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Pour l’historien Christian Morissonneau, ces « filles du fleuve Saint-Laurent » sont précisément les îles de la région de Berthier et de Sorel, entre Montréal et Trois-Rivières, à l’endroit où le fleuve s’élargit pour former un majestueux delta. L’expression sert à décrire un archipel méconnu, même des Québécois, dont l’histoire remonte pourtant au xviie siècle. Les noms de ces îles demeurent évocateurs : l’Île plate, l’Île du milieu, l’Île aux ours, l’Île D’Alençon, l’Île du Moine, l’Île aux Fantômes. Certaines sont habitées, parfois depuis le xviie siècle. On y accède par un pont, un traversier, autrefois par le pont de glace ou en chaland (chap. 7). Jacques Cartier y voyait même un labyrinthe d’îles (p. 61).

L’auteur décrit avec précision l’histoire particulière et parfois inédite de plusieurs de ces îles : leur peuplement initial, les migrations, la vie quotidienne, certains événements marquants comme les inondations de 1865, 1896 et 1971, ou encore les embâcles tout aussi dévastateurs (p. 170) ; on y présente des monuments et des lieux historiques, comme la gigantesque Église de la Visitation de l’Île Dupas (p. 92).

Ce livre original témoigne de quelque chose de fascinant : on y découvre qu’une vie intense se déroulait sur ces îles, à petite échelle, au cours des quatre siè cles passés, ce qui est exceptionnel dans un contexte nord-américain. De plus, on comprend qu’il s’agit aujourd’hui encore d’un endroit privilégié, non seulement pour la chasse, la pêche et la motoneige, mais simplement pour l’observation de la nature et de la vie sauvage. Plusieurs espèces animales sont ici présentées : la bernache du Canada, l’oie des neiges, le canard barboteur, etc. (p. 47). En outre, ce beau livre de Christian Morissonneau contient une centaine de photographies (pour la plupart de Pierre Phillipe Brunet et de l’auteur), toutes contemporaines et en couleurs, qui illustrent pleinement la beauté de ces lieux. Malheureusement, les sources et les références bibliographiques ne sont pas toujours précisées au fil du texte (p. 85). Les amateurs de plein air et d’histoire régionale apprécieront particulièrement cet ouvrage.