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Delisle, Jean (2013) : La traduction raisonnée : manuel d’initiation à la traduction professionnelle de l’anglais vers le français. 3e édition. Ottawa : Les Presses de l’Université d’Ottawa, 716 p.[Notice]

  • Kornebari B. Kumbe

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  • Kornebari B. Kumbe
    Université de Montréal, Montréal, Canada

La parution en 1980 du premier livre de Jean Delisle, L’analyse du discours comme méthode de traduction et Livre du maître, marque un moment charnière pour l’enseignement de la traduction. Car, l’ouvrage, ancré dans la théorie interprétative de l’École Supérieure d’Interprètes et de Traducteurs (ÉSIT), représente un point de départ vers le développement de méthodologies autres que la méthode dite de la performance magistrale (Ladmiral 1979 : 73). Delisle, tout en reconnaissant les apports de la Stylistique comparée du français et de l’anglais : méthode de traduction de Jean-Paul Vinay et Jean Darbelnet (1958), lance des critiques contre l’approche comparative en insistant sur le fait que « traduire n’est pas comparer » (Delisle 1980 : 94). En même temps, Delisle se démarque dans cet ouvrage comme le premier traductologue à proposer une approche de l’enseignement fondée sur une théorie reconnue de l’apprentissage : le behaviorisme. L’idée d’objectif d’apprentissage proposée par Delisle compte parmi les principales applications du behaviorisme dans les salles de classe. Les trois éditions de La traduction raisonnée : manuel d’initiation à la traduction professionnelle de l’anglais vers le français de Delisle (1993, 2003 et 2013) reprennent la partie appliquée de son approche et délaissent la partie théorique telle qu’elle est proposée par l’auteur dans son ouvrage de 1980. Il est donc à la fois curieux et intéressant de constater le changement de perspective lorsque Delisle affirme dans les trois éditions de La traduction raisonnée (1993 : 14 ; 2003 : 16 ; 2013 : 18) qu’« en pédagogie, les démarches comparative et interprétative sont complémentaires », même si l’auteur estime que son livre est conçu « comme une réflexion sur la démarche cognitive du traducteur » (Delisle 1993 : 13). L’ouvrage est donc axé sur la Théorie interprétative de la traduction (TIT) de Seleskovitch et Lederer de l’ÉSIT et la Stylistique comparée des deux comparatistes Vinay et Darbelnet (SCFA). Delisle (2013 : 17) déclare que c’est pour rendre hommage au comparatiste Darbelnet qu’il lui a emprunté le titre La traduction raisonnée : Darbelnet avait publié un article sous le même titre dans la revue Meta en 1969. Dès lors, on s’interroge sur le changement de perspective de l’auteur. Est-ce que Delisle, après plusieurs années d’enseignement de la traduction à l’université a constaté la problématique décrite par Vinay (1957 : 143) comme « chevauchement de disciplines », à savoir l’enseignement des langues étrangères et l’enseignement de la traduction professionnelle ? Il convient de noter que dans le contexte canadien, où Delisle a passé tant d’années comme professeur, les programmes de traduction professionnelle commencent au premier cycle où les élèves éprouvent encore le besoin de perfectionnement des connaissances linguistiques. Contrairement à d’autres pays, comme en France (particulièrement à l’ÉSIT), où les élèves entrent à l’école de traduction au deuxième cycle avec la maitrise des langues de travail comme l’une des conditions d’admission. Depuis la publication en 1993 de la première édition de La traduction raisonnée, Delisle n’a cessé de réviser son ouvrage didactique destiné aux étudiants comme aux professeurs de traduction : la deuxième édition a été publiée en 2003 et la troisième en 2013. Par ailleurs, Delisle compte à son actif une longue liste de publications, notamment sur la pédagogie de traduction mais aussi sur l’histoire de la traduction. Contrairement aux deux éditions précédentes dont seul Delisle est l’auteur, la troisième édition de La traduction raisonnée a un coauteur en la personne de Marco Fiola dont les contributions sont détaillées dans la page de remerciements. D’autres collaborateurs ont également rédigé les nouveaux objectifs : Georges L. Bastin – Autorévision (OS 11), Georges Farid – Nouvelle orthographe …

Parties annexes