Recensions

Khaled Anatolios, Retrieving Nicaea. The Development and Meaning of Trinitarian Doctrine. Foreword by Brian E. Daley. Grand Rapids, Mich., Baker Academic, 2011, 322 p.[Notice]

  • Gheorghe Ovidiu Sferlea

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  • Gheorghe Ovidiu Sferlea
    Université d’Oradea

Comme il est précisé dans l’Introduction, ce livre est un essai de « récupération créative » des éléments ayant régi le développement historique de la doctrine trinitaire, telle qu’elle fut articulée au ive siècle dans le sillage de Nicée. L’idée que K. Anatolios veut illustrer est que ce développement fut bien plus qu’une querelle autour de certains concepts ou formules auxquels on a parfois coutume de le réduire ; il a entraîné au contraire « une interprétation globale de la foi et de la vie chrétienne dans son ensemble » (p. 12). Anatolios choisit de mettre en évidence la cohérence et la richesse de cette interprétation chez trois théologiens du quatrième siècle : Athanase d’Alexandrie, Grégoire de Nysse et Augustin d’Hippone. La visée d’après laquelle il se penche sur la réflexion trinitaire du quatrième siècle est cependant systématique plutôt qu’historique ou simplement culturelle. Anatolios ambitionne en effet de montrer que cette réflexion garde tout son intérêt pour la théologie trinitaire d’aujourd’hui. C’est bien dans ce sens qu’elle peut et mérite d’être « récupérée ». Le livre est réparti en cinq chapitres. Après une Introduction, le premier traite de « La théologie trinitaire du quatrième siècle : histoire et interprétations ». On y trouve d’abord une brève mise en perspective historique des débats du quatrième siècle, avec notamment l’évocation du rôle joué par l’héritage théologique d’Origène. Sont ensuite marqués les principaux repères de la controverse trinitaire, d’Arius et Alexandre jusqu’au concile de Constantinople (381). Très claire, l’exposition est réduite au minimum de détails, mais parvient à donner une image assez complète des événements et de leurs enjeux théologiques. Le chapitre se clôt par une discussion sur l’interprétation traditionnelle de la controverse (celle d’Athanase, en somme) et sur les catégories forgées par les divers historiens modernes pour la remplacer. À la différence des historiens d’un parti pris plus révisionniste, Anatolios fait remarquer qu’il y a du bien-fondé dans la manière de présenter la controverse trinitaire du ive siècle comme un affrontement entre les « Ariens » et les défenseurs de Nicée. Il y a, en effet, des continuités théologiques profondes entre les adversaires de Nicée, malgré des différences qu’il ne faut certes pas méconnaître. Du côté opposé, Athanase fut bien un ardent défenseur de Nicée, de même que les Cappadociens. Et le Concile de 381 a bien eu la conscience de représenter une confirmation de Nicée. La tâche d’une lecture théologique du vie siècle serait donc d’« expliquer l’intelligibilité de cette perspective [traditionnelle], plutôt que de la rejeter en bloc » (p. 28). Pour ce faire, Anatolios propose de distinguer parmi les protagonistes qui se sont affrontés deux grands groupes. Il y a d’un côté les théologiens qui parlent de l’unité de la Sainte Trinité en termes d’unité de substance (Alexandre et Athanase d’Alexandrie, Marcel d’Ancyre, Apollinaire de Laodicée) ; et il y a d’un autre côté ceux qui conçoivent cette unité en termes d’une unité de la volonté (Arius, Eusèbe de Césarée, Asterius, Aèce et Eunome). Cette catégorisation est nouvelle et intéressante, puisqu’elle a l’avantage de partir du cadre commun que tous les participants acceptaient (penser dans un paradigme trinitaire). En même temps, elle contient les termes par rapport auxquels tous les participants ont cru devoir prendre position sans équivoque. Enfin, elle permet de retrouver une cohérence dans les débats parfois confus qui ont eu lieu entre Nicée et Constantinople. Le deuxième chapitre offre une analyse des positions de ces deux groupes à partir de la distinction « unité de substance - unité de volonté ». Anatolios dresse d’abord un inventaire des points doctrinaires que tous ces théologiens …