Régionalisme et régions –Afrique : Africa’s Stalled Development. International Causes and Cures.Leonard, David K. et Scott Straus. Boulder co, Lynne Rienner Publishers, 2002, 159 p.[Notice]

  • André Joyal

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  • André Joyal
    Département d’économie
    Université du Québec à Trois-Rivières

L’Afrique enlisée, telle pourrait être la traduction du titre de cet ouvrage qui rappelle le célèbre L’Afrique noire est mal partie, du regretté René Dumont, paru il y a plus de quarante ans. Les informations véhiculées par les médias écrits et électroniques nous laissent l’impression que l’Afrique sub-sahélienne est au bord du gouffre et qu’il en faudrait peu pour qu’elle y plonge de façon irrémédiable. Et pourtant, d’entrée de jeu, dans la préface, comme pour compenser l’effet du titre choisi, les auteurs font une mise en garde. En Afrique, tout ne va pas comme dans le plus mauvais des mondes. La majorité des pays ne connaissent pas de conflits armés, la démocratie progresse dans des pays tels le Botswana, le Ghana et le Sénégal alors que les deux premiers enregistrent une forte croissance économique tout comme la Tanzanie et l’Ouganda, alors que le fléau du sida se fait moins sévère dans les pays de l’Afrique centrale et de l’Ouest. Cependant, en parlant d’enlisement (notre traduction du mot stalle) les auteurs veulent faire référence aux décennies de stagnation économique qui caractérise la situation d’un grand nombre de pays où, avec un lien de cause à effet, on trouve la plus forte concentration de guerres civiles. En l’absence de changements structuraux importants, ils ne voient guère de possibilités d’améliorations sensibles dans un avenir rapproché. On comprendra ainsi l’importance accordée dans ce volume aux causes des conflits armés et aux moyens susceptibles d’y remédier. Après quoi tous les espoirs seront permis selon David Leonard et Scott Strauss. Le premier, en tant que professeur de sciences politiques, est rattaché à un centre d’études internationales de l’Université de la Californie à Berkeley tandis que le second, après avoir travaillé comme journaliste en Afrique de l’Est et centrale, au moment de la parution de l’ouvrage était en rédaction de thèse à la même université sur le génocide rwandais. Ils débutent leur plaidoyer par une section intitulée The Personal Rule Paradigm. On trouve une référence ici au pouvoir personnel approprié par certains leaders friands d’opérations marquées du sceau de la corruption. Celles-ci se manifestant à travers des activités reliées à l’immobilier, au monde des affaires, aux propriétés foncières, aux avantages fiscaux et à toute autre forme d’intervention dans le cadre des responsabilités publiques pouvant servir à des fins personnelles. L’importance prise par ce type de comportement a conduit certains à voir dans le pouvoir personnel le facteur dominant de la scène politique africaine. Ceci étant admis, les auteurs estiment que les causes à la base d’un tel phénomène et les facteurs qui en favorisent la pérennité sont mal connus. Apporter un éclairage sur une telle situation représente le premier objectif de leur ouvrage. Les moyens pour en éviter la prolifération constituent leur deuxième objectif. Le pouvoir personnel s’accompagne d’une économie enclavée (enclave production). Mobutu Sese Seko de l’ex-Zaïre représente l’exemple le plus marquant d’une telle situation. On sait que ce dictateur était parvenu à accumuler une fortune personnelle équivalant à la dette extérieure de son pays (6 milliards de dollars us). À l’opposé, les auteurs aiment présenter le Sénégal comme contre-exemple où il n’existe pas d’activités économiques enclavées. Hélas, dans un trop grand nombre de pays, aux yeux des auteurs, le pouvoir étatique est très faible. La structure de leur économie et son imbrication dans le système international ne sont pas de nature à offrir aux élites politiques la possibilité de réformes sérieuses. Dans un chapitre sur la dette et l’aide internationale, les auteurs font allusion à ce qu’un de mes anciens professeurs de Louvain, au milieu des années soixante, qualifiait …