Recensions

Peter S. Temes, Against School Reform (And in Praise of Great Teaching). Chicago, Ivan R. Dee Publisher, 2002, 220 p.[Notice]

  • Étienne Haché

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  • Étienne Haché
    Tours

C’est dans le cadre du fameux débat sur la réforme en milieu scolaire américain — débat qui date de quelques décennies déjà — que s’inscrit le récent ouvrage de Peter Temes, Against School Reform. Celui-ci doit se lire comme un plaidoyer en faveur de l’enseignant que l’auteur estime constamment décrié et mis à mal par l’industrie de la réforme scolaire et le solipsisme technocratique. De l’avis de Temes, seuls de bons maîtres sont capables de redonner à l’école ses lettres de noblesse conformément au principe de l’égalité des chances tel qu’il est inscrit depuis toujours dans la constitution américaine (p. 14, 18, 29, 34, 37 et passim). Dans des termes qui ne sont pas sans rappeler à certains égards ceux d’Ivan Illich dans sa Société sans école, l’auteur considère qu’il n’y a plus de temps à perdre ni d’argent à dépenser pour toutes sortes de projets de réforme bidon et destructeurs de l’intention avouée d’améliorer l’école (p. 15‑18, 33‑35 et passim). L’affirmation n’est pas une boutade, loin s’en faut. Déjà en son temps, Hegel disait qu’à force de vouloir innover, transformer et réformer sans cesse, on en arrive à une désorganisation qui annule toute possibilité d’amélioration ou de solution des problèmes initiaux. Quelques mots tout d’abord au sujet du plan et de la forme de l’ouvrage. Against School Reform est composé de sept chapitres — dont l’un introductif (p. 13‑51) et l’autre en forme de conclusion (p. 201‑203) —, ainsi que d’une annexe (p. 205‑211) comprenant une liste de 27 ouvrages publiés entre 1838 et 2001 — au nombre desquels figurent ceux de H. Mann, de J. Dewey et d’I. Illich —, et d’un index des noms et des mots clés (p. 213‑220). Ordonné, bien construit, le livre est en outre écrit dans un style clair, quand bien même de longues citations et de nombreux passages anecdotiques peuvent en exaspérer plus d’un. Son contenu s’articule en deux temps : 1) au niveau théorique tout d’abord, P. Temes s’emploie à grand renfort à mettre le doigt sur ce que représente à ses yeux un enseignement doté de qualité et de sens (chap. 2 et 3, p. 53‑106) ; 2) au point de vue pratique, il indique, dans un premier temps, ce qui incombe à l’école en matière de « recrutement » et de « rétention » des meilleurs enseignants (chap. 4 et 5, p. 107‑160) ; puis, dans un deuxième temps, il soumet au jugement des parents, des administrateurs et des éducateurs eux-mêmes, de même qu’à tous ceux qui tiennent à coeur l’école une série d’avis et de conseils pratiques (chap. 6, p. 161‑199) destinés à décentrer le milieu scolaire du pathos de la réforme et surtout remettre à l’ordre du jour la fonction d’enseignant — peut-être faudrait-il aussi ajouter l’enfant, dans la mesure où l’éducation vise également une complicité entre le maître et ses élèves (p. 14, 38, 39 et 174). Oui, le maître et sa capacité à faire de sa classe ce que Dewey lui-même, dont l’heureux pragmatisme s’est répandu pendant très longtemps comme une traînée de poudre dans tout le système scolaire américain, appelait un « embryon de vie communautaire » (p. 42). Car c’est une autre conviction de ce livre que le savoir et la culture ne sont pas l’évocation de choses mortes, pour reprendre ici Gaston Berger, mais le produit de l’« émerveillement » et de la « découverte » que tout éducateur se doit d’entretenir (p. 20, 40, 43 et passim). Ainsi à la question : « How can my class be a lot better ? » (p. 49), Temes …