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Les « livres de sagesse » de l’Ancien Testament, moins commentés que d’autres textes de la Bible, attirent de nouveau l’attention en ce début du xxie siècle. Deux raisons motivent ce nouvel engouement : cette partie de la Bible n’a guère attiré l’attention des chrétiens jusqu’il y a peu ; de plus, la découverte et la collection d’autres livres de sagesse venant d’autres traditions permettent de comparer ces nouvelles sources avec les livres de sagesse de l’Ancien Testament et ainsi mettre en lumière des similitudes étonnantes.

Une substantielle introduction permet à l’A. de cet ouvrage de situer l’ensemble des livres sapientiaux dans le cadre culturel du Proche-Orient. Le premier chapitre nous présente la complexité du livre des Proverbes, ses principales richesses. L’A. s’attarde à l’un ou l’autre des textes majeurs et affirme que ce livre est une somme de documents sapientiels d’origines très diverses. Selon lui, le livre des Proverbes résume plusieurs siècles de textes sapientiaux. Les textes, ici colligés, n’appartiennent pas tous au peuple d’Israël.

Le livre de Job, maintes et maintes fois commenté par les biblistes, reçoit ici une place de choix. Pour l’A., c’est le seul livre sapientiel d’Israël à suivre le déroulement d’une intrigue. Job, homme riche et juste, sombre peu à peu dans la misère. Il perd tous ses biens, ses fils et ses filles, pour être enfin atteint d’ulcères. Dans son épreuve, Job, malgré les invitations de ses amis à faire le contraire, ne maudit pas son Dieu. Il n’esquive pas la question de la souffrance : pourquoi suis-je né ? Pourquoi cela m’arrive-t-il, moi qui suis le juste serviteur de Dieu ? Pourquoi Dieu fait-il souffrir sa créature alors qu’elle mène une vie honnête ? Comment expliquer que le malheur atteigne si gravement un innocent ? La réponse n’est pas facile à trouver ; si elle l’est, elle n’est pas facile à accepter. Job annonce déjà le Christ souffrant. Le sens de la souffrance imméritée et incompréhensible, sans raison, ne peut se comprendre qu’en l’unissant à celle du Crucifié.

Beaucoup plus court que les livres des Proverbes et de Job, le troisième livre de sagesse de la Bible hébraïque est énigmatique à bien des égards. L’A. insiste pour dire que ce court texte rappelle le mystère de l’existence et les difficultés de vivre. Il appelle à la modestie, face à nos théories sur l’être humain. Même la sagesse a ses limites, principalement lorsqu’elle cherche à comprendre le rapport de l’homme à Dieu. Le jour vient où la révélation biblique découvrira aux croyants que la mort n’est pas le dernier mot de l’existence humaine. La foi dans la survie de l’homme ne balaie pas le réalisme amer de Qohélet, mais permet à l’homme de découvrir, sans trop le savoir, l’espérance dont il est le porteur.

La Sagesse de Ben Sira nous parvient par la traduction grecque appelée la Septante. Ce livre est le plus long des livres sapientiaux de l’Ancien Testament. Il est très facile de mesurer, à partir des textes retenus par l’auteur, la diversité et la richesse de réflexion du sage de Jérusalem. Quoi qu’il en soit, on est frappé par son enseignement sur la sagesse, ses propos sur la crainte du Seigneur, sur le rôle du sage et sur la façon d’acquérir la sagesse. L’écrivain donne une grande place à la prière ; il défend l’honneur du pauvre ; il affirme la liberté de l’homme devant Dieu ; il invite le pécheur à se convertir. Il traite du culte authentique, parle des relations familiales, de l’amitié, de la maladie et de la mort.

La Sagesse de Salomon, que la tradition latine appelle aussi « Livre de la Sagesse », a été écrite directement en grec. L’auteur est inconnu. Sous différentes formes, l’écrivain énonce le principe général suivant : la création est au service du Créateur. L’être humain a été créé en vue de l’incorruptibilité. C’est la Sagesse qui a guidé et sauvé les Hébreux dans leur traversée du désert. Ainsi donc, la main de Dieu sauve le cosmos et l’homme qui l’habite.

L’A. termine son ouvrage par une conclusion générale fort intéressante. Quelques thèmes fort importants y sont soulevés : monde sémitique et hellénisme, l’universel et le particulier, la foi des sages, création et histoire, vie morale et rétribution. En terminant, l’A. interroge le lecteur : et qui est la Sagesse ? Essentiellement spirituelle, habitée par l’Esprit du Seigneur, pénétrant jusqu’au plus intime du réel, sans rien perdre de sa pureté et ne visant que le bien, la Sagesse a Dieu comme souffle. Elle fait les amis de Dieu, anime l’univers, lance les prophètes. Bref, la Sagesse ne peut être que reçue. C’est pourquoi, il faut la demander au Seigneur dans la prière.