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N’anticipons pas…

La dyskératose congénitale (DKC), maladie multisystémique caractérisée par des anomalies cutanées, des troubles hématopoïétiques et une prédisposition aux cancers comporte deux formes, différentes par leur mode de transmission : (1) la dyskératose liée à l’X, due à des mutations du gène DKC1, situé en Xq28, codant pour la dyskérine, associée aux petits ARN nucléolaires ((→) m/s 2000, n° 4, p. 562) ; (2) la DKC autosomique dominante, beaucoup plus rare, due à des mutations dans le gène TERC, localisé en 3q21-23, codant pour l’ARN matriciel de la sous-unité catalytique de la télomérase (TERT) ((→) m/s 2002, n° 1, p. 39).

Dans les deux formes de DKC, il existe donc une inhibition partielle de la télomérase, cette transcriptase inverse qui synthétise les répétitions télomériques à chaque extrémité des chromosomes. L’importance du rôle de la télomérase dans la maintenance de la longueur des télomères, capital en biologie cellulaire, en particulier dans le vieillissement et les cancers, a fait l’objet de nombreux travaux dont médecine/sciences s’est fait l’écho à plusieurs reprises [1, 2]. Le mécanisme pathogénique des deux formes de DKC ayant été compris - atteinte des deux composants de la télomérase, avec pour conséquence un raccourcissement très net des télomères dans les cellules des malades -, tout semblait dit sur cette redoutable maladie. Pourtant, une équipe anglaise qui s’est investie dans l’étude des DKC [3] vient de découvrir un phénomène extrêmement intéressant : dans la forme à transmission dominante de la DKC, on observe indiscutablement un phénomène d’anticipation [4]. Une étude de plusieurs familles sur trois générations montre que certains sujets de la génération I peuvent rester asymptomatiques leur vie durant, et que les troubles apparaissent plus précocement à la génération III qu’à la génération II. Ainsi, ce mécanisme qu’on croyait réservé aux maladies par expansion de triplets peut aussi être observé dans d’autres affections humaines. Le modèle murin aurait pu mettre la puce à l’oreille puisque, chez les souris TR-/-, ce n’est qu’à partir de la 6e génération que se manifestent les anomalies (en l’occurrence, un vieillissement prématuré). L’anticipation se produit donc aussi, mais encore plus lentement car les cellules des lignées de souris utilisées sont pourvues de télomères beaucoup plus longs que ceux des cellules humaines.

L’extrême variabilité antigénique de P. falciparum favorisée par l’hôte ?

La malaria, fléau mondial avec ses deux millions de morts annuelles, est globalement le fruit d’un échec de la réponse immunitaire de l’hôte. L’ampleur de la variabilité antigénique de la protéine parasitaire EMP1 (erythrocyte membrane protein 1), exprimée à la surface des érythrocytes infectés, est responsable de l’échappement immunitaire et donc de la persistance de l’infection qui, in fine, se traduit par des difficultés à éradiquer le pathogène. Si la fréquence de recombinaison exceptionnellement élevée du gène var, codant pour la protéine EMP1, rend compte de l’importante variabilité antigénique de P. falciparum [5], M. Recker et al. [6] avancent l’existence d’un mécanisme, complémentaire, impliquant la pression immunitaire exercée par l’hôte. Avec un constat pour le moins paradoxal : les individus les plus capables de mettre en oeuvre une réaction immunitaire efficace contre les variants du parasite sont aussi les plus susceptibles de présenter une infection persistante. Les auteurs proposent un schéma, testé par modélisation mathématique, au sein duquel coexistent deux types de réactions immunes. L’un est une réponse lente dirigée contre l’épitope majeur de la protéine parasitaire : isolée, cette réaction devrait à elle seule suffire à terminer l’infection. Le second type de réaction immune - il s’agit de l’hypothèse des auteurs - comprendrait une série de réponses croisées, transitoires, dirigées contre des motifs antigéniques mineurs partagés par différents variants. Ces réponses immunes, mises en oeuvre précocement, entraîneraient la sélection de nouveaux variants à ces épitopes mineurs : l’efficacité de l’hôte à produire ces réponses serait ainsi corrélée à l’émergence de nouveaux variants, et donc à une augmentation de la durée de l’infection. Le paradigme proposé ici permet de rendre compte d’un certain nombre de mystères épidémiologiques observés en zone endémique. Ainsi en est-il de l’accroissement observé, avec l’âge, de la prévalence de l’infection par P. falciparum chez l’enfant, malgré l’augmentation de l’immunité acquise attendue d’une plus grande durée d’exposition au parasite : de fait, le modèle de M. Recker et al. explique comment cette capacité croissante à réagir contre le parasite peut, à travers sa composante dirigée contre les variants mineurs, provoquer une « chronicisation » de l’infection. Fort heureusement, cette capacité immunitaire s’amplifiant avec l’âge remplit aussi son rôle primordial en diminuant la parasitémie et, de ce fait, la fréquence des épisodes cliniques…

Innocuité des anti-COX 2 ?

Les inhibiteurs sélectifs de la cyclo-oxygénase 2 (anti-COX 2) sont une nouvelle classe de médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) dont la réputation est d’être moins toxiques pour le tractus digestif et d’exposer à un moindre risque d’hémorragies gastro-intestinales. Une équipe canadienne [7] a récemment mené une étude à large échelle dont les résultats sont, pour le moins, peu enthousiasmants. Cette étude porte sur une population de plus de 1,3 millions d’habitants de l’Ontario, tous âgés d’au moins 66 ans, suivie de 1994 à 2002. L’apparition des anti-COX 2 a modifié le mode de prescription des AINS puisque la prévalence d’utilisation de ces médicaments (toutes classes d’AINS confondues) a augmenté de 14 % à 20 % dans l’année qui a suivi l’introduction des inhibiteurs sélectifs, ce qui représente une augmentation de plus de 90 000 personnes traitées annuellement. Alors que le nombre d’hospitalisations pour hémorragie digestive haute était en baisse régulière pendant la période précédant l’introduction des anti-COX 2, il a augmenté significativement dans l’année suivant leur introduction (650 cas supplémentaires hospitalisés chaque année). Ces résultats indiquent que, même si un nouveau médicament d’une classe donnée est moins toxique que les autres, sa prescription effrénée aboutit néanmoins à des complications. D’abord ne pas nuire… d’abord mieux prescrire !

ARNi contre la grippe

Le tribut payé à la grippe est lourd : cette maladie entraîne plusieurs centaines de milliers de morts chaque année et les actions préventives (vaccinations) ou thérapeutiques (médicaments antiviraux) imparfaitement efficaces. D’où l’idée de bloquer la réplication virale in vivo en utilisant l’interférence par l’ARN dont l’efficacité in vitro a déjà été mise en évidence. Deux équipes américaines viennent de démontrer que cette approche peut être efficace… au moins chez la souris [8, 9]. Dans la première étude, des petits ARN interférents (ARNi), dirigés soit contre la protéine de la nucléocapside, soit contre des éléments de la transcriptase ARN ont été administrés à des souris. L’injection a été effectuée avant ou au décours de l’infection par le virus de la grippe. Les ARN étaient couplés à un polymère cationique, la polyéthylène-imine, qui a permis d’obtenir une capture efficace des ARNi par les cellules pulmonaires. Quelle que soit la séquence d’injections, une diminution spectaculaire de la réplication virale dans le poumon a été notée. Des résultats positifs ont également été obtenus en injectant un vecteur ADN permettant la transcription d’ARN en épingle à cheveux à partir desquels des ARNi sont synthétisés in vivo, ce qui permet une action prolongée de ces ARN. La seconde étude apporte des renseignements supplémentaires : d’une part, l’administration d’ARNi diminue la mortalité chez des souris exposées à des doses létales de virus ; d’autre part, cette réponse est spécifique et n’est pas due à une réponse antivirale exercée par la production endogène d’interféron ; enfin, cette protection est efficace contre deux souches de grippe aviaire hautement pathogènes. L’administration d’ARNi par voie nasale, permettant d’obtenir des concentrations élevées dans le tissu pulmonaire, semble apporter une efficacité supplémentaire.

Ces exemples encourageants d’utilisation des ARNi in vivo pour une maladie commune et grave ouvrent une voie thérapeutique… qui prendra encore un peu de temps de développement avant d’être prise en charge par la carte Vitale… avec photo !

Trafic du CFTR : il y a du Rab !

La protéine CFTR (cystic fibrosis transmembrane regulator) est une glycoprotéine membranaire qui exerce des fonctions de canal chlorure et dont les mutations sont responsables de la mucoviscidose, maladie génétique la plus fréquente chez l’homme. La mutation de CFTR la plus souvent rencontrée, ΔF508, entraîne plusieurs anomalies du fonctionnement et du trafic de la protéine. Celle-ci ne parvient pas à la membrane des cellules épithéliales où elle est normalement exprimée car elle reste séquestrée dans le réticulum endoplasmique. Néanmoins, si on permet à la protéine mutée d’atteindre la membrane plasmique par des artifices expérimentaux, une seconde anomalie est mise en évidence ; cette protéine a une demi-vie membranaire très courte et subit une endocytose pathologique. Les modalités de l’endocytose du CFTR normal et muté viennent de faire l’objet d’une étude très élégante qui apporte des informations essentielles sur le rôle central joué par une famille de petites protéines G, les protéines Rab [10]. Grâce à un modèle expérimental de cellules épithéliales en culture et de protéines dont des épitopes sont marqués et peuvent être suivis de manière cinétique, les auteurs ont observé les étapes suivantes. L’endocytose de la protéine CFTR vers les endosomes précoces implique Rab5. À partir des endosomes précoces, deux voies peuvent alors être empruntées : soit un recyclage vers la membrane qui dépend de la présence de Rab1 ; soit un mouvement vers les endosomes tardifs impliquant Rab7 ou vers le réseau trans-golgien qui implique Rab9. Le CFTR mutant ΔF508 disparaît rapidement de la membrane plasmique et n’y est pas recyclé. Néanmoins, la surexpression de Rab11, l’inhibition du protéasome ou l’inhibition de l’endocytose dépendante de Rab5 prolongent la vie membranaire de cette protéine pathologique. La stabilisation membranaire des CFTR mutés est probablement une piste intéressante pour accroître la performance de ces protéines au cours de la mucoviscidose.

Coliques néphrétiques : AINS contre opiacés

Quel est le traitement antalgique optimal pour soulager les douleurs de colique néphrétique, connues pour être parmi les plus violentes des douleurs aiguës ? Deux auteurs australiens tentent de répondre à cette question par une étude extensive de la littérature comparant l’efficacité et les effets secondaires des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et des opiacés dans cette situation pathologique [11]. Les études examinées proviennent des bases Medline et PreMedline, Embase et Cochrane, ainsi que d’études rapportées dans les actes de congrès internationaux. Des 74 études examinées au départ, 54 ont été éliminées sur des critères d’absence de randomisation, d’inhomogénéité, en termes de pathologie, des patients étudiés, ou d’inadéquation des méthodes d’évaluation de la douleur. Les 20 études rescapées ont été soumises à une méta-analyse. Premier constat : aucune de ces 20 études ne peut être considérée comme idéale en termes de méthodologie et d’information. Des informations intéressantes sont néanmoins dégagées : (1) la réduction du degré de douleur, quantifié par les patients eux-mêmes, obtenue avec les AINS est supérieure à celle provoquée par les opiacés ; (2) l’utilisation des AINS en première intention nécessite moins souvent le recours à un complément de traitement antalgique ; (3) les effets secondaires des AINS, en particulier digestifs, sont moins importants que ceux provoqués par les opiacés. Le résultat du match AINS-opiacés arbitré par la colique néphrétique est sans appel : 3 - 0.

EPO sans dopage

L’érythropoïétine (EPO), une cytokine principalement synthétisée par le rein, exerce deux types d’effets. Le plus connu est qu’elle stimule l’érythropoïèse, effet recherché par les athlètes en mal de forme et, plus couramment, par les malades atteints d’insuffisance rénale chronique dont les capacités de synthèse sont épuisées. Cet effet passe par la liaison de l’EPO à un récepteur homodimérique. L’autre effet, moins connu mais tout aussi important, est la protection tissulaire, en particulier du système nerveux. Une production locale d’EPO a été mise en évidence dans le système nerveux central. L’administration d’EPO par voie systémique permet une neuroprotection lors de l’ischémie cérébrale chez l’homme. L’effet neuroprotecteur semble être exercé par la mise en jeu d’un récepteur de l’EPO différent de celui impliqué dans l’érythropoïèse par ses caractéristiques de liaison, sa taille apparente et les protéines qui lui sont associées. Ces données ont conduit à rechercher des analogues de l’EPO susceptibles d’exercer une neuroprotection sans pour autant exposer aux risques liés à une augmentation importante de l’hématocrite. Une étude récente, menée par des équipes danoises, italiennes, turques et américaines a permis de synthétiser des analogues de l’EPO doués de telles propriétés [12]. L’un de ces composés, obtenu en remplaçant les lysines de l’EPO par des homocitrullines par carbamylation, appelé CEPO, est dépourvu, in vitro, de tout effet sur l’érythropoïèse, tout en conservant un effet anti-apoptotique puissant vis-à-vis de neurones in vitro. D’autres analogues synthétisés ont permis de montrer qu’il est possible de séparer complètement les effets neuroprotecteurs des effets sur la lignée rouge. In vivo, le franchissement de la barrière hémato-encéphalique est indispensable pour qu’une substance administrée par voie systémique exerce un effet neuroprotecteur. C’est le cas de l’EPO et l’étude mentionnée montre que c’est également le cas de la CEPO. L’effet protecteur de cet analogue a été évalué dans plusieurs modèles expérimentaux d’atteinte nerveuse ou cérébrale : infarctus cérébral, atteinte de la moelle épinière, compression du nerf sciatique, encéphalomyélite auto-immune, neuropathie périphérique d’origine diabétique. Dans tous les cas, un effet protecteur majeur a été mis en évidence. L’administration au long cours de la CEPO n’a pas entraîné d’élévation significative de l’hématocrite. Ces résultats expérimentaux impressionnants doivent bien sûr être confirmés chez l’homme. Ils représentent à ce stade une perspective thérapeutique de première importance pour un champ de maladies où les médicaments efficaces sont peu nombreux.

Thérapie « protéique » pour l’épidermolyse bulleuse dystrophique

Les épidermolyses bulleuses sont des maladies dermatologiques sévères caractérisées par un décollement de l’épiderme qui peut réaliser un tableau proche de celui des brûlures étendues. Elles sont classées en trois groupes selon le niveau où se produit le clivage dans la zone de jonction dermo-épidermique : intra-épidermiques (simples et non cicatricielles), jonctionnelles (clivage au niveau de la pars lucida) et dermolytiques ou dystrophiques (clivage sous la lame basale). Des causes génétiques de ces trois groupes ont été reconnues. Des anomalies du collagène VII sont responsables de la plupart des formes héréditaires d’épidermolyse bulleuse dystrophique (EBD) qui peuvent être transmises de manière dominante ou récessive. La forme à transmission récessive est la plus sévère. Il n’existe pas à ce jour de traitement de cette maladie qui a suscité de nombreuses tentatives d’élaboration de thérapie génique et cellulaire. L’une des approches consiste à introduire le gène normal dans des cellules prélevées chez le patient puis à les injecter à celui-ci ou à en ensemencer les zones cutanées. Les résultats de ces tentatives sont, pour l’instant, décevants. David T. Woodley et son équipe ont développé une approche originale et prometteuse [13]. Des fibroblastes cutanés provenant de patients atteints d’EBD sont cultivés et transduits avec l’ADNc complet du collagène VII grâce à un vecteur lentiviral minimal. Le collagène recombinant, produit par ces cellules cultivées, est ensuite purifié et injecté. Dans une étude préliminaire, l’injection a été faite dans le derme de souris glabres athymiques. Il a été observé que le collagène injecté migre en une semaine du point d’injection dans le derme à la membrane basale dans laquelle il s’incorpore. La quantité de collagène incorporée dans la membrane basale est proportionnelle à la quantité injectée. Ce qui est remarquable est que le collagène incorporé dans la membrane basale y reste de façon durable, puisqu’il est retrouvé plus de trois mois après l’injection, et y forme des fibrilles d’ancrage tout comme le collagène natif. Point important, l’injection intradermique de collagène à des souris immunocompétentes, si elle entraîne la formation d’anticorps, ne provoque ni anomalies dermo-épidermiques ni réaction générale. L’étape suivante a consisté à injecter du collagène recombinant de type VII dans le derme de peau provenant de sujets atteints d’EBD récessive et « greffée » à des souris immunodéficientes. Là encore, le collagène a migré vers la membrane basale, y a constitué des fibrilles de qualité normale et y est resté de manière prolongée. Reste à effectuer l’essai chez l’homme, ce qui pourrait advenir très rapidement.

La capacité des cellules souches médullaires à se différencier en cellule épithéliale : une controverse décidément bien fusionnelle !

La transdifférenciation potentielle des cellules médullaires adultes a déjà fait couler beaucoup d’encre dont certaines de ces colonnes se sont fait l’écho ((→) m/s 2003, n° 6-7, p. 683). Depuis environ un an, il semblait acquis que les cardiomyocytes comme les hépatocytes différenciés in vivo à partir de cellules médullaires étaient en réalité issus d’un événement de fusion entre cellule de la moelle donneuse et cellule résidente [14, 15]. Par la suite, il avait été démontré que les cellules médullaires capables de fusionner avec les hépatocytes appartenaient au compartiment des progéniteurs myélomonocytaires [16, 17]. Deux articles viennent de remettre en cause ce concept de fusion [18, 19]. Le premier s’attache à démontrer la différenciation hépatocytaire in vitro d’une sous-population médullaire, isolée après transplantation, éliminant l’hypothèse d’une fusion. Le résultat est conforté in vivo dans un modèle de foie lésé au tétrachlorure de carbone. Quant au second, il est fondé sur l’utilisation de la recombinase Cre pour tracer in vivo le devenir des cellules médullaires transplantées, modèle pour- tant déjà utilisé pour démontrer l’événement de fusion [15, 16]. Ainsi, dans les systèmes épithéliaux comme la peau, le poumon ou le foie, aucun événement de fusion n’a pu être mis en évidence après transplantation médullaire. Cette succession d’articles ne permet pas néanmoins de tirer une conclusion définitive, tant les protocoles, les modèles animaux et les techniques de détection utilisés sont différents. Les auteurs ont par exemple choisi dans le dernier article cité de dépléter les lymphocytes T matures et de ne pas léser les organes testés... On pourrait donc intituler cette saga d’articles much ado about nothing avant qu’une étude exhaustive ne nous permette de définir les conditions et les critères précis permettant à une cellule médullaire adulte de s’orienter vers une (ou des) voie(s) de différenciation non hématopoïétique.

Perdre la graisse abdominale par liposuccion n’améliore pas le syndrome métabolique

La perte de poids obtenue par le régime améliore le syndrome métabolique caractéristique de l’obésité, y compris la résistance à l’insuline, les facteurs de risque de la maladie coronarienne (tour de taille, pression artérielle, concentrations plasmatiques des lipides et marqueurs de l’inflammation). Malheureusement, il est difficile de maintenir la perte de poids sur le long terme et le syndrome métabolique s’aggrave à nouveau avec le regain du poids antérieur. Cette frustration sur l’efficacité du régime a conduit à proposer aux obèses la liposuccion qui leur fait perdre de grandes quantités de graisse abdominale. Cette technique est-elle aussi bénéfique que le régime ? S. Klein et al. viennent de répondre par la négative à cette question [20]. Pour cela, ils ont étudié 15 femmes obèses avant - et 10 à 12 semaines après - liposuccion. Huit d’entre elles, dont l’index de masse corporelle (IMC, poids en kg divisé par le carré de la taille en m) atteignait 35,1 ± 2,4 avaient une tolérance au glucose normale. Les sept autres présentaient un diabète de type II et avaient un IMC de 39,9 ± 5,6. La liposuccion a fait perdre aux premières 9,1 ± 3,7 kg de graisse et aux secondes 10,5 ± 3,3 kg. Ces chiffres représentent respectivement 18,3 % et 19,2 % des graisses totales. Aucune variation significative de la résistance à l’insuline n’a été constatée dans les deux groupes. Ce paramètre a été apprécié sous perfusion de glucose, de glycérol et de palmitate marqués au deutérium ainsi que d’insuline à deux débits croissants successifs, définis pour mesurer, au cours de la période 1, la production de glucose par le foie et la lipolyse dans le tissu adipeux et, au cours de la période 2, la capture du glucose par les muscles. De même, les concentrations de protéine C-réactive, de cytokines inflammatoires (TNF-α, IL-6) et des lipides sanguins (cholestérol, triglycérides) ne furent pas modifiées. Seul, le tour de taille diminua. On doit donc, pour soigner les conséquences de l’obésité, induire un équilibre énergétique déficitaire. Seule cette méthode permettra de diminuer la masse de graisse dans tous les organes, contrairement à la liposuccion qui ne cible que les graisses sous-cutanées abdominales et dont le seul intérêt semble donc être esthétique.

Un dosage de PSA « normal » laisse passer 15 % de cancers de la prostate

Le dosage d’antigène spécifique de la prostate (PSA) est considéré comme la méthode de choix pour le dépistage du cancer de la prostate. Il est conseillé annuellement chez les hommes de plus de 50 ans. La valeur seuil habituelle est de 4 ng/ml. La spécificité augmente et la sensibilité diminue lorsque le seuil est fixé à une valeur plus basse. Les malades ayant des valeurs élevées de PSA sont bien explorés, une biopsie ayant été faite dans la majorité des cas. En revanche, on est davantage dans l’incertitude pour les valeurs basses de PSA. I.M. Thompson et al. [21] viennent de montrer que le cancer de la prostate était loin d’être rare chez les patients ayant une valeur de PSA considérée comme normale. Ces auteurs ont examiné 9 459 hommes de plus de 55 ans ayant servi de témoins dans une étude (ayant duré 7 ans) de prévention du cancer de la prostate par le finastéride. Ils ont retenu, en fin d’étude, 2 950 sujets de 62 à 91 ans chez lesquels le toucher rectal était normal et la concentration de PSA toujours inférieure à 4 ng/ml. La prévalence du cancer de la prostate, affirmé à partir des résultats de biopsie réalisée systématiquement en fin d’étude, était de 15,2 % dans ce groupe (14,9 % étaient des cancers évolués). Il existait une relation entre la prévalence du cancer et la concentration de PSA : 6,6 % en dessous de 0,5 ng/ml, 10,1 % de 0,6 à 1 ng/ml, 17 % de 1,1 à 2 ng/ml, 23,9 % de 2,1 à 3 ng/ml et 26,9 % de 3,1 à 4 ng/ml. De même, la prévalence des cancers évolués augmentait avec la concentration de PSA, de 12,5 % pour la tranche la plus basse à 25% pour la plus élevée. Ainsi, le risque d’observer un cancer de la prostate augmente nettement avec la concentration de PSA, et les valeurs de seuil les plus basses ne permettent pas d’exclure la possibilité de cancer. Cette étude rend difficile le choix d’une conduite pratique. En effet, étendre le champ des indications de la biopsie prostatique à des sujets ayant une concentration de PSA inférieure au seuil classique de 4 ng/ml peut conduire à un traitement disproportionné de cancers débutants. Ne pas le faire laisse passer un petit nombre de cancers évolués. La solution viendra probablement des résultats d’autres études de cohorte en cours et de la découverte de nouveaux marqueurs de diagnostic et de pronostic.

Consommer régulièrement du soja protège du cancer de l’endomètre

La consommation régulière de soja est associée à un risque réduit de cancer de l’endomètre. Telle est la conclusion d’une étude cas-témoins cosignée par des chercheurs du département d’épidémiologie de Shanghai en Chine et de l’université de Vanderbildt aux États-Unis [22]. L’étude a concerné plus de 800 femmes de 30 à 69 ans, identifiées à partir du registre des cancers de Shanghai, ayant présenté un cancer de l’endomètre diagnostiqué durant la période 1997-2001 et un groupe témoin, apparié sur l’âge, de femmes résidant dans la région de Shanghai. Les données nécessaires à l’étude (en particulier les habitudes alimentaires et la consommation de soja des sujets) ont été obtenues de manière classique par des entretiens et des questionnaires. Des modèles de régression logistiques ont servi à calculer les odds ratios (OR) ajustés de l’association entre risque de cancer de l’endomètre et consommation de soja. Il apparaît que la consommation régulière de soja est inversement associée au risque de cancer de l’endomètre. Ainsi, l’OR qui est de 0,93 pour les femmes ayant les consommations les plus basses de protéines de soja descend à 0,67 pour les femmes ayant les consommations les plus élevées. Cette relation inverse semble encore plus marquée chez les femmes ayant un indice de masse corporelle élevé.

Nul besoin d’angiotensine II pour activer les récepteurs AT-1

L’étirement mécanique du muscle cardiaque est l’événement initial induisant l’hypertrophie cardiaque. Mais, on ne sait pas comment cet étirement est perçu et converti en une cascade de réactions intracellulaires responsables in fine de l’hypertrophie. L’angiotensine II paraît jouer un rôle essentiel parce que le traitement par les antagonistes des récepteurs AT-1 (AAT1) de patients ou d’ animaux d’expérience entraîne la régression de l’hypertrophie et empêche la progression de l’insuffisance cardiaque. La première hypothèse est que l’étirement induit, à partir des myocytes cardiaques, la sécrétion de l’angiotensine II qui, par un mécanisme autocrine, est à l’origine de l’hypertrophie. Y. Zou et al. [23] viennent de montrer qu’il n’en est rien. C’est l’étirement lui-même qui active les récepteurs AT-1 par un mécanisme indépendant de l’angiotensine II. Leur démonstration repose sur les résultats suivants : (1) l’étirement de myocytes cardiaques in vitro n’entraîne pas de sécrétion significative d’angiotensine II dans le milieu  et le blocage par un anticorps de l’angiotensine II du milieu n’empêche pas l’activation des extracellularly-regulated kinases (ERK) par l’étirement ; (2) le candesartan, un AAT1, mais pas la saralasine, un compétiteur de l’angiotensine II, bloque à la fois l’activation des ERK par l’angiotensine II et par l’étirement ; (3) l’utilisation de cellules ayant un récepteur AT-1 muté montre que l’angiotensine II n’est plus active alors que l’étirement le reste ; (4) des cellules déficientes en angiotensinogène et, donc, ne produisant pas d’angiotensine II, sont toujours sensibles à l’étirement. Le phénomène décrit est propre au récepteur AT-1 puisque l’étirement n’active ni le récepteur de l’endothéline, ni le récepteur α des catécholamines. L’interaction du récepteur avec la protéine G est obligatoire puisque l’étirement n’agit plus sur des cellules ayant un récepteur muté incapable de se coupler. La suite des événements conduisant à l’hypertrophie implique, outre les ERK, les kinases Janus et les inositol phosphates. Enfin, le phénomène existe également in vivo puisque la constriction de l’aorte chez des souris déficientes en angiotensinogène induit une hypertrophie cardiaque inhibée par le candesartan. Reste à savoir comment l’étirement active le récepteur AT-1 indépendamment de l’angiotensine II et pourquoi seuls les antagonistes inverses tels que le candesartan et non les compétiteurs tels que la saralasine bloquent le phénomène.