Comptes rendus : Études stratégiques et sécurité

Emily Spencer, 2009, Une guerre difficile. Points de vue sur l’insurrection et les Forces d’opérations spéciales, Kingston/Toronto, Presses de l’Académie canadienne de la défense/ The Dundurn Group, 327 p.[Notice]

  • Laurence Basset

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  • Laurence Basset
    Marsh Risk Consulting, Marsh and Mc Lennan Companies, Paris

Entre Les 36 stratagèmes et La guerre hors limites, l’ouvrage collectif dont nous parlons ici vient renforcer la littérature existante qui traite des nouvelles formes de guerre, celles que nos armées occidentales doivent apprendre petit à petit et qui nous laissent parfois tellement démunis face à un ennemi pourtant considéré comme si faible et si peu armé. Ce livre a été édité par les Presses de l’Académie canadienne de la défense, ce qui lui donne un caractère atypique, puisqu’il est destiné au personnel des Forces canadiennes. Il a pour objectif affiché de proposer à ses lecteurs une analyse de diverses situations afin de les éclairer sur l’environnement dans lequel ils évoluent désormais. On aurait pu croire que ce livre s’inscrivait dans la masse des ouvrages plus ou moins bien écrits, qui parsèment nos bibliothèques et encombrent nos étagères sans parvenir à apporter de véritable éclairage sur le sujet abordé. En effet, le thème est éculé, souvent mal traité, parfois trop résumé ; sa complexité le rend difficile à cerner et sa réalité rend son appréhension particulièrement délicate. Le fait de destiner cet ouvrage aux forces armées d’un pays impose d’autant plus de précautions de la part des auteurs et des responsables : il ne conviendrait pas de raconter une histoire qui ne soit pas la bonne ! La nécessaire adaptation des forces armées aux techniques de l’insurrection, voici le thème central de cet ouvrage. La rigueur de la construction du livre a certainement servi à exposer cette thématique : les auteurs sont nombreux, certes, mais pas trop, les thèmes abordés sont classés par ordre évolutif : les bases et références historiques présentées au début de l’ouvrage permettent de mieux comprendre la suite, composée d’exemples concrets, d’analyses de situations. Le livre aborde ainsi les concepts théoriques de l’insurrection et de la guerre. Les Forces d’opérations spéciales canadiennes (fosc) étant au coeur du schéma de lutte contre ces nouveaux phénomènes, il est normal que cet ouvrage leur accorde une large part. Plus que de l’insurrection, c’est d’ailleurs de la contre-insurrection et des formes de guerre associées qu’il s’agit ici. L’ouvrage consacre des chapitres au terrorisme, d’autres au renseignement, au phénomène de privatisation des armées et donc des conflits. Le dernier chapitre revient pour sa part sur la mise en place de forces d’opérations spéciales en prévision d’une longue guerre. Il rappelle un élément essentiel : l’importance prise par le terrorisme dans nos sociétés actuelles l’a fait passer d’un statut de simple menace criminelle à celui d’élément constitutif de la sécurité nationale, remettant en cause l’équilibre sécuritaire des nations. L’ouvrage relève parallèlement le leadership américain en matière de lutte antiterroriste, ce qui a été confirmé par les derniers événements au Pakistan et la neutralisation de Ben Laden. L’importance des relations interalliées et d’une stratégie commune est ainsi mise en exergue dans la lutte antiterroriste. C’est la gestion de cette nécessité qui pose les questions suivantes : comment des nations aux langues, aux techniques, aux technologies et aux habitudes différentes peuvent-elles parvenir à combattre ensemble un ennemi commun ? Les exemples concrets de mise en oeuvre et de succès de stratégies interalliées en Irak et en Afghanistan illustrent les propos théoriques. La question de l’intégration des fosc intervient comme une suite logique aux réflexions préalables : la nécessité d’évolution face aux nouvelles menaces impose de repenser les règles de fonctionnement. Les fosc semblent avoir intégré ces concepts depuis longtemps et elles acceptent que leur rôle ne soit pas d’être en tête de gondole, mais plutôt de contribuer à des missions spécifiques, pour aider à défendre une cause plus grande, celle de …