Notes bibliographiques

AJZENSTAT, Janet, Paul ROMNEY, Ian GENTLES et William D. GAIRDNER, dir., Canada’s Founding Debates (Toronto, University of Toronto Press, 2003), 502 p.[Notice]

  • Michel Ducharme

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  • Michel Ducharme
    Institut d’études canadiennes
    Université McGill

En publiant cet ouvrage, Ajzenstat, Romney, Gentles et Gairdner ont voulu démontrer que la création du Canada n’a pas été uniquement le résultat d’une entente pragmatique entre divers politiciens rongés par l’ambition personnelle. Les parlementaires coloniaux, qui ont débattu du projet, étaient aussi des hommes de principes. Dans ces conditions, leur oeuvre prend les traits d’un projet intellectuel. Pour mettre en lumière à la fois la vigueur des débats qui ont mené à la Confédération et les principes qui ont été discutés, Ajzenstat et al. ont réuni des extraits importants et représentatifs des discussions tenues dans les colonies britanniques au sujet de leur adhésion à la nouvelle fédération. Selon les directeurs du recueil, la lecture des débats autour du projet d’union permet de saisir à la fois la diversité des principes défendus ainsi que leur importance dans le processus de fondation du pays. La perspective de l’ouvrage est clairement pancanadienne. Les extraits proviennent des sept colonies ayant considéré la possibilité de s’unir en une fédération entre 1865 et 1873 : Terre-Neuve, Île-du-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Canada-Uni, colonie de la Rivière Rouge, Colombie-Britannique. De plus, les auteurs situent la fin du processus de fondation non pas avec la naissance du Dominion en 1867, mais au moment où le Canada acquiert sa taille presque définitive en 1873. D’un point de vue documentaire, l’ouvrage aide à mieux comprendre les fondements du Canada en ce qu’il permet aux Canadiens de prendre facilement connaissance de l’ensemble des débats en consultant un seul et même volume. Toutefois, l’ouvrage, qui s’adresse à un large public, semble participer d’une préoccupation plus civique qu’historique. Ce qui est en jeu, ce n’est pas tant la connaissance que l’unité nationale. La lecture des extraits, et plus encore leur agencement, laisse aux lecteurs l’impression que le Canada peut encore exister malgré la diversité culturelle et les particularités régionales étant donné que la Confédération s’est réalisée en tenant compte de ces difficultés. Les directeurs ne cachent d’ailleurs pas leurs prétentions puisqu’ils suggèrent souvent que le passé offre aux Canadiens des solutions à leur crise existentielle actuelle (p. 200, 229, 358). Soulignons que cette préoccupation « civique » ne mine en rien la valeur de l’ouvrage puisqu’il s’agit d’un recueil de sources. Or, les extraits choisis sont intéressants et de bonne qualité. Sans compter que rien n’oblige le lecteur à lire les extraits dans l’ordre proposé. Il peut choisir de les lire par auteurs ou par province. Néanmoins, d’un point de vue intellectuel, la préoccupation civique des directeurs rend le recueil plus fascinant parce qu’il nous renseigne à la fois sur les principes des politiciens canadiens du xixe siècle et sur ceux de certains intellectuels canadiens contemporains. Le recueil possède toutefois une limite importante. Puisque les auteurs voulaient démontrer la diversité des visions d’avenir articulées au cours des débats, ils ont tenu à ce que tous les points de vue soient présentés de manière équitable au sein du recueil. Si l’objectif est fort louable, le résultat est particulièrement étrange. D’abord, il devient rapidement évident que tout a été dit entre 1864 et 1873 concernant le nouveau pays. Cependant, toutes ces interventions n’ont pas eu le même impact sur l’évolution canadienne : certaines ont eu plus d’influence que d’autres. Malheureusement, les directeurs ne donnent aucune indication quant à l’importance de chaque intervention. Ensuite, les participants aux débats sont mal identifiés. Si les directeurs ont mis en marge des mini-biographies de certains intervenants, il est fastidieux de les rechercher dans le volume lorsqu’on en ressent le besoin. Bref, le lecteur n’a pas assez d’informations pour juger par lui-même du rang des intervenants, de leur fortune personnelle, …