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Cet ouvrage nous raconte « la sortie » et les découvertes faites en chemin, « lorsqu’elle [Église] se désengourdit un peu » (p. 16).

Voilà véritablement un guide que je qualifierais de pratique destiné à ceux et celles qui désirent tenter l’aventure proposée par le pape François dans Evangelii Gaudium, no 24, de se métamorphoser en une Église « en sortie » et de devenir des disciples missionnaires ! Les auteurs ont pris l’invitation du pape François au sérieux et se sont mis en route ensemble en compagnie d’acteurs pastoraux au nombre de 22, qui ont accepté de se laisser interpeller par ce diagnostic troublant : « […] les jeunes sont absents de leurs activités, ou presque ». De ce constat dramatique est née une recherche-action visant à répondre à l’invitation du pape François en « [tentant] de faire du neuf » (p. 15). C’est ainsi « qu’ils ont pris la route et risqué la sortie, sans que leurs craintes disparaissent complètement. […] ils ont même découvert comment devenir une “Église en sortie” » (ibid.)

En plus de l’introduction, l’ouvrage comporte cinq chapitres : a) « Se mettre en route », b) « Risquer la route », c) « Déroutés », d) « La route lieu de l’Église », e) « Toujours sur la route ». Il se termine par une conclusion et une annexe qui relate le témoignage de quelques participants. Le titre de chacun de ces chapitres évoque le chemin parcouru et instaure une dynamique nous propulsant au coeur de la recherche, non pas comme des observateurs passifs sur le bord de la route regardant « passer la parade », mais comme des lecteurs dynamiques qui sont invités, eux aussi, à prendre la route avec les auteurs et les participants. On peut déceler chez les auteurs le désir de nous faire saisir de l’intérieur ce qui s’est vécu durant la recherche-action qui s’est échelonnée sur trois ans. C’est ainsi qu’en acceptant de prendre la route avec eux nous risquons, chemin faisant, d’être transformés nous aussi.

Dans le premier chapitre, « Se mettre en route » (G. Routhier), nous comprenons combien il est parfois difficile de changer nos habitudes pastorales afin d’aller vers l’inconnu : « Ils [les intervenants en pastorale jeunesse] doivent eux aussi devenir des chercheurs et ne pas se satisfaire des choses apprises » (p. 20). Prendre la route n’est pas chose simple, quelle route ? Les participants décident de « prendre la route des jeunes » (p. 28), car pour eux c’est « la route de l’Église » (p. 29). Ainsi, à l’exemple des disciples de Jésus, ils seront « formés sur la route et c’est là, encore aujourd’hui que le Christ nous rejoindra pour nous former » (ibid.)

Dans le deuxième chapitre, « Risquer la route » (P. François et M. Yelle), les participants mettent cette sortie en oeuvre. Elle devra cependant respecter le rythme de chacun d’eux. Le démarrage est timide et le but est de leur permettre « d’expérimenter une manière nouvelle d’habiter la route des jeunes » (p. 43). Plusieurs types de marcheurs apparaissent : le voyageur sédentaire, l’aventurier organisé, le touriste observateur et le routier d’expérience. Au bout de cette première sortie, un retour de mission se fait, une première réflexion s’amorce qui conduit les participants à constater que « la “sortie” ne va pas de soi » et que lors du second cycle, s’appuyant sur l’expérience vécue, ils reconnaissent l’importance de se déplacer, mais aussi que ce mouvement requiert « une posture de réceptivité dans laquelle opérer cette action » (p. 53).

Dans le troisième chapitre, « Déroutés » (Y. Guérette), la réflexion porte davantage sur le concept de mission « comme clé de lecture » (p. 65). Il est important de réfléchir théologiquement à ce concept. Cette réflexion conduit à identifier un déplacement autre que le déplacement physique, soit « celui de l’extérieur vers l’intérieur » (p. 71). La relecture faite tout au long de ces sorties permet cet autre déplacement. Elle permet d’« interpréter le passage de l’Évangile vivant au milieu de nous » (p. 81).

Le quatrième chapitre, « La route lieu de l’Église » (G. Routhier), nous donne l’occasion de réfléchir à « quelle Église sommes-nous en train de construire ? » (p. 91). La recherche-action « nous [chercheurs et participants] a appris qu’il nous faut aujourd’hui retrouver les actes instituants qui favorisent l’émergence de l’Église et l’édifient » (p. 95). Les chercheurs soulignent aussi l’importance du « mystérieux travail de l’Esprit Saint » (p. 109). En faisant la relecture, les participants ont pris conscience de l’importance de l’action de l’Esprit Saint en le reconnaissant comme « agent principal de toute évangélisation » (p. 111).

Le cinquième chapitre, « Toujours sur la route » (P. Bergeron), nous permet de boucler la boucle et de compléter le voyage entrepris trois ans plus tôt. C’est le retour au questionnement de départ afin de jeter un coup d’oeil sur le chemin parcouru, tout en sachant que le voyage n’est pas terminé pour autant : « […] ce n’est pas parce que la recherche est terminée que ses acteurs sont arrivés à destination une fois pour toutes » (p. 125). La recherche-action a permis à l’ensemble des participants de faire un apprentissage important, « de redécouvrir et de contribuer à bâtir une Église où priment les relations et, plus encore, où il est possible d’être accueilli dans ses vulnérabilités » (p. 141).

La conclusion invite les lecteurs à « OSER ! C’est le souhait que nous formulons également aux lecteurs de cet ouvrage » (p. 147).

Ce livre, en plus d’être écrit dans un langage clair et à la portée de tous, nous fait vivre une aventure, nous donne le goût de prendre la route et, comme croyants, il ne peut pas nous laisser indifférents. Il nous dynamise et nous insuffle une bonne dose d’espérance. Il nous incite à vivre pleinement notre vocation de baptisé avec les frères et les soeurs que nous rencontrerons sur la route de l’Église à construire. Il y a de nombreuses citations bibliques et de nombreuses références aux textes du magistère.

Cet ouvrage sera utile à tous ceux et celles qui désirent faire Église autrement, peu importe le champ de l’activité pastorale. En refermant ce livre il ne reste plus qu’à prendre la route et OSER !