Chroniques bioéthiques (11)Tales of Bioethics (11)

Cloningate ? La publication scientifique et le clonage thérapeutique face à la mystification HwangScientific publication and therapeutic cloning now face Hwang mystification : more than a « Cloningate »[Notice]

  • Hervé Chneiweiss

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Ce qui est maintenant devenu « L’affaire Hwang », car l’histoire de cette falsification est à présent une véritable affaire, va durablement secouer le monde de la recherche en biologie. Elle l’ébranlera certainement autant que la « mémoire de l’eau » ou la « fusion froide », en termes de polémique médiatico-scientifique, plus encore, très probablement, compte tenu de l’enjeu scientifique, médical, éthique et politique, ainsi que de la dimension de fraude qui apparaît hélas plus clairement chaque jour. Chacun de nous s’interroge sur le fait de savoir comment un tel scandale a pu survenir. C’est une chronique à suspense qui apparaît peu à peu comme un véritable roman noir. Sans mort d’homme pour l’instant : il y a un héros trouble et aujourd’hui déchu, démiurge et machiavélique ; il y a un pouvoir politique avide de résultats ; s’y ajoutent une équipe de journalistes d’investigation prêts à prendre de gros risques et de jeunes scientifiques qui pianotent sur Internet. C’est une fable high-tech, globalisée, en ligne, bref : moderne. Ne doutons pas qu’un film et des livres sauront nous restituer bientôt le grand frisson de ce que l’histoire retiendra peut-être comme le Cloningate comme ce fut le cas pour le scandale du Watergate. Plus encore, il nous faut également comprendre pourquoi ce scandale est arrivé, c’est-à-dire les conditions, erreurs ou manipulations qui l’ont rendu possible. Il convient de savoir quelles en seront les retombées, en premier lieu pour les processus d’analyse et de relecture en matière de publication scientifique. Enfin nous devons envisager les conséquences de l’affaire pour l’avenir des recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines, toujours en attente - au moment où j’écris ces lignes - des décrets d’application permettant leur mise en oeuvre en France, 18 mois après le vote de la révision des lois de bioéthique du 6 août 2004. Mais le décret serait à la signature du Premier Ministre. Ce serait alors le sujet de notre prochaine chronique que nous baptiserions : enfin ! Commençons par un rappel des faits (Encadré 1). Dès la publication de l’article princeps de l’équipe de Hwang en 2004 [1], nous nous étions fait l’écho [2] des inquiétudes éthiques entourant les conditions d’obtention des ovules ayant servi à l’étude. Des pressions n’avaient-elles pas été exercées sur les donneuses ? Une rétribution existait-elle, illustrant le redoutable risque de « marchandisation » du corps de la femme ? Et ce sont finalement les recherches de réponses à ces questions qui ont conduit à la découverte des fraudes scientifiques et à la chute du demi-dieu vivant qu’était devenu Woo Suk Hwang. En effet, de l’article de 2004 à ceux de 2005 portant sur la production de 11 lignées de cellules souches embryonnaires humaines [3], et plus anecdotiquement le clonage, reproductif cette fois, d’un lévrier afghan, Hwang était devenu un héros des temps nouveaux. Héros national, porteur de l’image de la nouvelle Corée du Sud, sortie de l’ère de la dictature, sortie de la crise économique associée à la chute des conglomérats, échappant à la menace des armes nucléaires de son voisin du Nord…, mais aussi une figure internationale, mondialement adulée, Hwang étant élu Scientifique de l’année. Plus dure est la chute de celui qui apparaît aujourd’hui comme un mandarin mystificateur. Jusqu’au dernier moment, jusqu’à la présentation publique des conclusions de la commission d’enquête de l’université de Séoul le 12 janvier 2006, un public incrédule voulait encore croire à une erreur. Mais, à part le chien Snuppy ((→) m/s 2005, n° 11, p. 1002), réellement cloné, tout est fabrication et mensonge. Il nous est révélé aujourd’hui que Hwang allait …

Parties annexes