Paysage n°1Paysage culturel de l’art numérique[Notice]

  • Sophie Morand

…plus d’informations

  • Sophie Morand
    Université de Montréal
    Université Paris 3

L’association des concepts de modernité et de paysage culturel offre un large champ de réflexion, chacun renvoyant à plusieurs définitions possibles, selon les disciplines, les objets d’études ou l’approche méthodologique choisie. Nous proposons ici d’interroger ces deux concepts dans leur définition, leur utilisation, leur compréhension mais aussi leur interprétation et leur association possible à partir de Paysage n°1, une oeuvre d’art médiatique fondée sur les technologies numériques et réalisée par Luc Courchesne en 1997. Dans un premier temps, nous aborderons la notion de « paysage culturel » telle que formulée et définie par l’UNESCO. Nous en discuterons alors la nécessité et la portée avant d’en aborder les limites. Cela posé, nous pourrons dès lors élargir cette notion au champ de l’art, ce qui nous permettra également d’évoquer celle de modernité sous ses différents aspects : en tant que période historique, en tant que mouvement artistique et en tant qu’incarnation de la rupture. Enfin, dans le cadre de la dernière section, nous proposerons d’évaluer l’impact du numérique dans le système des beaux-arts et de voir comment la création numérique et les spécificités qui lui sont liées en viennent à dessiner un nouveau « paysage institutionnel » de l’art actuel. Adoptée en 1992 par la Convention pour le patrimoine culturel de l’UNESCO, la terminologie « paysage culturel » renvoie, pour l’institution, aux « oeuvres conjuguées de l’homme et de la nature », c’est-à dire des monuments, des sites, des formations géologiques ou d’autres types d’environnements qui font état d’une interaction effective ou symbolique entre l’homme et la nature. L’UNESCO réunit sous cette appellation trois catégories de paysages : ceux conçus et créés intentionnellement par l’homme, comme les parcs ou les jardins ; ceux considérés comme « évolutifs » et ceux considérés comme « associatifs ». Pour ce qui nous concerne, nous nous intéresserons plus particulièrement à la première catégorie, dans la mesure où l’un des principaux éléments constitutifs de l’oeuvre que nous proposons à l’étude est un parc, le parc Mont-Royal (Montréal). Conçu par Frederick Law Olmsted (célèbre pour être également l’architecte du Central Park de New-York) et inauguré en 1876, le parc Mont-Royal se situe en plein coeur de la ville de Montréal, sur la colline du Mont-Royal, qui s’est formée il y a quelque 125 millions d’années à la suite d’une solidification souterraine de magma et d’une érosion des roches sédimentaires créée par les glaciers. Parfait exemple de « paysage culturel », tel qu’entendu par l’UNESCO, le parc Mont-Royal est donc le fruit d’une interaction entre un phénomène naturel et une action humaine. Pour autant, celui-ci est totalement absent des listes de l’institution. Il faut rappeler en effet que celle-ci a pour principaux mandats la préservation et la conservation de sites et de biens considérés comme « universels et exceptionnels », sur avis d’un Comité. Ce dernier a pour rôle d’étudier les demandes d’inscription sur les listes de biens patrimoniaux à conserver déposées par les pays du monde entier et d’évaluer les qualités universelles et exceptionnelles du site en question. Le « candidat » doit alors remplir en partie ou en totalité un certain nombre de critères : De plus, la catégorie « paysage culturel » qui venait palier à la dualité entre « paysages naturels » d’un côté et « oeuvres humaines » de l’autre n’a été adoptée qu’en 1992 par la Convention. En conséquence, seuls un peu plus d’une soixantaine d’environnements sont actuellement rangés sous cette catégorie, tandis que certains sites comme le Parc du Grand Canyon ou le Jardin de Versailles sont respectivement identifiés sous les deux précédentes catégories bien que ceux-ci pourraient tout aussi bien …

Parties annexes