Recensions

Thomas Alferi, Fred Poché, Frédérique Poulet, dir., Langage et religion. Vers un nouveau paradigme ? Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg (coll. « CERIT/Centre d’études et de recherches interdisciplinaires en théologie »), 2017, 230 p.[Notice]

  • Ângelo Cardita

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  • Ângelo Cardita
    Université Laval, Québec

Cet ouvrage collectif réunit une série d’articles autour de la perspective théologique « post-libérale » de George Lindbeck. Prenant appui sur Wittgenstein et Geertz, cette approche, élaborée dans l’étude de Lindbeck The Nature of Doctrine (1984), fait du langage le modèle pour l’étude de la religion. « Suivant le modèle du langage, le postlibéralisme interroge donc la cohérence des doctrines religieuses et les formes de vie qui leur sont attachées pour se focaliser sur leurs capacités d’intégrer des individus dans une communauté » (p. 6-7). Dans sa préface à ce collectif, Thomas Alferi suggère qu’après une première phase de réception de la théologie post-libérale, la discussion peut et doit aller plus loin. Il présente alors les deux points névralgiques résultant de l’enquête publiée dans cet ouvrage : 1) les continuités linguistiques dans les religions et l’éventuelle inadéquation du modèle pour saisir la spécificité chrétienne décrite comme « l’événement d’un amour, qui, une fois pour toutes, résiste à sa dilution dans un “jeu du langage” au sens wittgensteinien » (p. 7) ; 2) la mise en question d’une approche « communautarienne » : les communautés religieuses se distinguent par leur langage propre configurant « un système clos et étanche » (p. 8) et donc intraduisible. Toutefois, l’acte de traduction semble être constitutif de l’acte missionnaire chrétien. Cependant, il n’est pas facile de vérifier la pertinence de ces deux corollaires dans le contexte de cette préface. Ils sont très simplement affirmés. Est-ce que la lecture de chacun des articles ici réunis confirme cette double assertion ? L’ouvrage s’organise en trois parties. Dans la première partie, intitulée « Langage religieux et société - ouverture conceptuelle », on trouve des articles censés ouvrir l’horizon du rapport religion-langage. La deuxième partie — « Théologie post-libérale : La solution culturo-linguistique en question » — se concentre plus spécifiquement sur l’approche de Lindbeck. La troisième partie semble vouloir ouvrir le panorama dans le sens de la diversité culturelle : « Appartenances culturelles et langage religieux ». Cette organisation des matériaux peut créer une certaine difficulté par rapport à l’interrogation centrale. D’une part, la première et la troisième parties peuvent représenter l’horizon large sur lequel situer le questionnement de l’approche post-libérale de Lindbeck, mais, d’autre part, la stratégie peut se révéler dispersive dans la mesure où l’on ne se focalise pas sur la perspective que l’on veut pourtant explorer. Autrement dit, ou bien on a commencé par l’exploration du territoire que la relation langage-religion est appelée à délimiter et à configurer, ou bien on a créé très simplement une diversion. Encore une fois, c’est la lecture de chacun des textes qui confirmera une possibilité ou l’autre. Dans cette recension, je commencerai par les articles de la deuxième partie, celle qui travaille directement le questionnement fondamental du recueil. La deuxième partie de ce recueil regroupe cinq articles. Dans le premier, Rémi Chéno se propose de « recevoir [l’ouvrage de Lindbeck] comme un point de départ pour penser en dehors des sentiers trop longtemps arpentés vers de nouveaux territoires à explorer » (p. 81). L’auteur pense à la théologie des religions. Il commence par clarifier la portée des pluralismes — libéral et post-libéral — expliquant que le choix du pluralisme post-libéral est « de s’appuyer sur la consistance spécifique de chaque religion, sa “territorialité” » (p. 83). Ainsi, les religions sont considérées comme « formes de vie » ou « formes culturo-linguistiques [qui] produisent des expériences religieuses » (p. 84). Pour cette raison, le fonctionnement interne du langage devient le modèle de compréhension de la religion. Dans cette perspective, la théologie est conçue comme « un discours de second ordre …

Parties annexes