Comptes rendus : Environnement

Paquerot, Sylvie, Un monde sans gouvernail. Enjeux de l’eau douce, Outremont, qc, Athéna éditions, 2005, 168 p.[Notice]

  • Olivier Boiral

…plus d’informations

  • Olivier Boiral
    Faculté des sciences de l’administration
    Université Laval, Québec

La disponibilité et le partage de l’eau douce sont devenus des enjeux internationaux majeurs qui transcendent les préoccupations écologiques locales. Par son caractère vital et non substituable, son importance économique et politique, l’eau est en effet un bien essentiel dont l’utilisation de plus en plus intense est porteuse de tensions croissantes entre les États. Ces tensions appellent une collaboration internationale accrue pour partager de façon plus équitable une ressource d’intérêt universel, dont l’inégale distribution ne respecte pas les frontières. Selon Sylvie Paquerot, cette collaboration demeure largement insuffisante en regard des enjeux en question. Ainsi, l’eau ne dispose pas encore d’un statut juridique clairement établi ou d’une politique internationale cohérente permettant de soustraire cette ressource à la logique marchande qui prédomine trop souvent dans son exploitation. La principale contribution de cet ouvrage est de proposer une synthèse éclairante et concise des principaux travaux et débats sur la question en mettant en lumière les paradoxes entre les conséquences humaines souvent dramatiques de l’utilisation de plus en plus inégalitaire de l’eau et l’absence de véritable politique internationale sur la question. L’ouvrage se divise en deux principaux chapitres montrant, à partir de perspectives différentes, la nécessité d’une approche mondiale et concertée de cette problématique. Le premier chapitre analyse la « globalité du cycle hydrologique » et ses conséquences écologiques, politiques ou économiques. Dans un premier temps, l’auteur s’attache à décrire le cycle hydrologique global de l’eau en comparant ce dernier à une sorte de « système circulatoire planétaire » indispensable au développement et au maintien de la vie sur terre. L’eau apparaît comme une ressource unique et multifonctionnelle dont la répartition très inégale et l’usage de plus en plus intense se traduisent, dans de nombreuses régions, par une situation de stress hydrique qui hypothèque toujours davantage les possibilités d’un développement durable. Dans un second temps, l’auteur montre les interdépendances écosystémiques et les incidences humaines du cycle hydrologique. Après avoir rappelé la fragilité des grands équilibres planétaires, qui sont menacés notamment par les variations climatiques, la déforestation et la désertification, les impacts environnementaux des différents usages de l’eau sont analysés : transport des eaux usées, introduction de matières chimiques ou organiques nocives découlant des activités industrielles, construction de barrages, irrigation et alimentation en eau potable, etc. Enfin, les usages excessifs de l’eau sont dénoncés à partir de données sur la consommation d’eau par pays, la capacité de renouvellement des ressources hydriques, les implications de l’agriculture intensive dans des régions arides ou encore l’épuisement parfois irréversible des eaux souterraines. Le second chapitre de l’ouvrage analyse les conséquences humaines générales des interdépendances internationales précédemment évoquées. Dans un premier temps, l’auteur montre en quoi l’accès à l’eau est une condition de survie et de développement. Les conséquences de la pénurie ou de la pollution de l’eau sur la santé des populations, de même que les liens étroits entre le sous-développement et l’accès à cette ressource sont illustrés par de nombreux exemples. Les enjeux économiques de la raréfaction de l’eau et de l’augmentation des coûts de distribution sont également analysés. Dans un deuxième temps, l’auteur examine le rôle essentiel de la disponibilité de l’eau pour le maintien de la paix. Ce rôle s’explique en particulier par l’existence de bassins hydrographiques partagés, par la compétition croissante pour l’accès à cette ressource et par les utilisations dommageables de l’eau. Les cas assez connus des tensions internationales liées à l’utilisation des eaux du Colorado, de l’Euphrate, du Jourdain ou encore du Nil, qui traversent plusieurs pays ou régions, sont utilisés pour illustrer les conflits pouvant découler de l’usage unilatéral de l’eau. Dans la conclusion, Sylvie Paquerot rappelle les dimensions non économiques de …