Recensions

Amy J. Ransom, Hockey, PQ. Canada’s Game in Quebec’s Popular Culture, Toronto, University of Toronto Press, 2014[Notice]

  • Tony Patoine

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  • Tony Patoine
    Cégep du Vieux-Montréal

L’ouvrage Hockey PQ : Canada’s Game in Quebec’s Popular Culture que nous offre la « québéciste » Amy J. Ransom nous met en face des innombrables perceptions de soi et de l’Autre qu’entretiennent les nations canadienne et québécoise lorsqu’il est question de glace, de patins, de bâtons et de rondelles. C’est ainsi que Hockey PQ expose de multiples jeux de miroirs. Comment les Québécois se voient-ils eux-mêmes par le truchement de références culturelles reliées au hockey (films, chansons, etc.) ? Puis, par les mêmes canaux, de quelle manière le hockey forge-t-il leur opinion du Rest of Canada (ROC) ? De leur côté, quel regard les Canadiens anglais posent-ils sur ces mêmes Québécois à travers tout ce que le hockey peut leur permettre comme rapprochements avec l’autre solitude ? Si le hockey « unit » le Canada à bien des égards (Hockey Night in Canada/Le Hockey du samedi soir, la Série du siècle de 1972, les Jeux olympiques, etc.), il ne permet pas moins d’en souligner des différences et des tensions identitaires importantes. Tout au long de l’ouvrage, Ransom étudiera principalement comment les discours (à forte teneur en testostérone) qui entourent le hockey nous rappellent constamment « qui nous sommes » et « qui nous ne sommes pas », et ce, autant du côté de l’identité nationale et collective que du côté de l’identité de genre. À titre d’exemple de ce qui attend le lecteur, Ransom commence son analyse dès l’introduction en disséquant la comédie à succès Bon Cop, Bad Cop, où on appuie plutôt fort sur les stéréotypes. C’est ainsi que Ransom relève d’emblée le message fédéraliste du film et les réponses identitaires – à la fois nationales et masculines – qu’il donne, en mettant en vedette Patrick Huard, en policier québécois rebelle, immature, bon vivant et sexy dans sa virilité, et Colm Feore, dans le rôle du policier anglais bythe book, sérieux, classy, urbain et quelque peu émasculé. Les deux doivent bien sûr faire la paire, bien contre leur gré, pour sauver le hockey, le sport national canadien… Révisant à peu près tout ce qui s’est dit de pertinent académiquement, sociologiquement et culturellement sur le hockey au Québec et au Canada dans son ouvrage, Ransom rejoint l’avis de plusieurs commentateurs selon lequel « pour le meilleur ou pour le pire, le hockey représente un, sinon le, trait culturel dominant de qui est “canadien” » (p. 6). Mais elle soulève du même coup que, la plupart du temps, lorsque ces discours et ces textes parlent du Canada, ils parlent en fait du Canada anglais. Implicitement, le Québec – le fait français – en est presque toujours séparé, avant la lettre. Ransom explique ce biais anglo-canadien par l’ignorance de ce que disent les Québécois sur le même sujet. C’est en partie pourquoi, par son ouvrage en anglais, elle vise à rejoindre les deux solitudes en faisant mieux connaître aux anglophones du ROC comment les Québécois, individuellement et collectivement, se perçoivent à travers leur rapport au hockey. Le coeur de l’ouvrage est donc divisé en cinq chapitres, où Ransom entreprend une impressionnante étude culturelle québécoise du hockey, dont le style – images en moins – rappelle un peu celui utilisé par Benoît Melançon dans son très beau livre Les yeux de Maurice Richard (Fides, 2006). Inspirée par la théorie de l’historien français Pierre Nora, Ransom traitera ainsi au chapitre premier des Canadiens de Montréal comme lieu de mémoire national au Québec. « Nos Glorieux », avec en avant-plan le « mythique » Maurice « Rocket » Richard, sont ainsi dépeints comme « lieux où persiste …