ÉditorialEditorial

La grippe aviaire : implications possibles sur la santé humaineAvian flu : possible implications for human health[Notice]

  • Olivier Lortholary,
  • Marc Lecuit,
  • Christine Rouzioux et
  • Patrick Berche

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  • Olivier Lortholary
    Université René Descartes-Paris V,
    Service des Maladies Infectieuses et Tropicales et Service de Microbiologie,
    Hôpital Necker-Enfants Malades,
    149, rue de Sèvres,
    75743 Paris Cedex 15 France.
    olivier.lortholary@nck.ap-hop-paris.fr

  • Marc Lecuit
    Université René Descartes-Paris V,
    Service des Maladies Infectieuses et Tropicales et Service de Microbiologie,
    Hôpital Necker-Enfants Malades,
    149, rue de Sèvres,
    75743 Paris Cedex 15 France.

  • Christine Rouzioux
    Université René Descartes-Paris V,
    Service des Maladies Infectieuses et Tropicales et Service de Microbiologie,
    Hôpital Necker-Enfants Malades,
    149, rue de Sèvres,
    75743 Paris Cedex 15 France.

  • Patrick Berche
    Université René Descartes-Paris V,
    Service des Maladies Infectieuses et Tropicales et Service de Microbiologie,
    Hôpital Necker-Enfants Malades,
    149, rue de Sèvres,
    75743 Paris Cedex 15 France.

L’enjeu majeur du contrôle de l’épizootie grippale aviaire actuelle due au virus H5N1 est la prévention d’une nouvelle pandémie grippale humaine. Celle-ci pourrait être liée à : (1) un réassortiment du génome de ce virus aviaire avec une souche épidémique humaine entraînant la circulation d’un virus hybride exprimant des antigènes viraux aviaires mais capable d’infecter une population humaine n’ayant pas d’immunité préexistante à ce nouveau virus ; ou (2) à la transmission interhumaine d’un virus aviaire ayant acquis directement un tropisme humain. Le propos de cet Editorial est de préciser sous forme de quelques questions/réponses les implications possibles sur la santé humaine des virus grippaux aviaires et notamment du virus responsable de l’épizootie aviaire actuelle, le virus H5N1 [1-9]. Les virus grippaux sont des virus à ARN de la famille des Orthomyxoviridae dont le génome est composé de huit segments. Trois espèces de virus influenzae existent : influenza A, B et C. Les virus A comportent plusieurs sous-types définis par des antigènes de surface que sont l’hémagglutinine (H) et la neuraminidase (N) dont il existe respectivement 15 et 9 types. Ils sont responsables des infections humaines et de celles de plusieurs espèces aviaires ou de mammifères, notamment le porc. Les virus aviaires domestiques sont principalement de sous-types H5 et H7. Ils ne sont pas tous hautement pathogènes, c’est-à-dire capables d’induire une létalité voisine de 100 % chez les espèces aviaires qu’ils infectent, mais la présence d’un virus H5 ou H7 chez les volailles est toujours préoccupante, compte tenu de la létalité potentielle que ces virus peuvent induire dans les élevages. Leur pathogénicité est en partie liée à la présence d’acides aminés basiques (arginine et lysine) au site de clivage de l’hémagglutinine (H), qui est la protéine majeure contrôlant l’adhésion et l’entrée du virus dans les cellules. Le clivage de l’hémagglutinine est une étape clé pour l’internalisation virale et la susceptibilité de cette protéine aux protéases cellulaires est donc déterminante pour le tropisme et la virulence du virus. Le nombre de sous-types antigéniques associés à des épizooties domestiques est limité par comparaison à la diversité des virus grippaux A isolés chez les oiseaux sauvages (malades ou porteurs sains). Le réservoir de virus grippaux chez les porcs joue un rôle important dans le risque de transmission des virus aviaires à l’homme. En effet, les cellules épithéliales du tractus respiratoire du porc co-expriment les récepteurs glucidiques (acides sialiques) des virus grippaux humains mais aussi aviaires. Lors de la pandémie grippale majeure de 1918 (virus H1N1 responsable de la grippe « espagnole » à l’origine de 20 à 40 millions de morts), il semble que le virus ait été transmis directement des espèces aviaires à l’homme. En effet, il s’agit d’un virus dont la séquence semble d’origine uniquement aviaire, sans trace de réassortiment avec une autre souche virale. Il semble également qu’il soit particulièrement virulent, comme le souligne un travail récent démontrant une forte létalité après inoculation chez l’oeuf embryonné de poulet et la souris, même s’il n’existe pas de corrélation parfaite entre pathogénicités murine et humaine. Il a également été montré que ce virus avait acquis la capacité de se lier aux acides sialiques humains. Dans les pandémies de 1957 (H2N2, grippe asiatique responsable de 4 millions de morts) et de 1968 (H3N2, grippe de Hong Kong responsable de 2 millions de morts), le virus transmis à l’homme a été le résultat d’un réassortiment génétique entre des segments génomiques de virus aviaires et humains chez le porc, lequel a conduit à un virus associé à une moindre mortalité chez l’homme. La réapparition du sous-type H1N1 responsable d’une pandémie humaine en 1977 reste inexpliquée. …

Parties annexes