Résumés
Résumé
L’étude s’intéresse aux ruines dans le roman 14 de Jean Echenoz (Minuit, 2012). Quels vestiges la Grande Guerre laisse-t-elle dans l’oeuvre singulière de l’écrivain ? Si la ruine des Lumières ou du romantisme se présentait sur un mode élégiaque, noble et sublime, elle ne possède plus aujourd’hui le lustre triomphant des siècles passés. On verra comment, dans 14, elle se place résolument sous le signe du prosaïque, du minuscule, voire du rebut. On analysera ainsi le sens et les modalités de cet effritement mémoriel qui se double malgré tout d’un retour de « survivances », au sens où l’entendait Abby Warburg. Au-delà de 14, nous montrerons que ce motif innerve toute l’oeuvre de l’écrivain, symptôme d’une condition socio-économique et reflet d’une réflexion ontologique. La ruine constitue en ce sens un paradigme heuristique extrêmement fécond.
Abstract
The present study will focus on the ruins in Jean Echenoz’s novel 14 (Minuit, 2012). What vestiges does the Great War leave in the writer’s singular work ? If ruins of the Enlightenment or Romanticism offered themselves as elegiac, noble and sublime, they no longer possess the triumphant luster of past centuries. We will see how, in 14, they are placed under the sign of the prosaic, the tiny, even the refuse. We will thus analyze the meaning and the modalities of this decay of memory, which is nonetheless shadowed by a return of modes of “survival” (Nachleben), such as they have been theorized by Abby Warburg. Beyond 14, we will observe how this motif innervates the writer’s entire work, as the symptom of a socio-economic condition and as the reflection of an ontological thought. Thus understood, ruins constitute an extremely fruitful heuristic paradigm.
Corps de l’article
La ruine est à la mode. Colloques, essais, exposition en 2016 à la Bibliothèque publique d’information du centre Georges-Pompidou : nombreuses sont les réflexions qui témoignent d’un engouement pour le paradigme « ruiniste ». Cette dilection pour le vestige n’est pas nouvelle. Elle a connu son heure de gloire au dix-septième siècle avec les tableaux de Le Lorrain et au dix-huitième avec ceux d’Hubert Robert, comme l’a admirablement montré Jean Starobinski[1]. Mais, si la ruine aujourd’hui occupe une place de choix dans la littérature, ce n’est plus sur ce mode élégiaque, noble et sublime. Au vingt et unième siècle, la ruine postmoderne s’écrit sur fond de catastrophes climatiques ou de conflits internationaux.
Notre étude vise cet univers du grand désastre en s’intéressant aux décombres engendrés par la Grande Guerre et décrits dans 14 de Jean Echenoz[2]. La ruine, marqueur négatif des ravages de la guerre, acquiert dans ce roman un statut singulier. Elle n’a rien en effet de monumental ou de grandiose et se présente sous la forme du trivial, du rebut, du débris. L’écrivain refuse clairement toute visée idéaliste ou esthétisante, comme le montre également l’ensemble de son oeuvre. Comment dès lors le vestige s’articule-t-il avec la « Grande Histoire » ? Quel est le rapport qui se construit entre mémoire et oubli, trace et souvenir ? Quelles sont les modalités d’écriture utilisées pour mettre à distance les poncifs lyriques liés à la contemplation des ruines (méditation sur un monde englouti, sur la fuite du temps, sur la brièveté de la vie), déjà moqués en leur temps par Flaubert, Mérimée ou Gautier ? Telles sont les questions auxquelles nous tenterons de répondre. La seconde partie de l’étude s’interrogera sur le sens à donner à cette nouvelle configuration d’un monde ruiné en montrant que le traumatisme historique de 1914 a valeur allégorique. Les ruines postmodernes mettent certes en scène une vision crépusculaire et mélancolique d’un monde laissé à l’abandon, mais l’écriture echenozienne propose aussi un geste de résistance en redonnant au détritus sa dignité.
Dans les poubelles de l’Histoire : dérisoire de la ruine
Si la ruine contemporaine, on l’a vu, ne possède plus son lustre triomphant des siècles passés, elle prolifère sur le mode du banal, du résidu, voire du décombre, poursuivant et prolongeant ce que Michel Makarius a joliment nommé « l’art d’accommoder des restes[3] ». Certes, précise Makarius, il s’agit là d’une conception extensive de la notion de ruine, peut-être périlleuse, mais elle traverse le champ plastique et littéraire de manière si dense, qu’il convient de l’interroger. L’oeuvre de Jean Echenoz est ainsi saturée par le motif du menu, du grenu, du presque rien, du déjà fichu, du périmé. À titre d’exemple, et cueillis presque au hasard, on relève ainsi une description des décharges publiques dans Un an[4], un inventaire des détritus jonchant le canal Saint-Martin[5], une cohorte d’objets hors d’usage s’entassant sur des balcons[6], et – plus modestement encore – sur les tables des cuisines, des « croûtons, fanes, épluchures[7] ». Modestes ruines, donc, brimborions d’une histoire individuelle qui disparaît dans l’apesanteur d’une cendre légère, tel le palais qui explose à la fin du Méridien de Greenwich[8].
La « Grande Histoire » n’échappe pas à cette pensée où la ruine est placée sous le signe de la dégradation, de la corrosion, de l’oxydation. En témoigne le dense et fulgurant 14, paru deux ans avant les commémorations officielles de la Grande Guerre. Le roman est né de la lecture de carnets de guerre trouvés dans des papiers familiaux. Surprise pour l’écrivain (qui retranscrit le document) :
Je m’attendais […] à un récit guerrier, or ça n’était pas du tout le cas. Ce qui m’intéressait dans ces carnets, c’est que cet homme racontait la vie quotidienne, parlait du vent, de la pluie, de la neige, de la chaleur étouffante, de l’ennui...[9]
14 reprend cette trame narrative en lui adjoignant un concentré, monté en épingle, de motifs propres au récit de guerre : tocsin, mobilisation, uniforme et barda du poilu, hiérarchie militaire, alcool, soupe et singe froid, jeux en tout genre, marches éprouvantes, fléau des parasites, tranchées et gaz « aveuglants, vésicants, asphyxiants, sternutatoires ou lacrymogènes » (14, 75), trous, feux et boyaux, boue, pisse et merde, désertion, blessures, morts…
Dans cet univers très codifié, mis à distance par l’écrivain pour éviter toute effusion sentimentale, la ruine s’efface, se vaporise, s’anéantit, comme les vestiges dérisoires cités plus haut. Le roman n’est pas un monument aux morts et semble même « ruiner » les images qui ont circulé pendant et après la guerre – sous forme de cartes postales ou de photographies (charpentes calcinées, maisons effondrées, cathédrales bombardées) publiées dans Le Miroir, journal auquel fait d’ailleurs référence le roman (14, 17, 114).
Suivons le parcours de cet effritement mémoriel. L’entropie qui va miner le récit se lit d’abord de manière anecdotique dans la description du domicile d’Anthime, le héros du récit, domicile bordé par un portail dont la peinture s’écaille. Le jardin, lui, est « une zone brève et mal délimitée de mauvaises herbes » parcouru par « une dalle de ciment fissuré »,
juste ornée par les traces de pattes qu’avait précisément laissées un chien – bête sans doute elle-même, donc, aussi basse que trapue –, gravée dans le mortier frais le jour lointain qu’on l’avait coulé. Seul souvenir de l’animal défunt, restaient ses empreintes digitales au fond desquelles s’était accumulée une poussière terreuse, reliquat organique où s’efforçaient de pousser d’autres herbes sauvages au format plus réduit.
14, 35-36
La topographie du quotidien contient en germe les ruines d’une histoire officielle et triomphante, d’une mémoire qui ne se manifeste plus que sous la forme du « presque rien » (une trace, une empreinte recouvertes de poussière). Ce sont là ce que Georges Didi-Huberman nomme des « survivances », empruntant ce concept à Warburg et à Benjamin :
Les survivances courent partout : elles se glissent dans chaque recoin de l’histoire – celle de l’art, par exemple. Mais, surtout, elles agissent dans les « rebuts de l’histoire » : ces « haillons », ces « guenilles », ces « défroques », ces « lambeaux » dont Walter Benjamin, plus encore qu’Aby Warburg, fit l’objet de sa quête incessante, sa quête d’historien-chiffonnier[10].
L’image du chiffonnier, empruntée à Baudelaire, commentée par Walter Benjamin dans Paris, capitale du xixe siècle. Le livre des passages[11], par Michel Makarius[12] et plus récemment par Antoine Compagnon[13], est particulièrement féconde pour mettre au jour une « mémoire en haillons[14] » où l’aura de la ruine, semblable aux installations de Christian Boltanski, se déploie secrètement dans les plis de la « Grande Histoire ».
Ces « survivances », on les retrouve dans les restes qui jonchent le sol, après la fébrilité fanfaronne de la mobilisation :
Dehors, fond sonore de dimanche : tout est plus silencieux qu’en semaine, à la façon de n’importe quel dimanche mais pas seulement, pas le même silence que d’habitude, comme si restait un écho résiduel des clameurs de ces derniers jours, des fanfares et des ovations. Tôt ce matin les plus vieux employés municipaux restés en ville ont fini d’évacuer les ultimes bouquets flétris, cocardes froissées, restes de banderoles, mouchoirs trempés puis séchés avant de passer la voirie au jet. On a remisé aux objets trouvés quelques accessoires égarés, une canne, deux foulards déchirés, trois chapeaux cabossés, projetés en l’air dans la fièvre patriotique et dont on n’a pas retrouvé les porteurs légitimes : on attend qu’ils se manifestent.
14, 26 ; nous soulignons
On connaît la valeur affective que Jean Echenoz accorde à la date fétiche du dimanche : temps poisseux qui s’étire paresseusement, air lourd et silence de feutre, effet pâle d’ennui, de creux, de vide. Ce marqueur temporel, dans le passage cité, résonne de manière tragique, préfigurant le temps de l’attente et de la mort à venir. La ville, fantomatique chambre d’échos, contrepoint des musiques qui vont rythmer tout le récit, est un théâtre parsemé de « quelques accessoires », expression soulignant tout à la fois le caractère secondaire et artificiel de ce qui reste. L’exaltation du sentiment national (« spectacle public », « état d’exception émotionnel » selon les termes de Frédéric Rousseau[15]) est d’ores et déjà fissurée, comme l’indiquent les adjectifs qualificatifs qui émaillent le texte. Si la ruine romantique s’élevait de manière noble et singulière, le vestige contemporain est trivial et nivelé par l’énumération. Cet effet-liste (figure rhétorique dominante dans l’oeuvre d’Echenoz, et particulièrement dans 14), en faisant disparaître les verbes, contribue à néantiser les soldats mobilisés, réduits à n’être que de simples « porteurs ». Les personnages sont « agis » « plutôt qu’acteurs »[16]. En outre, le verbe « évacuer », tant dans sa dimension militaire que médicale, désigne bien la ruine comme une scorie plus qu’un emblème.
Cette archéologie du quotidien annonce les paysages massacrés par la guerre :
Il est aussi arrivé de plus en plus qu’on passât par certains villages abandonnés de leur population, parfois même effondrés, dévastés ou brûlés, peut-être, pour n’avoir pas payé le tribut. Les caves des maisons vides avaient été souvent dévalisées, on y découvrait au mieux des bouteilles d’eau de Vichy. Les rues désertes étaient jonchées de choses diverses et dégradées : on pouvait trouver là, par terre et qu’on ne ramassait pas souvent, des cartouches non tirées laissées par une compagnie momentanée, du linge épars, des casseroles sans poignée, des flacons vides, un acte de naissance, un chien malade, un dix de trèfle, une bêche fendue.
14, 44-45
Ce qui frappe dans ce passage, c’est la présence de restes insignifiants, pathétiques témoins d’une mémoire lacunaire. Épaves plutôt que ruines, reliquats plutôt que reliques, les objets sont frappés d’incomplétude (« casseroles sans poignée », « flacons vides », « bêche fendue »), telles ces maisons où se trouvent encore quelques meubles et « même parfois des lits quoique sans literie » (14, 47).
Autre caractéristique de ces inventaires : leur aspect hétéroclite. La liste est du côté du vrac, du bric-à-brac plus que du chaos. Elle est placée sous le signe de l’arbitraire, de l’aléatoire, symbolisée par la seule carte retrouvée. Hasard, dans la cartomancie, le dix de trèfle représente le bien-être et l’équilibre… L’équilibre ici vacille, soumis à des lois obscures, arbitraires, fatrasiques. Ce désordre taxinomique, en faisant côtoyer les instruments de mort (les « cartouches ») et les signes de vie (l’« acte de naissance ») est cruellement ironique. La liste, en substituant la nomination à la description, en faisant la promotion d’objets quotidiens, « désublimise » la ruine, évitant simultanément « le voyeurisme de l’horreur et le sentimentalisme compassionnel », selon les mots de Pierre Schoentjes[17]. L’ironie n’est ni un masque ni une pose mais un « affect pudique », comme se plaît à le répéter Jean Echenoz :
L’ironie a une dimension affective. Ce n’est pas seulement du recul, c’est d’abord le refus du pathos au premier chef, mais pas pour autant le refus du sentiment : l’ironie est aussi un affect. C’est en tout cas pour moi le refus radical de toute psychologie, de toute hystérisation psychologique[18].
C’est de manière tout aussi distanciée qu’apparaît le corps ruiné des soldats, corps démembré, éclaté, brisé :
Les épargnés se sont relevés plus ou moins constellés de fragments de chair militaire, lambeaux terreux que déjà leur arrachaient et se disputaient les rats, parmi les débris de corps çà et là – une tête sans mâchoire inférieure, une main revêtue de son alliance, un pied seul dans sa botte, un oeil.
14, 82
Comme dans les précédentes énumérations, le dénombrement insiste sur l’idée de disjonction et opère un gros plan sur une anatomie disséquée, écartelée, morcelée. Le corps est saisi dans l’absurdité violente de membres mutilés. Vertige de la liste, pour reprendre le titre d’un essai d’Eco (2009), vertige de ce dénombrement monstrueux, horreur de la guerre. On retrouve un semblable effroi dans la description de l’anéantissement de l’orchestre qui mêle métonymies déshumanisantes, allusion patriotique ironique à La Marseillaise, litotes effrayantes :
Cependant, tandis que l’orchestre tenait sa partie dans le combat, le bras du baryton s’est vu traversé par une balle et le trombone est tombé, très mauvaisement blessé : le rond s’est resserré d’autant et, quoique en formation restreinte, les musiciens ont continué de jouer sans la moindre fausse note, puis comme ils reprenaient la mesure où se lève l’étendard sanglant, la flûte et l’alto sont tombés morts. […]
[…] Du côté de l’orchestre, l’un des clarinettistes était tombé, frappé au ventre, la grosse caisse avait culbuté, joue transpercée, avec son instrument et le deuxième flûtiste n’avait plus que la moitié de sa main.
14, 62, 64
L’amputation du bras droit d’Anthime a dès lors valeur de symbole. Amputation d’une époque, comme l’indique en filigrane le titre du roman, « titre sec, sans lettres[19] » qui prive le repère historique de son siècle. Amputation de la mémoire, comme nous l’avons vu précédemment en analysant les paysages dévastés. Mais les passages concernant l’absence de ce bras demandent à être interrogés. L’amputation est d’abord traitée sur le mode de la dédramatisation, voire de la loufoquerie :
Devenu gaucher par force, il s’y est adapté sans état d’âme : s’étant contraint avec succès à écrire de sa main restante – et tant qu’il y était à dessiner aussi, et de plus en plus, ce qu’il n’avait jamais fait avec la droite –, il a renoncé sans regret à certaines pratiques devenues inaccessibles, comme peler une banane ou nouer ses lacets. Côté banane, n’ayant jamais été friand de ce fruit d’ailleurs récent sur le marché, Anthime l’a remplacé sans mal par tant d’autres à peau comestible.
14, 107-108
Passons sur les burlesques parties de cartes entre éclopés (14, 109-110) pour souligner le statut ambivalent de ce membre « imaginaire » (14, 118), car ce « bras absent parfois devenu encore plus présent que l’autre, insistant, vigilant, ricaneur comme une mauvaise conscience », constitue bien « un témoin muet, complice un peu honteux d’être là » (14, 119-120). « C’est le vieux coup du membre fantôme » (14, 120). La tonalité railleuse de cette phrase place d’emblée les considérations sur le membre manquant sous le signe d’une goguenardise qui sollicite des « comparaisons glaçantes » : « certains amputés du pénis ont fait part d’érections et d’éjaculations fantômes » (14, 121). Mais par-delà l’écriture moqueuse, voire irrévérencieuse, la présence fantomatique de ces membres emblématise le statut de la ruine postmoderne. Car le bras disparu revient hanter les gestes instinctifs d’Anthime de même que la mémoire est simultanément refoulée – les combattants de retour du front préfèrent « ne jamais évoquer ce qu’ils y avaient vu » (14, 109) – et présente sous la forme des « revenances » évoquées plus haut.
Sens des survivances
Quel sens, dès lors, donner à ces ruines spectrales ? On peut, nous semble-t-il, leur accorder plusieurs valeurs. Elles expriment d’abord un évidement de l’archive historique qui ne surgit que dans une évidence trouée, paradoxale, empreinte d’une mémoire lacunaire, emplie de trous noirs. Dans ces poches d’ombre flottent pourtant, nous l’avons vu, de menus restes rongés par l’érosion jusqu’à parfois n’offrir que l’image du néant. Cette nouvelle représentation des vestiges entretient un rapport particulier avec le passé. 14 met ainsi remarquablement en scène ce que Marc Augé nomme « le temps en ruines », qu’il oppose au « temps des ruines » :
La vue des ruines nous fait fugitivement pressentir l’existence d’un temps qui n’est pas celui dont parlent les manuels d’histoire ou que les restaurations cherchent à ressusciter. C’est un temps pur, non datable, absent de notre monde d’images, de simulacres et de reconstitutions, de notre monde violent dont les décombres n’ont plus le temps de devenir des ruines[20].
À la fin de son essai, le sociologue explicite cette distinction en précisant que les ruines du temps donnent encore « signe de vie » alors que « le temps en ruines » « a perdu l’histoire[21] ». Pourtant, le « presque rien » chez Echenoz n’a pas tout à fait perdu sa dimension testimoniale. Le reste echenozien élabore une nouvelle politique du deuil en imposant une résistance mélancolique qui prolonge le geste de l’écriture flaubertienne. Comme le note Dominique Rabaté, dans son analyse d’Un coeur simple,
[l]a tristesse comme la douceur mélancoliques qui émanent du récit ont leur source dans la conscience que la vie se réduit à presque rien. De l’existence précisément, il restera une somme de petits riens, colifichets, babioles qui sont les cadeaux reçus, les monuments sans grandeur des êtres chers[22].
Ce « presque rien » s’illustre par exemple dans les traces gravées dans les bois par Anthime et ses compagnons : « Arcenel gravait plus calmement son nom, Anthime seulement ses initiales accompagnées de la date du jour à la pointe du couteau, sur un arbre et sur un calvaire » (14, 47). Ces entailles rappellent la collection de graffitis qui émaillent l’oeuvre de l’écrivain (« Venez tous au séminaire de Jacques Lacan ![23] », « Mardi 6 j’étais là avec ma femme[24] », « Nacera je t’aime[25] »). On le voit, les inscriptions attestent une présence sous une forme minimale, forme « d’écriture tactile » qui évoque les graffitis photographiés par Brassaï dans les années 1930, ouvrant le temps sur l’« “inactuel” des survivances[26] ». Jean-François Hamel ne dit pas autre chose en employant l’expression « revenances de l’histoire » pour désigner un nouveau rapport à la chronologie : « [L]e temps rejette l’être hors de ses gonds et le soumet à la dissémination du devenir, mais les vivants se donnent pour tâche d’en rectifier le cours pour entendre la parole des morts et décrypter les témoignages dont le présent porte les inscriptions silencieuses[27]. » Ou, pour le dire avec Françoise Proust : « Dans la modernité, le temps revient : il se répète, il est comme en sursis. Interdit, paralysé, arrêté, il tourne en rond. Il n’est pas “vivant”, il n’est pas stricto sensu mort, il est revenant, survivant[28]. » On pense aussi au commentaire de Gilles Deleuze concernant l’expression « temps hors de ses gonds » empruntée à Hamlet :
Le temps hors de ses gonds signifie […] le temps affolé, sorti de la courbure que lui donnait un dieu, libéré de sa figure circulaire trop simple, affranchi des événements qui faisaient son contenu, renversant son rapport avec le mouvement, bref se découvrant comme forme vide et pure[29].
Comme l’indique Tiphaine Samoyault, le temps est gelé, pétrifié, immobile, en somme, « la montre est cassée »[30]. Ce dérèglement chronologique s’illustre discrètement dans le récit par de courtes prolepses propulsant le lecteur dans un temps désordonné : évolution du rôle de l’alcool au sein de l’armée, transformation des uniformes, invention de la croix de guerre, futur rôle de l’aviation : « Plus tard viendront la chasse et les bombardements, l’interdiction de survol de certaines zones à l’adversaire, l’attaque des ballons dirigeables et captifs lorsque les choses en arriveront, très bientôt, à s’aggraver sans mesure » (14, 54). De brèves notations signalent également un bouleversement de la trame temporelle, telle cette comparaison qui assimile un éclat d’obus à une « hache polie néolithique » (14, 82), plongeant la guerre dans un temps archaïque. Enfin, le texte, comme presque toujours dans l’oeuvre de Jean Echenoz, joue sur des effets d’accélération (« Les jours suivants, tout est allé assez vite à la caserne », 14, 17) ou de ralentissement, lorsque les actions répétitives des soldats s’engluent dans le poisseux de l’imparfait.
Ce « temps affolé » est aussi le temps du recyclage. On sait que les ruines ont historiquement été considérées comme un réservoir de matériaux pour de nouvelles constructions et n’ont acquis une valeur culturelle qu’au dix-huitième siècle. Echenoz, comme bien d’autres artistes de la postmodernité, montre discrètement la capacité de la réutilisation et revalorisation des restes :
Arcenel s’adonnait ainsi à des travaux de sculpture en bas-relief sur les veines de pierre blanche affleurant par endroits dans l’argile des tranchées. Bossis s’était intéressé à la fabrication de bagues, breloques, coquetiers avec l’aluminium récupéré sur les fusées d’obus des ennemis, le cuivre et le laiton sur leurs étuis de munition, la fonte sur leurs grenades-oeuf et leurs grenades-citron. Fort de son expérience civile de la chaussure, Anthime avait commencé quant à lui par tailler des lacets dans les courroies abandonnées. Puis, l’idée lui étant venue d’utiliser ces mêmes courroies comme bracelets qui, noués puis munis d’un fermoir, permettaient de fixer au poignet les montres à gousset par soudures d’anses à midi et six heures, il avait ainsi cru inventer le bracelet-montre.
14, 112
Ce n’est sans doute pas un hasard si l’objet fabriqué par Anthime est une montre, désignant en creux le rapport cyclique au temps. Echenoz est bien, nous l’avons dit, un « chiffonnier de l’histoire ». Revenons sur cette expression benjaminienne. À partir d’une lecture du « Vin des chiffonniers »[31], Benjamin fait référence à ce métier qui a fasciné la bohème parce que le chiffonnier récupérait des déchets qui avaient acquis une certaine valeur du fait des nouveaux procédés industriels. Les os des animaux étaient, par exemple, transformés en boutons ou en jetons de dominos et les chiffons (on y reviendra) en papier. Convertir l’immonde naufrage provoqué par les armes de guerre en colifichets, c’est transformer les rebuts de l’Histoire en objets bricolés par un travail d’imagination.
Si les restes signent un nouveau régime historique, ils sont aussi une manière de cultiver un affect pudique (Anthime ne donne que les initiales de son nom) ou, selon le terme de Jérôme Lindon, de proposer un regard « impassible[32] » relativement à la Grande Boucherie. Les énumérations, nous l’avons vu, en substituant la nomination à l’ekphrasis, en jouant sur une tonalité ironique, combattent les habituels stéréotypes romantiques associés à la notion de ruine : refus d’un ton épique, refus du mélodrame, refus d’une prose méditative liée à la contemplation des formes fragmentaires. L’écriture de l’Histoire se fait à rebours de toute référence patrimoniale et congédie le modèle du roman historique.
Car 14, en problématisant la question des vestiges, dépasse le simple cadre historique. Le roman propose ainsi une réflexion ontologique sur le monde contemporain. Nombreuses sont, en effet, dans l’oeuvre de l’écrivain, les descriptions d’un univers urbain où pullulent ces formes-ruines dégradées, symptômes d’une société déliquescente et vacillante. La ruine moderne (voir par exemple les tableaux d’Hubert Robert) était bucolique, monumentale, nostalgique. En un mot, mythique. La ruine postmoderne est résolument du côté des villes, des décombres, de l’humilité. Aux ruines géométrisées, idéalisées, telles qu’on peut les voir dans l’oeuvre de Poussin, succèdent des ruines prosaïques, manifestation de la déliquescence du monde et témoin d’une mémoire effritée. Revenir sur le perdu, ce qui s’est effacé, évaporé, c’est hanter mélancoliquement le passé dont il ne reste que quelques modestes traces, comme en témoignent des façades en cours de démolition :
Comme d’habitude, des flancs d’immeubles rescapés laissent quelquefois reconstituer l’anatomie de ceux qui se collèrent contre eux : grands damiers composés d’anciennes parois de cuisine, de chambre ou de salle d’eau, c’est un patchwork d’alvéoles diversement tapissés, lambrissés, carrelés et peints. De plus ou moins tièdes intimités passées par ces murs, puis expropriées, ne reste que cet écorché d’inaccessibles carrés aux couleurs déchues, exposés au froid, au vent, à la vue de tous, et que Suzy décrypte en les regardant, reconstituant des biographies d’insectes – depuis le niveau du sol on peut deviner l’ancien emplacement d’un lit à deux places ou d’un évier, d’une chasse d’eau, d’un grand cadre ovale ; parfois dans le carrelage d’une salle de bains reste enchâssé un porte-savon intact, contenant un reliquat de pluie mousseuse[33].
Les « flancs » de l’immeuble « écorché » renouent avec une tradition qui relève des Beaux-Arts en assimilant le bâtiment à un humain dépouillé de sa peau mais non de ses oripeaux (restes de tapisserie, carreaux aux couleurs déchues, ombre fantomatique de meubles disparus). Revisitant la tradition médicale des « écorchés », Jean Echenoz se livre à une petite anatomie de la mélancolie : les « vies minuscules » enfuies se reconstituent dans des « biographies d’insectes » faites de vestiges vulnérables.
Multiples sont les passages décrivant des territoires urbains hantés par cette figure de l’entropie qui confond l’imaginaire des ruines avec celle du chantier. La frontière espagnole au poste de Béhobie est particulièrement révélatrice de ce mouvement de dégradation :
Toute la zone, d’ailleurs, a déjà l’air d’un chantier. Nombre de maisons aux murs effondrés sont envahies par une végétation parasite qui a démesurément crû par leurs toits crevés. Quand les immeubles récents ne sont pas déjà murés, divers textiles et plastiques noirâtres pendouillent de leurs fenêtres. Cela sent la rouille acide et le ciel aussi est d’un ton de rouille et d’excrément, à peine distinct derrière le charbon de la pluie. Quelques usines ont l’air détruites avant même leur dépôt de bilan, cernées par des tumulus de déchets, marquées par des échafaudages déserts et badigeonnées de slogans[34].
Le lexique péjoratif (« parasite », « pendouillent », « noirâtre »), la tonalité sombre de la description (« noir », « rouille », « charbon »), le ciel baudelairien version « trash » et la comparaison scatologique sont autant d’éléments qui enferment l’Histoire dans une pensée du déclin. Fin des grands récits, selon l’expression célèbre de Jean-François Lyotard : l’époque est à l’ensevelissement du passé, comme en témoigne de manière fracassante le court texte L’occupation des sols paru en 1988. Plusieurs éléments permettent de rapprocher ce récit de 14 alors même que tout semble éloigner ces deux narrations. D’un côté, un texte résolument ancré dans le monde urbain contemporain ; de l’autre, un roman qui s’appuie sur un grand événement historique. D’un côté, une action concentrée dans un périmètre réduit ; de l’autre, un bref roman qui se déplace de la Vendée à l’est de la France. Les échelles, en somme, semblent bien différentes, opposant le drame intime d’un deuil à l’ampleur tragique d’un deuil national.
Il apparaît cependant que l’on puisse construire des ponts, des passerelles, entre l’image d’Épinal publicitaire d’une femme peinte sur le mur d’un immeuble et l’image d’Épinal de la Grande Guerre revisitée par Jean Echenoz. Les deux textes, en effet, possèdent plusieurs thématiques communes avec, en premier lieu, la question d’un sol occupé, selon les degrés de sens que l’on peut donner à ce participe passé. La boue des tranchées fait écho à celle du canal Saint-Martin, qui, une fois vidangé, laisse apparaître nombre de détritus : « multitude de chariots d’hypermarchés rivaux », « bouteilles vides », « escargots stercoraires », « carcasses de cyclomoteurs », « armatures de chaises en fer » (OS, 18)… L’espace vert qui jouxte l’immeuble où se trouve l’effigie de la femme est lui aussi soumis à la loi de la dégradation car la construction d’un immeuble devant ce bâtiment modifie considérablement les lieux : « Négligence ou manoeuvre, on laissait l’espace dépérir. Les choses vertes s’y raréfièrent au profit de résidus bruns jonchant une boue d’où saillirent des ferrailles aux arêtes menaçantes, tendues vers l’usager comme les griffes mêmes du tétanos » (OS, 11-12). Nous retrouvons là les images récurrentes analysées tout au long de notre étude. Territoire hostile, nature dénaturée qui n’est plus qu’un « petit espace vert rudimentaire, sorte de square sans accessoires qui ne consistait qu’à former le coin de la rue » (OS, 9). En somme, un non-lieu, tel qu’ont pu le caractériser Denise et Jean-Pierre Le Dantec :
L’espace vert n’est pas un lieu, mais une portion de territoire indifférencié dont les limites se décident sur l’univers abstrait du plan. Plus d’histoire : l’espace se moque du contexte comme de la tradition. Plus de culture : l’espace vert n’est qu’un green aménagé selon les seules « règles » de la commodité ; l’art s’en trouve congédié, ou réduit à « l’emballage ». […] C’est un rien végétal dévolu à la purification de l’air et à l’exercice physique[35].
Le nom même de « plante » dans L’occupation des sols disparaît derrière des expressions comme « choses vertes », « monde chlorophyllien » (OS, 12) qui métamorphosent la nature en artefact. Fin de la nature, fin du temps, fin de l’homme réduit à la condition d’« usager » (OS, 12).
Cette dépersonnalisation du monde peut se lire à plusieurs niveaux. Un niveau ethnographique, présentant les décombres comme le reflet d’une société de surproduction de masse (voir la présence des caddies rouillés dans OS, 18) vouée à la destruction. La pratique de la restauration par façade, particulièrement présente dans Je m’en vais, met également en exergue une architecture qui exhibe cyniquement les vestiges du passé tout en adaptant l’espace intérieur aux lois du marché contemporain :
Il y a d’ailleurs encore, rue du 4-Septembre, des milliers de mètres carrés de bureaux rénovés à louer et des chantiers de rénovation sous haute surveillance électronique : on vide les vieux immeubles dont on conserve les façades, colonnes et cariatides, têtes couronnées sculptées surplombant les portes cochères. On restructure les étages que l’on adapte aux lois de la bureautique pour obtenir des locaux spacieux, paysagers et doublement vitrés, afin d’y accumuler encore et toujours plus de capital[36].
Jean Echenoz place la ville contemporaine sous le signe de la dématérialisation et de la déterritorialisation. Constructions et destructions, disparitions et surgissements sont interchangeables et dessinent des frontières mouvantes, des zones incertaines, frangées, diluées, le paysage ne se décidant pas entre « l’état de friche et celui de chantier[37] ». L’entre-deux constitue une topique de l’écriture echenozienne, exprimant moins le goût pour le paradoxe coquet que la volonté de désigner l’instabilité du monde contemporain et sa propension à générer du réversible.
Cette lecture sociologique ne doit pas masquer une dimension plus spirituelle. C’est là le second et le plus important niveau de lecture du texte. Bruno Blanckeman a montré la puissance de l’archétype des vanités dans les textes echenoziens : « [A]près la vanité urbaine dans L’occupation des sols et lunaire dans Nous trois, les neiges du grand Nord constituent une vanité polaire aux espaces jonchés de débris », écrit-il dans Les fictions singulières[38]. Le détritus est dès lors moins un paradigme commandant un cadre référentiel qu’un modèle ontologique réfléchissant l’effacement des consciences. Excédant l’exercice de remémoration propre à la pensée « ruiniste », le périmé, l’ordure, affichent une dimension crépusculaire. La glyptothèque dans l’oeuvre d’Echenoz est à ce sujet éloquente, décrivant dans Au piano[39] ou dans « Vingt femmes dans le jardin du Luxembourg et dans le sens des aiguilles d’une montre »[40], des statues sans bras, comme un écho au membre fantôme d’Anthime dans 14.
Car il s’agit bien d’un véritable jeu d’échos qui résonnent sourdement dans l’oeuvre d’Echenoz. Certains motifs « riment », d’un roman à l’autre, comme pour déjouer l’éclatement mémoriel et retisser du lien dans un monde menacé par la dispersion. Cette pratique intratextuelle se métaphorise une fois encore dans l’image du chiffonnier-historien, cet homme qui récupérait les chiffons pour en faire du papier. De menus détails témoignent de ce travail de récupération dont nous donnerons quelques exemples à partir de 14. Ainsi, l’amputation d’Anthime fait-elle songer au « Concerto pour la main gauche » de Ravel évoqué dans la biofiction que l’écrivain consacre à ce musicien[41]. La guerre de 14 apparaissait du reste en oblique dans ce récit, double inversé et souriant de 14. De même, la présence relativement centrale d’une usine de chaussures (Anthime y travaille comme comptable) apparaît comme un clin d’oeil à la fabrique Bata où travaille Zátopek dans Courir [42]. Les « pigeons globe-trotteurs promus au rang de messagers » (14, 92) ne sont pas sans rappeler la pigeonne au coeur du texte Des éclairs[43]. Enfin, les chiens, animaux récurrents dans l’oeuvre echenozienne, s’incarnent comiquement dans les bêtes croisées par Anthime (14, 86). Ces rémanences ténues semblent là pour conjurer la menace de disparition que porte en elle la ruine postmoderne. Dans un même ordre d’idées, on notera l’extrême cohérence de 14 qui organise un ensemble de correspondances plus ou moins clandestines : la campagne agraire, bucolique, voire virgilienne, de la Vendée contraste fortement avec les champs de bataille ; les « chars à boeufs » (14, 9) seront remplacés par des chars de guerre, les moissons céréalières ne seront plus la marque d’une agriculture opulente mais une « meule de foin providentiel » (14, 47) constituera un lit de fortune apprécié par des soldats partis pour une autre campagne (de guerre).
Le roman met en place des indices que le lecteur interprète rétrospectivement comme des signes de préfiguration, telle cette douleur au bras droit d’Anthime calmée par une chevalière magnétique (14, 13). Magnétique, tout est là. La force d’attraction du texte constitue de cette manière une loi centripète qui annule le mouvement en lignes brisées des vestiges. Notons que cette puissance aimantée, certes souterraine, permet de rendre secrètement hommage aux morts de la Grande Guerre, comme l’indique le nom même du héros trouvé sur un monument aux morts[44].
Jean Echenoz n’est pas le seul écrivain à faire de la ruine un motif important dans son oeuvre. D’autres écrivains relaient cet imaginaire en prenant en compte la question sociale et politique des friches industrielles, des territoires de l’entre-deux que sont les banlieues, des espaces périphériques oubliés par l’Histoire. Ils obéissent en cela à la proposition de Remy de Gourmont qui écrivait qu’il fallait « créer de l’histoire avec les détritus mêmes de l’histoire[45] ».
Parties annexes
Note biographique
Agrégée de lettres modernes, Christine Jérusalem est maître de conférences à l’ESPE / Université Lyon I. Spécialiste de littérature narrative contemporaine, elle a écrit plusieurs essais sur l’oeuvre de Jean Echenoz (Jean Echenoz : géographies du vide, Presses de l’Université de Saint-Étienne, 2005) et publié de nombreux articles consacrés aux écrivains de l’immédiat contemporain (François Bon, Annie Ernaux, Patrick Modiano, Pierre Bergougnoux, Pascal Quignard, Pierre Michon, Jacques Roubaud, Tanguy Viel, Marie Ndiaye, San-Antonio). Elle a codirigé un colloque sur Echenoz (Jean Echenoz : « une tentative modeste de description du monde », P. de l’Université de Saint-Étienne 2006), ainsi que « Le roman contemporain de la famille » (La Revue des lettres modernes, « Écritures contemporaines », no 12, 2015). Ses centres de recherche portent sur les rapports entre littérature et media (photographie, peinture, cinéma).
Notes
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[1]
Jean Starobinski, L’Invention de la liberté. 1700-1789, Genève / Paris, Skira, 1987 [1964].
-
[2]
Paris, Minuit, 2012. Désormais abrégé 14 suivi du numéro de la page.
-
[3]
Michel Makarius, Ruines. Représentations dans l’art de la Renaissance à nos jours, Paris, Flammarion, « Champs. Arts », 2011 [2004], p. 237.
-
[4]
Paris, Minuit, 1997, p. 90-91.
-
[5]
L’occupation des sols, Paris, Minuit, 1988, p. 18. Désormais abrégé OS suivi du numéro de la page.
-
[6]
Au piano, Paris, Minuit, 2002, p. 70.
-
[7]
Les grandes blondes, Paris, Minuit, 1995, p. 34.
-
[8]
Paris, Minuit, 1979, p. 227.
-
[9]
« L’Entretien, Jean Echenoz », entretien de Philippe Delaroche et Baptiste Liger avec Jean Echenoz, Lire, no 409, octobre 2012, p. 74.
-
[10]
Georges Didi-Huberman, Ninfa Moderna. Essai sur le drapé tombé, Paris, Gallimard, « Art et artistes », 2002, p. 46.
-
[11]
Walter Benjamin, Paris, capitale du xixe siècle. Le livre des passages, trad. par Jean Lacoste, Paris, éd. du Cerf, 1989.
-
[12]
Michel Makarius, op. cit.
-
[13]
Antoine Compagnon, Les chiffonniers de Paris, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des Histoires », 2017.
-
[14]
Georges Didi-Huberman, op. cit., p. 55.
-
[15]
Frédéric Rousseau, 14-18. Penser le patriotisme, Paris, Gallimard, « Folio. Histoire inédit », 2018, p. 19 et p. 42.
-
[16]
« L’Entretien, Jean Echenoz », loc. cit., p. 74.
-
[17]
Pierre Schoentjes, « 14 de Jean Echenoz. Un dernier compte à régler avec la Grande Guerre », Critique, no 786, novembre 2012, p. 969.
-
[18]
« L’éducation des regards », entretien d’Emmanuel Laugier et Frédéric Pomier avec Jean Echenoz, Le Matricule des anges, no 70, février 2006, p. 20.
-
[19]
« L’Entretien, Jean Echenoz », loc. cit., p. 74.
-
[20]
Marc Augé, Le temps en ruines, Paris, Galilée, « Lignes fictives », 2003, p. 9.
-
[21]
Ibid., p. 131.
-
[22]
Dominique Rabaté, Le chaudron fêlé. Écarts de la littérature, Paris, Corti, « Les essais », 2006, p. 281.
-
[23]
Jean Echenoz, Jérôme Lindon, Paris, Minuit, 2001, p. 45.
-
[24]
Jean Echenoz, Cherokee, Paris, Minuit, 1983, p. 195.
-
[25]
Jean Echenoz, Lac, Paris, Minuit, 1989, p. 38.
-
[26]
Georges Didi-Huberman, op. cit., p. 119.
-
[27]
Jean-François Hamel, Revenances de l’histoire. Répétition, narrativité, modernité, Paris, Minuit, « Paradoxe », 2006, p. 16.
-
[28]
Françoise Proust, L’histoire à contretemps. Le temps historique chez Walter Benjamin, Paris, éd. du Cerf, « Passages », 1994, p. 48-49.
-
[29]
Gilles Deleuze, Différence et répétition, Paris, Presses universitaires de France, 1968, p. 119-120.
-
[30]
Tiphaine Samoyault, La montre cassée, Lagrasse, Verdier, « Chaoïd », 2004.
-
[31]
Charles Baudelaire, « Le vin des chiffonniers », Les fleurs du mal, dans Oeuvres complètes, publiées par Claude Pichois, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », t. I, 1975, p. 106.
-
[32]
Qualificatif employé en 1989 dans une publicité des éditions de Minuit afin de promouvoir quatre écrivains de cette maison – Patrick Deville, Jean Echenoz, Christian Oster, Jean-Philippe Toussaint – sous la bannière de leurs « romans impassibles » (voir La Quinzaine littéraire, no 532, 16-31 mai 1989, p. 9).
-
[33]
Jean Echenoz, Lac, op. cit., p. 160-161.
-
[34]
Jean Echenoz, Je m’en vais, Paris, Minuit, 1999, p. 205-206. Nous soulignons.
-
[35]
Denise et Jean-Pierre Le Dantec, Le roman des jardins de France. Leur histoire, Paris, Plon, 1987, p. 261, cité par Alain Roger, Court traité du paysage, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des sciences humaines », 1997, p. 134-135.
-
[36]
Jean Echenoz, Je m’en vais, op. cit., p. 158.
-
[37]
Jean Echenoz, Les grandes blondes, op. cit., p. 101.
-
[38]
Bruno Blanckeman, Les fictions singulières. Étude sur le roman français contemporain, Paris, Prétexte, « Critique », 2002, p. 64.
-
[39]
Paris, Minuit, 2003.
-
[40]
« Vingt femmes dans le jardin du Luxembourg et dans le sens des aiguilles d’une montre » (2002), dans Caprice de la reine, Paris, Minuit, 2014.
-
[41]
Ravel, Paris, Minuit, 2006.
-
[42]
Paris, Minuit, 2008.
-
[43]
Paris, Minuit, 2010.
-
[44]
« L’Entretien, Jean Echenoz », loc. cit., p. 74.
-
[45]
Cité en exergue par Walter Benjamin, op. cit., p. 559.