Résumés
Résumé
Le roman pastoral des xvie et xviie siècles raconte le destin d’êtres humains qui, oscillant entre la constance et la faiblesse, passent du dévouement au caprice et de l’inconstance à la fidélité. Bien que l’amour entraîne ces personnages vers la source du Bien, du Vrai et de l’Un, ils demeurent en proie aux troubles intérieurs et aux perturbations engendrés par le désir. La tension entre l’imperfection humaine et l’élan vers l’idéal se reflète dans l’alternance, typique pour le roman pastoral, de la narration en prose et du transport poétique. Or, en dépit de la coexistence de ces grandeurs incommensurables, des oeuvres comme l’Ameto de Boccace, l’Arcadie de Sannazaro, La Diane de Montemayor, Galatée de Cervantès, l’Arcadie de Sir Philip Sydney et L’Astrée d’Honoré d’Urfé dégagent une remarquable impression de mesure et d’équilibre, qui réunit la force de l’idéal aux impulsions les plus intimes de l’âme humaine. Cet équilibre est perceptible dans tous les ingrédients du roman pastoral : le cadre idyllique, l’intrigue, la psychologie morale et l’élégance du style. Située dans une Arcadie primitive qui ignore les conflits, la pastorale inclut également des épisodes appartenant au monde des rivalités sociales. Elle ne se contente pas d’une seule histoire, mais incorpore une gamme de situations où l’amour est confronté à la Fortune, à la duplicité du coeur humain et, enfin, à l’énigme de l’union entre corps et âme. Concernant la psychologie, la pastorale ne s’attarde pas aux replis du coeur humain mais peint des âmes que l’élan amoureux emporte au-delà des circonstances amères et boueuses de leur vie. Enfin, l’alternance de la prose et des passages en vers participe elle aussi à cette mesure sans doute fragile, à cet équilibre souvent instable, en soulignant à sa manière l’incommensurabilité de la faiblesse humaine avec le Beau et le Bien qui l’attirent.
Abstract
In Renaissance pastoral novels, characters oscillate between weakness and constancy, caprice and resolve, fickleness and perfect loyalty. Although True Love inevitably leads these characters towards the invisible source of the Good, pastoral heroes are nevertheless prey to the turmoil and distraction engendered by earthly passions. This clash between the contradictory nature of human frailty and the neo-platonic desire for an ideal unity is further mirrored by the mix of prose and poetry, a typical stylistic feature of the genre. In spite of the tension between these elements, a strong impression of equilibrium emerges from works like Boccaccio’s Ameto, Sannazaro’s Arcadia, Montemayor’s Diana, Cervantes’ Galatea, Sir Philip Sidney’s Old Arcadia and Honoré d’Urfé’s Astrea. An elusive, yet durable balance unites the movement towards the Ideal and the innermost contradictions of the soul. This balance is perceptible at various levels : the idyllic setting, the plot, the moral psychology and graceful discourse of the characters. Set in Arcadia, a legendary land assumed to be free of greed and discord, all pastoral novels include episodes which take place beyond Arcadia’s borders in the familiar world of wealth, social rank, rivalry and conflict. In addition to the dignified love story (or stories) narrated by the main plot, pastoral novels always stage a variety of situations depicting clashes between love and Fortune, the duplicity of the human heart, and the enigmatic links between body and soul. Yet these novels rarely linger on the inner struggles of the soul ; instead, they highlight True Love’s extraordinary capacity to carry it away, far beyond the often murky and bitter circumstances of its daily existence. Finally, the blend of prose and poetry reinforces the pastoral’s equilibrium and its inner measure, calling attention, in its own way, to the incommensurability between human imperfection and the irresistible attraction of the Ideal.