Comptes rendus

ROCHER, Marie-Claude et Marc PELCHAT, dir., Le patrimoine des minorités religieuses du Québec. Richesse et vulnérabilité (Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, coll. « Patrimoine en mouvement », 2006), 273 p.[Notice]

  • Lucia Ferretti

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  • Lucia Ferretti
    Département des sciences humaines, Université du Québec à Trois-Rivières

Cet ouvrage est issu d’un colloque organisé en 2006 dans le cadre du congrès annuel de l’ACFAS. À l’origine, la vingtaine de présentations étaient complétées de trois événements : une exposition d’éléments du patrimoine matériel de quelques minorités religieuses établies depuis longtemps au Québec ; un accrochage au Musée McCord d’oeuvres du peintre protestant d’origine suisse André Biéler, qui a passé une partie de sa jeunesse à Montréal et à l’Île d’Orléans avant de s’installer en Ontario ; et un documentaire sur ce peintre réalisé par son petit-fils. La quatrième partie de l’ouvrage rend un pâle écho de tout cela (quoique en principe un DVD du film accompagne le livre, mais pas l’exemplaire expédié à la RHAF). Cette partie contient aussi, en revanche, la remarquable allocution de clôture préparée par Daniel Turp (lui-même converti à la foi presbytérienne, si mon souvenir est bon) à titre de vice-président de la Commission sur la culture du Gouvernement du Québec : il a présenté les grandes lignes du rapport de celle-ci sur l’avenir du patrimoine religieux au Québec. Ceux qui se sont intéressés aux travaux de la Commission savent le sérieux et l’ouverture avec lesquels les commissaires ont reçu les personnes et groupes de tous horizons confessionnels et non confessionnels désireux de s’exprimer sur la question. Paru en 2006, Croire au patrimoine religieux du Québec est un document d’une qualité exceptionnelle, susceptible de donner confiance à tous ceux qui, au Québec (et on s’est aperçu lors des audiences publiques qu’ils sont très très nombreux), croient à l’importance de la préservation et de la mise en valeur du patrimoine religieux à la fois pour des raisons identitaires – religieuses et nationales – très affirmées, et pour d’autres qui relèvent de l’art et du tourisme. Il y a eu dans ces audiences et il y a dans ce Rapport l’expression d’un peuple qui se révèle profondément engagé envers son patrimoine religieux, dans sa diversité et son unicité, engagement dont on avait déjà pu prendre la mesure depuis une quinzaine d’années par les succès de la Fondation du patrimoine religieux du Québec. Il faut souhaiter que le Gouvernement du Québec s’engage fermement à suivre les recommandations de sa Commission de la culture et faire pression pour l’y pousser. Comme dans tout colloque, les contributions ont été inégales. Dans la première partie de l’ouvrage sont rassemblées celles destinées à faire connaître l’histoire de quelques-unes des minorités religieuses du Québec. Certains des participants ont tendance à prétendre que la mémoire historique québécoise aurait « occulté » la contribution des minorités religieuses et présenté le Québec comme une société homogène francophone et catholique. Ce reproche, à mon avis, n’est pertinent que dans le cas des Canadiens français protestants. Pour le reste, même les historiens les plus nationalistes des périodes antérieures, tel Lionel Groulx parmi d’autres, n’ont jamais prétendu que le Québec était une société homogène francophone et catholique, ils ont toujours tenu compte de la présence des anglo-protestants et des juifs, qui ont eu depuis la fin du xviiie siècle un rôle dominant dans l’activité économique de la métropole, du Québec et du Canada tout entier et une influence significative sur la vie politique. Mais il est un peu normal, pour des raisons d’identité, de langue et d’accès aux sources, que les membres des confessions religieuses minoritaires soient les premiers intéressés à rappeler la contribution proprement religieuse de leurs coreligionnaires à l’histoire du Québec. Pourtant, très peu l’ont fait jusqu’à présent. Cela est en train de changer, surtout pour ce qui concerne les protestants francophones, ce dont témoignent bien la table ronde autour de Chiniquy ainsi que …