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Considérations préliminaires

Ce recueil d’articles se distingue des volumes thématiques précédemment parus chez Les Cahiers d’histoire. On pourra s’étonner, par exemple, du fait que deux médiévistes signent—en tant que directeurs scientifiques—un recueil dont les contributions concernent exclusivement l’histoire moderne et contemporaine, même si le lecteur attentif relèvera sans doute quelques références à l’Antiquité et au Moyen Âge dans l’une et l’autre des contributions[1]. Pour préserver notre légitimité par rapport à la matière rassemblée, il suffit d’attirer l’attention des lecteurs sur les objectifs du volume : explorer les défis et élargir les perspectives de critique et d’analyse de source dans les contextes de recherche actuels. Il s’agit alors d’un projet qui s’engage dans une réflexion autour de la base de travail de tous les historiens, indépendamment de leur époque de prédilection : les sources dites primaires ou historiques. Dans ces pages d’introduction, nous proposons d’abord de préciser ces objectifs. Dans un deuxième temps, nous passerons à un résumé détaillé des articles. Nous finirons sur quelques remarques de synthèse et de mise en perspective du volume.

Ce n’est pas la première fois que Les Cahiers d’histoire réservent un numéro thématique à une réflexion d’ordre méthodologique. On pensera notamment au numéro de l’année 2017 codirigée par Florence Prévost-Grégoire et Carol-Ann Bellefeuille, consacré aux échelles d’étude en histoire[2]. Les directeurs de revue ont ressenti le besoin de placer à ses côtés un volume-frère qui s’engage davantage dans une réflexion sur les méthodes en histoire tout en mettant en avant la question des interactions de ces méthodes avec les avancées récentes de la recherche scientifique. Nous espérons que ce volume-frère soit fidèle à cette idée initiale.

Par intérêt pour ces points d’interaction avec l’évolution globale de l’actualité méthodologique des sciences, notre recueil contribue à un débat qui restera nécessairement ouvert puisque ses paramètres ne cesseront d’évoluer. Plus grand encore est le débat sur les similitudes et les différences entre les sciences dites humaines et sociales, et les sciences dites exactes qui nous intéressent ici surtout en regard de l’impact des nouvelles technologies sur les formes de mise à disposition, de traitement et d’analyse des sources—une thématique qui ressort dans tous les articles de ce volume. Leurs auteurs contribuent, à notre sens, avant tout à la réflexion sur les synergies potentielles entre les approches interprétatives des sciences humaines et sociales et les démarches explicatives ou descriptives des sciences naturelles. Il ne s’agira donc pas d’explorer de véritables continuités entre ces deux pôles, voire de développer des perspectives de naturalisation des sciences humaines et sociales[3].

Soulignons aussi que ces transformations méthodologiques en histoire et leurs liens potentiels avec le cadre scientifique global n’effacent pas les traditions antérieures de critique et d’analyse des sources. Tous les auteurs développent leurs mises en perspective dans un esprit de complémentarité par rapport aux acquis méthodologiques de notre discipline. Ils demeurent ainsi attachés à des catégories et des démarches établies de l’analyse historique comme le croisement des sources, la contextualisation ou encore l’inscription des phénomènes historiques dans l’espace et dans le temps. Tous les auteurs se montrent aussi hautement conscients du fait que la pertinence des formes de traitement du matériel historique à l’aide du numérique et de l’informatique dépend fortement de la qualité de la documentation ancienne. Cette recherche de complémentarité entre l’ancien et le nouveau émane d’un pragmatisme méthodologique face aux exigences de la documentation. Elle rejoint en même temps des idées formulées, par exemple, dans le Manifeste des Digital Humanities de 2010[4].

Une redéfinition de la discipline historique dans le cadre des humanités numériques nous permet parfois de reconsidérer des questions méthodologiques très anciennes. Les procédés informatiques de mise en image de reconstructions de bâtiments et de paysages historiques, tels que proposés par plusieurs auteurs du volume, nous ramènent ainsi à la question du positionnement de l’historien par rapport au passé qu’il étudie, puisque les images des reconstructions suggèrent facilement une proximité objective par rapport à l’objet historique dont la reconstruction reste néanmoins le produit d’une démarche analytique. Tous les auteurs se posent ainsi la question dans quel sens l’enrichissement méthodologique par les humanités numériques complexifie le cadre de réflexions sur les exigences intellectuelles de ces transformations. Voilà le sens de progrès qu’il faudrait davantage tirer de ce bon mot attribué à Jean Jaurès, déformé souvent à des fins qui trahissent les intentions de son auteur : la tradition ne consiste pas à conserver des cendres, mais à entretenir une flamme[5].

Passons de la métaphore de l’entretien d’une flamme à celle de la source pure et transparente d’où l’historien puiserait son savoir. Sa force poétique a séduit les historiens de plus d’un pays. S’il nous semble difficile de l’écarter, il faut considérer les effets et les limites de cette métaphore. Elle est réductionniste à plusieurs égards[6] : suggérant que le savoir historique découle de la source par sa propre force, elle efface l’agentivité analytique de l’historien, qui au lieu de « créer » la source par les questionnements qu’il lui adresse, recourait à un médium de savoir doté d’une présence objective. Elle éclipse aussi ce qui appartient à la genèse du matériel historique et ce qui contribue à ses transformations successives : les contextes de création, les formes de transmission, la conservation, l’archivage. Le souhait d’aller à l’encontre d’une telle désincarnation de la source nous poussera inévitablement à considérer les dimensions diverses de la matérialité des sources. C’est aussi par rapport à ce souhait que les articles du volume proposent des ouvertures intéressantes.

Les objectifs du volume

Quelles problématiques de recherche visons-nous alors par la conception de ce volume ? Il nous sera permis d’évoquer ici d’abord une expérience à laquelle les spécialistes de la préhistoire, de l’Antiquité et du Moyen Âge se voient peut-être plus souvent confrontés que les historiens d’autres époques : le faible nombre de sources « traditionnelles » qui oblige à élargir l’éventail documentaire pour mieux analyser les dynamiques du passé. Dans cette perspective, on a dû s’ouvrir à des sources autrefois sous-utilisées. Les historiens de l’Antiquité et du Moyen Âge ont ainsi recours depuis longtemps à un matériel d’analyse diversifié qui peut comporter des inscriptions, des oeuvres d’art, des monnaies ou encore des données archéologiques. Parfois l’élargissement de l’éventail de sources est directement relié à des changements de perspective sur les dimensions historiques de réalités sociales du monde dans lequel nous vivons : le courant historiographique de l’histoire orale a ainsi contribué au décloisonnement du matériel historique plus traditionnel par la valorisation du témoignage oral d’acteurs subalternes. On peut également considérer que le courant postcolonial a permis de repenser les types de sources étudiées pour rendre justice à l’histoire de cultures et de sociétés en dehors du cadre occidental.

La recherche de nouvelles sources oblige également à redéfinir les paramètres méthodologiques. Cela nous ramène aux diverses formes d’introduction des technologies numériques en histoire permettant de créer des liens autrement inaccessibles. De même, l’informatique fournit des outils donnant l’opportunité de revisiter des sources traditionnelles sous un regard nouveau. Les avancements ne se limitent pas aux nouvelles technologies. On pensera aussi aux transferts méthodologiques entre différentes disciplines des sciences humaines et sociales, même si ce n’est pas forcément le cas des articles réunis dans ce volume. Notons, à titre d’exemple, le changement de perception dans l’approche de textes littéraires comme sources.

Plutôt que de considérer de nouvelles sources ou leur méthodologie, certains chercheurs emploient un cadre conceptuel duquel découle un nouvel angle d’analyse. C’est notamment le cas de la création du concept de race, défini pour l’étude des relations de pouvoirs dans les sociétés coloniales. Le genre donne aussi la possibilité à l’historien de revisiter des sources pour en dégager une nouvelle perspective sur les rôles et les champs d’action de tous les membres du corps social.

À la lumière, de ces réflexions préliminaires, ce volume réunit des articles qui se joignent aux différents efforts récents d’aller au-delà du cadre de la typologie traditionnelle des sources ou encore d’intégrer dans l’analyse de source des méthodes et des cadres conceptuels nouveaux. On pourra les classer en trois catégories d’objectifs : l’intérêt pour un type de source « nouvelle » ou d’un corpus de sources « nouveau », une nouvelle réflexion méthodologique ou une approche rendue possible par les avancées technologiques permettent d’élargir la méthodologie de l’analyse de source et enfin le recours à des sources de natures diverses par le chercheur qui l’amène à transformer et à enrichir son analyse des sources.

Les articles

Passons maintenant à la présentation des sept articles de ce numéro. Dans son article « Sources for Colonial Historiography: Museums and Colonial Collections, a Mapping and Memory Project on the Italian National Territory », Beatrice Falucci s’intéresse à un « nouveau » corpus de sources, les collections coloniales italiennes. L’autrice analyse la composition et l’origine de ces collections ainsi que leur rôle de vecteurs de mémoire au niveau local et national. Elle insiste également sur l’importance de développer un projet pour les insérer dans un réseau national d’éducation et de mise en mémoire. En considérant les musées et leurs collections comme sources per se pour l’histoire coloniale italienne, l’historienne souhaite les étudier non pas comme des vestiges poussiéreux du passé, mais bien comme des objets qui transmettent un savoir historique. À travers sa recherche, Falucci montre que l’élargissement de la typologie des sources peut renouveler le discours autour d’une période historique plutôt délaissée par le public et de ce fait peu problématisée. Dans le même ordre d’idées, Andrew John Fletcher utilise une base de données de création récente, la Miami-Illinois Digital Archive (MIDA), pour apporter des nuances au corpus de sources habituel de l’étude de ces sociétés autochtones. Son article « The Miami-Illinois Digital Archive: Exploring how Linguistic Scholarship can Enlarge our Understanding of the History of Indigenous Societies » propose aussi des associations productives entre l’histoire et la linguistique historique. La base de données MIDA, créée en 2012, regroupe deux dictionnaires français-miami-illinois et deux lexiques. Elle permet de donner une voix aux Autochtones qui, autrement, ne peut être entendue que par le truchement des textes des auteurs européens ou européoaméricains. Afin de mettre en lumière les nouvelles possibilités résultant de l’utilisation de cette base de données, l’historien se sert d’un cas bien précis, l’intervention du Chef Kiraoueria dans le procès d’André Perillaud en 1723 à Fort de Chartes, pour illustrer la conception illinoise de la justice. Fletcher explore également les difficultés épistémologiques inhérentes à l’utilisation de ces sources.

L’utilisation de nouvelles technologies en histoire a permis aux chercheurs de réexaminer les sources et de proposer de nouvelles manières de les mettre en valeur. L’article de Matthieu Deltombe et de Laëtitia Deudon, « Repenser les sources de l’histoire environnementale grâce aux outils numériques : le cas de la vallée de l’Escaut (France) », illustre à merveille ces transformations méthodologiques. Dans leur recherche, les auteurs souhaitent jeter un éclairage nouveau sur le territoire de l’Escaut (Hauts-de-France), du Moyen Âge à nos jours, en employant trois types d’outils numériques particulièrement pertinents pour l’histoire environnementale : les bases de données, le système d’information géographique (SIG) et la modélisation 3D (restitution et photogrammétrie). Dans un deuxième temps, ils présentent le cheminement méthodologique permettant l’analyse des sources et leur interprétation tout en considérant aussi les limites de telles démarches. L’article présente enfin les différentes applications possibles et les apports de ces outils technologiques, non seulement dans le cadre d’une recherche scientifique stricto sensu, mais en vue d’une mise en valeur pédagogique et patrimoniale. Ces réflexions autour des apports méthodologiques et des applications possibles des outils numériques en histoire sont aussi au coeur du travail d’Hubert Cousineau, d’Antoine Gauthier-Trépanier, d’Anthony Trouillas et de Joshua L. J. Vachon, « Espace et humanités numériques : le fort de Chambly et l’héritage de Vauban en Amérique du Nord ». Leur recherche est orientée autour de la question suivante : « Considérant l’importance du legs de Vauban quant à la planification de positions défensives, pourrions-nous discerner, dans la vision de l’édification du fort de Chambly, un héritage des considérations spatiales propres à sa méthode ? »[7]. Pour parvenir à déceler cette influence, les auteurs utilisent de nouvelles technologies comme la photogrammétrie et le système d’information géographique (SIG) permettant de visualiser les structures défensives du fort de Chambly. Les résultats de cette recherche sont présentés sous la bannière Historiamatica, une plateforme web qui regroupe différentes initiatives en humanités numériques lancées par des étudiants en histoire. L’usage d’outils numériques peut permettre à l’historien de valider des hypothèses et de clarifier des ambiguïtés dans les textes. C’est dans cette optique qu’Elizabeth Shotton s’est servie du LiDAR pour étudier la construction du petit port de Bullock en Irlande, du Moyen Âge au XXe siècle. Cette technologie permet une reconstitution 3D d’un objet, en plus d’offrir la possibilité d’analyser des vestiges archéologiques de manière non invasive. Grâce au LiDAR, l’historienne a pu présenter une vision renouvelée de l’histoire de ce port pour lequel il existe par ailleurs peu de sources. Shotton a ainsi pu développer une méthode pour reconstruire la chronologie des vestiges du port. L’étude des ports est essentielle pour comprendre la vie de plusieurs petites communautés irlandaises puisqu’ils constituent le moteur économique principal de ces régions, au moins jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle quand beaucoup de ces ports sont délaissés au profit de sites portuaires plus importants.

La diversification des types de sources utilisées par le chercheur l’amène à transformer et à enrichir son analyse des sources. Tel est le cas dans l’article « Les archives « construites » pour collecter, archiver et valoriser l’expérience combattante du XXIe siècle » de Christophe Lafaye. À travers sa recherche, l’auteur réfléchit à la constitution, au traitement, à la conservation et à la transmission de données numériques liées au monde combattant. L’objectif de l’archiviste est de participer à l’ensemble du processus de conception, de traitement, de conservation et de valorisation des sources réunies pour ses travaux. L’ambition de cette méthode est d’entraîner une réflexion globale et pluridisciplinaire pour collecter, archiver et valoriser l’expérience combattante française au XXIe siècle. Pour ce faire, l’historien se sert d’entretiens réalisés avec les soldats et de leurs archives privées. Un tel projet pose aussi la question des effets de l’implication personnelle de l’archiviste-historien par rapport à son objet d’étude puisqu’il participe lui-même à la collecte de données en étant présent sur le terrain comme réserviste du Service historique de la Défense (SHD) en France. Ce même élargissement de la typologie des sources a permis à Yann Cantin de poser un regard nouveau sur l’histoire de la communauté sourde française dans son article « Les archives de la communauté sourde à Paris, quelles possibilités d’un regard élargi ? ». Ainsi, il fait entre autres appel à la généalogie et à la reconstitution des personnalités sourdes pour mieux comprendre les interactions entre les Sourds et la société française, mais également pour nuancer le portrait sombre de la communauté sourde à la Belle Époque, toujours véhiculé dans l’historiographie. L’apport de cette méthodologie est enrichi par l’emploi de nouvelles technologies comme la reconnaissance des caractères dans les archives numérisées et de nouvelles sources telles que les journaux sourds ou les archives privées.

Mises en perspective

Sur la base de cette présentation de l’ensemble des articles réunis, il nous sera permis de proposer, à présent, quelques points de synthèse et de mise en perspective générale. En partant de cas d’étude précis, les contributions de ce recueil font un état des lieux par rapport à une réflexion qui doit inévitablement rester en état de mouvance, ne serait-ce que pour demeurer fidèle à l’un des traits de caractère les plus nobles de l’être humain : la curiosité.

Pour les scientifiques, pouvoir se consacrer pleinement aux enjeux de la curiosité intellectuelle, sans contrainte de productivisme, est un privilège de noblesse. Mais il émane d’une noblesse qui a des obligations : envers la communauté scientifique, sa cohésion et son intégrité, mais aussi envers les autres membres de la société. Elle fuit ainsi toute forme d’élitisme en valorisant la beauté et la diversité du savoir-penser et du savoir-faire ainsi que de leurs lieux d’action respectifs. Il n’y a pas de différence fondamentale de valeur entre le savoir du scientifique et les autres savoirs d’une société. Les scolastiques du Moyen Âge souscrivaient à cette idée d’une unité des savoirs, chaque fois qu’ils puisaient une métaphore dans le vaste champ des arts et métiers.

La tour d’ivoire des sciences comptera parmi les hauts lieux de démocratisation des savoirs de notre société tant qu’elle restera fidèle aux obligations que nous venons d’évoquer, par le soin accordé à sa beauté inhérente et aussi par l’ouverture de ses portes et fenêtres au dialogue. C’est dans cette perspective que tous les auteurs de ce volume assument fièrement l’expertise et la spécialisation scientifiques tout en s’engageant dans une réflexion sur les formes d’insertion du savoir historique dans les contextes sociaux d’aujourd’hui, des milieux de la pratique plus restreints jusqu’à la société dans son intégralité. Dans cet esprit, les auteurs mettent en regard des évolutions historiques avec des réalités sociales et environnementales actuelles. Ils proposent, à plusieurs reprises, des formes de démocratisation—souvent à l’aide du numérique et de l’informatique—de connaissances historiques. Des recherches fondamentales, parfois hautement spécialisées, s’ouvrent ainsi à des logiques de communautés de savoir plus larges sans sacrifier pourtant la complexité des sujets étudiés. La dimension engagée d’une telle définition de l’historien-chercheur est mise en avant surtout quand il s’agit de saisir les rapports entre la mémoire individuelle et la mise en mémoire collective, ou encore dans l’étude de la place historique de groupes défavorisés ou marginalisés. La recherche historique prend ainsi une place fondamentale dans une réflexion plus large sur les enjeux de l’égalité sociale.

De façon générale, les propositions de diversification de la typologie des sources et de leur traitement ouvrent des perspectives intéressantes pour oser un retour à la question des réalités sociales que les témoignages historiques nous présentent en miroir. Il ne s’agit pas de rétablir la notion hiératique de la vérité historique. Peut-être le moment est simplement venu d’aller au-delà d’une histoire des discours sans pour autant remettre en question sa contribution à la problématisation des rapports entre source et réalité historique.

La curiosité intellectuelle est sans doute un des principaux moteurs de toute société, passée, présente et future. Il s’agit cependant d’un moteur pour lequel il sera difficile, voire impossible, de déterminer de quoi il se nourrit de préférence. Et il n’est pas rare qu’il nous permette d’aller dans plusieurs directions à la fois. Ces deux qualités seront valorisées par les uns et considérées comme un défaut par les autres. L’imprévisibilité potentielle et la dimension pluridirectionnelle de la recherche comme forme professionnalisée et institutionnalisée de la curiosité humaine montrent que le concept de progrès n’offre sans doute pas le seul mode de réflexion et d’action pour cadrer ces deux spécificités, un concept dont la pertinence est d’ailleurs de plus en plus remise en question. Les auteurs de ce volume proposent une autre voie méthodologique qui met en avant l’aspect indéfini de principes scientifiques importants, comme la distinction et la hiérarchisation, qui, autrement dit, embrasse l’éclectisme méthodologique. Il est fascinant de constater que dans les articles réunis, ce choix n’est pratiquement jamais accompagné d’une réflexion de fonds sur cet éclectisme. Nous l’avons déjà souligné : ce choix émane plutôt d’un pragmatisme face aux exigences du matériel historique rassemblé. Il s’agit donc d’une démarche empirique. C’est aussi dans ce sens que les auteurs nous invitent dans leurs ateliers de travail respectifs. On nous rappelle, en fin de compte, que l’histoire comme discipline académique est avant tout une méthode, une idée à partir de laquelle les auteurs développent des réflexions stimulantes et encourageantes sur la place d’une telle méthode dans le monde dans lequel elle continue d’évoluer.

Remerciements

Pour clore cette introduction, nous aimerions remercier toute l’équipe de la revue Les Cahiers d’histoire et plus particulièrement les corédacteurs sortant de l’époque, Catherine Paulin et Vincent Houle, pour leur accompagnement durant la préparation de ce numéro, mais également, pour nous avoir donné l’occasion de faire un numéro dont les sources constituaient le fondement. Outre le travail exceptionnel de l’équipe des Cahiers d’histoire, nous tenons à adresser un remerciement spécial aux évaluateurs anonymes et aux auteurs pour leur implication et pour le partage de leur passion pour l’histoire et de leur domaine de spécialisation. Sans eux, la réalisation de ce numéro aurait été impossible. Nous espérons avoir fait honneur à la mission de la revue des Cahiers d’histoire d’offrir une plateforme de diffusion pour les jeunes chercheurs. Nous souhaitons que ce numéro sur la typologie et la méthodologie d’analyse des sources encourage les chercheurs à poursuivre leur réflexion sur cette base essentielle du travail de l’historien.