Résumés
Résumé
Si l’on entend, par « société des savoirs », la mobilisation des connaissances pour une meilleure gouvernance des sociétés contemporaines, celle-ci reste largement hypothétique. En effet, nombre d’obstacles s’érigent sur le chemin de la diffusion des savoirs dans la société, dont le premier est le poids des idées reçues et l’importance du contexte idéologique. Selon l’état du débat public, certains résultats de travaux académiques trouveront un écho, quand d’autres seront littéralement négligés, oubliés, voire niés. Ce phénomène de tri, de filtrage de la contribution des chercheurs au débat public est particulièrement puissant dans le domaine des sciences sociales, où la controverse scientifique représente une des modalités de production des savoirs eux-mêmes, et où l’établissement d’une causalité est toujours sujette à caution, tant le nombre de variables en cause est considérable et incontrôlable. Pour rendre compte de cette faiblesse des sciences sociales face au discours de l’opinion, nous prendrons ici l’exemple d’une controverse inscrite depuis plus d’un siècle dans l’histoire des sciences de l’Homme et de la Société : celle qui concerne le lien entre instabilité familiale et délinquance. En retraçant quelques moments de l’histoire de cette hypothétique causalité, il est possible de prendre la mesure, à la fois du rôle que joue indiscutablement le contexte idéologique et politique, et de l’impact du néoconservatisme ambiant sur les relations entre sciences sociales et action publique.
Abstract
If a knowledge-based society means the deployment of knowledge for better governance in contemporary societies, this is still a quite hypothetical phenomenon. Numerous roadblocks to the diffusion of knowledge across the whole society exist. Depending on the state of public debate, some university-based research findings will be disseminated and others will be literally neglected, forgotten, even denied. Such selection and filtering of researchers’ contributions to public debate particularly affects the social sciences. For them, scientific debate is one of the ways of generating knowledge itself, and in addition, the attribution of causality is circumscribed, given the large number of variables and the lack of scientific controls. In order to assess the weaknesses of the social sciences faced with public opinion, the author examines the case of a century-long debate in the humanities and social sciences, that is the link between family break-up and delinquency. Looking at the history of this supposed causal link, it is possible to assess both the impact of the ideological and political context and the impact of neo-conservatism on the relations between the social sciences and policies.
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