Faits et chiffresFeatures and Figures

Les maladies chroniques, une urgence planétaireChronic diseases, a planetary urgency[Notice]

  • Dominique Labie

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  • Dominique Labie
    Département de génétique, développementet pathologie moléculaire,
    Institut Cochin,
    24, rue du FaubourgSaint-Jacques,
    75014 Paris,
    France.
    labie@cochin.inserm.fr

L’année 2005 marque le cinquième anniversaire d’un projet global de santé de l’OMS, le MDG (Millenium development goals) qui affichait trois finalités : réduire la mortalité infantile, améliorer la santé maternelle, et prévenir l’extension du Sida et autres maladies infectieuses telles que tuberculose et paludisme. Ce sont là des causes majeures de mortalité, surtout dans les pays en développement. Différentes évolutions - démographie, vieillissement de la population, urbanisation, mondialisation - ont vu leur importance relative se modifier, ou plutôt ont fait ressortir celles d’autres causes de mortalité : maladies cardiovasculaires, accidents vasculaires cérébraux (AVC), déficits respiratoires, cancers, diabète [1]. Une distribution globale des 58 millions de décès prévus en 2005 permet de grouper trois causes principales : (1) les maladies transmissibles, les conditions périnatales, et les déficits nutritionnels ; (2) les maladies chroniques non transmissibles ; (3) les causes accidentelles. Or, la proportion relative de ces trois catégories a déjà changé, et une projection sur l’année 2015 démontre une modification encore plus importante. À un niveau mondial, ce sont aujourd’hui les maladies cardiovasculaires qui sont la cause principale de mortalité. Une étude, menée à Oxford (Royaume-Uni) sur plus de 2 000 accidents vasculaires aigus a, par exemple, montré que 19/20 d’entre eux sont des accidents coronariens, la quasi-totalité des autres étant des AVC avec une minorité d’accidents périphériques [2]. Une autre étude pluricentrique, coordonnée par des chercheurs de l’université de Harvard (États-Unis) a analysé les causes de cancers dans le monde en les rattachant aux facteurs de risque [3]. Les résultats sont interprétés selon l’âge, le sexe, et divisés en 13 sous-régions proposées par l’OMS et la Banque mondiale selon une évaluation potentielle des risques [4]. Le recensement épidémiologique montre que sur 7 millions de décès annuels par cancer, 2,43 millions (35 %) sont liés à des risques qui pourraient être modifiés, majoritairement dans des pays en cours de développement. Ces risques touchent environ deux fois plus d’hommes (1,6 millions) que de femmes (0,83 million). Tous ces chiffres font peur et expliquent un regain d’intérêt pour la prévalence de ces pathologies, leurs conséquences socio-économiques, ainsi que la volonté de trouver d’abord les moyens réalistes pour les prévenir, puis les prendre en charge. Une série de quatre articles a récemment évoqué ce problème dans le Lancet. Cette série est étoffée par d’autres articles ciblés sur la question des maladies chroniques. Comme toujours, dans ce type de travail, il faut d’abord établir un état des lieux [5]. Malgré une insuffisance d’informations en provenance de certains pays, les services de l’OMS ont pu déterminer les causes de décès dans le monde, en même temps que le déficit en termes d’années de vie normale en bonne santé (disability-adjusted life years, DALY) (Figure 1). À ce niveau mondial, les maladies cardiovasculaires seules égalent en proportion (30 %) l’ensemble des décès attribuables aux causes du groupe 1, proportion largement dépassée par l’ensemble des maladies chroniques. Les causes accidentelles ne représenteraient que 9 % des décès. Les conséquences socio-économiques sont du même ordre : les pertes d’activité mesurées en DALY frappent davantage une population de 30-59 ans que celle qui a plus de 60 ans. Une projection sur l’année 2015 montre que cette répartition va encore évoluer vers une prévalence accrue des maladies chroniques comme causes de décès. En répartissant les divers pays tels qu’ils sont classés par la banque mondiale en quatre groupes selon les revenus par habitant, on constate que cette évolution reste vraie pour tous, quoique naturellement en proportions variables, la prévalence des maladies chroniques s’imposant d’autant plus que le revenu est plus élevé (Figure 2). La finalité d’un …

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