Comptes rendus

STEFANESCU, Alexandre, dir., René Lévesque. Mythes et réalités (Montréal, VLB éditeur, coll. « Études québécoises », 2008), 249 p.[Notice]

  • Charles-Philippe Courtois

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  • Charles-Philippe Courtois
    Collège militaire royal de Saint-Jean

Les actes du colloque René Lévesque, Mythes et réalités organisé par la Fondation René Lévesque en collaboration avec l’Université du Québec à Montréal ne souffrent pas des écueils qui guettent souvent les ouvrages collectifs, soit le caractère trop disparate ou la qualité trop inégale des textes. Seule exception : la courte contribution de Lysiane Gagnon n’est qu’une opinion qui se voudrait critique du mythe Lévesque qui serait à dégonfler puisque le référendum de 1980 a échoué, mais le texte est très superficiel. Dans l’ensemble, au contraire, le public trouvera rassemblées dans ce recueil une bonne douzaine d’études intéressantes abordant diverses facettes d’un des hommes politiques les plus marquants du xxe siècle québécois. En outre, l’ouvrage est accompagné de l’enregistrement sur CD d’un discours prononcé par René Lévesque au Collège Sainte-Marie à Montréal le 9 mai 1964, durant la « Semaine du nationalisme ». Trois thèmes furent soumis aux participants : les influences et l’héritage ; un social-démocrate ; la question nationale. Serge Denis, Marc Comby et Alain Noël s’attardent à la question des rapports de René Lévesque avec la gauche. Serge Denis en profite pour exposer des analyses développées ailleurs sur l’histoire de la social-démocratie. Pour lui, un parti social-démocrate présente un programme socialiste, non révolutionnaire et est formé par des organisations syndicales, à l’exemple du Labour Party. Un petit nombre de nations en Occident n’ont pas connu ce phénomène, dont le Québec. Le PQ n’est donc pas un parti social-démocrate au sens strict. Seulement, dans la conjoncture où il vit le jour, il fut le parti le plus proche du peuple québécois, notamment sur le plan national qui lui permit de déclasser toutes les organisations socialistes qui courtisèrent cet électorat, tout en se montrant actif sur le terrain des mesures sociales. Jean-Jacques Simard présente René Lévesque comme un libéral nationaliste et un social-démocrate populiste : proche du peuple, populiste avant tout dans le bon sens du terme, Lévesque se démarque par son charisme et sa capacité de porter « l’orgueil des humbles ». Le texte est sans doute plus élogieux qu’éclairant, car il accole surtout beaucoup d’étiquettes à l’action politique de René Lévesque plus qu’il ne l’analyse de façon systématique. Néanmoins, l’affirmation selon laquelle René Lévesque n’était pas « socialiste » ou « de gauche » au sens européen […] mais un libéral à l’américaine » (p. 30), semble juste. Louis Balthazar s’interroge bien sûr sur l’américanité du chef souverainiste. L’exercice pourrait paraître convenu. Sans apporter du neuf, Balthazar offre une analyse nuancée, montrant le réel attachement de René Lévesque à la nord-américanité, son sentiment maintes fois exprimé d’une plus grande proximité avec les États-Unis qu’avec l’Europe, sa grande admiration pour Roosevelt, mais aussi l’existence, simultanément, chez lui, d’une conscience de ce qui distinguait la culture des États-Unis et celle du Québec (par exemple la place qu’occupe depuis longtemps la violence chez nos voisins du Sud). L’évolution du débat sur l’américanité au Québec après 2003 et la guerre d’Irak se fait sans doute ressentir… Pierre Nepveu étudie le rapport entre Lévesque et la littérature, qui, on le sait, lui était chère. Nepveu rappelle des faits connus, comme l’importance des lettres classiques et françaises dans la formation de Lévesque (lesquelles restituent la richesse du personnage qu’on ne saurait réduire à l’américanité). Toutefois cette contribution déçoit en ce qu’elle ne répond pas à la problématique annoncée : le rapport entre la littérature et la question nationale (Nepveu dit « l’espoir »), qui finalement n’est qu’effleuré. Pierre Anctil analyse les rapports entre René Lévesque et la communauté juive. Anctil y voit la prémisse des rapports que le mouvement nationaliste entretiendra avec …