Résumés
Résumé
Marie de l’Incarnation est l’auteure d’une importante correspondance dont il ne reste aujourd’hui que quelques centaines de lettres. À côté du dialogue qu’elle y noue avec ses correspondants de France et de Nouvelle‑France, l’Ursuline poursuit, inlassablement, une conversation intérieure, faite d’oraisons et de prières à Dieu. Cet échange est un lieu de secrets, un espace qui se dit mal, s’écrit encore moins, mais dont son fils et d’autres sollicitent pourtant le récit. Ses lecteurs assistent alors à une autre conversation, toujours recommencée, avec le « Verbe éternel ». Cet Autre habite toutes les lettres et fait, insensiblement, de tout lecteur un tiers, spectateur et témoin du mystère. Ce faisant, Marie de l’Incarnation familiarise chacun de ses correspondants avec l’expérience mystique, utilisant l’espace de la lettre pour ouvrir à un autre dialogue, où il n’y aurait plus ni épistolière ni destinataire.
Mots-clés :
- Marie de l’Incarnation,
- mystique,
- épistolaire,
- Nouvelle‑France,
- lecteur
Abstract
Marie de l’Incarnation wrote a substantial body of correspondence of which only a few hundred letters remain. Alongside her dialogue with correspondents from France and New France, the Ursuline tirelessly pursues an interior conversation consisting of prayers to God. This exchange is a place of secrets, a space that one would have trouble putting into words, let alone letters; however, she is entreated by her son and other correspondents to, nonetheless, disclose it. Her readers thus participate in another conversation, one which always returns to the “eternal Word.” This Other inhabits all of her letters and, imperceptibly, turns her readers into third party spectators and witnesses to the mystery. In so doing, Marie de l’Incarnation invites each of her readers to participate in the mystical experience, using the space of the letter to open up another dialogue in which there is neither writer nor reader.
Keywords:
- Marie de l’Incarnation,
- mystical,
- epistolary,
- New France,
- reader
Parties annexes
Bibliographie
- Marie de l’Incarnation, Correspondance, Abbaye Saint‑Pierre, Solesmes, 1971.
- Marie de l’Incarnation, Lettres de la Vénérable Mère Marie de l’Incarnation, première Supérieure des Ursulines de la Nouvelle France, Paris, Louis Billaine, 1681.
- Claude Martin, La Vie de la Vénérable Mère Marie de l’Incarnation, première Supérieure des Ursulines de la Nouvelle France, tirée de ses Lettres et de ses Écrits, Paris, Louis Billaine, 1677.
- Christian Belin, Le corps pensant. Essai sur la méditation chrétienne, Paris, Seuil, 2012.
- Lynn Berry, « “Le ciel et la terre nous ont parlé.” Comment les missionnaires du Canada français de l’époque coloniale interprétèrent le tremblement de terre de 1663 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 60, n° 1‑2, 2006, p. 11‑35.
- Michel de Certeau, La fable mystique, xvie‑xviie siècle, t. I, Paris, Gallimard, 1982.
- Michel de Certeau, La faiblesse de croire, texte édité et présenté par Luce Giard, Paris, Seuil, 1987.
- Michel de Certeau, Le lieu de l’autre. Histoire religieuse et mystique, Paris, Gallimard/Seuil, 2005.
- Michel de Certeau, La fable mystique, xvie‑xviie siècle, t. II, Paris, Gallimard, 2013.
- Michèle Clément, « Michel de Certeau : critique et pratique de la littérature », Les Dossiers du Grihl, « Michel de Certeau et la littérature », n° 2, 2018, http://journals.openedition.org/dossiersgrihl/6846 (27 mai 2020).
- Catherine Déglise et Anne‑Sophie Germain‑De Franceschi (dir.), Formes de la relation à Dieu aux xvie et xviie siècles, Paris, Classiques Garnier, 2019.
- Dominique Deslandres, « Qu’est‑ce qui faisait courir Marie Guyart? Essai d’ethnohistoire d’une mystique d’après sa correspondance », Laval théologique et philosophique, vol. 53, n° 2, 1997, p. 285‑300.
- Brigitte Diaz et Jürgen Siess (dir.), L’épistolaire au féminin. Correspondances de femmes (xviiie‑xxe siècle), Caen, Presses universitaires de Caen, 2006.
- Gérard Ferreyrolles, « L’épistolaire, à la lettre », Littératures classiques, 2010, vol. 1, n° 71, p. 5‑27.
- Patrick Goujon, Les politiques de l’âme. Direction spirituelle et Jésuites français à l’époque moderne, Paris, Classiques Garnier, 2019.
- Claire Gourdeau, Les délices de nos coeurs. Marie de l’Incarnation et ses pensionnaires amérindiennes, 1639‑1672, Québec, Septentrion/CÉLAT, 1994.
- Geneviève Haroche‑Bouzinac, L’épistolaire, Paris, Hachette, 1995.
- Sophie Houdard, Les invasions mystiques. Spiritualités, hétérodoxies et censures au début de l’époque moderne, Paris, Les Belles Lettres, 2011.
- Vincent Kaufmann, L’équivoque épistolaire, Paris, Éditions de Minuit, 1990.
- Isabelle Landy‑Houillon, « L’émergence du “je” dans les écritures croisées de Marie de l’Incarnation et de Claude Martin, son fils », dans Raymond Brodeur, Dominique Deslandres et Thérèse Nadeau‑Lacour (dir.), Lecture inédite de la modernité aux origines de la Nouvelle‑France. Marie Guyart de l’Incarnation et les autres fondateurs religieux, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2009, p. 61‑73.
- Isabelle Landy‑Houillon, « “Au bruit de tous les infinis” : la correspondance de Marie Guyart de l’Incarnation et de son fils Claude Martin », Littératures classiques, vol. 1, n° 71, 2010, p. 303‑325.
- Jacques Le Brun, La jouissance et le trouble. Recherche sur la littérature chrétienne de l’âge classique, Genève, Droz, 2004.
- Cécile Lignereux, « L’art épistolaire de l’âge classique comme champ d’application du savoir rhétorique », Exercices de rhétorique, n° 6, 2016, https://journals.openedition.org/rhetorique/441.
- Viviane Mellinghoff‑Bourgerie, « L’écrivain au service des âmes : tradition et avatars de l’épistolarité spirituelle », Travaux de littérature, vol. XXI, 2008, p. 117‑130.
- Hélène Michon, « Marie de l’Incarnation : une intériorité de lumière », dans Philippe Roy‑Lysencourt, Thérèse Nadeau‑Lacour et Raymond Brodeur (dir.), Marie Guyart de l’Incarnation. Singularité et universalité d’une femme de coeur et de raison, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2019, p. 63‑78.
- Réal Ouellet, La relation de voyage en Amérique (xvie‑xviiie siècles). Au carrefour des genres, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2010.
- Adrien Paschoud, « Le Grand voyage du pays des Hurons (1632) de Gabriel Sagard : envisager la notion d’aventure entre stratégie d’auteur, édification et interprétation », Littératures classiques, vol. 3, n° 100, 2019, p. 27‑37.
- Marie‑Christine Pioffet, La tentation de l’épopée dans les Relations des jésuites, Québec, Septentrion, 1997.
- Josiane Rieu, « La temporalité du langage poétique comme mystère », dans Marie‑Christine Gomez‑Géraud et Jean‑René Valette (dir.), Le discours mystique entre Moyen Âge et première modernité, t. I : La question du langage, Paris, Honoré Champion, 2019, p. 331‑356.
- Luc Vaillancourt, La lettre familière au xvie siècle. Rhétorique humaniste de l’épistolaire, Paris, Honoré Champion, 2003.