Résumés
Résumé
Certains chercheurs occidentaux et musulmans remettent en question la légitimité du mouridisme, cette tradition islamique lancée par Cheikh Ahmadou Bamba au Sénégal au tournant du xixe siècle. Par la théorie de la réception développée par Robert Jauss pour la littérature, le présent article formule l’hypothèse que le mouridisme en tant que réception de l’islam en Afrique noire est aussi valable que toute autre tradition islamique qui s’est développée depuis la mort du prophète Muhammad en 632 de notre ère. Grâce au charisme et au génie d’Ahmadou Bamba, l’islam est devenu la religion populaire qu’il était appelé à être parmi les populations noires d’Afrique. Se basant sur le potentiel idéologique de l’islam, A. Bamba a réalisé l’émancipation culturelle, religieuse, politique et économique du peuple wolof et, par extension, de tous les Sénégalais, qui sont fiers de sa contribution à la lutte pour l’indépendance de leur pays. La richesse de l’enseignement et de l’action de Cheikh Ahmadou Bamba est encore à découvrir par quiconque est intéressé par la recherche des moyens pour développer le continent africain.
Abstract
Some Western academics and Muslim scholars often question Mouridism, this Islamic tradition initiated by Sheikh Ahmadou Bamba in Senegal at the turn of the 19th century. Through the theory of reception developed by Robert Jauss for literature, this paper argues that Mouridism as a reception of Islam in Black Africa is as true as other Islamic traditions that developed after the death of Prophet Muhammad in 632 c.e. Thanks to Ahmadou Bamba’s charisma and genius, Islam became a popular religion that it was called to be among Black Africans as well. Using the ideological potential of this religion, Ahmadou Bamba brought about the cultural, religious, political and economic emancipation of Wolof people and by extension of all Senegalese that are proud of his contribution to the struggle for the independence of their country. The wealth of Sheikh Ahmadou Bamba’s teaching and action is still to be unfolded to Africans and all those interested in seeking ways to develop the African continent.
Corps de l’article
On se demande parfois si le mouridisme du Sénégal est un islam authentique au même titre que les autres voies musulmanes. Dans la perspective d’une théorie de la réception, toutes les lectures-interprétations successives d’une même oeuvre font au contraire partie de cette oeuvre : loin d’être menaçantes, elles redonnent vie, souvent de façon imprévue, à l’inspiration qui y a présidé. Le mouridisme est évidemment une traduction nouvelle de l’islam en terre négro-africaine qui met à rude épreuve l’adage selon lequel « traduire, c’est trahir ». On sait que les traductions ne sont jamais tout à fait identiques à la version originale. En ce sens, elles en sont une trahison. Mais sans ces traductions successives, on peut également penser que l’oeuvre manquerait de vie, à l’image d’une statue oubliée dans les caisses du grenier. Notre propos sera donc de mettre l’accent sur la dimension positive de cette nouvelle mouture d’islam en terre négro-africaine qu’est le mouridisme et de montrer comment elle peut apparaître comme un développement tout à fait légitime de l’islam.
L’islam disposait en effet de l’écriture arabe et d’un Livre saint. Les Africains de la vallée du fleuve Sénégal avaient eux aussi leur culture et leurs religions, mais n’avaient ni écriture ni Livre saint. Le nouvel islam qui se développera au Sénégal lira le même Coran en langue arabe, suivra également les enseignements du même prophète Muhammad, mais aura une pratique religieuse quotidienne adaptée au monde africain. Paul Marty s’est rendu compte de la spécificité de l’islam négro-africain, et dès 1921 il s’est mis à parler d’un « islam noir ».
Dans cette étude, nous allons considérer plus précisément la nouveauté apportée par l’islam confrérique mouride. Cheikh Ahmadou Bamba reçoit l’islam apporté par les marchands arabes et en fait un islam négro-africain. Il faudra ensuite analyser le pragmatisme d’Ahmadou Bamba et de sa relation au pouvoir politique et administratif de son pays le Sénégal. Les colonisateurs que connaît le Cheikh sont des Français de tradition chrétienne catholique. Depuis leur arrivée au pays, ils se sont toujours confrontés à l’autorité religieuse des chefs musulmans. Ils ont triomphé grâce à leur supériorité militaire. Au lieu de la confrontation directe, le Cheikh préférera la négociation et l’évitement. Ce qui ne l’empêchera pas d’ériger un véritable empire musulman mouride, dont l’influence grandira.
I. Un nouvel islam — une nouvelle ville sainte
1. L’islam en Afrique de l’Ouest
Le premier contact du continent africain avec l’islam remonte à l’an 615, lors du premier Hégire des musulmans fuyant la persécution des Quraychites mekkois pour se réfugier en Abyssinie (l’Éthiopie actuelle). En 666, à l’occasion de leur expansion en dehors de l’Arabie, les musulmans traverseront tout le désert du Sahara dans leur recherche de nouvelles opportunités commerciales. Se tournant vers le Sud, ils aborderont ce qu’ils appellent « le bilad al-sudan (“le pays des Noirs”). Ce nom de Soudan restera désormais pour désigner cette partie de l’Afrique noire, acculturée par la civilisation islamique, qui ceinture l’Afrique arabe, de l’Atlantique à la mer Rouge[1]. »
Les marchands et voyageurs arabes dans leur quête de l’or, de l’ivoire, et des esclaves braveront ainsi le désert et fonderont des comptoirs commerciaux dans les capitales de diverses aristocraties existantes. Ces villes se transformeront rapidement en grands centres économiques, politiques et culturels du monde musulman. L’historien Jean-Louis Triaud[2], tenant compte des caractères linguistiques, politiques et culturels, en distingue d’ouest en est cinq groupes :
à l’extrême ouest, le groupe wolof (entre le Sénégal et Niger),
le groupe mandé (soninké et malinké),
le groupe Songhay (Gao) sur le moyen Niger,
les Haoussa (entre le Niger et Tchad),
et les Kanembu-kanuri (de part et d’autre du lac Tchad).
On ne peut toutefois pas encore parler d’islamisation du continent africain. La religion du prophète Muhammad fut pendant plusieurs siècles connue seulement dans les cités et les enceintes royales de l’Afrique sahélo-soudanaise et orientale. Elle était l’apanage des chefs d’une certaine importance, des commerçants et des religieux professionnels.
L’expansion véritable de l’islam en Afrique de l’Ouest commence sous les Almoravides. Ce mot vient de l’arabe al-Murabitun et désigne les souverains berbères de la tribu des Sanhadja (désert du Maroc) qui régnèrent sur l’ouest de l’Afrique du Nord et de l’Espagne musulmane de la fin du ixe au début du xiie siècle. Le mot français « marabout » proviendrait de (mrabot-d’al-Murabit : Al-Moravide). En Afrique, le marabout est un homme de Dieu, un saint (wali) qui se signale à l’attention des fidèles par sa piété, sa science et ses oeuvres. Il est entouré d’un certain mystère, il confectionne des talismans pour ses fidèles. P. Marty souligne entre autres le rôle magico-thérapeutique de sa salive[3]. Dans sa conquête de l’empire du Ghana (qui comprenait à l’époque toute l’Afrique de l’Ouest), un des chefs lantuna (fraction des Sanhadja) fit appel à Ibn Yasin qui installa au Sénégal un ribat ou « couvent militaire ». C’est ainsi qu’al-murabitun désignerait ceux qui appartiennent au ribat. Le Takrur, dans la boucle du Sénégal, prend une grande importance au xe siècle sous les Almoravides. La révolte des Almohades et leur victoire finale (1147) mirent fin au règne des Almoravides. Les Almohades sont aussi de souverains Berbères qui régneront sur la moitié de l’Espagne et la totalité du Maghreb de 1147 à 1269. Ils sont aussi des puristes musulmans (sunnites) au rigorisme religieux plus poussé. Le renouveau administratif et artistique qu’ils instaurent favorisera l’expansion de la religion musulmane.
2. Cheikh Ahmadou Bamba
Ahmadou Bamba naquit à Mbacké (dans le Baol, au Sénégal) en 1850 d’une famille très croyante. Son grand-père Mballa Mbacké avait fondé dans le Baol une école coranique. Son père Momar Antasali était lui-même un marabout. Au cours de sa déportation dans la province du Saloum il épousera la soeur du célèbre Dammel (Roi) Lat Dior en 1864. À la mort de son oncle, Lat Dior, et à la suite du démembrement du Cayor en 1880, Ahmadou retourne à Mbacké.
Cheikh Ahmadou Bamba fut initié dans l’ordre qadiriyya par Cheikh Sidiya (1869-1924), le grand savant maure de Bou-Tilimit (en Mauritanie). Plus tard, il développe son propre ordre. Celui-ci ralliera rapidement tous les mécontents de la colonisation française. Pour A. Bamba, comme pour la plupart des marabouts du Maghreb ou d’Afrique noire, tôt ou tard vient l’heure de l’exil, un thème favori de la méditation mystique portant sur l’Hégire du Prophète. Sous l’occupation coloniale française (de tradition catholique), pratiquer l’islam était considéré comme un affront à l’autorité et, encore plus le fait de rassembler autour de soi des disciples. Cheikh Ahmadou Bamba connaîtra donc trois exils : au Gabon de 1895 à 1902, en Mauritanie en 1905, et à Diourbel, dans son propre pays, en 1908. Il meurt en 1927, après avoir affermi la confrérie des mourides qu’il avait fondée autour de la ville sainte de Touba (fondée par lui en 1926), symbole de l’unité, de la force et de l’esprit entreprenant de ces « musulmans noirs ». Les Wolofs, qui forment aujourd’hui 43 % de la population sénégalaise, sont essentiellement des mourides par tradition. Le Sénégal est rural à 62 %, la confrérie est solidement établie dans les villages du pays. Quand on tient compte du fait que 90 % de la population sénégalaise est musulmane, on peut avoir une idée de la forte influence des mourides, la seule confrérie essentiellement sénégalaise. Les autres confréries que sont la qadiriyya et la tijanniyya ont leurs villes saintes respectivement en Mauritanie et au Maroc.
3. L’« horizon d’attente »
Parlant d’« horizon d’attente » en contexte littéraire, R. Jauss remarque que l’oeuvre est reçue sur le fond d’une certaine tradition esthétique, morale et sociale. « La réception des oeuvres, ajoute-t-il, est une appropriation active, qui en modifie la valeur et le sens au cours des générations jusqu’au moment présent où nous nous trouvons face à ces oeuvres, dans notre horizon propre, en situation de lecteurs (ou d’historiens)[4]. » Si nous appliquons cette remarque au cas de la réception de l’islam par les peuples du Sénégal, cet horizon d’attente est nécessairement fait de l’ensemble des éléments culturels et religieux propre à ces peuples, des éléments sur lesquels peuvent facilement se greffer les apports culturels et religieux étrangers. Nous devons alors nous demander ce que veut dire le mot « religion » et la définition qu’en donne Lalande s’avère éclairante pour notre propos. Il s’agit selon lui d’une :
Institution sociale caractérisée par l’existence d’une communauté d’individus unis : (1) par l’accomplissement de certains rites réguliers et par l’adoption de certaines formules ; (2) par une croyance en une valeur absolue, avec laquelle rien ne peut être mis en balance, croyance que cette communauté a pour objet de maintenir ; (3) par la mise en rapport de l’individu avec une puissance spirituelle supérieure à l’homme, puissance conçue soit comme diffuse, soit comme multiple, soit enfin comme unique, « Dieu[5] ».
Une définition assez large qui explique bien l’ambiance religieuse que les religions étrangères ont rencontrée sur le continent africain. L’existence de communautés bâties autour d’une croyance ou de croyances. La pratique religieuse africaine constitue une base sur laquelle l’islam va s’édifier en terre négro-africaine. Cette base permettra en même temps de mieux lire ce qu’est devenue la nouvelle religion.
Le Sénégal d’Ahmadou Bamba, comme tout le continent africain, avait ses religions. Certes, il n’y avait pas de religion dite révélée, mais toutes les religions africaines croient en l’existence d’un dieu suprême, source de la création du monde visible et invisible. Elles sont essentiellement monothéistes malgré le cachet polythéiste qui leur est si facilement collé : il existe un seul Dieu suprême qui se sert de ces intermédiaires que sont les ancêtres pour entrer en communication avec les humains. Comme pour l’islam qui va venir s’y implanter, ce Dieu est inaccessible aux humains. C’est dans un but de prosélytisme et pour mieux asseoir leur pouvoir que les forces étrangères de domination prétendront à une absence de religion chez les peuples négro-africains[6]. Ce mensonge est démasqué entre autres par l’africaniste français Maurice Delafosse (1870-1926) qui s’est intéressé à l’histoire, à la vie et à la culture africaines.
In these monographs Delafosse is disposed to place the main emphasis upon the philosophical, esoteric, mystical and metaphysical aspects of indigenous African thought, rather than on the ritualistic and institutionalized aspects to which the former gave birth. Delafosse points out that if one is to fully understand the real nature of the pagan Negroes conceptions of God, the world, and man, one must keep clearly in mind the important part which religious mysticism plays in both individual and group thought. He makes it very clear that religious mysticism dominates the Negro’s entire outlook not only upon the mundane world, but upon the supermundane world, of which the visible world is but the lesser part. All individual and group activities, whether of a social, political, economic, or religious nature are primarily determined by considerations that are essentially of a mystical and religious character[7].
Outre la présence indéniable de cette religion ou ces religions, les contacts avec le monde extérieur joueront aussi un rôle important pour disposer les peuples africains à accueillir la religion du prophète Muhammad.
Les brassages et les bouleversements provoqués par la « révolution islamique » du 19e siècle, en brisant les particularismes et les structures traditionnelles, ont préparé les populations soudanaises à adhérer à l’islam. L’occupation coloniale fera le reste : face aux pouvoirs européens et chrétiens, le ralliement à l’islam représentera souvent la première forme, élémentaire, de fidélité à l’héritage africain et à l’esprit communautaire, donc de résistance culturelle[8].
4. Cheikh Ahmadou Bamba et la fidélité à la Sunna du prophète Muhammad
Le mot « musulman » veut dire « soumis » à Allah. Cette soumission sans conditions rassemble tous les fidèles de la voie tracée par le prophète Muhammad. Cependant, très tôt après la mort du Prophète, tout en préservant l’essentiel de la foi, diverses tendances se sont manifestées au sein du monde musulman. Quelle que soit la voie poursuivie (shi’isme ou sunnisme), la foi et la soumission à Allah restent inséparables. Les ahl al-sunna sont les « gens de la tradition » par opposition à ceux qui ne considèrent que la stricte lettre du Coran (Shiites et Kharijites). Les sunnites d’Afrique noire suivent essentiellement l’école juridique mâlikite qui est plus consensualiste. Dans cette école domine « un effort pour unir par consensus des savants de chaque époque (ijmâ), raisonnement par analogie (quiyâs), jugement personnel du prudens (ra’y), recours éventuel aux coutumes extra-islamiques (‘urf), dans un souci de servir l’intérêt général (maslaha)[9] ».
L’islam prôné par Cheikh Ahmadou Bamba est le prolongement négro-africain du sunnisme almoravide. L’ouverture juridique de cette école pavera la voie à la fondation du mouridisme qui se situe dans la ligne soufie transmise par la confrérie qadiriyya[10]. Fidèle à cette tradition soufie, A. Bamba a encouragé ses fidèles à accorder la priorité à l’éducation, à la récitation du Coran, à l’étude de la Loi islamique, aux mathématiques et aux langues. Lui-même est reconnu comme un grand intellectuel musulman qui a laissé plusieurs écrits en arabe. Il maîtrisait les doctrines majeures de l’islam sunnite et les écrits soufis. Ses poèmes et commentaires du Coran sont en accord avec la pensée islamique[11]. L’érudition d’A. Bamba et sa profonde spiritualité lui vaudront le respect de ses pairs et même du pouvoir colonial.
II. De la Mekke et Médine à Touba
1. Un islam qui renouvelle l’islam arabe
Cheikh Ahmadou Bamba ne se contente pas de répéter les discours de ses maîtres, à commencer par le prophète Muhammad. Il s’approprie activement l’islam. Il le modifie même quelque peu pour lui redonner auprès du peuple sénégalais et d’autres peuples qui adhéreront à la voie islamique qu’il a tracée. Comme le soutient Jauss en littérature, ce cheikh a relu l’islam qu’il avait reçu et l’a insensiblement transformé pour le rendre compréhensible de ceux à qui il s’adressait. A. Bamba a pris un risque, car l’écrit ne transmet pas nécessairement l’intention de l’auteur et le sens profond de sa démarche. Il a assumé la responsabilité de lire et de reconstruire d’une façon plus adaptée au contexte qui était le sien l’oeuvre du prophète Muhammad et du cheikh Sidiya son maître[12]. Cette oeuvre religieuse a été reçue comme telle, mais s’est modifiée pour s’adapter au nouveau contexte de sa réception. De cette lecture/relecture naîtra un islam négro-africain. Un islam qui lit le même Coran en arabe, qui suit les mêmes enseignements du prophète Muhammad, mais dont la pratique religieuse quotidienne a pris une nouvelle couleur locale.
Marty parle de réaction de l’âme wolof sur l’islam[13]. En effet, comme dans le cas d’autres réformateurs religieux, la voie mouride est la réaction d’un peuple ignoré des grands de ce monde. Le Cheikh exprime, sans s’en rendre compte, les conditions sociales et les besoins de son époque. L’islam était à l’époque un luxe réservé aux rois et à leurs cours, aux commerçants, bref, à l’élite. Il était impensable que le Négro-africain y accède au même titre que l’Arabe. La grande révolution du Cheikh Ahmadou Bamba est d’avoir popularisé l’islam, d’avoir fait en sorte que même le paysan wolof put être musulman. C’est comme si le dogme musulman avait dû entre ses mains prendre la couleur de l’âme des wolofs[14].
Une des originalités du Cheikh A. Bamba est sa doctrine de la sanctification par le labeur : « Travaille comme si tu ne devais jamais mourir, et prie comme si tu devais mourir demain ». Voici ce qu’en dit Danielle Bleitrach :
Amadou Bamba sécularisait la conduite religieuse de ses disciples, en situant le salut à l’intérieur du monde profane. Ce message mystique a été un facteur d’adaptation à la modernité capitaliste introduite par le colonialisme, mais aussi un levier identitaire (religieux, national) et une manière de se soustraire à l’éthique féodale des royaumes wolofs, où ceux qui travaillaient avaient un statut d’infériorité. Amadou Bamba revendiqua même « le partage des tâches », en instituant l’égalité entre les divers types de travaux et en nommant des cheikhs dans tous les milieux sociaux[15].
Une stratégie qui aura d’énormes incidences politiques, économiques, religieuses et culturelles. A. Bamba a dispensé par moments ses disciples de la prière pour le travail dans les plantations d’arachides. Ce faisant, il a aussi tiré des avantages économiques de l’exploitation arachidière. La traditionnelle stricte séparation entre le sacré et le profane venait ainsi de voler en éclats. À la mort du Cheikh, et jusqu’aujourd’hui, le mouridisme est devenu au Sénégal une puissance religieuse, économique et politique.
Le grand symbole du succès du charisme du Cheikh Ahmadou Bamba est la ville et la grande mosquée de Touba fondée en 1886. Les mourides ne sont désormais plus tenus de faire leur pèlerinage à La Mekke, il leur suffit d’aller à Touba[16]. Lors de l’inauguration de cette mosquée le 7 juin 1963, le président du Sénégal d’alors, feu Léopold Sedar Senghor, disait justement qu’Ahmadou Bamba avait voulu « enraciner l’islam en terre noire, en l’africanisant, en le négrifiant[17] ».
2. Un nouvel islam : opportunisme ou pragmatisme ?
L’attitude opportuniste en islam ne commence pas avec le Cheikh Ahmadou Bamba. Plusieurs califes avant lui ont manifesté leur désaccord avec l’autorité en place par la fondation de confréries musulmanes dissidentes, ou en tout cas différentes dans leur approche de leur foi musulmane commune. Au lendemain de la mort du prophète Muhammad en 632 éclatent des sécessions parmi les tribus bédouines qui se sentaient exclues de la communauté. Abou Bakr, premier successeur du Prophète, réussit à restaurer l’unité de l’Arabie et à affirmer la suprématie de l’islam davantage par la force militaire que par la conviction[18]. Pour mieux tenir en main les territoires conquis, les califes ont à la fois implanté des villes nouvelles peuplées d’Arabes et distribué aux musulmans des terres en dehors de l’Arabie. Ces villes attireront les artisans et les marchands non arabes qui voudront se convertir à l’islam afin de jouir des mêmes droits que les musulmans. Ces nouveaux convertis seront toujours traités comme des « clients » (mawali) des tribus arabes ; « en particulier, ils ne sont pas inscrits sur les listes du diwan et ne perçoivent rien des revenus créés par la conquête : ils ne sont donc pas totalement assimilés à la communauté musulmane, et cette condition devait plus tard les pousser à s’insurger contre le pouvoir et les notables[19] ».
En 750, les Abbassides renversent les Omeyyades d’Abou Bakr. Ce sera la victoire des éléments iraqo-iraniens sur les Syro-Égyptiens et l’accession au pouvoir des éléments musulmans non arabes. Le mouvement insurrectionnel en islam se poursuivra et culminera avec la création, tant en Afrique du Nord qu’en Orient, d’émirats autonomes fondés sur des ethnies musulmanes non arabes. L’islam des Mongols, variant du sunnisme au shi’isme, marquera l’attitude opportuniste par excellence qui retiendra l’attention de nombreux historiens de l’islam[20]. Le sunnisme se caractérise par une philosophie consensualiste, une attitude de juste milieu destinée à rassembler tous les fidèles de l’islam. C’était là une attitude qui risquait d’entretenir la méfiance de coreligionnaires plus radicaux. À la fin d’un chapitre sur « La et les mentalités sunnites », L. Gardet exprime ce constat de la façon suivante :
Les Khârijites excluent, avec des nuances, Sunnites aussi bien que les Shî’ites, non de l’Islam en sa réalité historique, mais de la « vraie religion ». Les Shî’ites accorderaient aux Sunnites un Islam quelque peu mineur, restant à la surface de l’enseignement prophétique. Les Sunnites, eux, regarderont Khârijites et Shî’ites comme d’authentiques musulmans, qui se sont enfermés en leurs dissidences, mais qui restent liés à la Communauté du Prophète[21].
Il ne faut pas oublier qu’en islam, le groupe sunnite est majoritaire. Les sursauts du radicalisme font que les faiseurs d’opinions oublient trop facilement cette évidence. C’est ainsi que, comme plusieurs autres avant lui, Cheikh Ahmadou Bamba profitera de cette ouverture sunnite pour constituer le mouridisme. Au cours de l’histoire, le sunnisme permettra une plus grande expansion de la foi islamique. Le Cheikh profite de la force de cette idéologie pour rassembler le peuple wolof et l’amener à l’émancipation religieuse, politique et surtout économique. Pour ce faire, il a eu parfois à se compromettre avec les pouvoirs en place. À sa suite, les califes mourides adopteront la même attitude, parfois clientéliste, à l’égard du pouvoir politique pour le développement de leur confrérie.
Les années 50 et 60, avant comme après l’indépendance, furent un âge d’or dans les relations clientélistes entre le pouvoir politique et les confréries, les uns protégeant les intérêts maraboutiques, les autres perpétuant leur rôle d’auxiliaires de l’administration. Une inflexion apparut à partir de 1968, avec le troisième calife, Sérigné Abdou Lahat M’Backé, qui pendant douze ans s’était fait auprès du président Léopold Sédar Senghor le porte-parole du monde rural et avait marqué sa volonté d’indépendance […]. Survinrent la sécheresse, la baisse des cours de l’arachide, l’entrée en crise du monde rural, au moment même où une phase de grands travaux commençait à Touba. M. Abdou Diouf, président du Sénégal à partir de 1980, réussit ce que son prédécesseur n’avait pas obtenu : transformer en allié officiel Sérigné Abdou Lahat M’Backé, devenu son conseiller privilégié, qui, en échange, bénéficia d’aides financières pour réaliser ses projets à Touba. Ainsi, aux élections de 1988, le calife général des mourides appela ses talibés à voter pour M. Abdou Diouf sous la forme d’un n’diguel (mot d’ordre) : « Celui qui ne votera pas pour Abdou Diouf pendant les élections de février 1988 aura trahi Cheikh Muhamad Bamba »[22].
Encore aujourd’hui, dans un contexte de crise politique et économique au pays, Touba est en marge de tout et se révèle être un îlot de prospérité. Tout Mouride nourrit le voeu de finir ses jours à Touba auprès de son Cheikh.
Plus que d’opportunisme, nous préférons parler de pragmatisme[23]. Outre le clientélisme, dont la critique est par ailleurs justifiée, la mystique du travail développée par Cheikh Ahmadou Bamba a été un levier de développement, comme l’a montré son contemporain européen et chrétien Max Weber dans son étude sur l’éthique protestante.
L’attitude pacifiste affichée à l’égard des colonisateurs (l’appel au jihad spirituel) permettra aux chefs locaux, aux guerriers et aux paysans de se rassembler pour exprimer leur ressentiment sans être inquiétés par le pouvoir. C’est ainsi qu’A. Bamba a collaboré avec les Français durant la Première Guerre mondiale, lui qui pourtant, en bon musulman, considérait leur culture chrétienne comme corrompue.
III. Mouridisme et pouvoir
1. Conflit avec le pouvoir colonial
Toute occupation territoriale implique une imposition par la force d’un système de gouvernance sur les populations locales. Celles-ci réagissent toujours d’une manière ou d’une autre, selon les moyens dont elles disposent ou les opportunités qu’elles ont pour le faire. En Afrique orientale et occidentale, le pouvoir colonial européen se heurtera à une présence musulmane. Grâce à leur force militaire, les Européens réussiront à conquérir les territoires, mais ils devront continuellement faire face à la résistance constituée autour de l’idéologie islamique qui y était déjà installée. Le militantisme musulman en Afrique commence surtout au xviiie siècle avec l’avancée de l’expansion européenne dans des territoires islamisés ou pratiquant les religions africaines. Les contraintes juridiques, politiques ou culturelles inhérentes à l’occupation seront ainsi récusées au nom de l’islam. Les nouveaux conquérants étant essentiellement chrétiens, les résistants se tourneront presque naturellement vers l’idéologie musulmane pour les combattre.
Cette situation provoquera une série de mouvements mahdistes (messianiques) pour chasser l’étranger et restaurer la pureté de la foi. L’histoire de l’islam en Afrique a retenu les noms d’un certain nombre de personnalités africaines qui se sont opposées aux forces d’occupation venues de l’extérieur et qui, ce faisant, vont promouvoir le développement de la foi islamique. Cheikh Ahmadou Bambou se situe dans cette lignée de chefs charismatiques religieux qui ont confronté, chacun à sa manière, le pouvoir colonial.
On pourrait d’abord citer le cas d’Al-Hajj Umar b. Sa’id Futi, né en 1794 dans le Fouta Toro au Nord du Sénégal. Il fera la guerre aux Français entre 1828 et 1831 avant d’en appeler au jihad. Ses écrits ont joué un rôle important dans la mobilisation de musulmans qui, autrement, auraient été tentés de se compromettre avec l’occupant. Le détachement de soldats français dirigé par Louis Faidherbe craignait d’ailleurs beaucoup Umar. Tous les deux poursuivaient la même mission d’expansion au Sénégal, quoique apparemment pour des motifs différents. Cependant très vite éclata le conflit d’intérêts. Pour neutraliser cet adversaire, les Français s’allièrent avec leurs ennemis.
Cheikh Ahmadou Bamba, dont la confrérie prit de l’essor dans le même Sénégal d’Umar, est bien conscient du destin de son compatriote. Son sort ne sera d’ailleurs pas différent. Il connaîtra trois exils par le même pouvoir colonial français. Par pragmatisme, A. Bamba afficha un certain esprit de conciliation avec les Français.
Aux temps de l’invasion étrangère et des affrontements guerriers entre féodaux wolofs et pouvoir colonial, Cheikh Amadou Bamba avait lancé un message de paix qui eut un grand succès auprès des communautés paysannes dévastées par la guerre et par les exactions des bandes guerrières de Lat Dior, les tieddos : « Refusons la guerre sainte, faisons la guerre sainte à nos âmes »[24].
Fort de l’expérience de mahdis comme Umar qui avaient confronté par les armes le pouvoir colonial, A. Bamba optera pour la voie non violente. Cette attitude conciliante lui valut l’honneur d’avoir sauvé son peuple et sa confrérie. Un exil prolongé ne l’aurait pas permis. Comme aurait dit le pragmatiste Jésus, « on reconnaît l’arbre à ses fruits[25] ». Les fruits de l’oeuvre de ce Cheikh ont éclaté aux yeux de tous. Comme le diront encore Bava et Bleitrach,
[…] aujourd’hui il est considéré comme un héros national s’étant opposé à l’avancée coloniale, alors qu’il avait mis au travail la population pour produire l’arachide au service de la colonie. En 1912, les terres du bassin arachidier commençaient à s’appauvrir, et Cheikh Amadou Bamba organisa la « colonisation des terres neuves ». Dans un milieu hostile (déserts arides, lions, etc.), les chefs mourides pourvoyaient aux besoins d’organisation et de concentration des colons dans les nouvelles zones de culture[26].
Aujourd’hui encore, au Sénégal d’Amadou Bamba, la relation avec le pouvoir n’est pas aussi limpide. Elle se caractérise toujours par une dépendance de la religion vis-à-vis du pouvoir politique et vice versa. Le succès de la confrérie en a fait un acteur incontournable de la scène politique et économique du pays. Tous les régimes se sont confrontés d’une manière ou d’une autre avec l’idéologie mouride.
En 1995, le Président Abdou Diouf (1981-2000), lui-même membre de la confrérie mouride, a essayé lui aussi de réformer les rapports avec le pouvoir « parallèle » de Touba (un accord tacite avec le gouvernement reconnaît une immunité territoriale à la ville sainte des mourides). Voici ce qu’en dit Lavroff :
Un renouveau de l’Islam se manifeste avec la création d’associations islamiques qui se forment autour d’un marabout et constituent des réseaux d’entraide mais aussi de réflexion et d’action sociale et politique […]. Pour l’essentiel, l’alliance entre les marabouts et le gouvernement se maintient mais avec une moindre dépendance des premiers par rapport au second. Le renouveau islamique permet de pallier les effets négatifs de la modernisation de la vie sociale qui engendre des marginaux. Des écoles islamiques accueillent ceux qui sont rejetés par le système d’enseignement public, les jeunes diplômés chômeurs trouvent dans la religion un apaisement à leur rancoeur et une raison d’espérer en une société vraiment juste où ils auraient leur place[27].
En mars 2003, le Président Abdoulaye Wade (2000- ), lui aussi mouride, a été confronté au choix entre la justice exigée par le droit commercial qui s’est mondialisé et l’intégrité territoriale de Touba. Un article d’Abel Thiam, correspondant de L’Intelligent à Dakar, explique comment le pouvoir a habilement négocié les virages pour épargner les susceptibilités des uns et des autres. Il s’agissait en l’occurrence du cas de Khadim Bousso, un riche commerçant mouride poursuivi pour malversations financières et qui s’était réfugié à Touba à sa sortie de l’hôpital. Une autre preuve qu’en réalité, les choses ne sont pas encore acquises. Un extrait de l’article d’Abel Thiam résume bien cette situation.
Si Khadim Bousso sort rapidement de l’hôpital pour réintégrer sa cellule, ce sera un signe que quelque chose a changé dans les rapports entre Dakar et Touba. Mais si le Marabout-homme d’affaires reste dans ces locaux aseptisés, le temps de trouver un « arrangement » ou de se faire oublier de ses créanciers, l’affaire apportera de l’eau au moulin de ceux qui pensent qu’au Sénégal le pouvoir politique, et avec lui la justice, a beaucoup d’efforts à faire pour démontrer que l’égalité devant la loi n’est pas un vain mot[28].
2. La mise en place d’un empire mouride
Fidèles à la tradition musulmane d’expansion et de colonisation territoriale, les mourides procéderont de la même manière que le colonisateur. Ils créeront des villages d’exploitation agricole peuplés de mourides à qui ils distribueront des terres. Ces villages vont attirer d’autres paysans qui, pour avoir accès « au gâteau », vont se convertir à cette forme d’islam. Le nombre d’exploitants agricoles va augmenter, et du même coup la demande en arachides. Certains chercheurs attribuent à cette expansion mouride l’épuisement des terres au Sénégal[29].
Le grand succès de l’empire mouride est lié au fait qu’il a popularisé l’islam : d’une religion de l’élite, Cheikh Ahmadou Bamba a fait une religion du peuple. Le Négro-africain pouvait être aussi musulman que n’importe qui. La connaissance de l’arabe n’est plus un préalable pour être un bon musulman. La foi islamique peut également se transmettre en wolof, la langue locale. Le Coran demeure en arabe, mais les enseignements peuvent se donner en wolof. Le pèlerinage à la Mekke qui nécessite des dépenses importantes (voyage en avion, etc.) n’est plus une obligation : il suffit d’aller à Touba.
Since Bamba’s movement pulled much of its support from the rural areas as opposed to the towns, it was forced to accept and tolerate pre-Islamic customs. However, Bamba, in keeping with his spiritual disposition, insisted and demanded that Shahada be given and the creed of Allah obeyed. Lucy Creevy points to several factors that contributed to Bamba’s success as a religious leader. First, he emerged at a time when the Wolof were converting to Islam in great numbers as opposed to their previous opposition to conversion by others. Secondly, the Murid order was specifically and identifiably Wolof in character. It was under the leadership of Wolof men and was therefore able to attract converts within the Wolof group. Creevy adds to this by establishing that the Wolof had been exposed to Islam for a considerable number of years and that all they needed was an intensive proselytization program under Wolof leadership rather than the program of the Torodbe leaders in earlier years […]. Creevy is in the company with other scholars such as Mervyn Hiskett, Peter Clark, and John Ralph Willis in agreeing that the third reason for the success of the Murids under Bamba was their strong opposition to colonial domination[30].
L’ascendance royale du Cheikh a aussi contribué à ce succès. On peut à juste titre voir dans son entreprise un désir de restaurer, quoique sous d’autres formes, le royaume du Cayor de son oncle Lat Dior, anéanti en 1880 par les Français[31].
Aujourd’hui, les mourides constituent un véritable empire qui déborde le Sénégal, la Gambie et d’autres pays africains pour s’étendre à tous les pays du monde où se sont installés les disciples de Cheikh Ahmadou Bamba. L’appartenance maraboutique est le premier trait caractéristique du musulman mouride où qu’il soit dans le monde. Touba demeure sa ville sainte, même si ceux qui le veulent et qui en ont les moyens peuvent se rendre à la Mekke et à Médine. Évidemment, les autres empires musulmans ne voient pas toujours d’un bon oeil cette croissance du mouridisme.
À l’inverse de la tidjanniyya, l’autre grande confrérie, qui a une implantation multinationale et élitiste, les mourides ont d’abord une dimension populaire et nationale dont les Sénégalais, fidèles ou non, se montrent fiers : « Le mouridisme est le meilleur rempart contre l’intégrisme ! » Les arguments ne manquent pas : l’hostilité de l’Arabie saoudite, les relations étroites entre le pouvoir et la confrérie[32]…
Conclusion
Les mourides d’Ahmadou Bamba sont un cas typique de réception de l’islam en terre négro-africaine. Nous avons préféré parler de terre négro-africaine, car les Négro-africains ont figuré parmi les premiers disciples du prophète Muhammad. Il s’agissait à l’origine d’esclaves arabisés, mais cela n’enlevait rien à leur origine africaine.
Cheikh Ahmadou Bamba aura le génie de rendre l’islam plus populaire en l’approchant de gens pas nécessairement riches ou éduqués. Aujourd’hui, les cadres de la confrérie sont des personnes riches et cultivées, mais la proximité avec le petit peuple demeure. De l’islam venu d’Arabie et vécu par les peuples arabisés d’Afrique du Nord, le Cheikh a vraiment fondé un « islam noir ». L’oeuvre originelle ayant été relue et même transformée pour l’adapter à la réalité locale, le résultat est un islam dans lequel un musulman d’Arabie saoudite, par exemple, ne se retrouverait pas nécessairement. C’est ainsi que l’islam a été reçu par Cheikh Ahmadou Bamba au Sénégal. Le mouridisme est-il un islam authentique au même titre que n’importe quelles autres voies musulmanes. La réponse nous paraît évidemment affirmative. En islam, il n’existe pas de hiérarchie centralisée. Le mouridisme n’est en définitive qu’une des nombreuses expressions de la même voie tracée par le prophète Muhammad.
Parties annexes
Notes
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[1]
Jean-Louis Triaud, « L’Afrique de l’Ouest islamisée », dans Encyclopaedia Universalis, 1995, Corpus 1, p. 481a.
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[2]
Ibid., p. 480c.
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[3]
Dans Vincent Monteil, Esquisses sénégalaises (Wâlo – Kayor – Dyolof – Mourides – Un visionnaire), Dakar, IFAN, 1966, p. 186.
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[4]
H.R. Jauss, Pour une esthétique de la réception, préface de J. Starobinski, Paris, Gallimard, 1978, p. 15.
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[5]
A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la Philosophie, Paris, 1968, au mot « Religion », en note.
-
[6]
Adib Rashad, « The Significance of Indigenous African Religions ». Adib Rashad est un consultant en éducation, auteur, historien et enseignant aux États-Unis. Il a vécu en Afrique de l’Ouest et en Asie du Sud-Est.
-
[7]
Ibid.
-
[8]
Jean-Louis Triaud, « L’Afrique de l’Ouest islamisée », p. 482c.
-
[9]
Louis Gardet, Les hommes de l’islam. Approche des mentalités, Paris, Librairie Hachette, 1977, p. 248. Italiques dans l’original.
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[10]
L’Ordre Sufi Qadiri Rifai a été fondé par Abdul Qadir al Geylani en Syrie. Il se caractérise par sa rigueur monastique : une alimentation frugale, la séparation du monde, la joie, la gratitude, etc.
-
[11]
Adib Rashad, « African Muslims Remembered : The Third in a Series ».
-
[12]
David R. Olson, The World on Paper, Cambridge, Cambridge University Press, 1996, p. 108.
-
[13]
Vincent Monteil, Esquisses sénégalaises, p. 178.
-
[14]
Ibid., p. 172.
-
[15]
Sophie Bava et Danielle Bleitrach, « Islam et pouvoir au Sénégal : Les mourides entre utopie et capitalisme », dans Politique africaine, Paris, Karthala, 2000.
-
[16]
Adib Rashad, « African Muslims Remembered ».
-
[17]
Vincent Monteil, Esquisses sénégalaises, p. 179.
-
[18]
Robert Mantran, « Islam : Histoire des pays musulmans », dans Encyclopaedia Universalis, t. 12, 1995, p. 647c.
-
[19]
Ibid., p. 649a.
-
[20]
Ibid., p. 654c.
-
[21]
L. Gardet, Les hommes de l’islam, p. 258.
-
[22]
Sophie Bava et Danielle Bleitrach, « Islam et pouvoir au Sénégal ».
-
[23]
Le Nouveau Petit Robert, 1995, définit le pragmatisme comme étant une doctrine qui donne la valeur pratique comme critère de la vérité (d’une idée). Nous l’utilisons ici dans le sens que lui donne A. Lalande à la suite de Charles Sanders Peirce, son fondateur. « Les avantages du système pragmatique sont nombreux… la question de la liberté psychologique s’y trouve immédiatement résolue, l’existence de Dieu, la providence, l’immortalité, s’y démontrent par leurs heureux effets sur notre vie terrestre, et la démonstration a l’avantage d’être facile, compréhensible, à qui possède les rudiments de l’histoire… Le vrai c’est l’utile ; c’est dans cette affirmation que consiste le pragmatisme » (« Pragmatisme et pragmaticisme », Revue philosophique de la France et de l’Étranger [1967], p. 141-142).
-
[24]
Sophie Bava et Danielle Bleitrach, « Islam et pouvoir au Sénégal ».
-
[25]
Mt 7,20.
-
[26]
Sophie Bava et Danielle Bleitrach, « Islam et pouvoir au Sénégal ».
-
[27]
Dmitri Georges Lavroff, « Sénégal, République du », dans Encyclopaedia Universalis, t. 20, 1995, p. 896c-897a.
-
[28]
Abou Abel Thiam, « Même les marabouts vont en prison », J.A./L’Intelligent, 2202 (23-29 mars 2003), p. 106.
-
[29]
Sophie Bava et Danielle Bleitrach, « Islam et pouvoir au Sénégal ».
-
[30]
Adib Rashad, « African Muslims Remembered », dans la même source.
-
[31]
Ibid.
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[32]
Sophie Bava et Danielle Bleitrach, « Islam et pouvoir au Sénégal ».