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La pharmacogénétique : le lien entre gènes et réponse aux médicamentsPharmacogenomics : from genes to drug sensitivity[Notice]

  • Marie-Anne Loriot et
  • Philippe Beaune

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  • Marie-Anne Loriot
    Service de Biochimie Générale,
    Oncologie Moléculaire et Pharmacogénétique,
    Hôpital Européen Georges Pompidou,
    20, rue Leblanc,
    75015 Paris, France
    et Inserm UMRS 490,
    Toxicologie Moléculaire,
    Centre Universitaire des Saints-Pères,
    45, rue des Saints-Pères,
    75006 Paris, France.
    Marie-Anne.Loriot@univ-paris5.fr

  • Philippe Beaune
    Service de Biochimie Générale,
    Oncologie Moléculaire et Pharmacogénétique,
    Hôpital Européen Georges Pompidou,
    20, rue Leblanc,
    75015 Paris, France
    et Inserm UMRS 490,
    Toxicologie Moléculaire,
    Centre Universitaire des Saints-Pères,
    45, rue des Saints-Pères,
    75006 Paris, France.

Chaque année en France, la iatrogénie médicamenteuse est responsable d’environ 128 000 hospitalisations, pour un coût global estimé à 320 millions d’euros et l’incidence des hospitalisations liées à un effet indésirable d’un médicament est de 3,2 % [1]. Ces chiffres démontrent que les variations individuelles de réponse aux médicaments représentent un problème médical et de Santé Publique important. La pharmacogénétique étudie les mécanismes d’origine génétique intervenant dans la réponse aux médicaments avec pour objectif l’optimisation des traitements, aussi bien en termes d’efficacité que de sécurité d’emploi. Dans cet article, nous allons exposer les « bases » de l’émergence de la pharmacogénétique comme outil de prescription thérapeutique en citant quelques exemples d’applications cliniques courantes. Le séquençage complet du génome humain et la mise au point de technologies performantes d’analyse des gènes a permis l’identification de variations de séquences dans les gènes cibles des médicaments. La pharmacogénétique s’intéresse aux conséquences de ces polymorphismes génétiques en thérapeutique dans le but de développer des tests simples permettant d’identifier les individus susceptibles de présenter des anomalies de réponse (inefficacité, toxicité). La plupart des gènes (codant pour des protéines intervenant dans le métabolisme, le transport, les récepteurs, la transduction du signal) sont susceptibles d’avoir un rôle déterminant dans la réponse aux médicaments. Cependant les gènes les plus étudiés sont ceux dont les produits interviennent dans le métabolisme et le transport de molécules thérapeutiques [2, 3]. Les polymorphismes génétiques peuvent être responsables de variations d’expression ou d’activité des enzymes du métabolisme des médicaments. Ils s’expriment dans la population générale sous la forme de différents phénotypes métaboliques, définissant généralement deux groupes d’individus : métaboliseurs lents (ML) (déficit d’activité enzymatique) et métaboliseurs rapides (MR) (activité normale). L’existence de métaboliseurs ultrarapides (MUR) (activité augmentée) ou intermédiaires (MI) (activité réduite) est possible pour certaines enzymes. La fréquence des différents phénotypes est variable en fonction de l’enzyme, et, pour une même enzyme, variable en fonction de l’origine ethnique ou géographique des populations étudiées. Les conséquences cliniques des polymorphismes génétiques dépendent de plusieurs facteurs : importance de la voie métabolique polymorphe dans la clairance globale du médicament, administration du médicament sous forme active ou de pro-drogue, activité des métabolites. Les méthodes de phénotypage reposent soit sur une mesure de l’activité enzymatique soit sur l’administration d’un substrat-test (en général un médicament), suivie d’une mesure des quantités résiduelles de substrat et/ou de leurs métabolites à partir d’un échantillon biologique, urinaire ou sanguin. On détermine le rapport métabolique entre la quantité de substance retrouvée sous forme inchangée et celle d’un (ou plusieurs) métabolite (s), rapport qui est le reflet de l’activité enzymatique étudiée. Les méthodes de phénotypage présentent certains inconvénients (absence d’un substrat-test présentant toutes les qualités requises, spécificité, innocuité ou contre-indications) qui limitent leur utilisation. En pratique, le génotypage est plus largement utilisé que le phénotypage puisqu’il est applicable à l’analyse de l’ensemble des polymorphismes affectant non seulement la pharmacocinétique des médicaments, mais également leurs effets (récepteurs, cibles protéiques). Des études de corrélation phénotype/génotype, complétées parfois par la caractérisation fonctionnelle in vitro des variants, sont un préalable nécessaire à l’utilisation de ces tests. Parmi les exemples importants, on peut citer le CYP 2D6 (CY : cytochrome), impliqué dans le métabolisme de plus d’une centaine de médicaments (anti-arythmiques, β-bloquants, psychotropes, dérivés opiacés à visée analgésique ou antitussive), soit 20 à 25 % de l’ensemble des médicaments d’usage courant et d’intérêt thérapeutique majeur (Tableau I) [4]. Des adaptations de la posologie des antidépresseurs en fonction du phénotype sont proposées par de nombreux auteurs qui recommandent des doses pouvant aller de 30 % de la dose standard conventionnelle pour les ML, à plus de 200 % pour les …

Parties annexes