se dirige et surtout, quand s’arrêtera cette transition. Il peut donc être reproché aux auteurs d’avoir trop mis l’accent sur les changements qui sont survenus au Mexique durant la décennie 1990 et par ce fait, avoir délibérément exclus de leur analyse ce que deviendra le Mexique durant les prochaines années.