Recensions

Jean-Michel Maldamé, Création par évolution. Science, philosophie et théologie. Paris, Les Éditions du Cerf (coll. « Théologies »), 2011, 277 p.[Notice]

  • Nestor Turcotte

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  • Nestor Turcotte
    Matane

Le présent ouvrage du dominicain Jean-Michel Maldamé s’inscrit dans une perspective où les divers savoirs doivent concourir à l’unité. Dans sa quête de vérité, l’être humain doit éviter de verser dans le sectarisme et le fondamentalisme. La juxtaposition des termes « évolution » et « création » abordée dans cet ouvrage n’est pas circonstancielle. Elle est liée à la nature même des relations entre foi et raison, entre vérité révélée et vérité acquise par la raison naturelle. Séparer absolument les domaines du savoir (foi et science) est antinaturel puisque l’esprit humain est en quête d’unité. La première étape de cette étude, « La vie en sa grandeur » (chapitres 1-3), présente un rapide examen de la théorie de l’évolution dans ses résultats mais aussi dans ses options fondatrices. Ainsi, « la théorie de l’évolution est une théorie scientifique dont le but est de donner une vision d’ensemble du monde des vivants. Elle présente une arborescence qui permet de classer les vivants non plus dans un ordre statique (Aristote), mais selon une dynamique marquée par le tracé des embranchements sur l’arbre des vivants ». La théorie de l’évolution permet de mettre en évidence la singularité de l’être humain et ouvre sur une anthropologie. La notion de personne humaine signifie qu’il est d’abord un individu, un être vivant séparé des autres ; elle signifie que cet individu est non divisé en lui-même parce qu’il réalise de manière éminente l’unité de tous les êtres vivants. Elle dit que le principe d’unité est dans l’esprit et non dans la matière. Il y a donc intrication de l’observateur des faits (le scientifique) et de leurs principes d’interprétation (le philosophe et le théologien). La tension entre les deux discours (le scientifique et le théologique) est inévitable, puisqu’il y a entre eux un lien structurel. La théorie de l’évolution suscite des débats. Elle continuera d’en susciter. La deuxième étape de l’ouvrage, « Bible et science de la nature » (chapitres 4-5), aborde les tenants d’une interprétation littérale de la Bible. Il n’y a pas, selon l’auteur, des vérités contingentes — celles des sciences — et, d’autre part, des vérités absolues ou éternelles qui constitueraient une doctrine fondamentale et inamovible — celles de la théologie. Les énoncés de la foi doivent être pris dans un développement où ceux-ci se précisent, s’affinent, se diversifient. La théologie sort renforcée de la provocation venue de la science. Cette provocation a permis d’établir de nouveaux rapports entre les symboles de la foi et la rationalité scientifique. La nature se décrit en langage mathématique, mais ce dernier ne fait jamais entrer l’esprit humain en état de repos. Le discours scientifique ne saurait être définitif. La théologie doit rester ouverte à une nouvelle lecture, en raison de son objet. Elle écoute le discours de la science, se l’approprie pour ensuite s’exprimer dans un langage renouvelé. L’auteur soulève par la suite l’épineuse question du créationnisme. Pour les fondamentalistes, comme pour les créationnistes, le texte biblique a une valeur scientifique. Il leur est impossible de voir que la réalité créée (le monde, tous les vivants, y compris l’homme) relève de plusieurs modes de connaissance. Le scientifique et le croyant considèrent la même réalité, mais à partir de lumières différentes. Les fondamentalistes et les créationnistes interprètent le texte biblique, avec un état de connaissance devenu caduc. Leur interprétation est une falsification de la Bible avant d’être une manifestation d’intolérance. Il ne saurait y avoir de conflit entre vérité naturelle et vérité surnaturelle. L’ordre du créé et l’ordre de la grâce peuvent et doivent se rencontrer. C’est à partir du spectacle du monde que la rencontre est possible. …