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La pensée à fleur de peauThinking with a sensitive skin[Notice]

  • Michael Schubert,
  • Hector Escriva et
  • Vincent Laudet

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  • Michael Schubert
    Laboratoire de biologie moléculaire de la cellule,
    Cnrs UMR 5161/Inra UMR 1237,
    École Normale Supérieure de Lyon,
    69364 Lyon, France.

  • Hector Escriva
    Laboratoire de biologie moléculaire de la cellule,
    Cnrs UMR 5161/Inra UMR 1237,
    École Normale Supérieure de Lyon,
    69364 Lyon, France.

  • Vincent Laudet
    Laboratoire de biologie moléculaire de la cellule,
    Cnrs UMR 5161/Inra UMR 1237,
    École Normale Supérieure de Lyon,
    69364 Lyon, France.
    vincent.laudet@ens-lyon.fr

Le système nerveux central (SNC) est organisé de façon différente chez les deux groupes majeurs d’animaux, les protostomiens (les insectes, les annélides, les mollusques, etc.) et les deutérostomiens (les échinodermes, les chordés, etc.) (Figure 1). D’une façon schématique, chez les protostomiens, le SNC est condensé et situé ventralement et, chez les deutérostomiens, il est condensé et situé dorsalement. Un troisième type d’organisation du système nerveux existe chez les animaux placés par la plupart des analyses phylogénétiques à la base de tous les animaux bilatériens: les cnidaires (les anémones, les coraux, etc.) (Figure 1). Chez ces derniers, le système nerveux n’est pas central, mais il est structuré sous la forme d’un réseau situé à la base de l’épiderme. Les biologistes de l’évolution se posent ainsi depuis longtemps des questions sur les caractéristiques du système nerveux chez l’ancêtre de tous les animaux bilatériens. Ce débat a donné lieu à une demi-douzaine d’hypothèses différentes. L’objet de cet article n’est pas de faire un récit détaillé des hypothèses existantes; cependant, on peut citer les deux hypothèses les plus représentatives: l’hypothèse d’inversion de Geoffroy-Saint Hilaire (revue plus tard par D. Arendt et K.Nübler-Jung [1]), qui propose un ancêtre commun des protostomiens et deutérostomiens avec un SNC concentré et ventral qui aurait été inversé dorso-ventralement chez les deutérostomiens; et l’hypothèse d’une évolution indépendante chez les protostomiens et les deutérostomiens par condensation ventrale ou dorsale, respectivement, du système nerveux diffus présent chez un ancêtre des animaux bilatériens [2]. Une approche intéressante dans l’étude de l’évolution d’une structure telle que le SNC est l’étude comparative, dans différents modèles animaux, des profils d’expression des gènes impliqués dans le développement de cette structure. Il est clair aujourd’hui que l’expression d’un grand nombre de gènes impliqués dans le développement du SNC montre des profils d’expression conservés entre les protostomiens et les deutérostomiens. Mais cette conservation des profils d’expression ne nous permet pas d’inférer une morphologie du SNC commune avec celle d’un ancêtre des animaux bilatériens. Dans un article récent, C.J. Lowe et al. [3] ont utilisé une approche très intéressante pour essayer d’élucider cette question. Ils ont étudié l’expression de vingt-deux gènes chez un hémichordé, Saccoglossus kowalevskii. Ces gènes connus pour être impliqués dans l’organisation spatiale du SNC chez les bilatériens, et très conservés au cours de l’évolution, montrent des profils d’expression comparables entre les insectes et les vertébrés. Les hémichordés et les échinodermes (oursin, étoile de mer, etc.) sont les deux groupes de deutérostomiens non chordés. Au contraire des échinodermes, les hémichordés montrent plusieurs ressemblances morphologiques avec les chordés, ce qui les rend très intéressants comme modèles pour comprendre la mise en place des caractères spécifiques des chordés. Les ressemblances les plus importantes entre les hémichordés et les chordés sont l’existence de fentes branchiales, une stomochorde (assimilée à la notochorde des chordés), et une extension postanale (assimilée à la queue). Leur système nerveux (sans cerveau) est composé d’un réseau de nerfs basi-épithéliaux autour du corps concentré dans deux chordes nerveuses, l’une ventrale et l’autre dorsale, qui ont été proposées par différents auteurs comme étant toutes les deux des homologues de la chorde nerveuse dorsale des chordés (Figure 1). Les résultats de C.J. Lowe montrent une distribution antéro-postérieure similaire des profils d’expression des vingt-deux gènes utilisés entre Saccoglossus et les vertébrés. Mais le résultat le plus surprenant de ce travail n’est pas la distribution antéro-postérieure des gènes étudiés, mais leur distribution dorso-ventrale. En effet, l’expression des gènes étudiés n’est pas concentrée dans la chorde dorsale ou dans la chorde ventrale de Saccoglossus, mais elle se situe au contraire dans plusieurs domaines qui entourent le corps de l’animal, …

Parties annexes