Présentation du dossier sur la francophonie[Notice]

  • Linda Cardinal et
  • Rémi Léger

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  • Linda Cardinal
    Chaire de recherche francophonie et politiques publiques, École d’études politiques, Université d’Ottawa, Pavillon Desmarais, 55 Laurier est, Pièce 9145, Ottawa, Ontario, Canada K1N 6N5

  • Rémi Léger
    Chercheur postdoctoral, École d’études politiques, Université d’Ottawa, 55 rue Laurier Ouest, Pièce 3182, Ottawa, Ont. K1N 6N5

Après plus de vingt ans de débats sur les droits des minorités nationales et ethniques au sein de la philosophie politique au Canada et au Québec, un dossier sur les minorités francophones hors Québec s’impose. Les auteurs des textes dans ce dossier se proposent de faire, voire de refaire, des minorités francophones un enjeu de réflexion de la philosophie politique canadienne et québécoise. Depuis les années 1960, les luttes des francophones hors Québec ont donné lieu à des formes de reconnaissance importantes dans le domaine de l’éducation et de la justice. Sur les plans institutionnel et juridique, la Charte canadienne des droits et libertés a joué un rôle fondamental sur l’évolution des droits linguistiques partout au pays. La Cour suprême du Canada a proposé des interprétations larges et généreuses des droits linguistiques confirmant ainsi le droit aux minorités de langue officielle de contrôler leurs écoles – la pierre angulaire d’une part importante de leurs revendications. Or, les revendications formulées par les minorités francophones ainsi que leurs avancées sur le plan institutionnel et juridique ont eu très peu d’échos en philosophie politique, que l’on pense, au premier chef, aux travaux de Will Kymlicka pour ce qui est du Canada. Les théoriciens, sauf exception, ont ignoré la situation des minorités linguistiques comme les francophones hors Québec, dispersées sur un territoire, créant ainsi une fausse polarisation entre les minorités nationales et les minorités ethniques. En revanche, il existe, au Canada et au Québec, un débat normatif très riche sur les enjeux du pluralisme, pensons au débat sur les accommodements raisonnables. Si le débat sur la place du Québec au sein du fédéralisme canadien bat de l’aile, il ne fait aucun doute que la philosophie politique a contribué à une meilleure acceptation des revendications historiques des minorités nationales. Malgré les critiques des chercheurs en milieu francophone hors Québec, à ce jour, peu de chercheurs ont tenté de combler les lacunes de la philosophie politique en ce qui a trait à la situation des minorités linguistiques. Or, de nouveaux chercheurs ont décidé de reprendre le débat comme en témoignent plusieurs des contributions à ce numéro et de relever le défi de le faire avancer sur les plans normatif et institutionnel. La prémisse de départ du présent dossier est donc double. D’abord, nous postulons que les recherches en philosophie politique canadienne et québécoise peuvent contribuer à approfondir la compréhension des rapports entre l’État canadien et les minorités francophones à l’instar des débats sur les minorités nationales et les minorités ethniques. Ensuite, que la réflexion au sein de l’étude des minorités francophones puisse aussi constituer un tremplin important pour théoriser la question des minorités francophones en lien avec les débats en philosophie politique. Cependant, avant d’en arriver à la problématique des textes dans le cadre de ce dossier, il est important de revenir sur le Québec contemporain. Dans un premier texte, Marie-Odile Magnan s’interroge sur l’identité collective anglophone au Québec et ses rapports avec la majorité francophone. Selon l’auteure, dans les années 2000, certaines thèses ont suggéré que le bilinguisme élevé des jeunes générations anglophones a mené à un « brouillage des frontières entre anglophones et francophones ». À partir d’une étude qualitative réalisée auprès de 33 jeunes adultes issus de l’école de langue anglaise de la ville de Québec, l’auteure entend « explorer les référents imaginaires à partir desquels les acteurs de langue anglaise se définissent – du moins dans le contexte de la ville de Québec où règne une forte majorité francophone ». Pour sa part, Emmanuelle Richez constate que les communautés francophones et acadiennes du Canada (CFAC) ont été « jusqu’à présent les principaux …