Recensions

PELLY, David F. 2000 Sacred Hunt. A Portrait of the Relationship Between Seals and Inuit, Seattle, University of Washington Press, xv + 126 p. [Notice]

  • Paul Charest

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  • Paul Charest
    Département d’anthropologie
    Université Laval
    Québec, Canada

Je suis habituellement agacé par les affirmations à l’emporte-pièce que tout est sacré chez les Autochtones. C’est, selon moi, une autre façon — un peu plus subtile peut-être — de les mettre à part de nous et de notre rationalité occidentale et moderne. Je dois reconnaître, toutefois, que l’auteur de ce petit volume n’abuse pas dans son texte de ce genre d’affirmations. Il ne fait directement référence au sacré qu’à la fin de son livre dans un court passage de trois petits paragraphes sous l’intitulé «A sacred link» (p. 106). Il souligne alors, qu’à la différence des Européens, «la croyance traditionnelle inuit est que tous les êtres ont une âme» et «que le succès à la chasse était le résultat du respect envers l’âme de leur proie, de l’adoption de l’attitude appropriée envers le phoque» (p. 106). Par contre, tout le premier chapitre d’une vingtaine de pages porte sur le «Respect envers le phoque» et traite, à travers des citations de mythes et de légendes inuit, de la création des phoques, de la transformation des phoques en humains — le plus souvent des femmes — et des rituels et tabous entourant leur chasse, y compris l’intervention du chaman. Disons-le tout de de suite, ce livre n’est pas un ouvrage scientifique relevant de l’anthropologie, de la géographie, de l’histoire ou de quelque autre discipline académique, mais plutôt une oeuvre de vulgarisation ou même une production artistique en raison des nombreuses illustrations d’oeuvres d’art inuit (sculptures, gravures, dessins) et des nombreuse photographies de qualité exceptionnelle qui occupent environ le tiers des pages. L’auteur situe sa démarche dans la mouvance de l’intérêt actuel pour la connaissance traditionnelle «des peuples dont les vies dépendaient de cette connaissance» (p. xiii). Son matériel «de recherche» été recueilli auprès de 31 informateurs et cinq informatrices résidant principalement dans le Nunavut (28 personnes), mais aussi au Nunavik (8 personnes), dans les Territoires du Nord-Ouest et au Groenland. Pendant les six années de la préparation de son livre il a résidé à Cambridge Bay mais, de façon étonnante, seulement deux informateurs sont originaires de cette localité, les plus nombreux étant de Sanikiluaq (8 personnes) et d’Igloolik (5 personnes). Comme ses informateurs proviennent d’une quinzaine de localités et de quatre régions différentes, l’auteur a parcouru une grande partie de l’Arctique dans sa quête de témoignages oraux de personnes âgées, dont certaines auraient plus de cent ans aujourd’hui, si on se fie aux dates de naissance accompagnant les références à chaque citation d’informateur. Au total, on dénombre une cinquantaine de ces citations, allant d’une seule phrase à deux pages, et représenant environ le tiers du contenu du livre. La partie centrale de l’ouvrage (pp. 33-105) est consacrée à la chasse au phoque proprement dite en fonction de trois saisons: l’hiver sur la banquise; le printemps dans les espaces d’eau libre entre les glaces; et l’été en kayak (au Groenland). La chasse au trou de respiration (aglu) est nettement la mieux documentée par la présentation d’une journée de chasse à partir du départ à l’aube jusqu’au retour à la nuit tombante, entrecoupée d’informations sur les connaissances des comportements du phoque et du rituel entourant la première capture par un jeune chasseur. D’autres données sont aussi fournies au sujet du partage des prises et de certaines pratiques, tels que l’abreuvement par la femme du chasseur du phoque rapporté et les tabous à respecter pour avoir du succès à la chasse. Le passage sur la chasse de printemps insiste davantage sur les différentes techniques (v.g.,auriaq, avataq) utilisées à cette période de l’année et l’apprentissage de celles-ci par le …