Comptes rendus de lecture

Intrapreneuriat : s’initier aux pratiques innovantes, Louis Jacques FILION et Mircea-Gabriel CHIRITA, JFD Éditions, 2016[Notice]

  • Olivier Basso

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  • Olivier Basso
    Professeur associé au Cnam de Paris, Expert facilitateur en leadership

C’est avec grand plaisir que j’ai pris connaissance de l’ouvrage consacré à l’intrapreneuriat publié par Louis Jacques Filion et Mircea-Gabriel Chirita. Sous-titré « s’initier aux pratiques innovantes », il constitue en effet une introduction vivante et réfléchie à ce que l’on a pu diversement nommer « entrepreneuriat organisationnel » ou « intrapreneuriat » (en langue anglaise intrapreneurship, corporate entrepreneurship ou encore corporate venturing), pour ne citer que quelques-unes des dénominations inventoriées par les auteurs (p. 214). Ainsi que le rappelle avec finesse Michel Marchesnay, auteur d’une préface inspirée, l’aphorisme de Sénèque « il n’est point de vent favorable pour celui qui ne sait où il va » semble malmené par le récit du voyage d’Ulysse marqué par tant d’incertitudes et de détours involontaires. En ce xxie siècle, l’entreprise s’inscrit dans un monde qui abonde en surprises, bonnes ou mauvaises selon les points de vue, et où la combinatoire des mondes possibles au gré des mutations technologiques, sociales ou géopolitiques, paraît avoir explosé. De ce fait, l’intrapreneuriat peut se présenter comme la capacité proactive de créer de nouveaux futurs, en allant au-delà des sentiers tracés. Pour évoquer cette dynamique de l’innovation, le livre Intrapreneuriat : s’initier aux pratiques innovantes, possède plusieurs qualités majeures, et je me propose dans les lignes qui suivent d’en détailler quelques-unes. C’est tout d’abord un recueil précieux de cas richement documentés qui évoquent les trajectoires contrastées et passionnantes d’intrapreneurs, ces « déviants positifs » qui parviennent à innover au coeur de l’organisation. En ce sens, Intrapreneuriat constitue un outil d’une grande valeur pour tous les enseignants qui, dans la sphère académique ou en formation continue, s’efforcent de trouver des illustrations et des exercices supports qui ne se réduisent pas aux seuls cas, souvent anciens, développés par la Harvard Business School sur le sujet. La première partie de l’ouvrage est en effet consacrée aux récits de la trajectoire de cinq intrapreneurs, autant d’histoires passionnées et passionnantes. La rédaction soignée et approfondie de ces cas permet d’évoquer, de manière très concrète, la vie propre de ces héros et héroïnes du monde organisationnel. La découverte des aventures intrapreneuriales de personnages inspirants et divers est très prenante et constitue une véritable « expérience de pensée » : le lecteur peut éprouver le goût de l’intrapreneuriat et ressentir ce dynamisme créateur, cette générosité dans l’action managériale. Les cinq histoires remarquables de Serban Teodoresco (DiverseyLever Consulting/Johnson…), Dominique Anglade (Procter & Gamble, Nortel…), Benoît Bisson (excentriQ/Desjardins), Brigitte Lépine (Challenge de l’innovation/TC Transcontinental) et Louise Roy (STCUM, Air France…) illustrent l’agilité des postures, la capacité à résoudre des problématiques complexes par l’action créatrice et à faire advenir une vision. Ces histoires singulières dessinent en effet des portraits personnels, dotés d’une grande épaisseur humaine, qui replongent le lecteur dans l’atmosphère propre aux différents contextes. Les cas restituent de manière multidimensionnelle l’équation personnelle, le contexte familial, le cadre organisationnel, où les décisions managériales sont souvent aussi des choix de vie. Récits d’enfance, entretiens avec les auteurs, mise en perspective historique des parcours de vie, sont autant de leviers mobilisés pour faire revivre la formation d’une personnalité, et raconter l’écriture progressive d’une histoire personnelle. Comme l’affirment les deux auteurs, « les organisations recherchent de plus en plus des gens créatifs qui peuvent créer de nouveaux produits et services, y apporter de nouvelles façons de faire » (p. 17). Et ce sont « ces gens qui innovent [qui] aident les organisations à se transformer et à se réinventer ». La force de cette première partie de l’ouvrage est d’apporter une dimension incarnée à ce qui pourrait demeurer une abstraction : l’intrapreneur et sa puissance d’invention. …

Parties annexes