Comptes rendus : Analyse de politique étrangère

Andrew M. Dorman, 2009, Blair’s Successful War. British Military Intervention in Sierra Leone, Burlington, vt, Ashgate, 159 p.[Notice]

  • Issaka K. Souaré

…plus d’informations

  • Issaka K. Souaré
    Institut d’études de sécurité
    Pretoria, Afrique du Sud

De 1991 à 2002, le petit pays ouest-africain de Sierra Leone a connu une guerre civile fratricide. La guerre avait été déclenchée par Foday Sankoh, un ancien caporal de l’armée sierra-léonaise, et son groupe armé au nom de Mouvement révolutionnaire uni (ruf). Composé principalement de jeunes combattants, conscrits le plus souvent malgré eux, des renégats de l’armée sierra-léonaise en quête de fortune et de membres du mouvement rebelle de Charles Taylor au Liberia voisin, le ruf a adopté une stratégie de guerre qui consistait à terroriser les populations civiles. Sankoh et ses hommes se sont livrés aux pires exactions contre les populations, y compris l’amputation de mains et le viol. Tout cela a occasionné des interventions militaires de la sous-région et d’ailleurs afin de mettre fin à cette barbarie. C’est à une de ces interventions militaires qu’est consacré cet ouvrage : l’intervention militaire de la Grande-Bretagne sous son premier ministre, Tony Blair. L’ouvrage comprend huit chapitres. Le premier aborde la propension de Blair à déployer les forces armées de son pays dans des opérations de maintien de la paix ou les missions « humanitaires » dans le monde. Durant les six premières années de Blair au pouvoir, soit de 1997 à 2003, l’auteur recense cinq interventions militaires, en Irak (1998), au Kosovo (1999), en Sierra Leone (2000), en Afghanistan (2001) et en Irak de nouveau en 2003. Cela aurait fait de lui, selon certains observateurs, un « premier ministre de guerres ». Mais, contrairement aux autres opérations militaires, l’auteur pense que seule l’intervention de la Sierra Leone s’est soldée par un « apparent succès ». Ce chapitre liminaire permet donc de rentrer dans les détails de cette opération. Après un aperçu historique sur la Sierra Leone et la guerre civile au deuxième chapitre, les quatre chapitres suivants s’attèlent au déroulement de la guerre, à l’intervention des différentes forces d’opération de paix et aux négociations de paix, notamment celles qui ont abouti, en mai 1999, à la signature du fameux accord de Lomé entre le gouvernement sierra-léonais et le ruf, accord qui a prévu un partage du pouvoir entre les deux entités, faisant du chef du ruf le vice-président du pays. Au chapitre 7, l’auteur se penche sur la défaite politique et militaire du ruf après qu’il eut violé, à maintes reprises, les termes de l’accord de Lomé. Dans le dernier chapitre, enfin, il examine les effets de l’expérience sierra-léonaise sur l’administration Blair, ses politiques et stratégies d’intervention militaire ailleurs dans le monde, ainsi que son impact sur l’armée britannique. Il convient de s’attarder un peu sur les facteurs ayant conduit l’administration Blair à intervenir, militairement, en Sierra Leone en mai 2000. Ici, l’auteur avance quatre raisons. La première serait le désir de l’administration Blair de sauver un énorme capital politique et économique qu’elle aurait investi en Sierra Leone depuis des années. Ces investissements – de l’ordre d’une cinquantaine de millions de livres sterling en ce qui concerne le capital économique – étaient destinés à soutenir, entre autres, le programme ddr des anciens combattants et le budget de fonctionnement du gouvernement de Ahmed Tajan Kabbah. Politiquement, ces soutiens n’étaient pas dissociés des efforts visant à réparer les conséquences du scandale de violation de l’embargo onusien sur l’exportation d’armes en Sierra Leone, lequel embargo avait été violé, en 1996, par une société privée britannique, Sandline International, avec la bénédiction du gouvernement britannique. Le deuxième facteur avancé par l’auteur est la présence, en Sierra Leone, de plusieurs ressortissants britanniques (y compris des binationaux) et de ceux d’autres pays européens et du Commonwealth, ainsi que d’Amérique du Nord, tous amalgamés sous …