Résumés
Résumé
En février 1706, un numéro du Mercure galant propose à ses lecteurs le récit d’un « Accommodement fait entre les Iroquois et les Outaouais en 1705 ». À l’occasion de cette négociation, les propos sont rédigés, comme l’écrit le rédacteur du Mercure galant, en « style sauvage ». La manière dont ce style est caractérisé et la fonction qu’il occupe dans ce récit invitent à s’interroger sur l’imaginaire colonial de la presse d’actualité. Cet article analyse ainsi le rôle essentiel que joue le temps historique court de la mode et du moment présent dans la construction de la figure de l’Autre.
Abstract
The February 1706 issue of the Mercure galant offered its readers the account of an agreement made between the Iroquois and the Ottawa in 1705. Given the context in which this negotiation was received, the Mercure’s journalist decides to render each party’s remarks, as he writes, in « style sauvage ». This style’s characterization and the function it plays within the article’s overarching narrative invite us to question received notions on the colonial imaginary of Ancien Régime news periodicals. Moreover, this article rethinks the essential role played by mondain fashions’ short historical time and the present moment in the construction of the figure of the Other.
Corps de l’article
En février 1706, un numéro du Mercure galant propose à ses lecteurs le récit d’un « Accommodement fait entre les Iroquois et les Outaouais en 1705[1] ». On y apprend d’abord que cet accommodement est intervenu à Montréal, en présence du gouverneur général de la Nouvelle-France, le marquis de Vaudreuil, et de représentants des nations iroquoise et outaouaise. On y découvre ensuite les détails d’une négociation au cours de laquelle trois orateurs plaident tour à tour la cause des parties en présence. Les propos sont rapportés en style direct et disposés sur la page à la manière des répliques dans un texte dramatique, alors que s’y succèdent les tirades des différents porte-parole, celui des Iroquois, celui des Outaouais et, enfin, Onnontio, c’est-à-dire le marquis de Vaudreuil[2]. Pareille scénographie semble en apparence familière au lecteur européen, puisqu’elle reproduit la disposition du texte dramatique et les rituels de l’éloquence judiciaire, les avocats plaidant successivement le pour et le contre. Au demeurant, toute cette scène s’ouvre sur une remarque que reprend à dessein le titre de cet article et sur laquelle nous souhaiterions attirer d’emblée l’attention. Au moyen de cette apostrophe, l’auteur anonyme[3] du récit interpelle en ces termes son correspondant et, par-delà, le lectorat du Mercure galant : « Entrez bien, Monsieur, dans le style, vous allez devenir sauvage en lisant ceci[4]. » Qu’est-ce à dire ? Appeler le lecteur à entrer dans le style de ce récit signifie d’abord l’inviter à entrer en sympathie avec ce style, à faire siennes ses particularités, voire à adopter le point de vue bienveillant que déterminent des affinités de goût — comme lorsqu’« on dit … figurément, entrer dans les sentiments de quelqu’un, pour dire, se conformer aux sentiments de quelqu’un[5] ». Cette exhortation liminaire permet ensuite d’orienter la lecture des échanges entre le marquis de Vaudreuil et les représentants des nations iroquoise et outaouaise, en insistant sans détour sur ce qui en fait le principal intérêt : l’art de dire qu’illustre la brillante diplomatie de la parole autochtone déployée en cette circonstance.
L’attrait, voire la fascination qu’exerce cet art de dire sur les voyageurs français n’ont, du reste, rien de particulièrement original. De fait, le goût des autochtones pour les cérémonies de la parole a très tôt frappé l’esprit des Français. Dès 1616, le père Biard écrit ainsi : « Ces gens, je crois, sont les plus grands harangueurs de toute la terre. Ils ne feront rien sans cela[6]. » Aussi ne faut-il pas s’étonner si, depuis les travaux pionniers qu’André Vachon a consacrés à ce qu’il appelait, dans un ouvrage paru en 1968, « l’éloquence indienne[7] », articles et commentaires se sont multipliés sur cette question, dans la mesure où, comme l’observait à son tour Normand Doiron en 1998,
Un examen, même superficiel, de la littérature de voyage en Nouvelle-France permet de formuler l’observation suivante : ces récits accordent une grande importance à la représentation de la parole amérindienne, ils rapportent, en traduction, les très nombreuses harangues des capitaines sauvages, à tel point qu’ils versent parfois dans l’anthologie oratoire[8].
À ce foisonnement de sources devait tout naturellement répondre celui des lectures qu’allait en proposer la critique savante et sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir. Pour l’heure, rappelons seulement le livre consacré récemment à cette question, paru sous le titre de Voix autochtones dans les écrits de la Nouvelle-France. Il s’agit d’un ouvrage collectif où sont réunis les travaux qu’anime, à l’Université du Québec à Chicoutimi, la Chaire de recherche sur la parole autochtone, dont Luc Vaillancourt est titulaire. Or, l’introduction sur laquelle s’ouvre le volume annonce en ces termes la démarche qu’on y propose :
Le présent ouvrage … marque le lancement d’un chantier de recherche de plusieurs années de la Chaire de recherche sur la parole autochtone, ayant pour objectif d’examiner la place faite depuis la Nouvelle-France aux voix autochtones dans l’espace discursif et l’imaginaire canadien-français, en portant une attention particulière aux procédés linguistiques et rhétoriques ayant … conditionné leur mise en scène[9].
Dans les pages qui suivent, ce même point de vue — essentiellement rhétorique — guidera notre examen de l’ensemble des textes que consacre le Mercure galant aux négociations diplomatiques entre le gouverneur de la Nouvelle-France et les nations autochtones[10]. Seule une telle perspective nous semble en effet en mesure de fournir quelques éléments de réponse à cette question assurément incontournable : pourquoi le rédacteur du Mercure galant choisit-il de raconter ces épisodes en mettant en scène les voix autochtones, mais aussi françaises, à la faveur de ce qu’il appelle lui-même un « style sauvage[11] » ? Cette première interrogation en entraîne aussitôt une seconde, autrement difficile : pourquoi, en acceptant d’entrer dans ce style, le lectorat éminemment mondain du Mercure galant serait-il susceptible de concevoir le désir de devenir lui-même « sauvage » ?
Pourquoi choisir d’écrire en « style sauvage » ?
Répondre à la première question requiert d’abord de rappeler en quelques mots le contexte général dans lequel s’inscrivent ces négociations diplomatiques et la nature de l’accommodement auquel parviennent finalement les parties en présence. Depuis 1701, la Grande Paix de Montréal a mis fin aux guerres presqu’incessantes que se livraient, au 17e siècle, les Iroquois, d’une part, les Français et leurs alliés autochtones, d’autre part[12]. Or, en 1705 survient un incident qui contrevient à ce traité et que relate le rédacteur du Mercure galant en amont de son récit :
Les Iroquois demeuraient paisiblement sur leurs nattes [NDA[13] : c’est-à-dire demeuraient en paix] à Kataracoui [NDA : c’est le Fort de Frontenac] avec les Outaouais …, lorsque les Outaouais, s’étant jetés brusquement sur les Iroquois, en tuèrent quelques-uns et firent trente prisonniers. Incident fâcheux, embarrassant et d’autant plus difficile qu’il est arrivé chez Onnontio [NDA : c’est-à-dire dans un lieu appartenant au Gouverneur général des Français][14].
La suite du récit revient sur les stratégies auxquelles recourent les différentes parties dans la négociation d’un accord auquel préside Onnontio et qui, en guise de réparation, enjoint finalement aux Outaouais de « remplacer les Iroquois tués par des esclaves[15] ». Mais l’amorce de l’épisode met aussi en scène la parole autochtone. Métaphores dépaysantes — demeurer sur ses nattes —, toponymie et onomastique exotiques — Kataracoui, Onnontio — caractérisent cette prose qu’émaillent des images d’autant plus susceptibles de flatter le goût des lecteurs du Mercure galant qu’elles participent de l’immense vogue dont jouissent alors les « Indes », c’est-à-dire l’ensemble du monde extraeuropéen. Quelques années plus tard, Les Indes galantes (1735) de Rameau, peut-être l’opéra le plus emblématique du répertoire lyrique français, illustre cet imaginaire exotique où s’entremêlent Indes orientales et Indes occidentales, avec ses quatre entrées qui font se succéder sur scène Turcs, Incas, Persans et « Sauvages ». Au tout début du siècle, ce même goût pour l’ailleurs s’exprimait déjà, comme l’a remarqué Kim Gladu, dans le succès éclatant que connaît l’Orient littéraire depuis la traduction française des Mille et une nuits qu’avait entreprise, à partir de 1704, Antoine Galland[16]. Dans ce contexte, poursuit Gladu, le style figuré des « sauvages » de la Nouvelle-France en faisait tout naturellement « le pendant du style oriental tel que conçu à l’aube du XVIIIe siècle[17] ».
Cet engouement généralisé pour l’exotisme, qui compte assurément pour beaucoup dans le recours à un « style sauvage », invite ensuite à examiner la manière dont sont rédigés les différents plaidoyers que rapporte le rédacteur du Mercure galant. On jugera mieux de cette manière à la lecture du premier discours que prononce un chef iroquois devant les Outaouais et le marquis de Vaudreuil :
Les Iroquois sont entrés les premiers dans la Salle de l’Audience, et ont pleuré en chantant : « An Hi, An Hi, O Mânes de ma grand-mère ! Ô Esprit des Chefs, venez pleurer… An Hi, mon oncle le Soleil… tu es tout rouge… et tu es tout noir… An Hi, An Hi. J’ai le gosier bouché de douleur, les yeux fermés de larmes, de la bile amère dans l’estomac, les bras salis de sang… An Hi An Hi… » Ce chef des Iroquois, après avoir ainsi pleuré, salua Onnontio et dit : « Mon Père, tu es blessé à mort. J’étais dans ton coeur. Tu es donc blessé à mort. » Ici l’Iroquois se tut tout à coup, on interpréta sa parole et on l’écrivit[18].
Que penser de ce style ? Ou, plus précisément, de quelles ressources intellectuelles et de quelles notions pouvait donc disposer, en 1705, un observateur français qui aurait voulu décrire ce style ? Ce dernier, à vrai dire, aurait d’abord pu se tourner vers une imposante tradition historiographique, dans un contexte où, comme le rappelait encore récemment Luc Vaillancourt, voyageurs et missionnaires français du Grand Siècle s’étaient très souvent employés « à détailler les caractéristiques de l’“éloquence sauvage”[19] ». Au seuil du 17e siècle, Marc Lescarbot, par exemple, l’évoque déjà en ces termes : « … ils parlent fort posément, comme voulant bien se faire entendre, et s’arrêtent aussitôt en songeant une grande espace de temps, puis reprennent leur parole[20]. » Autrement dit, « l’éloquence sauvage » est un art de dire qui suppose la mesure et de fréquents silences qui ne souffrent aucune interruption — caractéristiques qui figurent d’ailleurs dans le discours consigné par le rédacteur du Mercure galant. Certains de ces éléments se retrouvent sous la plume du jésuite Jean de Brébeuf, qui observe lui aussi que, lors des Conseils, « les sauvages … haussent et fléchissent la voix comme d’un ton de prédicateur à l’antique, mais lentement, posément, distinctement ». Brébeuf ajoute en outre : « Il est vrai que leurs discours sont d’abord difficiles à entendre, à cause d’une infinité de métaphores[21]. » Placée sous ce jour, « l’éloquence sauvage » s’apparenterait donc à celle d’un orateur antique qu’un goût excessif pour les métaphores inviterait à ranger parmi les tenants de l’école asianiste[22]. Un autre jésuite, Paul Le Jeune, en offre toutefois un portrait opposé, dans un passage célèbre et très souvent cité : « Il n’y a lieu au monde où la rhétorique soit plus puissante qu’en Canada : et néanmoins elle n’a point d’autre habit que celui que la nature lui a baillé : elle est toute nue et toute simple[23]. »
On pourrait multiplier les exemples. On ne ferait cependant qu’approfondir la richesse et la diversité d’une tradition historiographique dont le rédacteur du Mercure galant se détourne pourtant lorsqu’il définit l’éloquence autochtone. Celle-ci, écrit-il en effet, se caractériserait surtout par un style « figuré, concis, coupé, style qui laisse un peu à deviner[24] ». Or, à l’aube du siècle des Lumières, tous ces adjectifs parlent d’autant plus au public cultivé qu’ils servent alors à décrire les charmes de la conversation familière, c’est-à-dire de la forme par excellence de l’éloquence française que les partisans des Modernes valorisent plus que tout dans les polémiques qui les opposent aux tenants des Anciens[25]. Ce style figuré, concis, coupé et qui laisse un peu à deviner est précisément celui qui fait alors la gloire des écrivains en vogue, tels Fontenelle ou Houdar de La Motte, et que favorise le public mondain en raison de son goût pour le mot d’esprit, lequel joue justement avec les métaphores galantes pour mieux « laisser un peu à deviner afin d’exercer la sagacité de l’interlocuteur[26] ». Dès la fin du 17e siècle et au cours des premières décennies du 18e siècle, cet idéal stylistique fondé sur la concision et l’allusion avait été l’occasion de nombreuses réflexions critiques sur les rapports entre les agréments du langage et les virtualités d’un sens implicite. C’est ce dont témoigne, entre autres, La manière de bien penser dans les ouvrages d’esprit de Dominique Bouhours (1628-1702), critique à la mode et fort influent qui célébrait une prose « renfermée en peu de paroles » et dont le sens se « cache en partie, afin qu’on le cherche et qu’on le devine … pour nous donner le plaisir de le découvrir tout à fait quand nous avons de l’esprit[27] ». À vrai dire, cet art de l’allusion et de la supposition feinte constitue à cette époque un véritable lieu commun de la critique littéraire, tant et si bien que ce sont même les techniques destinées à « couper » son style qu’aiment enseigner les maîtres de rhétorique dans les collèges, comme l’indiquent ces propos tenus par Charles Porée (1675-1741), qui fut l’un des plus célèbres d’entre eux : « Le style coupé me paraît … le plus propre à aiguiser l’esprit des jeunes gens et à exercer leur imagination[28]. » Ce style que cultivent les partisans des Modernes, c’est aussi, on s’en doute, celui du journalisme que pratique le futur directeur du Mercure galant, Charles Dufresny (1648-1724), lui-même proche de « la coterie formée autour de La Motte et de Fontenelle[29] » et dont l’esthétique allie même volontiers, comme l’observe François Moureau, « modernisme » et « primitivisme[30] ». Ce style, c’est enfin, à en croire notre rédacteur, celui des autochtones de la Nouvelle-France. En ce sens, le « style sauvage » revêt ici non seulement les charmes d’un exotisme fort en vogue, mais se pare encore des séductions qu’exercent sur le lectorat du Mercure galant les idées esthétiques à la mode et le goût du jour. Voilà qui répond à la première question, celle du choix d’écrire en « style sauvage », que nous posions en début d’article.
Pourquoi vouloir devenir « sauvage » ?
Passons maintenant à la seconde question : « Pourquoi, en acceptant d’entrer dans ce style, les lectrices et les lecteurs du Mercure galant seraient-ils susceptibles de souhaiter devenir eux-mêmes sauvages ? ». Le marquis de Vaudreuil, il est vrai, semble donner l’exemple, adoptant lui-même ce style lors des négociations devant conduire à un accommodement entre les parties. Ne s’adresse-t-il pas en ces termes aux représentants des nations iroquoise et outaouaise ?
Onnontio après cela, se tournant du côté de l’Outaouais, lui dit : « Tu étais ivre [NDA : c’est-à-dire, insensé, chez les Sauvages, selon le génie de leur langue], tu n’avais pas d’esprit quand tu as fait cela à Kataracoui. L’Arbre de la paix ayant été touché et appuyé par la main, l’ayant vu planter, ayant vu enterrer la Hache… L’Iroquois devrait avoir ravagé ta Cabane » [NDA : Onnontio se sert du style sauvage, cela est prudent. Cabane est pris pour nation ou village][31].
Toutefois, la dernière note de l’auteur indique que le marquis de Vaudreuil agit par calcul politique, lui-même fondé sur un savoir ethnologique précis qui, comme l’a déjà relevé l’historiographie récente, fait en sorte que l’administration coloniale française observe, avec une attention scrupuleuse, les protocoles et « usages diplomatiques autochtones[32] ». Le Mercure galant souligne ainsi qu’« il faut se conformer au génie de leur langue, pour les [les Sauvages] gagner[33] ». Mais cette prudence politique suppose encore davantage. Cette « Hache » ou cette « Cabane » sont en effet autant de figures empruntées aux langues autochtones et reprises ensuite par l’interprète français. Autrement dit, comme le relève, non sans sagacité, Catherine Broué, la « reconduction des métaphores par la traduction n’est pas anodine en regard de la dynamique diplomatique : elle donne aux parties en présence l’impression qu’elles se comprennent, tout en permettant des interprétations radicalement différentes[34] ».
En revanche, ce n’est assurément pas ce souci diplomatique qui détermine les lectrices et les lecteurs français du Mercure galant à vouloir entrer à leur tour dans ce style jusqu’à devenir eux-mêmes « sauvages ». De fait, la fonction que joue le « style sauvage » dans ce récit ne se réduit pas au rôle qu’il tient dans une scénographie destinée à célébrer la prudence politique du gouverneur de la Nouvelle-France. Ce « style sauvage », on l’a vu, se donne aussi à comprendre à la lumière d’un vaste appareil notionnel dont l’extrême actualité, en ce début de 18e siècle, a encore et surtout pour vocation de séduire le public. Au prisme de catégories à la mode, il est susceptible de piquer la curiosité non seulement par son exotisme, mais également par la vivacité de ses figures, par sa concision et par un art de couper sa phrase de manière à dire sans dire. Cette écriture ramassée et allusive qu’émaillent toutes ces « figures sauvages[35] » — la hache qu’on enterre, l’arbre de la paix qu’on plante, la cabane qu’on ravage —, semble ici constellée de ce qu’on appelle, dans la langue de la rhétorique et de la critique littéraire du 18e siècle, des « figures piquantes[36] », lesquelles sont autant de tournures qu’exige l’ambition de produire « une impression vive et agréable sur l’esprit[37] », afin de mieux surprendre et séduire. Au surplus, cet art de piquer agréablement les sens et l’esprit s’affirme même, en ce début du siècle, comme la qualité esthétique par excellence, celle qu’encensent les partisans des Modernes, celle qui caractérise le style rocaille, et que recherchent par-dessus tout écrivains, philosophes et artistes[38]. En poésie, Houdar de La Motte réclame « la liberté du naturel et le piquant de la naïveté[39] » ; sur la scène, dans La seconde surprise de l’amour, la Lisette de Marivaux s’écrie : « Je connais une dame qui n’a gardé son mari que deux jours ; c’est cela qui est piquant[40]. » Il s’agit dans tous les cas d’une esthétique qui, au nom du piquant, fait prévaloir « des notions telles que la bigarrure, le bizarre, le caprice, la digression, les singularités surprenantes … et le refus des préjugés de l’habitude, [bref,] ce que l’histoire des arts nommera le style rocaille[41] ».
C’est pourquoi le style des orateurs autochtones présente, aux yeux du public français, des séductions véritablement piquantes, tout à fait analogues à celles qu’offre au regard la tenue bigarrée que revêtent, lors de cette négociation, Iroquois et Outaouais, et que le rédacteur du Mercure galant décrit en ces termes :
Le corps de messieurs les Sauvages était presque nu, et marqué de cent hiéroglyphes différents de serpents, d’ours, de cochons, de rats, de corbeaux, de poux, etc. Des cornes de chevreuil en tête, chacun un collier, fait de dents et d’ongles de loup-cervier… Cela aurait été fort joli à voir en carnaval à Versailles[42].
Tout comme le « style sauvage », l’amusante bigarrure que donnent à voir ces colliers et ces hiéroglyphes chatoyants suppose un goût pour l’exotisme et la surprise étroitement lié à l’esprit du temps, lequel est fortement marqué, en ce premier 18e siècle, par la mode du travestissement et du masque que portent même jusqu’à la folie les déguisements de bal ou de carnaval. En témoigne une célèbre gravure de Charles-Nicolas Cochin représentant un bal masqué donné dans la grande galerie des Glaces du château de Versailles : hommes et femmes de cour y apparaissent déguisés tantôt en personnages de la commedia dell’arte, tantôt en Persans ou en « sauvage » du Canada, tantôt en Turcs, et même… en ifs (figure 1) ! Au tout début du 18e siècle, l’un des exemples les plus connus et emblématiques de cette vogue demeure sans doute les Mémoires de l’abbé de Choisy habillé en femme. Sur un ton enjoué et frivole, Choisy y raconte comment il « se forge progressivement, avec l’approbation de son entourage, une identité féminine factice[43] » qui tire parti de toutes les ressources alors offertes au travestissement : perruques, habits de cour et procédés de maquillage dignes de comédiens. De même, si la description que fait le rédacteur du Mercure galant du « corps de messieurs les Sauvages » ou encore le style auquel lui-même recourt peuvent donner l’envie de devenir soi-même « sauvage », c’est dans la mesure où il s’agit, pour une part essentielle, d’une invitation à imaginer et à goûter la réjouissante folie d’un travestissement bigarré, à la fois badin et piquant[44].
* * *
En somme, répondre aux deux questions posées en début d’article revient sans doute à apporter une preuve supplémentaire de ce qu’affirment historiens et ethnologues lorsqu’ils assurent qu’en Amérique, la rencontre entre cultures autochtone et européenne a supposé « l’incapacité de chacun à appréhender l’Autre en dehors des catégories du Même[45] ». Toutefois, à la lumière de l’étude que nous en proposons, il semble que l’imaginaire colonial de la presse d’actualité invite aussi à repenser le rôle — souvent négligé, mais essentiel — que joue le temps historique court de la mode et du moment présent dans la construction de la figure de l’Autre[46]. Le récit que livre le rédacteur du Mercure galant est en effet sous-tendu par un dispositif dont la complexité tient à une sorte de double articulation. D’une part, la représentation d’une altérité « sauvage » relève du goût de l’exotisme, c’est-à-dire d’une catégorie inscrite dans le temps long de l’histoire culturelle européenne. D’autre part, les figures exotiques qui peuplent le récit ne deviennent lisibles qu’à partir de catégories rhétoriques et esthétiques relevant de la mode, qu’il s’agisse du « style coupé » ou encore des « figures piquantes ». Or, cette mode les rattache à une scénographie du frivole et du ludique qu’illustre la pratique du travestissement mondain, c’est-à-dire à une modalité du rapport à l’Autre tout à fait caractéristique du rococo français alors naissant. Au demeurant, cette enquête sur la manière dont la représentation de l’altérité autochtone procède de catégories étroitement associées à un temps historique court mériterait d’être prolongée au-delà du siècle des Lumières. Par exemple, lorsque dans la seconde moitié du 20e siècle, André Vachon évoque ce qui, à ses yeux, définit « l’éloquence indienne », ne considère-t-il pas que le mérite et la force du discours autochtone tiennent au fait que celui-ci « réunissait tous les éléments du drame antique », que souvent « il en possédait de surcroît la majestueuse noblesse et les impérissables beautés[47] » ? Cette description n’offre pas seulement un saisissant contraste avec celle qu’en donne le Mercure galant au seuil des Lumières. Elle mobilise encore un ensemble de références que l’esthétique des années 1960 associe à l’excellence poétique, illustrant à nouveau de ce fait le rôle déterminant de catégories de pensée indissociables d’un temps historique court.
Parties annexes
Note biographique
Professeur titulaire de littérature à l’Université du Québec à Trois-Rivières, Marc André Bernier est membre de la Société royale du Canada et directeur du Centre interuniversitaire de recherche sur la première modernité (CIREM 16-18). Ses travaux récents portent sur l’histoire de la rhétorique, l’écriture des femmes et le Nouveau Monde. Avec Clorinda Donato et Hans-Jürgen Lüsebrink, il a notamment fait paraître en 2014 Jesuit Accounts of the Colonial Americas. Intercultural Transfers, Intellectual Disputes and Textualities (University of Toronto Press). Il a également rédigé l’article « Amérique » dans le Dictionnaire critique de l’utopie au temps des Lumières paru en 2016 (Georg Éditeur).
Notes
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[1]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada pendant la dernière année », Mercure galant, février 1706, p. 75-128, p. 101. Nous modernisons l’orthographe de tous les passages tirés de ce texte.
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[2]
« Onnontio » est le titre que les autochtones donnèrent d’abord à Charles Huault de Montmagny (1601-1657) et qu’ils utilisèrent par la suite pour désigner tous les gouverneurs de la Nouvelle-France ; ce terme huron correspond à la traduction littérale de « Montmagny », qui serait dérivé du latin « Mons Magnus », c’est-à-dire « Grande Montagne ». Quant aux noms des porte-parole des nations autochtones, le Mercure galant adopte des pratiques variables dans les textes de notre corpus, car tantôt il les mentionne et tantôt ne les précise pas.
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[3]
Sur l’identité de cet auteur, on ne saurait formuler que des hypothèses invérifiables hors de tout doute, mais la plus vraisemblable invite à considérer la possibilité qu’il s’agisse de Charles de Monseignat (1652-1718), qui, entre 1689 et 1698, fut le secrétaire du gouverneur Frontenac et qui, en 1705, était contrôleur de la Marine et des fortifications en Nouvelle-France ainsi que conseiller-secrétaire et greffier en chef du Conseil supérieur. En faveur de cette hypothèse, signalons d’abord, à la suite de Catherine Broué, que Frontenac, sous le titre de Paroles, avait inauguré l’envoi à la cour de procès-verbaux rapportant les « discussions diplomatiques entre divers groupes autochtones … et le gouverneur de la colonie » ; Catherine Broué, « Paroles diplomatiques autochtones en Nouvelle-France : un artéfact polyphonique éloquent », dans Nathalie Vuillemin et Thomas Wien (dir.), Penser l’Amérique. De l’observation à l’inscription (Oxford, Oxford University Studies in the Enlightenment, 2017), p. 111. Rappelons ensuite, avec Peter N. Moogk, que Monseignat fut également « l’auteur de la fameuse “Relation de ce qui s’est passé de plus remarquable en Canada”, qui attribue au gouverneur [Frontenac] le mérite d’avoir sauvé la Nouvelle-France en 1689-1690 ». Ajoutons enfin que Monseignat pouvait s’adresser avec aisance à un public mondain, puisque, comme le précise encore Peter N. Moogk à propos de cette « Relation », il avait alors « adopté la forme épistolaire et l’on a prétendu que la lettre était destinée à la marquise de Maintenon » ; voir Peter N. Moogk, « Monseignat (Monseignac), Charles de », Dictionnaire biographique du Canada (DBC), vol. 2 (Québec et Toronto, Presses de l’Université Laval et University of Toronto Press, 1969), [biographi.ca/fr/bio/monseignat_charles_de_2F.html].
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[4]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 100. Dans les textes analysés, le mot « sauvage » reste proche du sens étymologique de salvaticus, « peuples qui vivent ordinairement dans les bois » ; Dictionnaire de l’Académie française, t. 2 (Paris, Veuve Brunet, 1762), p. 499.
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[5]
Dictionnaire de l’Académie française, t. 1 (Paris, Veuve Brunet, 1762), p. 642.
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[6]
Cité par Ana Isabel Valero Pena, « Le pouvoir de la parole dans les relations franco-amérindiennes en Nouvelle-France au XVIIe siècle », Globe, vol. 6, no 1 (2003), p. 158. Voir également Marie-Christine Gomez-Géraud, « L’entrée de l’Indien dans la littérature française : genèse d’un stéréotype », Europe, no 756 (1992), p. 66 : « Les premiers voyageurs en Nouvelle-France semblent avoir été sensibles à une forme spectaculaire de l’éloquence indienne. »
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[7]
André Vachon, Éloquence indienne, textes choisis, présentés et annotés (Montréal et Paris, Fides, 1968).
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[8]
Normand Doiron, « Genèse de l’éloquence sauvage : la renaissance française de Tacite », dans Claude Duchet et Stéphane Vachon (dir.), La recherche littéraire. Objets et méthodes (Montréal, XYZ, 1998), p. 217.
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[9]
Luc Vaillancourt, Sandrine Tailleur et Émilie Urbain (dir.), Voix autochtones dans les écrits de la Nouvelle-France (Paris, Hermann, 2019), p. 7.
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[10]
Outre l’important « Journal de ce qui s’est passé en Canada pendant la dernière année », le corpus comporte un second texte, dont il sera également question : « Relation des négociations qui se sont faites dans l’Amérique Septentrionale, entre les Français, les Sauvages Iroquois et les Anglais, en 1704 », Mercure galant, « Nouvelles de l’Amérique Septentrionale » (Paris, Michel Brunet), avril 1705, p. 29-51.
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[11]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 100.
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[12]
Sur cette question, voir notamment Gilles Havard, La grande paix de Montréal. Les voies de la diplomatie franco-amérindienne (Montréal, Recherches amérindiennes au Québec, 1991).
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[13]
Ces notes ont été ajoutées dans l’article original par le rédacteur du Mercure galant à l’intention de son lectorat.
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[14]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 97-98.
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[15]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 121.
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[16]
Sur ce point, voir Kim Gladu, « Présence du “sauvage” dans le Mercure galant (1702-1713) », dans Vaillancourt, Tailleur et Urbain (dir.), Voix autochtones dans les écrits de la Nouvelle-France, p. 310.
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[17]
Gladu, « Présence du “sauvage” dans le Mercure galant (1702-1713) », p. 320.
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[18]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 105-106.
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[19]
Luc Vaillancourt, « “Quand je sçauray parler Huron” : l’ambition linguistique des Jésuites », Tangence, no 123 (2020), p. 19.
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[20]
Marc Lescarbot, Histoire de la Nouvelle-France, vol. 1 (Paris, 1865), p. 282 ; cité par Valero Pena, « Le pouvoir de la parole dans les relations franco-amérindiennes en Nouvelle-France… », p. 162.
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[21]
Jesuits Relations, vol. 10 (1636), p. 256 ; cité par Valero Pena, « Le pouvoir de la parole dans les relations franco-amérindiennes en Nouvelle-France… », p. 163.
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[22]
Voir Valero Pena, « Le pouvoir de la parole dans les relations franco-amérindiennes en Nouvelle-France… », p. 163-164 : « La présence de métaphores dans les discours amérindiens est un aspect remarqué à plusieurs reprises dans les récits de voyage. Chez certains Occidentaux, l’usage de métaphores contribue à la vision négative des langues indigènes : elles seraient langues de la passion, riches en métaphores, et non comme les langues raisonnables (européennes), riches en abstractions. »
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[23]
Jesuits Relations, 1636, vol. 10, p. 256 ; cité par Valero Pena, « Le pouvoir de la parole dans les relations franco-amérindiennes en Nouvelle-France… », p. 163.
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[24]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 101. À comparer avec cette autre description du « style sauvage » que fournit, dans une livraison précédente, le Mercure galant : « On remarquera que Pitresculle est un rusé et un homme habile dans son métier, possédant le style sauvage qui est figuré, style qui dit beaucoup, parce qu’il laisse beaucoup à penser » (« Relation des négociations qui se sont faites dans l’Amérique Septentrionale, entre les Français, les Sauvages Iroquois et les Anglais… », p. 37).
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[25]
Sur cette querelle qui correspond au principal épisode de la vie intellectuelle française aux confins des 17e et 18e siècles, voir, entre autres, Anne-Marie Lecoq (dir.), La Querelle des Anciens et des Modernes, XVIIe-XVIIIe siècles (Paris, Gallimard, 2001).
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[26]
Sur ce parallèle entre « style sauvage » et éloquence galante, voir Gladu, « Présence du “sauvage” dans le Mercure galant (1702-1713) », p. 320-321.
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[27]
Dominique Bouhours, La manière de bien penser dans les ouvrages d’esprit (Paris, Florentin Delaulne, 1687) ; fac-similé de l’édition de 1705, avec introduction et notes de Suzanne Guellouz (Toulouse, Université de Toulouse-Le-Mirail, 1988), p. 160.
-
[28]
Pierre-François Guyot, abbé Desfontaines, « Le père Porée », L’esprit de l’abbé Desfontaines, ou Réflexions sur les différents genres de science et de littérature, t. 2 (Londres, Clement, 1757), p. 89-90. À comparer avec cette remarque d’un autre maître de rhétorique, Balthazar Gibert, qui associe l’éclat du style à toutes les formes d’expression « qui donnent plus à concevoir qu’elles ne disent » ; Balthazar Gibert, La rhétorique ou les règles de l’éloquence (Paris, Thiboust, 1730), p. 317-318.
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[29]
François Moureau, Dufresny, auteur dramatique (1657-1724) (Paris, Klincksieck, 1979), quatrième de couverture.
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[30]
Sur ce point, voir François Moureau, La plume et le plomb. Espaces de l’imprimé et du manuscrit au siècle des Lumières (Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2006), p. 363 : « Le “modernisme” de Dufresny s’exprime dans des idées singulières, “bizarres” : des opéras de silence, des papiers collés à la manière surréaliste, et, en littérature, dans la conviction que l’art moderne doit être total et retrouver la forme universelle antérieure à la division des arts. Ce “primitivisme” qui justifie la “modernité” n’est pas le moins curieux de son esthétique. » Sur cette esthétique, nous nous permettons également de renvoyer à Marc André Bernier et Claude La Charité, « Analyse morale et invention d’une esthétique du sublime comique dans le Parallèle burlesque (1711) de Dufresny », dans Charlène Deharbe et Nicholas Dion (dir.), Fiction et morale au siècle des Lumières (Paris, Hermann, 2023), p. 75-90.
-
[31]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 120-121.
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[32]
Broué, « Paroles diplomatiques autochtones en Nouvelle-France », p. 112 ; voir aussi Havard, La grande paix de Montréal, p. 145 : « La conférence de 1701 était à bien des égards exceptionnelle, et … les représentants du Roi-Soleil … se montrèrent soucieux de respecter à la lettre les mille et une facettes du protocole diplomatique amérindien. »
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[33]
« Suite touchant les négociations entre les Français et les Iroquois », Mercure galant, « Nouvelles de l’Amérique Septentrionale », avril 1705 (Paris, Michel Brunet), p. 46.
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[34]
Broué, « Paroles diplomatiques autochtones en Nouvelle-France », p. 113.
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[35]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 111, n. 8.
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[36]
Sur cette notion, voir notamment Charles Batteux, Principes de la littérature, t. 4 (Paris, Desaint et Saillant, 1754), p. 108 : « Parmi les figures de pensées, on distingue celles qui piquent l’attention, et celles qui touchent principalement le coeur. »
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[37]
Dictionnaire de l’Académie française, t. 2 (Paris, Firmin Didot Frères, 1835), p. 420.
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[38]
Sur cette esthétique de « la séduction piquante », si souvent associée au 18e siècle rocaille, voir les pages classiques de Jean Starobinski, L’invention de la liberté, 1700-1789 (Genève, Skira, 1964), p. 9 ; de même que le bel ouvrage de Kim Gladu, La grandeur des petits genres. L’esthétique rococo à l’âge de la galanterie (1670-1760) (Paris, Hermann, 2019).
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[39]
Houdar de La Motte, Fables nouvelles … avec un discours sur la fable (Paris, Grégoire Dupuis, 1719), p. liv-lv. Nous soulignons.
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[40]
Marivaux, La seconde surprise de l’amour, dans Frédéric Deloffre (éd.), Théâtre complet, t. 1 (Paris, Bordas, 1989), p. 676. Nous soulignons.
-
[41]
Marc Fumaroli, Mireille Huchon et François Moureau, « Rabelais, l’Homère français ? », Revue d’histoire littéraire de la France, no 4 (2018), p. 776.
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[42]
« Journal de ce qui s’est passé en Canada… », p. 103.
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[43]
Sur la mode du travestissement et Choisy, voir Cyril Francès, « Vérité et fiction travesties : les Mémoires de l’abbé de Choisy habillé en femme », dans Marc André Bernier et Zeina Hakim (dir.), Mémoires et roman : les rapports de Vérité et de Fiction au XVIIIe siècle (Paris, Hermann, 2023), p. 43-58.
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[44]
Sur les liens entre imaginaire autochtone, théâtralité et recherche de plaisir, voir aussi Sébastien Côté, « Adario et sa descendance : personnages amérindiens dans le théâtre français du XVIIIe siècle », dans Vaillancourt, Tailleur et Urbain (dir.), Voix autochtones dans les écrits de la Nouvelle-France, p. 341-365.
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[45]
Luc Vaillancourt et Marc-Olivier Laflamme, « Fonction rhétorique de la parole autochtone dans les récits de voyage de la Nouvelle-France », dans Vaillancourt, Tailleur et Urbain (dir.), Voix autochtones dans les écrits de la Nouvelle-France, p. 125.
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[46]
Sur la thèse qui consiste, au contraire, à inscrire dans un certain nombre d’invariants la représentation de l’altérité autochtone, voir notamment l’ouvrage d’Olive Patricia Dickason [1984], Le mythe du sauvage, trad. Jude Des Chênes (Paris, Philippe Lebaud, 1995), p. 75-98.
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[47]
Vachon, Éloquence indienne, p. 11.