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Introduction

Depuis quelques années, les dispositifs de mise en oeuvre de la RSE proposés aux dirigeants de PME suscitent un intérêt croissant de la part des collectivités territoriales, des réseaux consulaires, des réseaux professionnels et des chercheurs en RSE et en PME (Murillo et Lozano, 2009). En effet, pour les porteurs de démarches collectives (acteurs consulaires, réseaux professionnels…), l’enjeu est de favoriser l’intégration de pratiques RSE dans les PME. Pour le monde académique, il est question d’approfondir les connaissances relatives aux leviers de diffusion de la RSE en PME (Schneider-Maunoury, 2000 ; Quairel et Auberger, 2005 ; Berger-Douce, 2005, 2006, 2008). Ces études ont surtout mis en avant la pertinence des démarches collectives, mais peu ont cherché à l’analyser effectivement. Parmi les travaux précurseurs se trouvent ceux de Berger-Douce (2006). Ceux-ci ont abordé la question sous l’angle de l’appropriation. L’auteur mobilise le cadre conceptuel proposé par De Vaujany (2005) pour qualifier la démarche collective d’un réseau au service de l’appropriation de la RSE pour les PME. Notre étude s’inscrit dans la lignée de celle de Berger-Douce, mais propose une perspective d’analyse complémentaire, plus axée sur une lecture processuelle et temporelle de l’appropriation. Dans notre étude, l’appropriation de la RSE n’est pas seulement étudiée au niveau global, à savoir au niveau de la démarche RSE du réseau. Elle est aussi et surtout étudiée au niveau des adhérents du réseau. Dans un contexte particulier de démarches RSE proposées par un réseau de pairs, notre étude a pour objectif d’identifier les dynamiques (ou processus) d’appropriation de ces dispositifs par les dirigeants de PME, membres du réseau.

La première partie de l’article pose les bases théoriques de notre réflexion en apportant des éléments de compréhension sur les logiques d’appropriation d’une démarche RSE, proposée dans le cadre d’un groupement professionnel de dirigeants de PME. Sur le plan théorique, nous proposons d’abord d’étudier la notion de performance au regard de la RSE, car cette notion est au coeur des réflexions sur la RSE (Szekely et Knirch, 2006 ; St-Pierre et Cadieux, 2011). Nous soulignons ensuite les particularités de la démarche RSE en milieu PME et en précisons les mécanismes d’appropriation par des dirigeants de PME. Nous mobilisons pour cela la théorie de l’appropriation telle que De Vaujany (2005) la définit. La deuxième partie expose le terrain de l’enquête et la méthodologie adoptée. L’étude relève ainsi d’une enquête qualitative exploratoire menée auprès de dirigeants ayant participé à une démarche collective, le dispositif de Performance Globale©[2], proposée par un réseau de pairs, le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD). L’analyse porte sur le suivi de quatre entreprises pendant plusieurs mois. Enfin, la troisième partie est consacrée à la présentation des résultats de la recherche. Ils mettent en évidence deux dynamiques principales d’appropriation de pratiques responsables par les dirigeants de PME.

1. L’appropriation de la RSE en PME

Dans un premier temps, nous nous intéressons au concept de performance au regard de la RSE. Nous montrons ensuite comment s’expriment les problématiques de performance en PME compte tenu de leurs spécificités. Nous mobilisons enfin les approches théoriques de l’appropriation pour mieux cerner l’engagement des PME dans un dispositif de Performance Globale©.

1.1. La performance au regard de la RSE

La performance d’entreprise est un concept qui occupe une place importante dans les travaux en sciences de gestion. Depuis les années 1950, plusieurs chercheurs se sont intéressés à cette notion et ont tenté de la définir (Bass, 1952 ; Georgopoulous et Tannenbaum, 1957 ; Quinn et Rohrbaugh, 1981 ; Keeley, 1984 ; Bescos, Dobler, Mendoza et Naulleau, 1993 ; Morin, Savoie et Beaudin, 1994 ; Bessire, 1999). La performance peut alors être considérée comme l’accomplissement des objectifs de l’organisation. Concept flou et polysémique (Bourguignon, 1995 ; St-Pierre et Cadieux, 2011), la performance prend tout son sens lorsqu’elle est envisagée de façon instrumentale. Dans une vision fermée de l’organisation, caractérisée par des droits de propriétés formels, la performance se mesure généralement par rapport aux objectifs des actionnaires et renvoie donc à une perspective économique. C’est ainsi que, selon Lorino (1996), « ... est performance dans l’entreprise tout ce qui, et seulement ce qui contribue à atteindre les objectifs stratégiques […] et ce qui contribue à améliorer le couple valeur/coût ». La performance se focalise alors sur le résultat affiché, mais porte également un jugement de valeur sur le résultat final, qu’il soit positif ou négatif et sur l’action qui a permis sa réalisation (Saulquin et Schier, 2010).

L’élargissement du champ de la responsabilité de l’entreprise modifie cet équilibre. La performance devient alors multidimensionnelle – ou globale ou durable selon les auteurs – en raison de la multitude des attentes des parties prenantes (Freeman, 1984 ; Mitchell, Agle et Wood, 1997 ; Saulquin et Schier, 2010 ; St-Pierre et Cadieux, 2011). Ainsi, la performance de l’entreprise « ne se mesure plus seulement en termes de performance financière, mais aussi en termes de performance sociale et environnementale » (Martinet et Reynaud, 2001 ; Margolis et Walsh, 2003 ; Barnett et Salomon, 2012). Ceci revient à considérer « la performance de l’entreprise aussi bien selon l’angle économique et financier, que selon le respect de l’ensemble de ses partenaires et de l’environnement naturel qu’ils partagent » (Férone, d’Arcimoles, Bello et Sassenou, 2001).

Cette notion est de plus en plus abordée dans les travaux académiques qui analysent la mise en place de stratégies responsables par les entreprises (Capron et Quairel, 2004). Ces stratégies recouvrent l’ensemble des actions d’une entreprise dans les domaines social, sociétal et écologique. La Commission des Communautés européennes en 2011 définit ainsi la RSE comme « un concept qui désigne l’intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes ». Adopter une stratégie RSE implique donc d’intégrer les principes de la Triple Bottom Line (Elkington, 1998) qui est la transposition de la notion de développement durable aux entreprises visant à la fois la performance économique, sociale et écologique – dans la continuité des 3P : People (équité sociale), Planet (préservation de l’environnement), Profits (croissance économique). C’est ainsi qu’aujourd’hui, aussi bien les pouvoirs publics que les acteurs économiques prennent progressivement conscience que le succès commercial et les bénéfices ne résultent pas uniquement d’une maximisation des profits à court terme, mais nécessitent au contraire un comportement qui, pour être orienté vers la rentabilité, n’en est pas moins responsable (Camison, 2010 ; Arend, 2014 ; Labelle, Courrent et Spence, 2014). Pour certains auteurs (Cohen et Winn, 2007), les entreprises ont même « le potentiel de renverser la tendance en conduisant le monde vers une nouvelle révolution industrielle » (2007, p. 30, notre traduction). Un nombre croissant de politiques publiques, de normes et d’outils d’accompagnement (Global Compact, SA 8000, ISO 26000, audits sociaux ou environnementaux…) est ainsi proposé aux entreprises afin de construire une stratégie responsable, diagnostiquer et contrôler les conséquences environnementales et sociales de leurs activités. Cependant, ces outils sont généralement proposés aux grandes entreprises et peu adaptés au contexte des PME (Quairel et Auberger, 2005 ; Baumann-Pauly, Wickert, Spence et Scherer, 2013) compte tenu de leurs spécificités.

1.2. La RSE appliquée aux PME

Certains auteurs (Capron et Quairel, 2004 ; Lapointe et Gendron, 2004 ; Jenkins, 2006 ; Gellert et De Graaf, 2012 ; Baumann-Pauly et al., 2013 ; Thornton et Byrd, 2013) s’accordent sur la pertinence d’une démarche particulière de RSE dans l’univers des PME par référence aux spécificités de ces organisations. Comme l’a précisé Julien (1996), « la PME est une entité propre où les fonctions sont toutes intégrées ou du moins fortement reliées et où le propriétaire-dirigeant en contrôle la plupart des aspects, et pour quelques-unes, y participe directement ». La stratégie y est bien souvent implicite, à court terme et fondée sur la vision du dirigeant (Julien et Marchesnay, 1996 ; Spence, 1999). Les relations de proximité que ce soit au sein de l’entreprise ou dans les relations avec les clients, fournisseurs et autres partenaires (Torrès, 2003) sont également des éléments déterminants pour caractériser les PME.

Dans ce cadre, l’intégration de la RSE en PME va fortement dépendre des représentations que s’en fait le dirigeant. Ainsi la conviction du dirigeant (Paradas, 2006, 2008 ; Thornton et Byrd, 2013) et la recherche d’une légitimité (Marchesnay, 2009), associées à la difficulté de trouver des compétences fondamentales pour le développement de son activité (Mathieu et Reynaud, 2005 ; Thornton et Byrd, 2013) peuvent constituer des leviers d’engagement responsable déterminants en PME. Plusieurs études (Schneider-Maunoury, 2000 ; Delpuech, 2009 ; Gellert et De Graaf, 2012 ; Baumann-Pauly et al., 2013 ; Thornton et Byrd, 2013) montrent ainsi que les PME ayant entamé des démarches de responsabilisation, souvent initiées par des dirigeants conscients de l’enjeu de concilier rentabilité et responsabilité, avaient bénéficié de dispositifs d’accompagnement et d’évaluation. Se présentant sous la forme d’autodiagnostics ou de démarches collectives, ces dispositifs étaient pour la plupart construits à partir d’expériences de chefs d’entreprise. Ces guides, nombreux et variés (guide de la performance globale du CJD, bilan sociétal du CJDES, SME Key du réseau CSR Europe, SD 21000 de l’AFNOR, AFAQ 1000 NR de l’AFAQ/AFNOR…), ont tous la particularité de prendre en compte les spécificités de la PME afin d’aider le dirigeant à acquérir une réflexion stratégique orientée vers la performance globale. Il semble donc nécessaire de comprendre comment les dirigeants de PME s’engagent dans des dispositifs d’accompagnement RSE afin de pouvoir proposer des outils adaptés à leurs besoins et leurs caractéristiques (Walker, Redmond, Webster et Le Clus, 2007 ; Parker, Redmond et Simpson, 2009 ; Redmond et Walker, 2009). Or bien que ces dispositifs d’accompagnement et d’évaluation se développent, peu d’études se sont intéressées à la manière selon laquelle les dirigeants de PME se les approprient (Berger-Douce, 2006 ; Moore et Spence, 2006).

Dans un tel contexte, comprendre comment une démarche RSE peut aider les PME à en intégrer les principes dans leur stratégie et leur fonctionnement revient à s’interroger sur la manière, dont le dirigeant s’approprie les actions et les outils proposés dans le cadre de ce dispositif.

1.3. L’engagement des PME dans une démarche RSE : une question d’appropriation

Dans notre étude, nous mobilisons plus particulièrement les travaux de De Vaujany (2005) pour comprendre les logiques d’appropriation de la RSE par les dirigeants de PME. L’appropriation fait référence à deux notions (Mallet, 2006) : d’un côté la notion d’adaptation qui renvoie à l’idée de se conformer à une situation, ou à quelque chose, et de l’autre à la notion d’acceptation qui fait référence à l’idée de s’attribuer quelque chose, de la faire sienne. Dans un tel schéma, l’appropriation d’un objet, qu’il soit un outil ou une démarche, implique qu’on comprenne au départ l’objet et son utilisation pour pouvoir ensuite le mobiliser et le transformer pour des situations nouvelles. Les travaux de De Vaujany (2005) s’inspirent principalement de ceux de Swanson et Ramiller (1997), d’Orlikowski, Okamura et Yates (1999) et de Desanctis et Poole (1994), issus du structurationnisme anglo-saxon (courant initié par Giddens, 1984). La particularité de ces approches est de considérer les outils ou les méthodes comme des objets socialement construits. Elles reconnaissent ainsi l’importance des relations qui lient l’outil introduit, les individus concernés et le contexte organisationnel et relationnel dans lequel cela s’inscrit.

Comme le soulignent Proulx (2002) et De Vaujany (2005), l’appropriation s’inscrit dans un processus d’accès, d’utilisation puis de transformation de l’objet. Son caractère est contingent dans la mesure où il est nécessaire, pour en comprendre la dynamique, de prendre en compte à la fois les acteurs concernés par l’appropriation, les relations (souvent complexes) par lesquelles s’opèrent l’appropriation et les actions proposées (à travers les outils, les objets et les règles) constituant l’objet de l’appropriation. L’étude de cette dynamique nécessite donc avant tout de comprendre les mécanismes qui sous-tendent le processus d’appropriation. Selon Proulx (2001), l’appropriation implique l’interdépendance de trois mécanismes : le learning by doing (l’apprentissage en faisant), le learning by using (l’apprentissage en utilisant) et le learning by interacting (l’apprentissage en interagissant). L’appropriation est dans ce cadre une affaire d’individus au sein d’un collectif et renvoie donc à la fois à des dimensions cognitives et comportementales, mais aussi à la mise en action des connaissances créées. De Vaujany (2005) s’inscrit dans la même lignée, mais propose un cadre conceptuel de l’appropriation plus riche. S’inspirant des travaux du structurationnisme anglo-saxon (cités plus haut), il offre une meilleure compréhension de son caractère contingent. Pour que l’appropriation soit possible, il est nécessaire que l’utilisateur acquière une certaine maîtrise « technique » de l’outil, mais aussi qu’il lui donne du sens (Desanctis et Poole, 1994). Or, les objets (outils, démarches, dispositifs et/ou règles) peuvent être « détournés », réinterprétés voire instrumentés (flexibilité interprétative et instrumentale des outils). L’appropriation se révèle ainsi protéiforme dans la mesure où ces outils, ces démarches peuvent, selon les acteurs, prendre des statuts particuliers. Dans cette perspective, De Vaujany (2005) propose d’inscrire l’appropriation dans trois perspectives interdépendantes (rationnelle, sociopolitique et psychocognitive) (Tableau 1).

Tableau 1

Les trois dimensions de l’appropriation (d’après De Vaujany, 2005)

Les trois dimensions de l’appropriation (d’après De Vaujany, 2005)

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Sur ces bases, le passage d’une phase d’adaptation à une phase d’acceptation d’un objet va dépendre des perspectives d’appropriation activées par les acteurs. De Vaujany (2005) préconise de découper le processus d’appropriation en plusieurs phases. Ce dernier débute par une phase qualifiée de « préappropriation » où l’outil, la démarche fait l’objet d’une première interprétation par l’utilisateur. Si une acceptation minimale s’opère, le processus entre alors dans une phase « d’appropriation originelle » au cours de laquelle les mécanismes d’appropriation décrits plus haut (rationnel, sociopolitique et psychocognitif) sont activés. Cette seconde phase se concrétise par le développement de routines, de réflexes d’utilisation. Dans une troisième phase, la démarche ou l’outil pourra faire l’objet d’une « réappropriation » en débouchant sur de nouvelles routines. Selon un tel schéma, le processus d’appropriation débute avant la démarche proposée et se poursuit bien après les premières routines d’utilisation.

Cette approche a été éprouvée dans le cadre d’études variées portant sur l’intégration d’outils de gestion (les NTIC par exemple) ou encore sur l’intégration de démarches stratégiques nouvelles. Dechamp et Romeyer (2006) ont notamment mobilisé ce cadre d’analyse pour expliquer la manière particulière, dont a été mise en oeuvre une nouvelle gouvernance interne au sein d’un CHU. La nouvelle gouvernance impliquait un management décentralisé au niveau des pôles du CHU et une participation active des médecins responsables de ces pôles. Ne souhaitant pas remettre en question leur positionnement et leur rôle professionnel, les médecins se sont approprié cette nouvelle gouvernance dans une perspective sociopolitique en la détournant et en l’éloignant ainsi de la vision initiale souhaitée.

L’utilisation du cadre conceptuel de De Vaujany dans des contextes variés nous invite donc à le mobiliser dans le cadre de la RSE. Avant nous, Berger-Douce (2006) a analysé l’action de sensibilisation au management environnemental menée par une chambre consulaire, en mobilisant les différentes perspectives appropriatives décrites plus haut. L’auteur a ainsi souligné les caractéristiques stratégiques et opérationnelles du dispositif mis en place par la chambre de commerce et d’industrie de Valenciennes (réunions de groupe, sessions de formation collective, audits croisés, utilisation de grilles d’analyse, etc.). Dans son étude, Berger-Douce a avant tout cherché à préciser le pouvoir de diffusion de la démarche collective orientée sur des principes de RSE. Elle a ainsi pu mettre en avant l’intérêt de mobiliser le cadre conceptuel de De Vaujany. Son analyse porte cependant sur la manière, dont la démarche est diffusée au niveau collectif. Elle ne permet pas de comprendre la manière, dont le dispositif d’accompagnement a concrètement aidé les dirigeants à mettre en oeuvre leur engagement responsable dans leur entreprise. En se focalisant plus particulièrement sur les dirigeants, notre étude se démarque ainsi de celle de Berger-Douce. En cherchant à analyser la manière, dont ces derniers s’approprient une démarche RSE proposée par le réseau, dont ils sont membres, nous apportons alors une analyse complémentaire. L’objectif visé est également d’accorder une place plus importante aux dimensions temporelle et processuelle de l’appropriation.

Dans la grille de lecture que nous proposons pour étudier les dynamiques d’appropriation des dirigeants (Figure 1), nous mobilisons le cadre théorique proposé par De Vaujany en y associant des éléments spécifiques à la PME.

Figure 1

Lecture interprétative du degré d’appropriation de la RSE en PME

Lecture interprétative du degré d’appropriation de la RSE en PME

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L’engagement des dirigeants de PME dans une démarche RSE et la mise en oeuvre qui en sera faite au sein de l’entreprise s’inscrit donc dans un processus d’appropriation caractérisé par trois phases – phase de préappropriation, phase d’appropriation originelle et phase de réappropriation. Au regard des développements précédents, la manière particulière, dont les dirigeants s’approprieront la démarche va dépendre principalement des dimensions d’appropriation qu’ils activent et des valeurs et convictions qu’ils portent à l’égard de la RSE.

Les dimensions (rationnelle, sociopolitique et psychocognitive) jouent un rôle particulier pour pouvoir passer, dans le processus d’appropriation, de la phase « d’appropriation originelle » aux phases de routinisation et de « réappropriation ». Comme le souligne De Vaujany (2005), ces dimensions sont interdépendantes, mais leur intensité de mobilisation peut différer et ainsi expliquer des dynamiques d’appropriation variées. Par sa place centrale dans la PME, le dirigeant va peser sur le sens qui sera donné à la démarche RSE. Les valeurs, les convictions de ces derniers à l’égard de la RSE (Paradas, 2007, 2008), le rôle des représentations des dirigeants sur leur environnement et la vision qu’ils ont de leur activité (Julien et Marchesnay, 1996) vont jouer un rôle déterminant dans l’intégration et l’acceptation de la démarche RSE.

L’approche de De Vaujany offre ainsi un cadre d’analyse intéressant pour expliciter la manière, dont les outils sont mis en oeuvre au sein des organisations. Mobilisée dans différents contextes (PME, grandes entreprises) et pour des outils et démarches variés (outils de gestion, démarches stratégiques), elle nous semble particulièrement adaptée pour étudier l’intégration de démarches RSE en PME.

À partir de la grille présentée dans la figure 1, nous proposons donc d’étudier comment le processus d’appropriation d’une démarche RSE proposée par un réseau de dirigeants de PME s’opère effectivement et selon quelles logiques il conduit à des degrés de mise en oeuvre variés de la démarche RSE dans les entreprises membres. Nous allons à présent présenter l’étude que nous avons menée sur le dispositif d’accompagnement et d’évaluation de la RSE proposé par le Club des Jeunes Dirigeants (CJD).

2. Le cadre méthodologique de la recherche

Nous décrivons dans ce qui suit le dispositif de RSE investigué et précisons la méthodologie adoptée.

2.1. Le dispositif de Performance Globale© du CJD

Le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) est un mouvement patronal né en 1938 pour défendre des valeurs et des actions prônant un libéralisme responsable au sein de la société. Il regroupe 106 agences locales réparties sur 17 régions et plus de 3 600 adhérents. Les membres du CJD sont principalement des chefs d’entreprise ou des cadres dirigeants disposant d’une autonomie en matière de management et de gestion et désireux de rompre leur isolement, de prendre du recul sur le travail quotidien et de se former au métier d’entrepreneur. Cette association de dirigeants se veut ainsi un lieu d’échanges, de réflexions et d’expérimentations afin d’offrir à tout jeune dirigeant la possibilité de progresser et de faire progresser son entreprise. Pour cela, la démarche du réseau se structure autour de réunions plénières, de formations, de groupes de travail centrés sur la réflexion stratégique et d’un processus d’accompagnement.

C’est dans ce cadre que le CJD offre un ensemble d’outils permettant aux dirigeants de mener des réflexions tenant compte des trois piliers de la RSE, même si le CJD lui préfère le terme de performance globale afin de mieux exprimer la question de l’équilibre entre le social, l’économique et l’environnemental. Le guide et le concours de la Performance Globale© ont été développés dans cette optique et témoignent de l’engagement responsable du réseau et des valeurs qu’il défend.

Publié en 2004 après deux années d’apprentissage, le guide de la Performance Globale© s’appuie sur l’expérience de plus de 700 dirigeants, membres du CJD. Aujourd’hui, cet outil d’autodiagnostic est offert à chaque nouvel adhérent ; il sera amené à l’utiliser lors de la commission « Start »[3]. Ce guide ambitionne de permettre à tout dirigeant de piloter son entreprise selon une logique de responsabilité sociale, sociétale et environnementale. Pour cela, il l’invite à se poser les questions pertinentes sur ses valeurs et celles de l’entreprise, sur les processus de concertation et de décision mis en place avec ses parties prenantes et sur les stratégies relatives à chaque partie prenante. Il permet ainsi d’élaborer un diagnostic et d’identifier des enjeux importants pour l’entreprise et des points d’amélioration.

Le concours de la Performance Globale© est, quant à lui, organisé en partenariat avec des établissements de l’enseignement supérieur. Le concours se déroule sur une période de 6 mois et consiste pour une entreprise volontaire, membre du CJD, de permettre à une équipe d’étudiants issus d’écoles de commerce ou de master universitaire en management de poser un diagnostic concernant son engagement RSE et de proposer des actions concrètes d’amélioration. Pour cela, l’entreprise et les étudiants peuvent s’appuyer sur le guide de la Performance Globale©.

En résumé, le guide et le concours font du parcours de Performance Globale© proposé par le CJD un dispositif d’accompagnement spécifique qui permet à chaque dirigeant d’acquérir progressivement les connaissances nécessaires à l’élaboration d’une stratégie responsable. Le cadre de l’étude étant posé, nous présentons dans ce qui suit la démarche d’investigation empirique.

2.2. La méthodologie de la recherche

Cette recherche s’inscrit dans une démarche qualitative à visée exploratoire (Yin, 1989 ; Wacheux, 1996). Ce choix s’explique par la nature de l’objet de recherche. En effet, comprendre les mécanismes individuels d’appropriation d’une démarche de RSE nécessite le recueil de données qualitatives afin d’accéder au vécu des acteurs.

Pour ce faire, nous avons opté pour la méthode des cas. En effet, il nous semblait important de lier les mécanismes d’appropriation individuels à une situation managériale précise. Le nombre d’entretiens a été défini selon le principe de saturation sémantique (Thiétart, 2003). C’est ainsi que quatre entreprises ont été étudiées. Les entreprises interrogées ont été sélectionnées en fonction de plusieurs critères (Tableau 2) :

  • tout d’abord, nous nous sommes intéressés aux données contextuelles telles que l’année d’intégration au CJD, l’année de participation au concours, le contexte dans lequel se sont effectués la démarche et le niveau d’appropriation plus ou moins avancé de chacun des adhérents interrogés ;

  • nous avons ensuite collecté des informations concernant la taille, élément fondamental dans la définition de la PME (selon la Commission européenne, l’effectif de l’entreprise ne doit pas dépasser 250 personnes) ainsi que le secteur d’activité. Ces éléments sont essentiels dans cette recherche pour envisager des pistes potentielles d’explication.

Sur ces différents critères, et afin de garantir la richesse de l’analyse, nous avons cherché à diversifier le profil des entreprises de notre échantillon.

Tableau 2

Caractéristiques signalétiques des entreprises interrogées

Caractéristiques signalétiques des entreprises interrogées

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Pour chaque entreprise, l’enquête s’est donc centrée sur le retour d’expérience des quatre dirigeants. Il s’agissait de connaître les motivations qui les avaient poussés à s’engager dans le concours, de cerner la manière, dont cette expérience avait été vécue et de savoir si cette démarche avait laissé des traces dans les entreprises. Nous avons ainsi élaboré une grille d’entretien structurée autour des thèmes suivants :

  • les raisons de la participation au concours de la Performance Globale© : ce thème permet de comprendre ce qui a amené le dirigeant à s’engager dans cette démarche ;

  • le vécu de la démarche : nous souhaitions recueillir des éléments sur la manière, dont le dirigeant s’est approprié la démarche, les temps forts et les obstacles vécus ;

  • les apports de la démarche : nous souhaitions mettre en évidence les répercussions de la démarche au niveau personnel et organisationnel en termes financier, environnemental, social et sociétal.

La collecte des données s’est effectuée par entretiens individuels semi-directifs (deux entretiens d’une durée moyenne d’une heure et demie chacun, soit huit entretiens au total) entre mai et septembre 2009. Nous nous sommes également appuyés sur des données secondaires (des rapports réalisés par des étudiants dans le cadre du concours de la Performance Globale© et des documents internes).

S’agissant de l’analyse de l’appropriation, notre étude tiendra plus particulièrement compte des dimensions sociopolitique et psychocognitive. La dimension rationnelle reste en retrait dans notre travail. Elle implique en effet de mieux cerner les actions à mener au niveau du dispositif visant à optimiser son fonctionnement (orientations et décisions prises par le bureau national du CJD). Ces dernières n’ont pas fait l’objet d’observations directes.

Nous avons ensuite procédé à la retranscription des entretiens, effectué un codage de l’ensemble des données recueillies et mené une analyse de contenu thématique (Bardin, 1998) à l’aide du logiciel NVivo 8. Cet outil nous a permis d’élaborer un dictionnaire de thèmes selon onze codes (répartis entre trois codes de catégorie de niveau 1 et huit codes de catégorie de niveau 2, présentés dans le tableau 3). Nous avons regroupé les phénomènes en fonction des similarités et différences observées lors de l’analyse des discours.

Une fois la phase de codage terminée, une analyse de contenu thématique, verticale (intrainterview) et horizontale (interinterviews), a été menée (Bardin, 1998). Celle-ci a permis d’identifier et d’analyser les différents mécanismes qui sous-tendent le processus d’appropriation de la démarche de RSE proposée par le CJD.

Tableau 3

Codes liés à l’appropriation

Codes liés à l’appropriation

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3. L’analyse du processus d’appropriation de la démarche RSE du CJD : des dynamiques et des mécanismes à l’oeuvre variés

Dans un premier temps, nous présentons les cas en procédant à une analyse comparative des actions menées par les dirigeants dans les différentes phases du processus d’appropriation. Cette première analyse révèle des degrés variés d’appropriation de la démarche de Performance Globale©. Dans un second temps, nous procédons à une lecture interprétative des cas à partir de la grille d’analyse issue de notre cadre théorique. Ce deuxième niveau d’analyse permet ainsi de mieux cerner les différences constatées et les dynamiques d’appropriation associées.

3.1. L’appropriation de la démarche RSE par les dirigeants

Pour analyser les quatre cas, nous avons distingué deux grandes périodes : la participation au concours et la mise en oeuvre de la démarche de RSE. À partir des discours des dirigeants, nous avons repéré, pour chaque période, des preuves d’engagement et de mise en oeuvre de la démarche. Cette dernière revêt des formes variées qui s’apprécient au regard de la nature (corrective ou réinterprétative) des actions menées par les dirigeants et de leur variété (les différents volets de la RSE).

3.1.1. La participation au concours

Pour les quatre PME étudiées, la première période s’est déroulée lors d’une réunion plénière au cours de laquelle les entreprises ont été sollicitées après que la démarche du concours leur ait été présentée. Pour les quatre dirigeants, l’engagement dans la démarche s’est fait avant tout par devoir dans le but de rendre service au réseau.

Dirigeant de la PME 1 : « Au départ, j’ai fait le concours parce qu’il fallait du monde, des volontaires… et puis pour voir ce que c’était… C’est toujours intéressant d’avoir un regard extérieur, parce que vous vous êtes dans le quotidien ».

Dirigeant de la PME 2 : « Je me suis engagé dans le concours par devoir sociétal envers le CJD, mais aussi envers les étudiants. En tant qu’ancien compagnon, j’ai le souci de transmettre des valeurs et des savoirs aux autres ».

La participation des dirigeants au concours de la Performance Globale©, en revanche, n’a pas été vécue de la même façon. Pour les dirigeants des PME 1 et 3, cette participation a été un moyen de mieux cerner le concept de RSE. La conviction personnelle du dirigeant de la PME 1, déjà forte avant la participation au concours, ainsi que l’esprit d’ouverture du dirigeant de la PME 3 n’ont sans doute pas été neutre dans cette étape du processus.

Dirigeant de la PME 1 : « C’était à partir de l’année de la canicule que je me suis vraiment rendu compte qu’il y avait un problème. La canicule est peut-être complètement un hasard, mais c’est là où j’ai commencé à m’intéresser à l’écologie. Avant je m’y intéressais, mais pas tant que ça. Et puis là du jour au lendemain, plus de bagnole, le vélo tous les jours : enfin un changement radical de vie. Donc après, c’est créer sa boîte et essayer de la concilier avec ses idées, et les faire partager aux autres ».

Dirigeant de la PME 3 : « Les questions liées à la performance globale me paraissaient floues. J’avais envie d’en savoir plus ».

Pour les dirigeants des PME 2 et 4, le concours a servi avant tout à valider les choix stratégiques passés. Lors de cette période, le dirigeant de la PME 2 venait de reprendre l’entreprise et s’est trouvé rapidement dans une situation difficile avec une perte de chiffre d’affaires de 45 %. Le concours était pour lui un moyen de pointer les problèmes qu’il jugeait importants. Il reconnaît avoir orienté d’ailleurs les étudiants dans leur démarche d’évaluation. Le dirigeant de la PME 4, quant à lui, venait de créer son entreprise. Le concours était une occasion d’avoir un regard extérieur sur son entreprise. Contrairement au dirigeant de la PME 2, il a laissé « carte blanche » aux étudiants pour mener leur diagnostic.

Dirigeant de la PME 2 « C’était la première année du concours pour la section CJD, moi je venais d’arriver dans l’entreprise, je me suis dit : tiens ça peut être intéressant pour moi d’avoir un oeil extérieur à l’entreprise pour faire en fait mon miroir. Parce que dans une entreprise que l’on crée, on embauche les gens à son image, c’est comme ça. Une entreprise que vous reprenez, c’est les gens qui vous embauchent, ce n’est pas vous, donc faut s’intégrer dans le groupe, c’est hyper difficile ».

Dirigeant de la PME 4 : « Je me suis retrouvé un petit peu embringué là-dedans, démarrant mon entreprise en même temps… Je me suis dit que le concours c’était peut-être une opportunité pour nous… vérifier qu’on est sur les rails, vérifier que cette vision externe nous renvoie ce que nous on attend, nous renvoie ce qu’on pense avoir mis en oeuvre dans le cadre de la stratégie d’ouverture, donc on m’a dit qui lève la main ?, ben j’ai levé la main, sans crainte ».

3.1.2. La mise en oeuvre de la démarche RSE

Dans la deuxième période correspondant à la mise en oeuvre de la démarche, nous constatons aussi des démarches différentes selon les dirigeants.

Suite au concours, le dirigeant de la PME 1 a cherché à mieux formaliser sa stratégie et à impliquer ses salariés autour de valeurs communes en organisant des journées de concertation dans l’entreprise. Cela a abouti notamment à encourager des pratiques responsables chez les salariés (veiller à tout éteindre avant la fermeture de l’entreprise, utiliser systématiquement du papier recyclé, encourager les déplacements en transport en commun…). Il a également engagé des procédures de qualité, de transmission de savoirs et de participation salariale aux bénéfices de l’entreprise. Il a même confié à des étudiants en sociologie une enquête sur le climat social de son entreprise. Par ailleurs, il a mobilisé d’autres actions proposées par le dispositif du CJD, en participant à des commissions ad hoc et en animant sa propre commission. Il s’est aussi progressivement impliqué dans le dispositif en devenant coordinateur du concours. Cette implication n’a sans doute pas été neutre lorsqu’il a dû entamer un repositionnement de son activité initiale suite à une concurrence devenue trop forte. L’entreprise est ainsi passée d’une activité de redéploiement de sites radio téléphonie à une activité de conseils et de diagnostic énergétique, jugée aux dires du dirigeant plus saine et plus en lien avec le développement durable et ses valeurs.

Pour le dirigeant de la PME 3, la participation au concours a été selon ses dires « un élément déclencheur », prenant conscience que la RSE devait être intégrée dans la stratégie de l’entreprise. Différentes démarches ont été entreprises suite au concours. Une réflexion sur les valeurs responsables a été menée au sein de l’entreprise. Des journées de concertation ont été organisées afin de développer une vision plus partagée au sein de l’entreprise. Un système d’intéressement a également été mis en place. Ces changements ont surtout conduit à la réécriture du plan d’affaires pour les trois prochaines années autour des trois grands principes de la RSE.

Le dirigeant de la PME 3 : « Le premier travail est plutôt sur le social au sein de l’entreprise, et le sociétal avec les partenaires et c’est d’essayer d’avancer avec eux. On a mis en place l’intéressement en 2009. Donc c’est-à-dire qu’aujourd’hui on est dans les 2 % de boîtes de notre taille qui refilent du bénéfice. Bon voilà, c’est important ! Donc on a quelques actions, maintenant on aimerait un peu plus le formaliser. On est en train de réécrire le plan d’affaires des trois à cinq prochaines années. Pour nous c’est la stratégie que l’on place sur le développement durable. D’une vision un peu floue de management qui n’avait pas de nom, c’est passer à quelque chose de concret, sur lequel on peut s’appuyer, qu’on peut s’expliquer… »

Pour le dirigeant de la PME 2, la participation au concours de la Performance Globale© a débouché sur des actions plus limitées que celles menées dans les PME 1 et 3. Elles n’ont concerné qu’un seul volet de la performance globale, le volet social. Pour le dirigeant, ces points étaient prioritaires, venant de reprendre l’entreprise depuis peu. Après le concours, le dirigeant a effectué quelques réaménagements dans l’organisation du travail, a résolu certains problèmes liés à la communication interne et à la délégation du pouvoir.

Ces mesures ont cependant été mises en place progressivement, plusieurs mois après le concours, soit par manque de temps, soit par manque d’expérience. Par exemple, l’embauche d’un chef d’atelier pour décharger le dirigeant de la fonction production et lui permettre ainsi de se consacrer pleinement au développement commercial, n’a été envisagée, que deux ans après le concours. Le diagnostic issu de sa deuxième participation au concours, quatre ans plus tard, a cependant montré que plusieurs points déjà cités lors du premier concours (manque de communication interne, surcharge de travail, répartition des responsabilités dans l’entreprise…) nécessitaient encore d’être améliorés. Dès lors, les questions relatives au développement stratégique des différentes activités de l’entreprise restaient toujours tributaires des modes organisationnels et managériaux, nous laissant supposer une certaine difficulté de la part du dirigeant de la PME 2 à sortir d’une vision stratégique à très court terme. Dans un tel contexte, les actions mises en place restent avant tout des mesures correctives sans une prise de conscience plus poussée des principes RSE et donc d’une vision plus intégrative.

Le concours de la Performance Globale© n’a pas suscité, non plus, de la part du dirigeant de la PME 4 un engagement poussé dans une réflexion stratégique autour des trois volets de la RSE. Même s’il admet que le concours et le guide lui ont ouvert les yeux et l’ont encouragé à devenir « plus responsable ». Les actions, qui ont été mises en place, ont consisté à développer davantage de communication interne et externe. Le dirigeant a instauré un dialogue plus régulier avec ses employés et a clarifié les missions assignées à chacun. Il s’est également tourné vers des organismes d’insertion comme l’Association de gestion des fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) et l’organisme CAP Emploi, pour étoffer son réseau. Cependant, le dirigeant ne reconnaît pas, en fait, d’utilité particulière à tous les aspects de la démarche de la Performance Globale© pour son entreprise, compte tenu de son activité (trop jeune encore) et de sa taille trop réduite. Le concours a été surtout un moyen de confirmer ses choix stratégiques de démarrage.

Le dirigeant de la PME 4 : « Dans les grandes lignes, l’audit m’a confirmé que la stratégie de démarrage de mon entreprise n’était pas complètement en dehors du cadre. Il m’a également confirmé que pour certains points, notamment l’environnemental et le management, on a très peu la main pour répondre aux attentes de performance globale. Par contre, la participation au concours m’a permis de voir qu’au lieu de proposer uniquement les compétences de jeunes individus sur le marché, on pourrait proposer celles de retraités ou de personnes handicapées. On a mis en place, par l’intermédiaire du CJD, une démarche de relation avec les gens de l’AGEFIPH et de CAP Emploi. Voilà ce qui a été fait à l’issue du concours ».

Cette première analyse, comparant les actions menées par les dirigeants dans les différentes phases du processus d’appropriation, révèle des degrés variés d’appropriation de la démarche RSE. Pour les PME 2 et 4, cette mise en oeuvre de la démarche RSE est plutôt limitée. Les actions menées ont été de nature corrective dans une logique de mise en conformité, sans toutefois amener les dirigeants à rechercher une meilleure intégration des principes de la RSE dans leur réflexion stratégique. Pour les dirigeants des PME 1 et 3, on peut en revanche parler d’intégration et d’adaptation plus poussée des principes de RSE. Les actions mises en place ont conduit les dirigeants à repenser leurs modes relationnels (au sein de leur organisation, des parties prenantes externes, du développement des activités, etc.) les amenant à développer des orientations stratégiques nouvelles (repositionnement/redéploiement stratégique) autour des principes de la RSE.

Il s’agit à présent de mieux cerner les éléments et les mécanismes sous-jacents pour expliquer ces résultats contrastés en mobilisant la grille d’analyse présentée dans la figure 1.

3.2. L’interprétation des processus étudiés : vers le repérage de dynamiques d’appropriation

Les phases du processus d’appropriation décrites dans la figure 1 peuvent être réparties dans les deux grandes périodes que nous avons distinguées dans la présentation des cas – la participation au concours et la mise en oeuvre de la démarche de RSE. Ainsi, la première période liée au concours est apparentée à la présentation de la démarche à l’entreprise et à la participation effective de celle-ci au concours. Elle regroupe les phases de préappropriation et d’appropriation originelle. La période de mise en oeuvre traduit, quant à elle, la manière, dont la démarche se contextualise effectivement dans l’entreprise. La lecture interprétative des cas au regard de la grille d’analyse nous permet de repérer deux types de processus d’appropriation – un processus d’appropriation « d’éveil » et un processus d’appropriation « d’engagement » débouchant sur une réappropriation du dispositif RSE.

3.2.1. Un processus d’appropriation « d’éveil »

Ce type de processus concerne principalement les PME 2 et 4 (Figure 2). On observe chez elles de fortes similitudes dans les phases du processus d’appropriation. La phase d’acceptation minimale qui suit la phase de préappropriation et précède celle de l’appropriation originelle s’est faite par devoir sociétal dans le but de rendre avant tout service au réseau. Le concours de la Performance Globale© a été ensuite interprété comme un support d’apprentissage donnant la possibilité aux dirigeants d’avoir « un effet miroir ». Toutefois, cette recherche d’effet miroir a été plus ou moins détournée de son objet initial – le développement d’une démarche RSE – dans la mesure où les deux entreprises en question l’ont utilisée dans un tout autre intérêt – dans une logique de mise en conformité des choix stratégiques passés.

Figure 2

Un processus d’appropriation « d’éveil » (dirigeants de la PME 2 et dans une moindre mesure le dirigeant de la PME 4)

Un processus d’appropriation « d’éveil » (dirigeants de la PME 2 et dans une moindre mesure le dirigeant de la PME 4)

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Selon l’approche de De Vaujany (2005), l’appropriation de la démarche s’est faite par ces deux dirigeants principalement dans une perspective sociopolitique. Les phases suivantes du processus d’appropriation traduisant la mise en oeuvre de la démarche et regroupant la phase de mise en place de « routines d’utilisation » et la phase de « réappropriation » n’ont donné lieu qu’à des actions plutôt ponctuelles de nature corrective. La phase de mise en oeuvre s’est traduite par une adaptation de la démarche au contexte existant de l’entreprise sans que celle-ci ne s’inscrive dans une réflexion stratégique sur le long terme. Les deux dirigeants n’ont en outre pas cherché à mobiliser d’autres actions complémentaires du dispositif (Commission ad hoc notamment) ni au cours du déroulement du concours ni après.

Pour ces deux entreprises, la RSE est en quelque sorte passée au second plan, même si le concours leur a ouvert les yeux sur ce que représente cette démarche. Le détournement de la démarche associé aux convictions des dirigeants envers la RSE peu affirmées explique en grande partie la manière particulière, dont la démarche a été appropriée dans ces deux entreprises. Le processus d’appropriation dans un tel contexte est selon nous resté à l’état d’éveil pour le dirigeant de la PME 4. Pour le dirigeant de la PME 2, on pourrait même parler de « mise en veille » dans la mesure où sa deuxième participation au concours a révélé une situation très proche de celle analysée quatre ans plus tôt.

3.2.2. Un processus d’appropriation « d’engagement » conduisant à une réappropriation du dispositif

Ce type de processus concerne le dirigeant de la PME 1 et dans une moindre mesure celui de la PME 3 (Figure 3). Pour ces dirigeants, la phase d’acceptation s’est déroulée dans les mêmes circonstances que pour les dirigeants des PME 2 et 4. En revanche l’interprétation de la démarche a été différente. Les dirigeants ont accepté la démarche par devoir sociétal puis ils y ont participé afin d’avoir certes un oeil extérieur sur leur entreprise, mais aussi dans un but de mieux cerner le concept de RSE. L’utilisation du dispositif proposé par le CJD s’est donc faite dans une perspective d’appropriation sociopolitique et psychocognitive au sens de De Vaujany (2005).

Figure 3

Un processus d’appropriation « d’engagement » conduisant à une réappropriation du dispositif (dirigeants des PME 1 et 3)

Un processus d’appropriation « d’engagement » conduisant à une réappropriation du dispositif (dirigeants des PME 1 et 3)

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Les phases suivantes du processus d’appropriation à savoir la phase de mise en place de « routines d’utilisation » et la phase de « réappropriation » ont ensuite donné lieu à une mise en oeuvre de la démarche RSE beaucoup plus poussée que dans les cas précédemment étudiés. La démarche proposée par le CJD a été vécue par les dirigeants comme un élément déclencheur. Elle leur a permis d’enrichir leurs représentations personnelles et les a mis peu à peu dans une logique d’amélioration de leur entreprise au niveau global. L’appropriation du dispositif proposé par le CJD dans une perspective sociopolitique et psychocognitive a conduit les dirigeants à se réapproprier peu à peu la démarche RSE pour soutenir le développement stratégique de leur entreprise. Concernant le poids à accorder aux convictions des dirigeants dans cette dynamique d’appropriation, notre analyse sera des plus nuancées. Les convictions initiales fortes du dirigeant de la PME 1 et son implication dans le dispositif ont certainement joué un rôle dans cette dynamique. Quant au dirigeant de la PME 3, il n’était pas au départ spécialement engagé dans des réflexions sur la RSE. En revanche, une fois impliqué dans la démarche, il s’est davantage ouvert à ces questions.

Discussion et conclusion

Notre étude exploratoire a cherché à mieux cerner les logiques d’appropriation de démarches RSE collectives par des dirigeants de PME. L’observation de la démarche proposée par le CJD nous a conduits à mettre en évidence le rôle d’entraînement du concours dans l’appropriation des principes de RSE par les dirigeants de PME. Plusieurs apports théoriques découlent de notre analyse.

Tout d’abord, notre étude montre que la démarche RSE proposée par le CJD permet d’apporter, pour les quatre dirigeants interviewés, un éclairage certain sur la notion de RSE. Tous ont pris conscience de l’intérêt de considérer la performance de l’entreprise de manière responsable et dans une perspective globale, même si cette prise de conscience se traduit dans les faits par des niveaux variables d’intégration des principes responsables. Les différences observées sur la manière, dont la démarche a été appropriée par les dirigeants ne résultent pas tant du contexte particulier de chaque entreprise (type d’activité, type de concurrence) que des représentations que se font les dirigeants de la RSE. Notre travail confirme les études nombreuses menées sur la RSE en PME, soulignant l’importance à accorder aux représentations pour comprendre l’engagement responsable des dirigeants de PME (Julien et Marchesnay, 1996 ; Spence, 1999 ; Paradas, 2006 ; Thornton et Byrd, 2013). Toutefois, les représentations ne constituent pas le seul levier d’engagement, les dispositifs d’accompagnement publics et/ou professionnels, les démarches collectives proposant des référentiels ou des guides demeurent tout aussi déterminants en PME. La RSE nécessite en effet une réflexion complexe au niveau de l’entreprise. Son intégration implique bien souvent de repenser les relations entre l’entreprise et les diverses parties prenantes, voire de repenser la nature même de l’activité, sa raison d’être. En PME, cela ne peut se faire sans une évolution des représentations du dirigeant, acteur central de l’entreprise. La démarche proposée par le CJD semble ainsi offrir aux dirigeants un cadre propice à la réflexion stratégique.

Ensuite, les dynamiques identifiées – dynamique « d’éveil » et dynamique « d’engagement » – impliquant deux mécanismes d’appropriation différents : sociopolitique et psychocognitif (empruntés aux travaux de De Vaujany, 2005) apportent certaines précisions sur la manière, dont l’engagement responsable des dirigeants s’est opéré dans le cadre de la démarche RSE collective étudiée. Nos résultats apportent un certain éclairage sur les logiques sous-jacentes conduisant à des processus d’intégration différents. La nécessité d’affirmer leur implication au sein du réseau constitue un des premiers facteurs de leur participation au concours de la Performance Globale© proposé par le CJD (perspective sociopolitique). Une modification des représentations individuelles, rendue possible grâce à une prise de conscience, conduit également certains adhérents à s’approprier progressivement la démarche RSE (perspective psychocognitive). Nos observations et nos résultats corroborent ainsi les études soulignant l’importance des démarches collectives et le rôle que celles-ci peuvent jouer sur les représentations des dirigeants des PME (Schneider-Maunoury, 2000 ; Delpuech, 2009 ; Gellert et De Graaf, 2012 ; Baumann-Pauly et al., 2013 ; Thornton et Byrd, 2013). Notre travail rejoint dans une certaine mesure l’étude menée par Berger-Douce (2006) sur l’action de sensibilisation en management environnemental d’une chambre consulaire auprès de PME. Mobilisant les mêmes perspectives appropriatives (sociopolitique et psychocognitive) citées plus haut, l’auteur montre que le processus d’appropriation de la démarche collective étudiée s’inscrit plutôt dans une perspective psychocognitive pour les PME et sociopolitique pour l’acteur clé, à savoir la CCI. Bien que les perspectives d’analyse soient différentes, les résultats de notre étude et de celle de Berger-Douce (2006) mettent avant tout en évidence que les démarches collectives semblent plus efficaces que les actions individuelles pour intégrer la RSE dans la stratégie de la PME. Ces démarches collectives constituent ainsi un réel support d’apprentissage pour les dirigeants de PME.

De plus et de façon plus large, notre étude fait écho à d’autres travaux (Condon, 2004 ; Walker et al., 2007 ; Redmond et Walker, 2009) qui s’accordent à dire que l’apprentissage est le meilleur moyen d’inciter les PME à s’engager volontairement dans une démarche RSE. Ces travaux mettent notamment l’accent sur la nécessité de proposer des dispositifs d’accompagnement adaptés aux particularités des PME. Ces derniers reposeraient sur le développement d’actions incitatives à partir d’approches participatives tournées vers la résolution de problèmes stratégiques. Cela permettrait aux dirigeants de travailler sur leur propre activité, de bénéficier de conseils pratiques, de guides de réflexion, d’un partage d’informations (visites d’entreprises, échanges avec des écoles ou universités…). Notre étude montre que cette forme d’apprentissage par l’expérience et l’échange, favorisée par une démarche collective, semble particulièrement adaptée aux dirigeants de PME. Les actions proposées par le CJD, décrites dans notre étude (concours de la Performance Globale©, commission « Start ») ont en effet permis à certains dirigeants d’aller plus loin dans leur engagement responsable. La mobilisation de l’approche de De Vaujany a permis notamment de montrer que certaines actions ou certaines relations par lesquelles s’opère l’appropriation conduisent les dirigeants à activer des mécanismes d’appropriation (psychocognitif et/ou sociopolitique) qui vont favoriser, voire accélérer l’intégration de démarches RSE dans la stratégie de leur entreprise. Ces mécanismes sont interdépendants, mais l’intensité de leur mobilisation par les dirigeants peut varier et expliquer des dynamiques d’appropriation variées. Ils jouent ainsi un rôle particulier pour pouvoir passer, dans le processus d’appropriation, de la phase « d’appropriation originelle » aux phases de routinisation et de « réappropriation ». Si les mécanismes psychocognitifs ont joué un rôle important dans la prise de conscience de certains dirigeants de notre étude ainsi que dans leur réflexion, la dimension sociopolitique a permis quant à elle de soutenir leur démarche d’engagement responsable au sein du réseau en les aidant à se l’approprier progressivement dans une perspective stratégique sur le long terme. Les démarches collectives proposées doivent donc permettre aux acteurs d’acquérir de nouvelles connaissances (ce qui est souvent le cas), mais doivent avant tout être des supports d’apprentissage que les dirigeants vont mobiliser en s’investissant personnellement.

Nos résultats invitent aussi à nous interroger sur la portée effective des démarches RSE collectives, non pas uniquement sous l’angle des dirigeants, mais aussi sous l’angle de l’acteur incitateur de la démarche. Notre étude appelle ainsi certains commentaires sur le rôle que ce dernier peut jouer en termes d’animation et de management de la démarche. Nos observations et nos résultats montrent ainsi que la démarche collective doit prendre la forme d’un accompagnement, d’un suivi régulier de chaque individu, mais aussi d’une recherche d’implication de chacun dans la démarche. Au sein du CJD, cela se traduit notamment par l’implication progressive de chacun des membres. La première année d’adhésion est considérée comme une période de découverte des valeurs du réseau, de son fonctionnement et de ses adhérents, lors de laquelle le jeune dirigeant nouvellement recruté a peu d’obligations envers le réseau. C’est lors de cette année charnière que la dimension psychocognitive de l’appropriation apparaît, car le réseau génère de nouveaux savoirs au travers des actions collectives qu’il propose. Dès la deuxième année, il est demandé au jeune dirigeant de s’impliquer directement en acceptant une fonction au sein du réseau (gestion de la communication, du recrutement de nouveaux adhérents, responsable de la formation, du concours de la Performance Globale©, etc.).Tout l’enjeu de l’acteur incitateur de la démarche RSE va consister à proposer un dispositif autour d’actions variées pouvant apporter à la fois de l’information, des connaissances mobilisables rapidement pour les dirigeants et un accompagnement sur la durée. Compte tenu de la diversité des PME, ce dispositif doit permettre à chacun d’évoluer à son rythme. Ces résultats font écho dans une certaine mesure aux travaux menés par Parker, Redmond et Simpson (2009) soulignant la nécessité, face à l’hétérogénéité des PME, de tenir compte de la manière, dont ces dernières opèrent pour s’engager dans des démarches responsables afin d’envisager des actions publiques et/ou privées, permettant d’encourager collectivement les PME à améliorer leurs pratiques responsables et durables.

Enfin, la mobilisation du cadre conceptuel de De Vaujany permet de prendre en compte dans l’analyse les acteurs concernés par l’appropriation (dirigeants de PME), les relations (souvent complexes) par lesquelles s’opèrent l’appropriation et les actions proposées (à travers les outils, les objets, les règles et dispositifs) constituant l’objet de l’appropriation. Une telle approche offre ainsi un cadre plus riche pour appréhender les mécanismes de coordination d’une démarche collective engendrant l’appropriation des principes de RSE. Notre étude apporte également une lecture processuelle et temporelle de l’appropriation. Elle vient ainsi proposer une perspective d’analyse complémentaire aux travaux de Berger-Douce.

Sur le plan managérial, notre réflexion montre l’enjeu pour les organisations professionnelles de stimuler les dynamiques d’appropriation RSE. Les recommandations issues de cette recherche peuvent s’articuler autour de quatre dispositifs majeurs : la sélection, la sensibilisation, l’accompagnement et l’évaluation. Ils varient parfois dans leur contenu selon le stade RSE auquel se situe la PME. Ainsi, les recommandations visant à permettre d’enclencher une dynamique « d’éveil » RSE ne sont pas systématiquement similaires à celles requises pour générer une dynamique « d’engagement » RSE.

Tableau 4

Comment stimuler les dynamiques d’appropriation des démarches RSE ?

Comment stimuler les dynamiques d’appropriation des démarches RSE ?

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Les différents apports développés dans notre travail doivent toutefois être considérés au regard des limites de cette recherche qui représentent autant de voies d’exploration futures. En premier lieu, en raison de sa nature idiographique, cette étude mériterait d’être complétée par des recherches supplémentaires au sein d’autres sections du CJD ou encore auprès d’autres groupements (territoriaux par exemple) afin de valider notre grille d’analyse. Au vu du caractère exploratoire de notre recherche, et dans une optique de recherche longitudinale, il serait intéressant de réaliser des entretiens avec les mêmes dirigeants de notre étude, cinq années après leur participation au concours afin de vérifier d’une part si leur degré d’appropriation de la RSE a évolué vers une réappropriation de la démarche et d’autre part d’identifier les différentes actions de RSE mises en place dans leur entreprise. Une extension de ce travail pourrait même consister à identifier des profils de dirigeants et les analyser au regard des dynamiques d’appropriation. Plus globalement, à l’instar des travaux de Martinet et Reynaud (2004) et de Gendre-Aegerter (2008), il serait également intéressant de mobiliser des méthodologies d’analyse complémentaires, telles les cartes cognitives pour étendre les recherches en entrepreneuriat responsable et analyser les représentations des dirigeants de PME dans ce domaine. Enfin, la dernière voie d’investigation concerne la généralisation des résultats de cette étude à d’autres instruments de diagnostic et de pilotage de la RSE en milieu PME. Selon nous, les dynamiques d’appropriation d’éveil et d’engagement de la RSE en PME peuvent être observées, quel que soit l’instrument à l’oeuvre. Mais, compte tenu du fait que chaque outil RSE est porteur de singularités dans son contenu et ses principes d’application, cela aura forcément une influence sur les dimensions de l’appropriation à l’oeuvre (rationnelle, sociopolitique et psychocognitive) au sein de la PME. En conséquence, nous avançons l’idée que la nature de l’instrument de diagnostic et de pilotage de la RSE exerce une influence forte sur les dimensions de l’appropriation et une influence modérée, voire faible sur les phases et les dynamiques de l’appropriation. Cette affirmation invite à des investigations empiriques permettant de comparer l’appropriation par une ou plusieurs PME des différents instruments RSE en PME. Cela conduirait à mettre en lumière les dynamiques, phases et dimensions de l’appropriation pour chaque instrument RSE en PME comme leurs similarités et divergences dans le processus à l’oeuvre. Ces différentes pistes de recherche, associées aux résultats de ce travail, témoignent de l’intérêt de poursuivre les investigations dans ce champ de recherche fécond.